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Mt  16  20-21

La glose. Après que Pierre a confessé que Jésus était le Christ, Fils du Dieu vivant, le Sauveur, ne voulant pas que ses disciples publient pour le moment cette vérité, leur commande de ne dire à personne qu’il était le Christ. — S. Jérôme. Lorsqu’il a envoyé précédemment ses disciples prêcher l’Évangile, il leur a commandé d’annoncer son avènement. Comment concilier cet ordre avec celui qu’il leur donne ici de ne pas publier qu’il est le Christ. Je crois donc qu’il y a une différence entre prêcher le Christ et prêcher Jésus-Christ ; le nom de Christ exprime en général la dignité, celui de Jésus est le nom propre du Sauveur. — Origène. Ou bien on peut dire que les Apôtres parlaient très peu de Jésus et seulement comme d’un homme étonnant et extraordinaire, mais sans annoncer qu’il était le Christ. Si l’on prétend que les Apôtres aient publié dès lors cette vérité, il faudra dire que le dessein du Sauveur était que les Apôtres ne donnassent d’abord de temps à autre qu’une légère idée de ce qu’il était, afin que dans l’intervalle ces premières notions du Christ eussent le temps de pénétrer dans l’esprit de leurs auditeurs. Ou bien il faut résoudre cette difficulté en disant que l’ordre qu’ils avaient reçu d’annoncer le Christ ne devait être accompli que dans les temps qui suivirent sa résurrection. La défense, au contraire, qu’il fait ici aux Apôtres est pour le temps actuel, car il était inutile de prêcher le Christ sans parler de sa croix. Il leur défend donc de dire à personne qu’il fut le Christ, et cependant il les préparait à prêcher plus tard qu’il était le Christ qui a été crucifié et qui est ressuscité d’entre les morts.

S. Jérôme. Que personne ne suppose que cette explication n’est que le fruit de notre invention, car le Sauveur lui-même nous indique dans ce qui suit les raisons de cette défense : « Dès lors Jésus commença à découvrir à ses disciples qu’il fallait qu’il souffrit, » etc. Voici le sens de ces paroles : Vous prêcherez mon nom lorsque j’aurai souffert ces tourments, car il ne servirait de rien d’annoncer publiquement le Christ et de faire connaître sa majesté au milieu des peuples qui seraient témoins quelque temps après de sa flagellation et de sa mort sur la croix.

S. Chrys. (hom. 54.) Si on arrache ce qui a déjà poussé des racines et qu’on veuille le planter de nouveau, il tiendra difficilement dans l’esprit d’un grand nombre ; mais, au contraire, si une vérité qui a jeté une fois ses racines n’est ébranlée, on lui voit prendre bientôt de grands accroissements. Or, le Sauveur s’étend longuement sur ces tristes prédictions pour ouvrir l’intelligence de ses disciples.

Origène. Remarquez que l’Évangéliste ne dit pas : Il commença à leur dire ou à leur enseigner, mais : « Il commença à leur découvrir, » car de même qu’on découvre et qu’on montre les choses extérieures, ainsi Notre-Seigneur rend sensibles les choses dont il parle. Or, je suis persuadé que le mystère de sa passion ne fut pas découvert aussi clairement à ceux qui virent de leurs yeux ses innombrables souffrances, qu’il le fut aux disciples dans le discours que Jésus leur adresse sur le mystère de sa passion et de sa résurrection. Et cependant il ne fit alors que commencer à leur découvrir ce mystère, et ce ne fut que plus tard, lorsqu’ils furent devenus capables, qu’il le leur développa tans sa plénitude, car tout ce que Jésus commence il le perfectionne. Il fallait qu’il allât à Jérusalem pour être immolé dans la Jérusalem d’ici-bas (dans la Jérusalem terrestre), mais il devait régner par sa résurrection dans la Jérusalem d’en haut, c’est-à-dire dans la Jérusalem céleste (Ga 4) ; car, après que Jésus-Christ fut ressuscité et beaucoup d’autres avec lui, ce n’est plus sur la terre, mais dans le ciel qu’il faut chercher Jérusalem, c’est-à-dire la maison de la prière. Il a beaucoup à souffrir de la part des anciens de la Jérusalem terrestre avant d’être glorifié par ceux qui jouissent de ses bienfaits, c’est-à-dire les anciens de la Jérusalem céleste (Ap 4, 40 ; 5, 8.19.14 ; 13, 16 ; 19, 4). Le troisième jour, il ressuscite d’entre les, morts et obtient à ceux qu’il a délivrés du démon la grâce d’être baptisés dans leur esprit, dans leur âme et dans leur corps, au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, de manière que ces trois jours soient perpétuellement présents à la mémoire de ceux qu’ils ont rendu enfants de lumière.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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