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Mt  6  5-6

S. Chrys. (sur S. Matth.) Salomon (Si 9, 23) nous fait cette recommandation : « Avant la prière, préparez votre âme. » C’est ce que fait celui qui donne l’aumône avant de prier. Les bonnes oeuvres, en effet, réveillent la foi du cœur et donnent à l’âme la force de s’adresser à Dieu par la prière. L’aumône est donc une préparation à la prière et c’est pour cela qu’après avoir expliqué les conditions de l’aumône le Sauveur nous donne ses instructions sur la prière.

S. Augustin. (serm. sur la mont.) Or, il nous enseigne ici non pas l’obligation de la prière, mais la manière dont nous devons prier, de même que plus haut il n’a point parlé de la nécessité de l’aumône, mais de l’intention avec laquelle on doit la faire. — S. Chrys. (sur S. Matth.) La prière est comme un tribut spirituel que l’homme tire du plus intime de son âme pour l’offrir à Dieu. Plus donc la prière est honorable et glorieuse, plus il faut prendre garde à ce qu’une intention tout humaine ne vienne l’avilir. Aussi, écoutez le Sauveur : « Lorsque vous prierez, vous ne serez pas comme des hypocrites. » — S. Chrys. (hom. 49.) Il appelle hypocrites ceux qui font semblant de prier et regardent de tous côtés si les hommes les considèrent, et c’est pour cela qu’il ajoute « Qui aiment à prier dans les synagogues. » — S. Chrys. (sur S. Matth.) Je ne pense pas que le Seigneur veuille parler ici du lieu où l’on prie, mais de l’intention qui anime la prière, car c’est une action louable que de prier dans les assemblées des fidèles, selon cette parole du roi-prophète : « Bénissez Dieu dans les assemblées. » Celui-là donc qui prie pour être vu des hommes, ce n’est pas vers Dieu, mais vers les hommes qu’il tourne ses regards et, par son intention, il prie dans la synagogue. Le texte ajoute : « Et dans les coins des rues, » afin de paraître prier en secret, poursuivant ainsi aux yeux des hommes le double mérite de la prière et de la prière faite en secret. — La glose. Ou bien ces coins de rues sont les endroits où une voie en coupe une autre et forme un carrefour.

S. Chrys. (sur S. Matth.) Il nous défend donc de prier dans l’assemblée de nos frères dans l’intention d’en être remarqués ; aussi ajoute-t-il : « Pour être vus des hommes. » Que celui qui se livre à la prière évite donc avec soin tout ce qui est extraordinaire et qui peut attirer les regards des hommes, comme d’élever la voix, de se frapper la poitrine ou de tenir les mains étendues. — S. Augustin. (serm. sur la mont.) Ce qui est un mal, ce n’est pas d’être vu des hommes, mais d’agir pour en être remarqué. — S. Chrys. (hom. 19). Il est toujours bon de se dérober au danger de la vaine gloire, mais surtout dans la prière, car si même sans ce défaut nos pensées nous égarent çà et là pendant la prière, comment comprenons-nous ce qui nous est dit si nous venons prier avec une âme travaillée de cette nouvelle infirmité ? — S. Augustin. (serm. sur la mont.) Nous devons éviter également de faire voir aux hommes que nous ne voulons pour récompense de nos actions que leur être agréables, car écoutons ce qui suit : « Je vous le dis en vérité, ils ont reçu leur récompense. » — S. Chrys. (sur S. Matth.) Chacun ne moissonnera que ce qu’il aura semé ; celui donc qui aura prié pour plaire aux hommes plutôt qu’à Dieu recevra les louanges des hommes et n’aura aucun droit aux louanges de Dieu. Notre-Seigneur dit : « Ils ont reçu, » car Dieu voulait leur accorder la récompense dont il est l’auteur, ils ont mieux aimé rechercher celle que donnent les hommes. Mais comment doit-on prier ? Notre-Seigneur nous l’enseigne par ce qui suit : « Pour vous, lorsque vous voudrez prier, entrez dans votre chambre et, après en avoir fermé la porte, priez votre Père dans le secret. — S. Jérôme. Ces paroles, dans leur sens naturel, apprennent à celui qui les entend à fuir la vaine gloire dans la prière. — S. Chrys. (sur S. Matth.) Il faut qu’il n’y ait absolument là que celui qui prie et celui à qui s’adresse la prière. Un témoin, loin de vous être alors utile, ne fait que vous être à charge.

S. Cypr. (De l’Oraison Dominicale.) D’ailleurs il est plus convenable pour notre foi de prier dans les lieux retirés, nous comprenons mieux alors que Dieu est présent partout et qu’il pénètre les endroits les plus secrets de la plénitude de sa majesté. — S. Chrys. (sur S. Matth.) Nous pouvons aussi par cette porte de la maison entendre notre bouche, en ce sens que nous n’avons pas besoin d’élever bien haut la voix, mais que nous devons prier dans le silence du cœur pour trois raisons : la première c’est que Dieu qui écoute la voix du cœur ne doit pas être importuné par des cris, mais apaisé par le spectacle d’une conscience droite ; la seconde, c’est que personne, excepté Dieu et vous ne doit connaître l’objet de vos prières secrètes ; la troisième, c’est que votre prière bruyante est un véritable empêchement pour celui qui prie à côté de vous. — Confér. Nous devons prier dans le plus grand silence, afin que nos ennemis qui nous entourent, surtout pendant la prière, ne puissent connaître dans quelle intention nous prions. — S. Augustin. (serm. sur la mont.) Par nos chambres on peut encore entendre nos cœurs, dont le Psalmiste a dit (Ps 4) : « Ce que vous dites dans vos cœurs, repassez-le avec amertume dans le lieu de votre repos. » La porte ce sont les sens de la chair ; au dehors sont toutes les choses temporelles qui pénètrent par les sens dans nos pensées, et la multitude des vains fantômes qui viennent nous étourdir pendant la prière. — S. Cypr. (de l’Or. Dom.) Mais quelle est cette négligence qui vous laisse prendre et entraîner lorsque vous priez Dieu, par des pensées aussi ridicules que profanes ? Quelle pensée donc doit vous occuper davantage que celle-ci ; c’est à Dieu que je parle. Comment exiger que Dieu vous écoute, alors que vous ne vous écoutez pas vous-mêmes ? C’est vraiment là ne pas vous mettre en garde contre votre ennemi, c’est offenser Dieu par la négligence et la froideur de votre prière. — S. Augustin. (serm. sur la mont.) Il faut donc fermer la porte, c’est-à-dire résister à l’importunité des sens, afin que la prière toute spirituelle monte jusqu’au Père après avoir été formée au plus intime du cœur où l’âme prie Dieu dans le secret, c’est pourquoi il ajoute : « Et votre Père vous le rendra. — S. Rémi. Voici donc le sens de ces paroles : qu’il vous suffise que votre prière soit connue de celui-là seul qui pénètre jusqu’au plus secret des cœurs, et qui par là même ne peut manquer de l’exaucer.

S. Chrys. hom. 12.) Remarquez qu’il ne dit pas : « C’est lui qui vous donnera gratuitement, » mais « c’est lui qui vous le rendra, » car Dieu se constitue lui-même votre débiteur.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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