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Lc  9  51-56

S. Cyrille. Comme le temps approchait où le Seigneur devait, après les souffrances de sa passion, remonter au ciel, il résolut de se rendre à Jérusalem : « Les jours où il devait être enlevé de ce monde étant près de s’accomplir, » etc. — Tite de Bostra. Il fallait, en effet, que le véritable agneau fût offert là où l’agneau figuratif était immolé. L’Évangéliste dit qu’il « affermit son visage, » c’est-à-dire qu’il n’allait point de côté et d’autre, qu’il ne parcourait point les bourgs et les villages, mais qu’il se rendait directement à Jérusalem. — Bède. Que les païens cessent donc d’insulter, comme un homme, ce crucifié qui a prévu, certainement comme Dieu, le temps de son crucifiement, et qui, consentant à cette mort ignominieuse, a marché avec une contenance ferme, c’est-à-dire avec une âme résolue et intrépide.

S. Cyrille. Il envoie devant lui des messagers, pour lui préparer un logement et à ceux de sa suite, mais, lorsqu’ils arrivèrent dans le pays de Samarie, ils ne furent point reçus : « Et il envoya devant lui quelques-uns de ses disciples, et ils partirent et entrèrent dans un bourg de Samarie pour lui préparer un logement ; mais les habitants refusèrent de le recevoir. » — S. Ambr. Remarquez que le Sauveur ne voulut point être reçu par ceux qu’il savait n’être point sincèrement convertis ; s’il l’eût voulu, il eût changé leurs mauvaises dispositions, et leur eût inspiré un véritable dévouement pour sa personne ; mais Dieu appelle qui il veut, et donne aussi suivant sa volonté la grâce de la foi et de la piété. Or, l’Évangéliste nous fait connaître la raison pour laquelle ils refusèrent de le recevoir : « Parce qu’il se dirigeait vers Jérusalem. » — Théophile. Mais s’ils refusèrent de le recevoir, parce que son intention était de se rendre à Jérusalem, ne sont-ils pas excusables ? Nous répondons qu’il faut entendre ces paroles de l’Evangéliste : « Et ils ne le reçurent pas, » dans ce sens qu’il ne vint même pas dans le pays de Samarie, » et qu’à cette question : Pourquoi ne l’ont-ils pas reçu ? l’auteur sacré répond, que ce n’est point par impuissance de sa part, mais parce qu’au lieu de se rendre dans le pays de Samarie, il aima mieux aller à Jérusalem. — Bède. On peut dire aussi que les Samaritains ne voulurent point le recevoir, par ce qu’ils le voyaient se diriger vers Jérusalem, car selon la remarque de saint Jean, les Juifs ne communiquent pas avec les Samaritains. (Jn 4.)

S. Cyrille. Le Sauveur, qui connaissait toutes choses avant leur accomplissement, savait bien que ceux qu’il envoyait, ne seraient pas reçus par les Samaritains ; il leur commande cependant d’aller annoncer sa venue, parce qu’il agissait toujours dans l’intérêt de ses disciples. Il se rendait à Jérusalem aux approches de sa passion, c’est donc pour leur épargner le scandale de ses souffrances, et leur apprendre à supporter patiemment les outrages, qu’il permit ce refus des Samaritains, comme une espèce de prélude de ce qu’il devait souffrir. Il leur donnait encore une autre leçon, ils étaient destinés à être un jour les docteurs de tout l’univers, et devaient parcourir les villes et les bourgades pour y prêcher l’Évangile, et ils devaient nécessairement rencontrer des hommes qui refuseraient de recevoir cette sainte doctrine, et ne permettraient pas à Jésus de demeurer au milieu d’eux. Il leur apprend donc, qu’eu annonçant cette divine doctrine, ils doivent se montrer pleins de patience et de douceur, fuir tout sentiment de haine et de colère, et ne jamais chercher à sévir contre ceux qui les outrageraient. Mais telles n’étaient point leurs dispositions ; cédant aux mouvements d’un zèle trop ardent, ils voulaient faire tomber sur les Samaritains le feu du ciel : « Ce qu’ayant vu ses disciples, ils lui dirent : Seigneur, voulez-vous que nous commandions que le feu du ciel descende, » etc. — S. Ambr. Ils se rappelaient que le zèle de Phinées, qui avait mis à mort des sacrilèges (Nb 25), lui avait été imputé à justice ; et encore, qu’à la prière d’Elie, le feu était descendu du ciel pour venger les outrages faits à ce prophète (4 R 1.) — Bède. Ces saints personnages, en sachant parfaitement que la mort qui sépare l’âme du corps, n’est pas à redouter, ont semblé partager les idées de ceux qui la craignaient, et ont puni quelquefois de mort certains crimes. Ils inspiraient ainsi à ceux qui en étaient témoins une salutaire frayeur, et pour ceux qui étaient punis de mort, ce n’est pas la mort qui leur était funeste, c’eût été bien plutôt le péché qui n’aurait fait que s’accroître, s’ils eussent vécu plus longtemps.

S. Ambr. Laissons la vengeance à celui qui est dominé par la crainte ; celui qui est sans crainte, ne cherche pas à se venger. Nous voyons encore ici que les Apôtres étaient égaux en mérites aux prophètes, puisqu’ils espèrent obtenir le même pouvoir que le prophète ; et l’espérance qu’ils ont de faire descendre le feu du ciel est fondée, puisqu’ils sont les fils du tonnerre. (Mc 3, 17.)

Tite de Bostra. Les disciples estiment que la punition des Samaritains, frappés de mort pour avoir refusé de recevoir le Sauveur, serait beaucoup plus juste que celle des cinquante soldats envoyés pour se saisir d’Élie, son serviteur. — S. Ambr. Le Sauveur, au contraire, ne s’irrite point contre eux, il veut nous apprendre que le désir de la vengeance est incompatible avec la perfection de la vertu, que la plénitude de la charité exclut toute colère, qu’il ne faut point repousser la faiblesse, mais bien plutôt l’aider, et que les âmes vraiment pieuses doivent rejeter bien loin tout mouvement d’indignation, et les âmes magnanimes tout désir de vengeance : « Jésus, se tournant vers eux, les reprit, en disant : Vous ne savez pas de quel esprit vous êtes. » — Bède. Le Seigneur ne leur reproche point de vouloir suivre l’exemple du saint prophète, mais l’erreur grossière où ils étaient par rapport à la vengeance, et il les reprend de ce qu’ils désiraient se venger de leurs ennemis, par sentiment de haine plutôt que de les ramener au bien par un sentiment d’affection. Aussi, après qu’il leur eut enseigné comment ils devaient aimer leur prochain comme eux-mêmes, et lors même qu’ils eurent reçu le Saint-Esprit, on vit encore de ces vengeances, quoique plus rarement que dans l’Ancien Testament ; car comme Notre-Seigneur ajoute : « Le Fils de l’homme n’est pas venu pour perdre les âmes, mais pour les sauver. » Vous donc qui êtes marqués de son esprit, soyez les imitateurs de ses oeuvres, exercez ici bas la miséricorde, vous jugerez avec justice dans le siècle futur. — S. Ambr. En effet, il ne faut pas toujours punir ceux qui sont coupables ; souvent la clémence est bien plus utile ; elle vous fait pratiquer la patience, et elle inspire au pécheur le désir de devenir meilleur. C’est ainsi que les Samaritains, sur lesquels le Sauveur refusa de faire tomber le feu du ciel, embrassèrent la foi avec plus d’empressement.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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