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Le signe de Judas l’Iscariote

La laïcisation
(Attention, ceci n’est pas une prophétie. Juste un conte.)

L’arrestation de Jésus, Giotto di Bondone.
L’arrestation de Jésus (Giotto di Bondone)

 

« Trempant alors la bouchée, Jésus la prend et la donne à Judas, fils de Simon Iscariote. Après la bouchée, alors Satan entra en lui. Jésus lui dit donc : “Ce que tu fais, fais-le vite.” » (Jean 13, 26)

 

Le signe de Judas est trop douloureux pour être regardé dans son seul déroulement historique. C’est du point de vue du Ciel qu’il faut le comprendre.

A partir de 1830, la Vierge Marie, à la rue du Bac, avertit la terre que l’Église allait devoir entrer, pas après pas, dans les mystères de sa diminution en puissance temporelle. Et, de ce fait, sa puissance spirituelle grandirait, grandirait, jusqu’à provoquer, dans la génération des derniers chrétiens, le retour du Christ dans sa gloire. Elle le fit par une petite médaille…

L’Esprit Saint qui avait mené Jésus vers sa passion se mit à orienter l’Église dans la même direction. D’abord, ce furent les élites des nations européennes qui se détournèrent de la foi. En 1870, Pie IX eut à vivre la perte de sa puissance temporelle par la destruction de ses États. Il en souffrit beaucoup, excommunia Garibaldi et les tenants de l’unité italienne mais ne put rien empêcher. Pauvre pape que saint Jean Bosco vint visiter pour lui dire : « Laissez faire. Cela vient de Dieu. » Ainsi commença à se réaliser la prophétie qu’avait laissée Jésus (Jean 21, 18) : « En vérité, en vérité, je te le dis, quand tu étais jeune, tu mettais toi-même ta ceinture, et tu allais où tu voulais ; quand tu auras vieilli, tu étendras les mains, et un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudrais pas. »

« Où tu ne voudrais pas. » Ce qu’ignoraient ou voulaient ignorer les papes, c’est la suite de cette prophétie (Jean 21, 19) : « Il signifiait, en parlant ainsi, le genre de mort par lequel Pierre devait glorifier Dieu. Ayant dit cela, il lui dit : “Suis-moi.” »

1945, la naissance du signe de Judas

Voici l’histoire de ce chemin.

Dès la fin des deux guerres mondiales, l’esprit de la révolte apparut et c’était compréhensible. Un tel traumatisme, un tel échec des générations précédentes ne pouvait que provoquer un rejet des anciennes valeurs. En 1964, à peine le concile Vatican II fut-il terminé que des milliers de prêtres et de fidèles s’en emparèrent pour lui faire porter des fruits selon l’air du temps, des fruits que leur peu de fréquentation de l’Esprit Saint suscita. Ainsi dirent-ils :

« Ce Concile, par Gaudium et Spes, nous dit de construire la terre ! Le Ciel sera pour plus tard. La gloire de Dieu, c’est le bonheur ici-bas. Et le bonheur commence par la lutte contre la pauvreté matérielle. La pauvreté des âmes s’occupera d’elle-même. »

Ainsi réalisèrent-ils une prophétie de Marc 14, 3 : « Comme il se trouvait à Béthanie, une femme vint, avec un flacon d’albâtre contenant un nard pur de grand prix. Brisant le flacon, elle le lui versa sur la tête. Or il y en eut qui s’indignèrent entre eux, dont Judas Iscariote, l’un des Douze : “A quoi bon ce gaspillage de parfum ? Ce parfum pouvait être vendu plus de 300 deniers et donné aux pauvres.” Et ils la rudoyaient. Mais Jésus dit : “Laissez-la ; pourquoi la tracassez-vous ? C’est une bonne oeuvre qu’elle a accomplie sur moi. Les pauvres, en effet, vous les aurez toujours avec vous et, quand vous le voudrez, vous pourrez leur faire du bien, mais moi, vous ne m’aurez pas toujours. Elle a fait ce qui était en son pouvoir : d’avance elle a parfumé mon corps pour l’ensevelissement. En vérité, je vous le dis, partout où sera proclamé l’Évangile, au monde entier, on redira aussi, à sa mémoire, ce qu’elle vient de faire.” »

En effet, pendant 40 ans, ce fut toute une génération d’apôtres, de témoins, d’acteurs de terrain qui se dévoua corps et âme… au social. Elle inaugura l’existence dans l’Église d’une lignée de fidèles qui devait la trahir à l’Heure dite. C’est en effet ce souci de l’action matérielle efficace qui leur fit dénoncer le temps perdu dans la prière, le culte de la charité qui prie et de l’humilité (le parfum gaspillé…). Pourtant, cette lignée ne quitta pas l’Église. Elle resta en elle jusqu’au terme assigné.

À partir de 2000, le grand renouveau

Mais l’Église est comme un arbre dont la sève est le lien de l’Esprit Saint. Toute branche coupée de sa sève meurt. Les séminaires tenus par le Parti du progrès se vidèrent et ses vocations sacerdotales se tarirent tandis que, dans la voie de la fidélité à la prière, les fleurs du renouveau revinrent. C’est ainsi que, à la grande stupéfaction du monde, l’arbre de l’Église, plus petit et resserré sur sa vie, sembla repartir de plus belle.

