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Saint Thomas d’Aquin
Docteur de l’Église

La Chaîne d’or

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Saint Thomas d’Aquin, le docteur des docteurs.

 

À travers les quatre chaînes d’or, saint Thomas d’Aquin est aussi le plus grand compilateur de son temps. Non seulement il ajoute de son propre génie, mais il utilise et synthétise tout ce que la sainteté et la théologie ont produit depuis le commencement de l’Église. Il en ressort un formidable commentaire, moderne.
(Source pour la traduction française du texte : Congrégation pour le Clergé)

 

 

Explication suivie

des

QUATRE ÉVANGILES

par le docteur angélique Saint Thomas d’Aquin
composée des interprètes grecs et latins,
et surtout des ss. Pères

admirablement coordonnés et enchaînés
de manière à ne former qu’un seul texte suivi et
appelé à juste titre

la


CHAÎNE D’OR

 


Edition où le texte corrigé par le P. Nicolaï a été
revu avec le plus grand soin sur les textes originaux grecs et latins

TRADUCTION NOUVELLE

par

M. L’ABBE J.-M. PERONNE
Chanoine titulaire de l’Eglise de Soissons
ancien professeur d’Ecriture sainte et d’éloquence sacrée


PARIS
LIBRAIRIE DE LOUIS VIVÈS, ÉDITEUR
rue Delambre, 9

1868


cf. reproduction offset aux « Editions pamphiliennes », rue St. Louis, F 84400 Saignon

 

Concession du révérend Père provincial
de la province de Paris de l’ordre des Frères prêcheurs,
pour une nouvelle édition de la Chaîne d’or.

Nous F. Étienne Blondel, docteur en théologie de la Faculté de Paris et prieur, quoique indigne, de la province de Paris des frères prêcheurs, nous donnons le pouvoir et accordons la faculté au R. P. F. Jean Nicolaï, docteur en théologie et premier professeur de théologie, ainsi que préfet des études dans le couvent de Saint-Jacques, de publier la Chaîne d’or de saint Thomas sur les quatre évangiles qu’il a corrigée et augmentée des notes qui étaient nécessaires ; nous lui accordons aussi la permission de publier les autres ouvrages qu’il pourra dans la suite corriger ou annoter, par tels libraires qu’il choisira, conformément au privilège qui lui a été accordé de par le Roi ; ce à quoi nous l’exhortons vivement par notre désir que nous avons d’être utile au public. En foi de quoi nous lui donnons ces présentes lettres, scellées du sceau de notre secrétariat, et signées de notre main, pour les apposer au commencement de son édition.

Donné dans notre susdit couvent de Saint-Jacques à Paris, le 2 mai de l’an 1657.

 

 

A notre très saint père Urbain
par la Providence Divine, quatrième pape de ce nom,
F. Thomas d’Aquin, de l’ordre des Frères Prêcheurs,
baise les pieds avec un pieux respect.

La source de la sagesse, le Verbe unique de Dieu qui habite au plus haut des cieux (Si 1, 5 ; et pour ce qui suit, Sg 8, 1), par lequel le Père avait tout créé avec sagesse et ordonné toutes choses avec douceur, voulut se revêtir de notre chair à la fin des temps, afin que le regard de l’homme, qui ne pouvait atteindre dans une si haute élévation sa majesté divine, pût contempler son éclat sous les voiles de la nature humaine. Il avait répandu ses rayons, c’est-à-dire les marques de sa sagesse sur toutes les œuvres qu’il avait créées ; mais par une prérogative plus excellente, il avait imprimé dans l’âme des hommes le sceau de sa ressemblance et gravé avec plus de soin encore cette image auguste dans le cœur de ceux qui devaient recevoir le don de l’aimer de l’abondance de sa grâce. Mais qu’est-ce que l’esprit de l’homme au milieu de l’immensité de la création, pour qu’il puisse saisir dans toute leur perfection les empreintes de la divine sagesse ? D’autant plus que la lumière de Dieu répandue dans les hommes a été couverte par les ténèbres du péché et par les nuages des préoccupations temporelles ; et le cœur de quelques insensés a été tellement obscurci, qu’ils ont attribué la gloire de Dieu à de vaines idoles, et qu’ils ont fait des actions indignes, livrés qu’ils étaient à ce sens dépravé (Rm 1, 21, 23, 28, etc.).

