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Lc  19  28-37

Tite de Bostra. (Ch. des Pèr. gr.) Les disciples qui avaient entendu dire au Sauveur : « Le royaume de Dieu est proche, » et qui le voyaient se diriger vers Jérusalem, pensaient qu’il allait commencer à y établir le royaume de Dieu. Dans la parabole qui précède, Jésus a redressé cette erreur, et montré qu’il n’avait pas encore triomphé de la mort qu’on lui préparait. Cette parabole achevée, il va au-devant de sa passion en continuant sa marche vers Jérusalem : « Après ce discours, il continua de marcher vers Jérusalem. » — Bède. Il leur apprend en même temps que cette parabole est une prédiction de la triste destinée de cette ville qui allait le mettre à mort, et devait périr elle-même au milieu des horreurs de la guerre : « Comme il approchait de Bethphagé et de Béthanie, » etc. Bethphagé était une bourgade habitée par les prêtres, et située sur le versant du mont des Oliviers ; Béthanie était aussi une petite ville située sur le penchant de la même montagne, à quinze stades environ de Jérusalem (cf. Mc 11, 1 ; Lc 19, 59 ; Jn 11, 1.14).

S. Chrys. (hom. 67, sur S. Matth.) Dans les commencements de sa vie publique, Jésus se mêlait simplement et sans distinction avec les Juifs ; mais lorsqu’il eut donné assez de preuves de sa puissance, toutes ses actions sont empreintes d’une grande autorité. Les miracles se multiplient, il annonce à ses disciples qu’ils trouveront un ânon qui n’a pas encore été monté : « Allez à ce village qui est devant vous, » etc. Il leur prédit également que personne ne les empêchera, mais qu’aussitôt qu’ils auront parlé, on les laissera faire sans dire un seul mot. Il ajoute donc : « Déliez-le, et me l’amenez. »

Tite de Bostra. Il y eut ici un ordre divin bien clairement connu, car personne ne peut résister à Dieu, quand il réclame ce qui lui appartient. Or, les disciples chargés de conduire cet ânon, ne refusèrent point de remplir cette office comme peu relevé, mais ils partirent aussitôt pour l’amener : « Ceux qui étaient envoyés, s’en allèrent, » etc. — S. Basile. C’est ainsi que nous devons accepter avec empressement et avec zèle les plus humbles fonctions, persuadés qu’aucune action n’est petite lorsqu’elle est faite en vue de Dieu, et qu’elle est digne du royaume des cieux.

Tite de Bostra. Ceux qui avaient attaché l’ânon, obéissent en silence à cet acte de puissance du Sauveur, et ne peuvent résister à l’ordre qu’il leur donne : « Comme ils détachaient l’ânon, ses maîtres leur dirent : Pourquoi déliez-vous cet ânon ? Ils répondirent : Parce que le Seigneur en a besoin. » C’est qu’en effet le nom du Seigneur annonce la majesté, et qu’il allait paraître comme un roi à la vue de tout le peuple.

S. Augustin. (de l’acc. des Evang., 2, 66.) Ne soyez pas surpris que saint Matthieu parle de l’ânesse et de son ânon, tandis que les autres ne disent rien de l’ânesse ; car lorsque deux faits peuvent se concilier, il n’y a aucune contradiction à les admettre, alors même que chaque évangéliste y mêlerait des circonstances différentes, a plus forte raison quand un évangéliste raconte une circonstance qu’un autre passe tout simplement sous silence.

La glose. Les disciples témoignent ici leur empressement et leur zèle pour Jésus-Christ, non seulement en lui amenant l’ânon qui ne leur appartenait pas, mais en se dépouillant de leurs propres vêtements qu’ils jetèrent sur l’ânon, et qu’ils étendirent le long du chemin : « Et ils l’amenèrent à Jésus, et jetant leurs vêtements sur l’ânon, » etc. — Bède. D’après les autres évangélistes, ce ne furent pas seulement les disciples, mais une grande partie de la foule, qui étendirent leurs vêtements le long du chemin.

S. Ambr. Dans le sens figuré, Notre-Seigneur vient sur la montagne des Oliviers, pour planter de nouveaux oliviers en vertu de sa souveraine puissance ; or, cette montagne, c’est Jésus-Christ lui-même, car quel autre que lui pourrait produire ces olives fécondées par la plénitude de l’Esprit ? — Bède. Les villes dont il est ici question, sont situées sur le versant du mont des Oliviers, c’est-à-dire sur le Seigneur lui-même, qui entretient l’onction des grâces spirituelles par la double lumière de la science et de la piété.

