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Mt  12  9-13

S. Jérôme. Comme Notre-Seigneur avait victorieusement justifié ses disciples du reproche qu’on leur faisait d’avoir violé le jour du sabbat, les pharisiens s’attachent à le calomnier lui-même. « Étant parti de là, dit l’écrivain sacré, il vint dans leur synagogue. » — S. Hil. (can. 12.) Ce qui précède s’était passé au milieu des champs, et ce n’est qu’après qu’il entre dans la synagogue. — S. Augustin. (de l’accord des Evang., 2, 35.) On pourrait croire que le fait des épis et la guérison que saint Matthieu raconte à la suite ont eu lieu le même jour, puisque dans ce dernier cas il fait encore mention du jour du sabbat, si d’ailleurs saint Luc ne nous apprenait qu’il opéra cette guérison un autre jour de sabbat. Cette manière de s’exprimer de saint Matthieu : « Et partant de là, il vint dans leur synagogue, » signifie donc seulement qu’il ne vint dans la synagogue qu’après avoir quitté le champ, sans indiquer si c’est immédiatement ou plusieurs jours après ; et cela suffit pour donner raison au récit de saint Luc, qui rattache cette guérison à un autre jour de sabbat.

S. Hil. (can. 12.) A peine est-il entré dans la synagogue, qu’ils lui présentent un homme dont la main est desséchée, et lui demandent s’il est permis de guérir le jour du sabbat, pour trouver dans sa réponse une occasion de le condamner. « Et il se trouva là un homme qui avait une main desséchée, et ils l’interrogeaient, » etc.

S. Chrys. (hom. 41.) Ils interrogent non pour s’instruire, mais pour trouver occasion de l’accuser, comme l’Évangéliste le dit clairement : « Afin de pouvoir l’accuser. » Le fait seul suffisait à leurs mauvais desseins, mais ils veulent le prendre dans ses paroles pour se ménager contre lui un plus grand nombre de sujets d’accusation. — S. Jérôme. Ils lui demandent s’il est permis de guérir le jour du sabbat, afin de l’accuser de cruauté, d’impuissance s’il s’en abstient, et de transgression de la loi s’il guérit cet homme.

S. Augustin. (de l’accord des Evang., 2, 35.) On peut être surpris de ce que saint Matthieu dit que ce sont les pharisiens eux-mêmes qui demandent au Seigneur s’il est permis de guérir le jour du sabbat, tandis que saint Marc et saint Luc racontent que c’est le Seigneur lui-même qui leur fait cette question : « Est-il permis de faire du bien le jour du sabbat ou de faire du mal ? » Il faut donc comprendre qu’ils l’interrogèrent les premiers, en lui demandant : « Est-il permis de guérir le jour du sabbat ? » Le Seigneur, voyant dans leur pensée qu’ils cherchaient une occasion de l’accuser, place au milieu d’eux celui qu’il devait guérir, et leur adresse la question rapportée par saint Marc et saint Luc (Mc 3, 4 ; Lc 6, 9) ; et comme ils gardent le silence, il leur propose la comparaison de la brebis, et il conclut en leur disant : « Il est donc permis de faire du bien les jours du sabbat. » Il leur répond donc en ces termes : « Quel est celui qui, parmi vous, ayant une brebis, » etc. — S. Jérôme. La réponse qu’il fait à cette question est une condamnation de leur avarice. Comment, leur dit-il, vous vous hâtez, le jour du sabbat, de retirer une brebis ou un autre animal de la fosse où ils sont tombés, et cela non point par compassion pour cet animal, mais par un sentiment de vil intérêt, et moi je ne devrais pas délivrer un homme qui vaut mille fois plus qu’une brebis ! — Raban. Cet exemple est parfaitement choisi pour répondre à leur question et pour leur prouver qu’ils violent continuellement le sabbat par esprit de cupidité, eux qui lui reprochent de le violer pour une oeuvre de charité, et qui, par une fausse interprétation de la loi, prétendent que les bonnes oeuvres sont interdites le jour du sabbat, tandis qu’on ne doit s’abstenir que des mauvaises ; c’est pour cela qu’il est dit : « Vous ne ferez pas ces jours-là d’oeuvres serviles, » c’est-à-dire de péchés. C’est ainsi que dans le repos éternel il y aura cessation du mal et non pas du bien. — S. Augustin. (de l’accord des Evang., 2, 35.) La conclusion de cette comparaison, c’est qu’il est permis de faire de bonnes oeuvres le jour du sabbat. « Donc, leur dit-il, il est permis de faire du bien les jours du sabbat. »

S. Chrys. (hom. 41.) Remarquez que d’excuses différentes il apporte pour justifier la violation du sabbat ; mais comme la maladie de cet homme était incurable, il en vient à sa guérison. Alors il dit à cet homme : « Étendez votre main. » — S. Jérôme. Dans l’Évangile dont se servent les Nazaréens et les Ébionites, et que plusieurs regardent comme l’Évangile authentique de saint Matthieu, il est dit que cet homme, dont la main était desséchée, était maçon, et qu’il pria Jésus en ces termes : « J’étais maçon, demandant ma nourriture au travail de mes mains ; je vous en prie, ô Jésus, rendez-moi la santé, afin que je ne sois pas réduit à mendier honteusement mon pain. » — Raban. Jésus choisit le jour du sabbat de préférence pour enseigner et pour guérir, non-seulement en vue du sabbat spirituel, mais aussi à cause du grand concours de peuple qui était plus favorable au salut de tous, unique objet de ses désirs.

S. Hil. Dans le sens mystique, après le retour des champs où les Apôtres avaient cueilli les fruits de la moisson, Jésus vient dans la synagogue pour y préparer l’oeuvre d’une nouvelle moisson ; car plusieurs de ceux qui furent guéris se joignirent plus tard aux Apôtres. — S. Jérôme. Jusqu’à l’avènement du Dieu Sauveur, la main dans la synagogue des Juifs demeura desséchée et incapable des oeuvres de Dieu ; mais lorsqu’il fut venu sur la terre, les Apôtres rendirent l’usage de cette main droite à ceux qui embrassèrent la foi, et elle recouvra la même force d’action qu’auparavant. — S. Hil. Toute guérison se fait par la parole, et la main redevient semblable à l’autre, c’est-à-dire qu’elle devient propre au ministère du salut comme celle des Apôtres. Aussi le Sauveur apprend-il aux pharisiens à ne pas voir avec peine l’oeuvre du salut des hommes confiée aux Apôtres, puisqu’eux-mêmes, s’ils veulent croire, deviendront dignes du même ministère. — Raban. Ou bien cet homme, dont la main est desséchée, c’est le genre humain qui est devenu complètement stérile en bonnes oeuvres pour avoir étendu vers le fruit défendu cette main qu’a guérie une autre main innocente étendue sur la croix. C’est dans la synagogue que se trouve cette main desséchée, parce que la science, lorsqu’elle est départie avec abondance, expose à des fautes plus graves et sans excuse. Jésus commande d’étendre cette main desséchée qu’il veut guérir ; car l’infirmité d’une âme ne peut être guérie par un remède plus efficace que par d’abondantes aumônes. Cet homme avait la main droite desséchée, parce qu’elle était comme engourdie pour les oeuvres de charité ; sa main gauche était saine, parce qu’elle servait ses intérêts. A l’arrivée du Seigneur, la main droite devient saine comme la gauche, parce qu’elle distribue par un sentiment de charité ce qu’elle avait amassé par esprit d’avarice.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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