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Lc  6  1-5

S. Ambr. Ce n’est pas seulement par ses enseignements, mais par sa conduite et par ses actes, que Notre-Seigneur commence à dépouiller l’homme des observances de l’ancienne loi. « Or, un jour de sabbat, appelé le second-premier, comme Jésus passait le long des blés, ses disciples cueillaient des épis, » etc. — Bède. L’importunité de la foule ne laissait pas aux disciples le temps de manger, et comme ils éprouvaient le besoin de la faim, ils l’apaisent en mangeant les épis qu’ils froissent entre leurs mains, preuve d’une vie simple et austère, qui, loin de chercher des mets apprêtés, se contente des aliments les plus simples. — Théophile. C’était, dit l’Évangéliste, le sabbat second-premier, parce que les Juifs donnaient le nom de sabbat à toutes les fêtes. En effet, le mot sabbat signifie repos. Or, il arrivait souvent qu’une fête tombait la veille du sabbat, et on appelait ce jour sabbat à cause de la fête ; puis alors le véritable jour du sabbat était appelé second-premier, comme étant le second après la fête qui avait précédé. — S. Chrys. (hom. 40 sur S. Matth.) Il y avait alors une double fête, celle du jour même du sabbat et celle de la solennité qui lui succédait, et à laquelle on donnait aussi le nom de sabbat. — S. Isidore. Il appelle ce sabbat second-premier, parce que c’était le second jour de Pâque, et le premier des Azymes. En effet, on immolait la pâque le soir, et le jour suivant on célébrait la fête des Azymes. Ce qui rend cette explication plus vraisemblable, c’est que nous voyons les Apôtres arracher des épis et les manger ; car dans cette époque de l’année, les épis s’inclinent sous le poids des grains qu’ils contiennent. — S. Epiph. (contre les hérés., liv. I, ch. xxx.) Ils passaient donc le long des champs de blé un jour de sabbat, et ils mangeaient des épis pour montrer que la loi du sabbat a cessé d’exister depuis la venue du grand sabbat, c’est-à-dire de Jésus-Christ, qui nous a donné le repos après les fatigues que nos crimes nous avaient causées.

S. Cyrille. Les pharisiens et les scribes, dans leur ignorance des saintes Écritures, conspiraient entre eux pour accuser les disciples de Jésus-Christ : « Alors quelques-uns des pharisiens leur dirent : Pourquoi faites-vous ce qu’il n’est pas permis de faire ? » etc. Mais dites-moi vous-mêmes, lorsque la table est servie devant vous le jour du sabbat, hésitez-vous à rompre le pain ? Pourquoi donc reprenez-vous les autres ? — Bède. Il en est qui prétendent que ce reproche fut fait à Notre-Seigneur en personne, mais il a pu très-bien être fait par différentes personnes et au Sauveur lui-même, et à ses disciples ; et quoiqu’il en soit, c’était surtout à lui que le reproche s’adressait.

S. Ambr. Or, le Seigneur accuse à son tour les défenseurs de la loi, de ne pas connaître ce que la loi renferme, et il leur cite à l’appui l’exemple de David : « Jésus leur répondit : N’avez-vous pas lu, » etc. — S. Cyrille. Comme s’il disait : La loi de Moïse fait cette recommandation expressément : « Jugez selon la justice, ne faites point acception de personnes dans vos jugements ; » pourquoi donc accusez-vous mes disciples, vous qui ne cessez d’exalter David comme un saint et comme un prophète, bien qu’il n’ait pas observé le commandement de Moïse ? — S. Chrys. (hom. 40 sur S. Matth.) Remarquez que, lorsque Notre-Seigneur prend la défense de ses serviteurs (c’est-à-dire de ses disciples), il cite à l’appui l’exemple de simples serviteurs, celui de David et des prêtres, mais quand il répond à ses propres accusateurs, il en appelle à l’exemple de son Père, comme lorsqu’il dit : « Mon Père agit sans cesse, et moi j’agis aussi (Jn 5, 17). »

Théophile. Il leur répond encore d’une autre manière : « Et il ajouta : Le Fils de l’homme est maître même du sabbat ; » comme s’il disait : Je suis maître du sabbat, et j’en dispose à mon gré, et comme législateur, j’ai le pouvoir de supprimer le sabbat. Jésus-Christ était appelé Fils de l’homme, parce que tout Fils de Dieu qu’il était, il a daigné devenir miraculeusement Fils de l’homme et en porter le nom par amour pour les hommes. — S. Chrys. D’après saint Marc, Notre-Seigneur justifie ses disciples par une considération propre à tous les hommes : « Le sabbat, leur dit-il, a été fait pour les hommes, et non l’homme pour le sabbat. » Donc il faut mettre le sabbat au-dessous de l’homme, plutôt que de placer l’homme sous le joug du sabbat,

S. Ambr. Cette action des disciples renferme un grand mystère. Le champ de blé, c’est le monde entier ; la moisson, dont ce champ est couvert, c’est la prodigieuse fécondité des saints répandus dans le champ du genre humain ; les épis sont les fruits de l’Église ; les Apôtres en font tomber les grains et les mangent, c’est-à-dire qu’ils se nourrissent de nos progrès dans la vertu, en séparant de leur enveloppe extérieure les oeuvres et les fruits de l’âme pour les faire paraître à la lumière de la foi par les miracles éclatants de leurs oeuvres. — Bède. Ils broient les épis dans leurs mains, c’est-à-dire qu’ils font mourir le vieil homme dans ceux qu’ils veulent unir au corps de Jésus-Christ, en les séparant de toute intention terrestre. — S. Ambr. Les Juifs croyaient que c’était là une action défendue le jour du sabbat ; mais Jésus-Christ, en venant apporter le bienfait inestimable de la grâce nouvelle, voulait désigner à la fois le repos de la loi et le travail de la grâce. C’est dans un dessein tout particulier que saint Luc appelle ce jour le sabbat second-premier, et non premier-second, parce qu’en effet, le sabbat établi par la loi, qui était le premier, est supprimé, et celui qui était le second par ordre de temps est devenu le premier. Il est donc appelé second par ordre de temps, et premier, à cause de l’excellence de l’opération de la grâce ; car le sabbat qui délivre du châtiment est supérieur à celui qui prescrit la punition. Ou encore, ce sabbat est le premier dans les desseins éternels de Dieu, et le second par ordre d’institution. David, qui fuit avec ses compagnons, est dans la loi la figure de Jésus-Christ qui se dérobe avec ses disciples à la connaissance et aux poursuites du prince du monde. Mais pourquoi ce fidèle observateur et ce zélé défenseur de la loi mange-t-il lui-même de ces pains, et en donne-t-il à ceux qui étaient avec lui (alors que les prêtres seuls pouvaient en manger) ? C’était pour nous montrer par cette action, que la nourriture réservée jusqu’alors aux prêtres, deviendrait la nourriture des peuples, ou bien que tous nous devions imiter les vertus de la vie sacerdotale, ou enfin que tous les enfants de l’Église sont de véritables prêtres. En effet, nous recevons l’onction sainte qui nous consacre prêtres pour nous offrir nous-mêmes à Dieu comme des hosties spirituelles. (1 P 2)

Mais puisque le sabbat a été fait pour les hommes, et que leur utilité demandait que l’homme ne fût plus soumis au jeûne prolongé d’une faim mortelle (lui qui avait été si longtemps privé des fruits de la terre), la loi, loin d’être détruite, reçoit ici son accomplissement.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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