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Mt  9  23-26

La glose. Après la guérison de l’hémorroïsse, vient la résurrection de la jeune fille que l’écrivain sacré raconte en ces termes : « Et lorsque Jésus fut arrivé dans la maison du chef de la synagogue. » — S. Chrys. (hom. 32.) Il est à remarquer que Notre-Seigneur semble user ici de lenteur, et qu’il s’entretient avec la femme qu’il vient de guérir pour laisser à la jeune fille le temps de mourir, et rendre ainsi plus éclatant le fait de sa résurrection. Il suivit la même conduite à l’égard de Lazare, qui demeura dans le tombeau jusqu’au troisième jour. « Et lorsqu’il eut vu les joueurs de flûte et une foule qui faisait grand bruit. » Nous avons là une preuve évidente que la jeune fille était morte. — S. Ambr. (sur S. Luc, 6.) En effet, c’était un usage chez les anciens de faire venir des joueurs de flûte pour exciter la douleur et faire couler les larmes aux funérailles des morts. — S. Chrys. (hom. 32.) Mais Jésus-Christ chassa tous ces joueurs de flûte, et fit entrer les parents de la jeune fille afin que l’on ne pût attribuer à un autre sa résurrection. Avant même de la ressusciter, il relève leur courage par ces paroles : « Retirez-vous, car la jeune fille n’est pas morte, mais elle dort. » — Raban. C’est-à-dire elle est morte à vos yeux, mais pour Dieu qui peut la ressusciter, elle n’est qu’endormie dans son corps comme dans son âme. — S. Chrys. Par ces paroles, le Sauveur apaise l’agitation intérieure de ceux qui étaient présents, et il leur montre avec quelle facilité il peut ressusciter les morts. Il tint le même langage à Lazare (Jn 11) : « Notre ami Lazare dort, » et il nous apprend ainsi à ne pas redouter la mort. Comme il devait mourir lui-même, il voulut, en rendant la vie à quelques morts, ranimer la confiance de ses disciples, et leur apprendre à supporter la mort avec courage. Car dès qu’il s’approche, la mort n’est plus qu’un sommeil. Or, en entendant ces paroles, ils se moquaient de lui, mais il ne leur en fait aucun reproche : car il voulait que cette dérision, les flûtes et toutes les autres circonstances fussent autant de preuves de la mort de cette jeune fille. Comme il arrive bien souvent que les hommes refusent de croire aux miracles lorsqu’ils sont opérés, il veut les convaincre auparavant par leurs propres aveux ; c’est ce qu’il fit encore à la mort de Lazare, lorsqu’il demanda : « Où l’avez-vous mis ? » Afin que ceux qui lui répondirent : « Venez et voyez » fussent forcés de croire que Lazare était véritablement mort, et qu’il l’a ressuscité.

S. Jérôme. Mais ceux qui couvraient ainsi d’indignes outrages le Sauveur qui allait ressusciter cette jeune fille, n’étaient pas dignes d’assister au fait mystérieux de sa résurrection ; c’est pourquoi l’Évangéliste ajoute : « Et après qu’on eut fait sortir tout le monde, il entra, lui prit la main, et la jeune fille se leva. » — S. Chrys. (hom. 32.) Il n’introduit pas dans son corps une âme nouvelle, mais il y fait rentrer celle qui en était sortie, et rappelle la jeune fille comme d’un sommeil, pour préparer ainsi les esprits à croire en la résurrection. Non-seulement il ressuscite cette jeune fille, mais il lui fait encore donner à manger, pour que tous soient bien convaincus que cette résurrection n’est pas une chose imaginaire, mais bien une réalité. — « Et le bruit s’en répandit dans tout le pays. » — La glose. Cette circonstance fait ressortir la grandeur et la nouveauté de ce miracle, en même temps qu’elle devient une preuve évidente et irréfragable de sa vérité.

S. Hil. (can. 9 sur S. Matth.) Dans le sens mystique, Notre-Seigneur entre dans la maison du chef de la synagogue, c’est-à-dire dans la synagogue elle-même, au moment ou les cantiques de la loi font entendre en son honneur des chants funèbres. — S. Jérôme. Jusqu’à ce jour la jeune fille repose morte dans la maison de son père, et ceux qui paraissent être les maîtres sont les joueurs de flûte qui font entendre des airs lugubres. La foule des Juifs n’est pas le peuple des croyants, c’est une foule tumultueuse. Mais lorsque la plénitude des nations sera entrée, alors tout Israël sera sauvé. (Rm 11.) — S. Hil. Afin qu’il fût bien démontré que le nombre des croyants était limité, la foule tout entière fut mise dehors. Le Sauveur aurait bien désiré qu’elle fût sauvée, mais en se moquant de ses paroles et de ses actions, elle se rendit indigne d’être témoin de la résurrection de cette jeune fille. — S. Jérôme. « Jésus lui prit la main, et la jeune fille se leva, » car la synagogue ne peut avoir part à la résurrection avant que les mains des Juifs n’aient été purifiées du sang dont elles sont souillées. — S. Hil. Le bruit de cette résurrection se répand dans toute cette contrée ; en effet, après que Jésus a sauvé ceux qu’il avait élus, ils vont publier les bienfaits du Christ et ses oeuvres.

Raban. Dans le sens moral, la jeune fille morte dans la maison, c’est l’âme qui est morte dans ses pensées. Le Sauveur dit qu’elle n’est qu’endormie, parce que ceux qui pèchent dans la vie présente peuvent encore ressusciter par la pénitence. Les joueurs de flûte, ce sont les flatteurs qui applaudissent à celle qui est morte. — S. Grég. (Moral. 17, 25.) La foule est mise dehors avant que la jeune fille soit ressuscitée, car tant que la multitude des intérêts temporels n’est pas chassée des plus secrètes parties du cœur, l’âme qui est morte au dedans ne peut ressusciter. — Raban. Notre-Seigneur ressuscite cette jeune fille dans la maison en présence d’un petit nombre de témoins, le jeune homme en dehors de la porte de la ville, et Lazare devant un grand nombre de spectateurs, parce qu’une faute publique exige un remède public ; tandis qu’une faute légère peut être effacée par une pénitence secrète et plus douce.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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