Origène. (hom. 37, sur S. Luc.) Béthanie veut dire maison d’obéissance, et Bethphagé, ville habitée par les prêtres, signifie maison des mâchoires, parce que la loi attribuait aux prêtres les mâchoires des victimes dans les sacrifices. C’est donc dans la maison de l’obéissance et dans une ville habitée par les prêtres, que le Sauveur envoie ses disciples pour délier le petit de l’ânesse. — S. Ambr. Ils trouvèrent donc dans ce village l’ânon qui était lié avec l’ânesse : il ne pouvait être délié que par l’ordre du Seigneur, et ce fut la main des Apôtres qui le délia. Telles sont les actions, telle est la vie, telle est la grâce. Soyez donc tels que vous méritiez de rompre les liens de ceux qui sont attachés. Dans l’ânesse, saint Matthieu a comme figuré la mère de l’erreur ; et saint Luc représente dans l’ânon l’universalité du peuple des Gentils. Notre-Seigneur ajoute avec dessein : « Sur lequel aucun homme ne s’est encore assis, » parce qu’avant Jésus-Christ, personne n’avait appelé les Gentils à faire partie de l’Église. Ce peuple était retenu dans les liens de l’infidélité, attaché à un maître injuste, et esclave de l’erreur. Il ne pouvait revendiquer son indépendance, parce qu’elle était enchaînée non par sa nature, mais par sa faute. Aussi quand on parle ici du Seigneur, on ne veut parler que d’un seul. Misérable servitude que celle dont les droits ne sont pas clairement définis ; car celui qui n’est pas soumis à un seul maître en a nécessairement plusieurs. Les maîtres étrangers lient pour posséder, celui-ci délie pour retenir, car il sait que les bienfaits sont plus forts pour retenir que tous les liens. — Origène. (hom. 37, sur S. Luc.) Cet ânon avait donc plusieurs maîtres avant que le Sauveur en eût besoin, mais dès qu’il en fut devenu le véritable maître, les autres cessèrent d’avoir autorité sur lui, car personne ne peut servir Dieu et l’argent. (Mt 12.) Lorsque nous étions esclaves du péché, nous étions sous la domination d’une multitude de passions et de vices. Or, le Seigneur déclare qu’il a besoin de l’ânon, parce que son grand désir est de rompre les liens qui nous attachent au péché.

Origène. (Traité 11, sur S. Jean.) Ce n’est pas sans raison que le lieu où l’ânesse et l’ânon se trouvaient attachés, était un village ; parce que la terre tout entière, en comparaison du monde céleste, n’est elle-même que comme un simple hameau.

S. Ambr. Ce n’est pas non plus sans un dessein particulier qu’il envoie deux de ses disciples, ils figurent Pierre qui fut envoyé au centurion Corneille, et Paul au reste de la gentilité ; et c’est pourquoi l’Évangéliste se contente d’indiquer le nombre sans désigner les personnes. Si cependant on veut ici une désignation spéciale, ou peut appliquer ceci à Philippe que l’Esprit-Saint envoya dans la ville de Gaza, lorsqu’il baptisa l’eunuque de la reine Candace. (Ac 8.) — Théophile. Ou bien encore, ces deux disciples figurent les deux ordres des prophètes et des Apôtres qui doivent amener à l’Église, et soumettre à Jésus-Christ le peuple des Gentils, Us amènent cet ânon d’un simple village, pour signifier la grossièreté et l’ignorance de ce peuple avant sa conversion. — S. Ambr. Ces deux disciples envoyés pour délier l’ânon, ne parlent point en leur propre nom, ils reproduisent les paroles de Jésus, pour vous apprendre que ce n’est point par la vertu de leurs discours, mais par la parole de Dieu, ni en leur nom, mais au nom de Jésus-Christ qu’ils ont converti les Gentils à la foi, et que les puissances ennemies qui exerçaient sur les nations un empire tyrannique ont cédé devant l’ordre de Dieu. — Origène. Les disciples jettent leurs vêtements sur l’ânon et y font asseoir le Sauveur, lorsqu’ils prennent la parole de Dieu et la déposent sur l’âme de ceux qui les écoutent. Ils se dépouillent de leurs vêtements, et les étendent le long du chemin ; les vêtements des Apôtres, ce sont leurs bonnes oeuvres, et il est vrai de dire que l’ânon délié par les disciples, et qui porte Jésus, marchent sur les vêtements des Apôtres, quand il pratique leur doctrine et qu’il imite leurs vertus. Qui de nous est assez heureux pour porter ainsi Jésus ? — S. Ambr. Ce n’est pas que le Maître du monde trouve aucun plaisir à être ainsi porté par une ânesse ; mais cette action est un emblème mystérieux de sa présence sur le siège intime de notre âme où il est assis comme un guide invisible pour diriger les démarches de notre âme, et réprimer tous les mouvements de la concupiscence de la chair par la vertu de sa parole dont il se sert à la fois comme de rênes et d’aiguillon.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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