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Mt  1  2

S. Augustin. (de l’accord des Evang. liv. 2, ch. 1.) Saint Matthieu en commençant son évangile par la généalogie de Jésus-Christ, prouve par là qu’il a entrepris de nous raconter l’origine de Jésus-Christ selon la chair. Saint Luc au contraire qui se propose de nous le présenter surtout comme Prêtre chargé d’expier nos péchés, ne raconte la généalogie de Jésus-Christ qu’après son baptême, alors que saint Jean lui rendit ce témoignage : Voici celui qui efface les péchés du monde.

La suite des générations dans saint Matthieu nous représente Notre-Seigneur Jésus-Christ prenant sur lui nos péchés, et dans saint Luc, Notre-Seigneur effaçant ces mêmes péchés (cf. Lc 3, 23 : « Et Jésus avait alors trente ans commencés, étant comme l’on croyait, fils de Joseph ») ; c’est pour cela que saint Matthieu dresse cette généalogie en descendant, et saint Luc en remontant. Or saint Matthieu, qui raconte la génération de Jésus-Christ en commençant par ses premiers ancêtres, ouvre la série des générations par Abraham. — S. Ambr. (sur S. Luc.) En effet, Abraham fut le premier qui mérita que Dieu rendit témoignage à sa foi, parce qu’il crut à Dieu, et que sa foi lui fut imputée à justice (Gn 15, 16 ; Rm 4, 6 ; Gal 3, 1 ; Jc 3, 23). Il avait aussi droit à nous être représenté comme la souche de la génération du Christ, parce que le premier encore il reçut la promesse de l’établissement de l’Église par ces paroles : « En toi seront bénies toutes les nations de la terre. » David partage également cet honneur que Jésus soit appelé son fils, et la prérogative de voir la généalogie du Sauveur commencer par son nom. — S. Augustin. (Cité de Dieu, liv. 15, ch. 15.) L’Évangéliste S. Matthieu voulant graver dans la mémoire la génération de Jésus-Christ selon la chair par la série de ses aïeux, commence par Abraham et dit : « Abraham engendra Isaac. » Pourquoi ne dit-il pas : il engendra Ismaël qui fut l’aîné de ses enfants ? Il ajoute Isaac engendra Jacob. » Pourquoi n’a-t-il pas dit : Il engendra Esaü qui fut son premier-né ? C’est que ni par Ismaël, ni par Esaü on ne pourrait descendre jusqu’à David. — La glose. Cependant les frères de Juda sont comptés avec lui dans la génération, parce qu’ils font partie du peuple de Dieu, tandis qu’Ismaël et Esaü n’ont pas persévéré dans le culte d’un seul Dieu. — S. Chrys. (hom. 3 sur S. Matth.) Ou bien il fait mention des douze patriarches pour ôter tout prétexte à l’orgueil qui vient de la noblesse des aïeux. Car plusieurs d’entre eux eurent pour mères de simples servantes, mais tous furent également patriarches et chefs de tribu. — La glose. Juda est désigné nommément, parce que c’est de lui seul qu’est descendu le Seigneur.

S. Anselme. Chacun des aïeux du Christ doit nous rappeler non seulement leur histoire, mais encore une allégorie et une moralité : une allégorie en ce que tous ont été la figure du Christ ; une moralité, parce que chacun d’eux nous inspire la vertu par la signification de son nom ou par les exemples de sa vie. Ainsi Abraham dans plusieurs circonstances a été la figure du Christ et il l’a été de plus par son nom, car Abraham signifie père de plusieurs nations, et le Christ a été aussi le père de tous les fidèles (Ps 17, 40). Abraham sortit encore de sa famille pour aller habiter dans une terre étrangère, et le Christ abandonna le peuple juif pour aller chez les Gentils dans la personne de ses Apôtres. — S. Chrys. (sur S. Matth.) Isaac signifie ris. Or le rire des saints n’est pas l’éclat insensé qui sort des lèvres, mais la joie modérée d’une âme raisonnable. En cela il a été la figure du Christ, car de même qu’Isaac fut donné à ses parents dans leur extrême vieillesse pour être leur joie, et leur apprendre qu’il n’était pas l’enfant de la nature mais de la grâce, ainsi Jésus-Christ naquit dans les derniers temps d’une mère juive, pour être la joie de tous ; l’un naquit d’une vierge, l’autre d’une femme âgée, tous deux contre les lois et l’espérance de la nature. — S. Rémi. Le nom de Jacob signifie qui supplante, qui renverse, et il est dit du Christ : « Vous avez renversé sous moi ceux qui s’élevaient contre moi (Ps 17, 40). »

S. Chrys. (sur S. Matth.) Notre Jacob engendra douze apôtres non dans la chair, mais dans l’esprit, non de son sang, mais par sa parole. Juda signifie celui qui confesse, qui rend gloire, et en cela il était la figure de Jésus-Christ qui devait rendre gloire à son Père : « Je vous rends gloire, mon Père, Seigneur du ciel et de la terre. » — La glose. Au sens moral, Abraham par ses exemples est une figure de la vertu de foi, puisqu’il est dit de lui « Abraham crut à Dieu, et sa foi lui fut imputée à justice. » Isaac est la figure de l’espérance, car son nom signifie ris, et il fut en effet la joie de ses parents. Or c’est ce que fait également l’espérance en nous comblant de joie dans l’attente des biens éternels. Abraham engendra Isaac, parce que la foi est mère de l’espérance. Jacob est la figure de la charité, car la charité embrasse à la fois deux vies différentes : la vie active par l’amour du prochain, la vie contemplative par l’amour de Dieu. La vie active est figurée par Lia, la contemplative par Rachel. Lia signifie celle qui travaille, parce que la vie active suppose nécessairement le travail, Rachel le principe vu, car par la vie contemplative on voit Dieu qui est le principe de toutes choses. Jacob a pour aïeul et pour père Abraham et Isaac, parce que la charité naît de la foi et de l’espérance. En effet, ce que nous croyons, ce que nous espérons, nous ne pouvons nous empêcher de l’aimer.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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