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Mt  2  10-11

La glose. Après avoir montré comment l’étoile s’était mise au service des Mages, l’Évangéliste nous apprend quelle fut la joie de ces derniers : « Lorsqu’ils virent l’étoile, ils furent transportés d’une joie extrême. » — S. Rémi. Et remarquez qu’il ne se contente pas de dire : « Ils furent dans la joie » mais : « Ils furent transportés d’une joie extrême. » S. Chrys. (sur S. Matth.) Ils furent transportés de joie, parce que leur espérance, loin d’être trompée, se trouvait affermie, et qu’ils ne s’étaient pas exposés inutilement aux fatigues d’un si long voyage : — La glose. On est transporté de joie quand on se réjouit pour Dieu, qui est la joie véritable. L’Évangéliste ajoute : « d’une grande joie, » parce que l’objet de cette joie était considérable. — S. Chrys. (sur S. Matth.) Le ministère rempli par cette étoile leur fit comprendre que la dignité du roi qui venait de naître surpassait de beaucoup celle de tous les rois de la terre. L’auteur sacré ajoute : « d’une joie extrême. » — S. Rémi. Il veut nous apprendre par là qu’on se réjouit beaucoup plus des choses qu’on retrouve que de celles qu’on n’a jamais perdues.

suite. « Et entrant dans la maison, ils trouvèrent l’enfant. » — S. Léon, pape. (serm. 4 sur l’Epiph.) Ils le trouvèrent petit de forme, réduit à avoir besoin du secours d’autrui, incapable de parler, ne différant en rien de la généralité des autres enfants ; car de même que des témoignages incontestables prouvaient qu’en lui se trouvait l’invisible majesté de Dieu, de même il devait être démontré que cette nature éternelle du Fils de Dieu s’était unie à la vérité de la nature humaine.

suite. « Avec Marie, sa mère. » — S. Chrys. (sur S. Matth.) Elle n’était pas couronnée du diadème, elle ne reposait pas sur un lit doré, elle avait à peine une simple tunique, non point pour orner son corps, mais pour le couvrir, le vêtir, et telle que pouvait en porter en voyage la femme d’un charpentier. Si donc ils étaient venus chercher un roi de la terre, la joie eût fait place chez eux à un sentiment de confusion, de ce qu’un si grand voyage était pour eux sans résultat. Mais comme le roi qu’ils cherchaient était le roi du ciel, bien qu’ils ne découvraient en lui rien de royal, contents du témoignage que lui rendait l’étoile, ils se réjouissaient à la vue de ce pauvre enfant dont l’Esprit saint leur dévoilait au fond du cœur la redoutable majesté ; c’est pour cela qu’ils se prosternèrent pour l’adorer, car si leurs yeux ne voient en lui qu’un homme, ils reconnaissent un Dieu. — Raban. Par une disposition providentielle, Joseph se trouvait alors absent, pour ne point donner aux Gentils l’occasion d’un soupçon injurieux. — La glose. Bien qu’ils aient suivi les usages de leur nation dans les dons qu’ils offraient au Sauveur, les Arabes trouvant en abondance dans leur pays l’or, l’encens et des parfums de toute espèce, cependant dans leur intention ces présents avaient une signification mystérieuse. Le texte sacré ajoute donc : « Ayant ouvert leurs trésors, ils lui offrirent pour présents de l’or, de l’encens et de la myrrhe. » — S. Grég. (hom. 10 sur les Evang.) L’or convient à la dignité royale, l’encens faisait partie des sacrifices offerts à Dieu, et la myrrhe sert à embaumer les morts… — S. Augustin. (Serm. sur l’Epiph.) Ils lui offrent de l’or comme à un roi puissant, l’encens comme à un Dieu, la myrrhe comme à celui qui devait mourir pour le salut de tous. — S. Chrys. (sur S. Matth.) Que les Mages ne comprissent pas alors la grandeur du mystère qui les faisait agir ainsi, ou la signification mystérieuse de chacun de leurs présents, peu importe, car la grâce qui leur avait inspiré toute cette conduite avait tout disposé suivant ses vues. — S. Rémi. il ne faut pas oublier que chacun des trois Mages ne présenta pas en particulier un seul de ces trois présents, mais que chacun d’eux les offrit tous les trois, proclamant ainsi tous les trois par la nature de leurs présents le roi, le lieu et l’homme. — S. Chrys. (hom. 7 sur S. Matth.) Que Marcion et Paul de Samosate rougissent donc, eux qui refusent de reconnaître ce qu’ont reconnu les Mages, qui ont donné naissance à l’Église, et qui ont adoré Dieu dans une chair mortelle. Que celui qu’ils adorent fût revêtu d’un corps mortel, les langes et la crèche le disent assez ; mais qu’ils aient adoré en lui non pas un simple mortel, mais un Dieu, nous en avons la preuve dans les présents qu’il était juste d’offrir à la divinité. Que les Juifs soient aussi couverts de honte, eux qui sont prévenus par les Mages, et qui ne se mettent pas en peine de venir du moins à leur suite.

S. Grég. (hom. 10.) On peut encore donner une autre interprétation de ces présents. L’or signifie la sagesse, au témoignage de Salomon : « Un trésor désirable se trouve sur les lèvres du Sage » (Pv 21, 20), l’encens qu’on brûle devant Dieu figure la vertu de la prière selon ces paroles : « Que ma prière se lève comme l’encens en votre présence ; la myrrhe est le symbole de la mortification de la chair. Nous offrons à ce roi nouveau-né l’or lorsque nous resplendissons devant lui de l’éclat de la sagesse ; nous lui offrons l’encens lorsque par la prière nous exhalons devant Dieu le parfum de nos hommages ; nous lui offrons la myrrhe en mortifiant par l’abstinence les vices de la chair. — La glose. Ces trois hommes qui offrent à Dieu leurs présents figurent les nations venues des trois parties du monde. Ils ouvrent leurs trésors en manifestant la foi de leurs cœurs par le témoignage qu’ils en donnent. Ils les ouvrent dans l’intérieur de la maison pour nous apprendre à ne pas étaler par vanité aux yeux du public le trésor d’une bonne conscience ; ils offrent trois présents, c’est-à-dire leur foi en la sainte Trinité. On peut dire encore qu’ils ouvrent les trésors des Écritures et qu’ils en tirent les trois sens historique, moral et allégorique ; ou bien la logique, la physique et la morale en tant qu’il les soumettent à la foi.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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