Cela se passait à une époque où le monde au contraire, après les terribles guerres religieuses du début du XXIe siècle, s’enracinait de plus en plus dans l’humanisme sans Dieu. Tranquillement, le pape de Rome parlait de sa chaire du Vatican, rappelant ce qui plaît à Dieu face aux lois que les comités d’éthique et les loges rationalistes suscitaient. Tant et si bien que, puisque l’Islam avait été réduit au silence par sa grande guerre, il restait dans le monde une seule voix médiatique discordante, celle de l’homme en blanc du Vatican.

Or la jeunesse occidentale et la jeunesse orientale étaient abreuvées, jusqu’à l’angoisse, des idées sans saveur de leurs aînés sur la jouissance, « commencement et fin d’une vie appelée à s’éteindre dans l’euthanasie ». D’un coup, sans que personne l’explique, elle se retourna vers l’Église. Les fruits du courage tranquille des papes sortirent de terre, de manière stupéfiante. Les monastères se remplirent ; des familles chrétiennes se formèrent.

Cette génération rendit justice aux papes du passé si longtemps bafoués et on reconnut leur clairvoyance. Il faut dire que depuis la perte des États Pontificaux, le siège apostolique s’était relevé spirituellement. Il avait dénoncé tour à tour le communisme sous Léon XIII, la guerre nationaliste de 1914 sous Benoît XV, le nazisme sous Pie XI dès 1938, il avait sauvé près d’un million de Juifs par l’action diplomatique et pastorale efficace de Pie XII durant la Seconde Guerre mondiale. Et puis Paul VI, Jean-Paul II et ses successeurs avaient courageusement montré du doigt l’idéologie d’après-guerre à qui l’Occident sacrifiait sa survie même : le culte du plaisir immédiat.

Les missions apostoliques repartirent et, comme l’avait souhaité saint Jean-Paul le Grand, la Chine s’ouvrit au Christ. Ce fut, après celle du XIXe siècle, la plus grande épopée missionnaire de l’histoire.

L’Église de cette génération fut sainte de manière unique car elle ne se fonda plus sur l’espoir d’un succès humain, mais sur l’espérance de la victoire éternelle.

Leur grand agacement

Il ne faut pourtant pas croire que tout fut clair et propre. Dans les milieux hostiles à ce renouveau profond, l’agacement contre l’Église romaine ne cessa de grandir. Ce courant du monde ne savait pas gré à la papauté d’avoir dénoncé l’idéologie du temps au moment voulu. Bien au contraire, montrées du doigt par l’autorité de Pierre, les générations accumulaient une rancœur de plus en plus grande contre « le père ». Or, dans l’Église même, le Parti du progrès entretenait ces idées, sourdement. Des projets se répandirent : changer le gouvernement de l’Église, démocratiser, décider la pastorale et la foi par le vote. Il y eut des discussions, des rapprochements entre les autorités politiques et ces chrétiens. On médita ensemble le moyen de faire taire la voix du pape.

C’est vers cette époque que prit corps cette parole de l’évangile, selon son sens prophétique (Marc 14, 10) : « Judas Iscariote, l’un des Douze, s’en alla auprès des grands prêtres pour le leur livrer. A cette nouvelle ils se réjouirent et ils promirent de lui donner de l’argent. Et il cherchait une occasion favorable pour le livrer. »

Trahir

Comme tous les renouveaux intenses de l’Église, il ne dura pas. En vieillissant, la génération du renouveau catholique vit la joie de son zèle pour l’humilité et l’amour tourner en un radotage moralisateur et triste. Ils abreuvèrent avec excès leurs enfants de l’espérance du Ciel. Les générations passant, il se leva une nouvelle jeunesse qu’agaçaient la dévotion et le goût pour l’éternité. Voulant se libérer de ce carcan, ils firent remonter à leur mémoire le souvenir des grandes guerres religieuses, celles des chrétiens au XVIe siècle, celle des musulmans toute récente. Et revint l’ancienne litanie : « Les guerres viennent toutes des religions ! »

Telle qu’est la jeunesse à 20 ans, tel sera le monde lors de ses 50 ans, lorsqu’elle sera au pouvoir. Des campagnes médiatiques s’organisèrent sur le rôle perpétuellement négatif et tyrannique de la papauté et des religions en général. Mais cette fois, ce fut mondial car l’humanité était devenue une sorte de village médiatique et occidentalisé.

C’est du sein de l’Église même que partaient les contestations les plus virulentes, comme si le vieillard de Rome brûlait la conscience. On rappela Benoît XV et son amour de l’Allemagne agressive, Pie XII et son soutien aux nazis, Jean-Paul II et sa haine du plaisir, Benoît XVII et ses mises en gardes contre les améliorations de la nature humaine. Les calomnies que l’histoire avait réparées ressortirent.

