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La génération des poilus de la Grande Guerre
(1914-1918)

Les contes du tome 2 décrivent l’histoire d’une génération et de son éducation, selon le deuxième sens des textes eschatologiques de la Révélation. Il est parlé des « générations » de la manière dont le fait Jésus : les membres de cette génération ne forment pas un bloc uniforme. Le conte vise plutôt le courant dominant du temps, tenu le plus souvent par des représentants qui possèdent le pouvoir, au moins au plan médiatique.

La bataille de la Somme, 4e division canadienne.
La bataille de la Somme, 4e division canadienne.

 

« Dieu renverse les puissants de leur trône et il élève les humbles » (Magnificat de Marie). Il le fait à chaque génération, la prenant par le domaine où elle a mis son orgueil et ainsi il la sauve, puisque seuls les humbles entrent au paradis.

A titre d’exemple et pour mieux comprendre l’universalité de cette sagesse divine, voici l’expérience telle qu’elle a été vécue par la génération de la première guerre mondiale.

Le signe du Titanic

En Europe, l’orgueil majeur de cette génération fut sa foi dans la science qui devait, croyait-elle, lui apporter la totalité du bonheur. Son idole principale fut la Patrie qu’elle exaltait jusqu’à en faire une nouvelle religion, au point d’en faire, de fait, un monstre dévoreur d’hommes. Dès 1870, on se préparait mentalement à tout lui offrir en sacrifice. Pour la patrie, chacun bombait le torse. En France, on se targuait de faire rendre gorge aux Boches et, jusque dans les écoles primaires, on branchait les enfants sur la récupération d’une terre perdue lors de la guerre précédente : l’Alsace et la Lorraine. En Allemagne, on chantait Deutschland über alles (« Allemagne au-dessus de tout. »). L’idéologie était européenne, mais comme l’Europe dominait le monde, elle concernait le monde entier.

Dieu laissait faire les lois de ce péché d’idolâtrie. Car Dieu a le temps. Un arbre mauvais produit certes des fruits mauvais mais la vie sur terre n’est qu’une première étape. Celui qui se la rend inutile et malheureuse n’a pas tout perdu s’il y a une vie après la mort.

Dieu, cependant, commença par avertir cette génération par la parole de quelques visionnaires qui avertirent : « Que peut produire l’éducation perpétuelle à la haine de l’autre et à l’amour de sa propre supériorité ? » Puis il y eut un signe dans le ciel (de l’intelligence), visible par tous. Le regard obsessionnel des Occidentaux pour le naufrage du Titanic en 1912, montre que le signe du malheur à venir a été compris dès cette époque, au moins confusément, dans ce qui semblait une prophétie. E paquebot tout neuf, promis à la vie, était l’image du monde de cette époque. Fruit de la science la plus moderne, ses parois étanches lui donnait une réputation publicitaire : « Même Dieu ne pourrait pas le couler. » Comme l’Europe, il était un petit monde séparé en classes sociales. La mort fondit sur lui d’un seul coup, au milieu de la nuit, alors que le vent ne soufflait pas et que la mer était calme. En 1999, le film Titanic le comprit si bien qu’il alla jusqu’à en montrer le sens spirituel. Dans ses dernières images, il se termine dans la Lumière de la Vie éternelle où les naufragés, au-delà de leurs souffrances, se retrouvent humbles, aimant et sauvés. Il y a là une prophétie dont on ne soupçonne pas encore la justesse.

La coupe amère de son échec

Seule une partie des élites, celle d’étudiants plutôt gamins, se réjouit de la guerre. Ces jeunes avaient nourri leur imagination des récits napoléoniens où il manque la réalité et l’odeur de la mort, des cris des agonisants. Les autres y allèrent par devoir et parce qu’il fallait bien. Et très vite, tous ces jeunes comprirent. Il ne leur fallut pas six mois pour sortir définitivement des rêves de la guerre glorieuse. Dans les combats, l’attente boueuse, le souvenir douloureux de son foyer, les poilus de la Grande Guerre furent profondément éduqués à l’humilité. Mais ce n’était qu’un début. Pour ceux qui survécurent, il leur fallu jusqu’à la fin de leur vie, avaler la coupe de l’échec de leurs valeurs, à travers deux autres leçons.

Avant de rejoindre l’autre monde, ils durent vivre la défaite universelle que fut la seconde guerre mondiale, puis la révolution libertaire de mai 68 qui vint rejeter, à jamais pensa-t-elle, les valeurs de sa jeunesse.

Albert Dumas avait été un jeune sous-lieutenant de 19 ans en 1917. Durant la seconde guerre mondiale, il s’illustra dans le gaullisme et la résistance du renseignement. Le 11 novembre 1970, il se rendit au monument aux morts de sa ville, en France, pour la cérémonie commémorative des combattants des deux guerres mondiales. Or des jeunes étaient assis sur des bancs et assistaient de loin au salut rendu aux couleurs. Se croyant intelligents (un autre orgueil fut aussi leur lot), ils se mirent à les huer. Ils se moquaient grossièrement de leur dignité. Albert, scandalisé, s’approcha pour discuter. Et l’un des jeunes, avec une extrême violence, lui lança au visage le mot qui humilie : « Fasciste ».Monsieur, les fascistes, moi je les ai combattu ! » répondit Albert.

Il repartit découragé chez lui, ne comprenant pas encore vraiment pourquoi la génération qui montait, celle de ses petits-enfants, avait tendance à cracher à la face de leurs pères et grands-pères, leurs « valeurs criminelles de patrie, honneur, sacrifice, devoir ». Pourquoi exaltaient-ils les valeurs opposées ?

Fin du monde

Quel échec pour les patriotes de 14… Pour celui qui sait lire les signes des temps, il y a ici une application de la théologie de fin du monde. Ce fut, pour toute cette génération, une véritable souffrance mais surtout, pour qui sait lire l’action de Dieu, une véritable action de salut produite par les lois de Dieu. Beaucoup, grâce à cela, ont été sauvés, efficacement. Dès cette terre.

En 1990, Albert Dumas mourut. Il vit l’apparition glorieuse du Christ. Le Sauveur s’était fait accompagné de ses camarades de combats, ceux de son camp et ceux d’en face. Alors il comprit et renia pour toujours ce qui restait de la morgue nationaliste de sa jeunesse. Car il n’y a plus de boches, dans l’autre monde. Comment est-il possible de s’être ainsi massacrés alors qu’on est appelés à vivre ensemble auprès du même Dieu pour l’éternité.

Albert, devenu lucide, fit sienne lors de son entrée dans la lumière du Seigneur les anciennes paroles du prophète Isaïe 42, 15 : « Parole du Seigneur : Je vais ravager montagnes et collines, en flétrir toute la verdure ; je vais changer les torrents en terre ferme et dessécher les marécages. Je conduirai les aveugles par un chemin qu’ils ne connaissent pas, par des sentiers qu’ils ne connaissent pas je les ferai cheminer. Puis devant eux je changerai l’obscurité en lumière et les fondrières en surface unie. Cela, je le ferai, je n’y manquerai pas. »

Arnaud Dumouch, 7 janvier 2006

 

Tableau de l’artiste Éric Monticolo.
Tableau du peintre Éric Monticolo

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