Or la sagesse divine qui avait fait l’homme pour qu’il pût jouir d’elle-même, ne permit point qu’il fût privé d’un don si excellent ; elle se porta donc tout entière vers notre nature, se l’unissant d’une manière admirable pour rappeler entièrement à elle l’homme qui s’était égaré. Le prince des Apôtres fut le premier qui mérita de contempler l’éclat de cette sagesse au travers des voiles de la mortalité, et de la confesser avec fermeté et dans la plénitude d’une conviction exempte d’erreur par ces paroles « Vous êtes le Christ, le Fils du Dieu vivant. » O bienheureuse confession, ce n’est ni la chair ni le sang, mais le Père qui est au ciel qui vous révèle. C’est elle qui fonde l’Église sur la terre, ouvre les portes du ciel, reçoit le pouvoir de remettre les péchés, et contre elle les portes de l’enfer ne prévaudront jamais. Héritier légitime de cette foi et de cette confession, vous veillez avec soin, très saint-Père, à ce que la lumière de la divine sagesse inonde les cœurs des fidèles, et repousse les folles inventions des hérétiques, qui sont appelées avec raison les portes de l’enfer. Si Platon estimait heureuse la république dont les chefs se livrent à l’étude de la sagesse, de cette sagesse que la faiblesse de l’esprit humain défigure si souvent par tant d’erreurs, combien doit-on estimer heureux le peuple chrétien qui vit sous votre gouvernement, et à qui vous distribuez avec tant de sollicitude cette sagesse si élevée, que la sagesse de Dieu elle-même revêtue d’une nature mortelle, nous a enseignée par ses paroles et démontrée par ses œuvres ? C’est par un effet de cette vigilante sollicitude que Votre Sainteté a daigné me confier la tâche d’expliquer l’Évangile de saint Matthieu, tâche que j’ai remplie selon mes forces, en recueillant avec soin dans les divers traités des saints docteurs de quoi former une exposition suivie de cet Évangile. Les citations peu nombreuses que j’ai tirées d’auteurs non connus, et puisées le plus souvent dans des Gloses, je les ai données sous le titre général de Gloses, pour qu’on pût les distinguer d’avec les passages des saints Pères. J’ai pris soin de donner toujours le nom des auteurs latins, avec l’indication précise du livre auquel là citation était empruntée, à l’exception des ouvrages qui sont un commentaire ou une exposition du livre que j’expliquais moi-même. J’ai cru inutile alors d’ajouter cette indication. Ainsi, par exemple, lorsque je cite le nom de saint Jérôme sans indication de livre ou de traité, c’est que le passage est tiré de son commentaire sur saint Matthieu, et ainsi des autres. Toutefois, pour les citations empruntées au commentaire de saint Chrysostome sur saint Matthieu, j’ai cru devoir ajouter sur saint Matthieu, pour les distinguer des autres passages empruntés aux homélies du même Père.

