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Mt  13  33

S. Chrys. (hom. 47.) C’est pour établir la même vérité que Notre-Seigneur propose la parabole du levain : « Il leur dit encore cette autre parabole : Le royaume des cieux est semblable au levain, » etc., c’est-à-dire : de même que le levain change et modifie une grande quantité de farine, en lui communiquant sa saveur ; ainsi vous changerez le monde entier. Et remarquez ici la sagesse du Sauveur ; il emprunte ses comparaisons à des faits naturels et il montre ainsi que de même qu’il est impossible que ces faits ne se produisent pas suivant leur nature, ainsi en est-il du royaume des cieux. Or, il ne dit pas simplement : Le levain qu’elle place, mais « qu’elle cache, qu’elle mêle, » paroles dont voici le sens : C’est ainsi que vous-mêmes vous triompherez de vos persécuteurs après vous être mêlés et confondus avec eux. Car de même que le levain, bien qu’il soit comme perdu dans la masse, n’est point détruit, mais communique insensiblement sa force à toute la pâte, ainsi en sera-t-il de votre prédication. Ne craignez donc pas les persécutions que je vous ai prédites, car elles ne serviront qu’à vous rendre plus éclatants et à vous faire triompher de tous vos ennemis. Notre-Seigneur prend ici les trois mesures de farine pour une grande quantité, et il donne au nombre trois la signification d’un nombre considérable et indéterminé. — S. Jérôme. La mesure dont il est ici question est une mesure en usage dans la Palestine et qui représente un boisseau et demi. — S. Augustin. (Quest. évang., 1, 12.) Ou bien le levain c’est la charité, parce qu’elle excite et qu’elle échauffe : la femme représente la sagesse. Ces trois mesures de farine sont ces trois choses qui se trouvent dans l’homme et qui sont exprimées par ces paroles : « De tout votre cœur, de toute votre âme et de tout votre esprit. » (Mt 22.) Ou bien elles représentent les trois récoltes qui donnent : l’une cent, l’autre soixante et l’autre trente ; ou bien les trois espèces d’hommes dont il est parlé dans Ezéchiel : Noé, Daniel et Job (Ez 14, 14.16).

Raban. Il dit : « Jusqu’à ce que toute la pâte soit levée, » parce que la charité cachée dans notre âme doit s’y développer jusqu’à ce qu’elle ait communiqué sa perfection à l’âme tout entière, ce qui se commence dans cette vie et s’achève dans l’autre. — S. Jérôme. Ou bien encore cette femme qui prend du levain et le met dans trois mesures de farine, c’est la prédication des Apôtres, ou l’Église formée de différentes nations. Elle prend le levain, c’est-à-dire l’intelligence des Écritures, et elle le cache dans trois mesures de farine : l’esprit, l’âme et le corps, afin de les ramener à l’unité, et qu’il n’y ait entre eux aucun désaccord. Ou bien encore, nous lisons dans Platon qu’il y a trois parties dans l’âme : la partie raisonnable, la partie irascible et la partie concupiscible ; si donc nous avons reçu le levain évangélique des saintes Écritures, nous devons posséder la prudence dans la partie raisonnable, la haine contre le mal dans la partie irascible, le désir des vertus dans la partie concupiscible, et tout cela doit être le fruit de la doctrine évangélique que notre mère la sainte Église nous a communiquée. Je crois devoir rapporter également l’interprétation de quelques auteurs, d’après laquelle cette femme est aussi l’Église, qui a mêlé la foi à trois mesures de farine, c’est-à-dire à la croyance dans le Père, dans le Fils et dans le Saint-Esprit, et lorsque ce précieux levain de la foi a fait fermenter toute la masse, elle nous conduit à la connaissance non pas de trois Dieux, mais d’un seul et même Dieu. C’est une pieuse interprétation ; mais ni les paraboles, ni l’explication douteuse d’un discours énigmatique ne peuvent servir d’appui et de preuve aux dogmes de la foi.

S. Hil. (can. 13.) Ou bien encore le Seigneur se compare lui-même au levain ; le levain est fait avec de la farine et il rend à la masse d’où il est sorti la vertu qu’il en a reçue. Or, c’est ce levain qu’une femme, la synagogue, a pris et a caché par la condamnation à mort qu’elle a prononcée contre le Seigneur. Ce levain, mélangé avec trois mesures de farine, c’est-à-dire mêlé dans des proportions égales à la loi, aux prophètes, à l’Évangile, ne fait qu’une seule chose de ces trois éléments, parce que la propagation de l’Évangile vient accomplir les prescriptions de la loi et les prédictions des prophètes. Je me rappelle cependant en avoir entendu plusieurs qui interprétaient ces trois mesures de farine de la vocation des nations sorties de Sem, de Cham et de Japhet. Mais je ne sais si cette interprétation est fondée en raison, car quoique toutes les nations aient été appelées à l’Évangile, on ne peut dire que Jésus-Christ y ait été caché ; puisqu’au contraire il s’y est manifesté avec éclat ; et d’ailleurs ce céleste levain n’a point communiqué sa vertu à toute la masse des infidèles.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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