Des réunions eurent lieu entre les catholiques du progrès et les humanistes sans Dieu. On réfléchit, on posa le pour et le contre, et on décida qu’il fallait supprimer cette anomalie de l’histoire qu’était l’État du Vatican. On décida aussi de créer une nouvelle autorité ecclésiastique. Les projets d’Église enfin démocratique ressortirent. Le projet, si bien ficelé, pensait réduire la voix de Pierre, tranquillement, sans vagues, à celle d’un vicaire de paroisse.

La fin de la papauté

Le parlement du gouvernement mondial vota la confiscation de l’État du Vatican et son rattachement à la ville de Rome. Et le pape se laissa faire, sans protester, avec une grande paix. Il savait que son autorité ne venait pas de son petit État mais du ministère Apostolique confié par le Christ. Et il eut bien raison de ne rien craindre. Depuis son exil en Italie, sa parole montait, simple et encore plus puissante. Et pourtant, il semblait bien seul. Les chrétiens qui le soutenaient n’osaient parler trop fort, tant l’exaspération contre « l’empêcheur de vivre librement » était grande.

A Rome, un synode composé d’évêques et de laïques fut convoqué sur l’initiative de monseigneur Vlassov. Et il supprima la fonction pontificale par un vote unanime. Monseigneur Garlier, de France, fidèle au pape, et non convoqué au synode, commenta :

« Le ridicule de cette situation n’échappera pas même au monde laïc. On ne dépose pas le Vicaire du Christ, quand bien même tous les évêques du monde voteraient dans le même sens. »

Et effectivement, rien ne put faire taire le Magistère de l’Église qui reçut même, de manière absolument inattendue, l’offre de venir se réfugier en Israël. Le pape partit, simplement, et avec lui le siècle apostolique qui, de romain, devint le siège de Jérusalem.

Ce n’est que plus tard et d’une manière qui relève du secret de Dieu que se réalisa cette prophétie : le troisième secret de Fatima[1] est rapporté ainsi par Lucie.[2]

« Nous vîmes divers autres évêques, prêtres, religieux et religieuses monter sur une montagne escarpée, au sommet de laquelle il y avait une grande croix en troncs bruts, comme s’ils étaient en chêne-liège avec leur écorce. Avant d’y arriver, le Saint-Père traversa une grande ville à moitié en ruine et, à moitié tremblant, d’un pas vacillant, affligé de souffrance et de peine, il priait pour les âmes des cadavres qu’il trouvait sur son chemin. Parvenu au sommet de la montagne, prosterné à genoux au pied de la grande croix, il fut tué par un groupe de soldats qui tirèrent plusieurs coups avec une arme à feu et des flèches. Et de la même manière moururent les uns après les autres les évêques, les prêtres, les religieux et religieuses et divers laïcs, hommes et femmes de classe et de catégories sociales différentes. »

Certains disent qu’elle se réalisa lentement et comme par extinction, la fin du sacerdoce apostolique… D’autres croient plus probable qu’il y eut un martyre physique. L’essentiel est que cette fin de la papauté et du sacerdoce ministériel fut vraiment bénie par Dieu et observée par les anges. Le pape, les évêques et les prêtres qui furent fidèles vécurent leur sacrifice consciemment et avec toute la joie de celui qui sait qu’il accomplit un grand mystère. Et la nature des arrosoirs de cristal qu’ils utilisèrent, le rôle qu’Israël reçut pour reprendre le flambeau abandonné par les nations, est une autre histoire.

Arnaud Dumouch, 25 décembre 2005

 

1. Apparition reconnue canoniquement par l’Église. Les textes cités ont une certaine autorité dont le degré est rappelé en fin d’ouvrage. La béatification de deux des trois voyants montre l’importance que donne l’Autorité apostolique romaine à cet événement. [↩]

2. Dévoilé au monde le 26 juin 2000 par le pape Jean-Paul II. Mon opinion est que ce secret ne concerne pas le passé. Elle diffère en cela de celle du cardinal Ratzinger (commentaire du secret, 26 juin 2000). Sa portée me semble être beaucoup plus grande que l’attentat de 1981 contre Jean-Paul II. Le fait que les autorités de Rome le rangent dans les faits passés n’est-il pas lié à cette parole de Jésus en Jean 21, 18 : « Quand tu auras vieilli, tu étendras les mains, et un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudrais pas. »
Autre interprétation (par Laurent C., juillet 2005) : La 3eme prophétie de Fatima (la ville en ruines, l’évêque vêtu de blanc tué au pied de la croix, etc.) pourrait-elle aussi s’appliquer à un futur attentat (islamiste) ayant pour objet Rome et/ou le Vatican ? Le pape a bien été victime d’un attentat, mais cela n’explique pas la ville en ruine…
Oui, cela pourrait, puisque ces prophéties ont plusieurs sens possibles. C’est même une très intéressante interprétation car elle est dans la ligne des deux autres secrets qui annoncent les 3 premières guerres mondiales :
    1° Cette guerre va bientôt finit (guerre 14)
    2° Mais il en viendra une autre pire (guerre 39)
    3° La Russie répandra ses erreurs (Guerre froide). [↩]

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