Il a fallu aussi retrancher souvent quelque chose des citations empruntées aux saints Pères pour plus de brièveté et de clarté ; comme aussi, pour l’intelligence du texte, j’ai dû parfois changer l’ordre des phrases. Quelquefois j’ai laissé le texte pour ne donner que le sens, surtout dans les homélies de saint Chrysostome dont la traduction est défectueuse. Le but que je me suis proposé dans cet ouvrage, a été non seulement de chercher le sens littéral, mais d’exposer aussi le sens mystique, de détruire chemin faisant les erreurs, et d’appuyer sur de nouvelles preuves la vérité catholique ; ce qui m’a paru indispensable, parce que c’est surtout dans l’Évangile qu’on trouve la forme, la perfection de la foi catholique, et la règle de toute la vie chrétienne. Puisse cet ouvrage ne paraître trop long à personne. Il m’a été impossible de poursuivre un plan si étendu sans abréger beaucoup, ayant à citer tant de saints docteurs, ce que j’ai tâché de faire avec la plus grande concision. Que Votre Sainteté daigne agréer cet ouvrage, dont je soumets l’examen et la correction à votre jugement. Ce travail est le fruit de notre sollicitude et de mon obéissance ; c’est vous qui me l’avez imposé, c’est à vous qu’il appartient de le juger en dernier ressort. Les fleuves reviennent au lieu d’où ils sont sortis (Si 1, 7).

 

 

Au très-vénérable Père en Jésus-Christ
le seigneur Annibal, cardinal prêtre de la Basilique des douze apôtres,
le frère Thomas d’Aquin, de l’ordre des Frères Prêcheurs,
tout à lui.

Le souverain auteur de toutes choses, Dieu, qui a tout créé par la seule inspiration de sa bonté, a donné à toute créature l’amour naturel du bien, afin qu’au moment où elle aime et recherche naturellement le bien qui lui est propre, on la voie par un retour admirable revenir à son auteur. Mais la créature raisonnable l’emporte sur les autres en ce qu’elle peut contempler par la sagesse la source universelle de tout bien, et y puiser avec suavité par l’amour de la charité. De là vient qu’au jugement de la saine raison, le don de la sagesse, qui nous conduit à la source même de toute bonté, doit être préféré à tous les autres biens. C’est cette sagesse qui n’engendre pas le dégoût ; celui qui s’en nourrit a encore faim, celui qui la boit ne cesse d’avoir soif. C’est elle qui est si opposée au péché, que ceux qui agissent d’après ses inspirations n’y tombent jamais. C’est elle qui donne à ses ministres des fruits vraiment impérissables, car ceux qui la manifestent aux hommes reçoivent comme récompense la vie éternelle. Elle est supérieure à toutes les voluptés par sa douceur, aux trônes et aux royaumes par sa sécurité, à toutes les richesses par les avantages qu’elle procure. Après avoir goûté le charme de ses faveurs, j’ai essayé, en recueillant les pensées des saints docteurs, de donner une exposition de cette sagesse évangélique qui, avant tous les siècles, était cachée dans les mystérieuses profondeurs de l’éternité, et qui a été produite au jour par la sagesse incarnée. J’avais d’abord été invité à ce travail par l’ordre d’Urbain IV, d’heureuse mémoire ; mais comme après la mort de ce pontife il me restait encore à expliquer les trois Évangiles, de saint Marc, de saint Luc et de saint Jean, je n’ai pas voulu que la négligence laissât inachevé un ouvrage qu’avait commencé l’obéissance ; je me suis donc appliqué avec le soin le plus scrupuleux à compléter l’exposition des quatre Évangiles, en suivant le même plan dans les citations des saints docteurs, que j’ai toujours fait précéder de leurs noms.

Pour rendre cette exposition de la doctrine des saints interprètes plus complète et plus suivie, j’ai fait traduire en latin un grand nombre de passages des Pères qui ont écrit en grec, et je les ai entremêlés avec ceux des auteurs latins, en ayant toujours soin de placer leurs noms en tête de chaque citation. Et comme il est de toute convenance que les prémices des fruits de nos travaux soient offertes aux prêtres, j’ai cru de mon devoir d’offrir cette exposition de l’Évangile, fruit de mon travail, au prêtre de la basilique des douze apôtres. Daignez l’agréer comme un hommage dû à votre autorité, et en même temps que votre science éminente le soumettra à son jugement, que votre vieille amitié y voie un témoignage de ma sincère affection.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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