Accueil  >  Bibliothèque  >  La Chaîne d’or  >  Évangile selon saint Matthieu  >  chapitre 16, versets 22-23

Mt  16  22-23

Origène. Jésus ne faisais encore que découvrir à ses Apôtres le commencement de ces mystères, que déjà Pierre les regardait comme indignes du Fils du Dieu vivant, et comme s’il oubliait que le Fils du Dieu vivant ne peut faire aucune action qui mérite le blâme, il ose le reprendre de ce qu’il vient de dire : « Et Pierre, le prenant à part, » etc. — S. Jérôme. Nous avons souvent rappelé que Pierre fait preuve d’une ardeur excessive et d’un amour extraordinaire pour le Sauveur. Or, comme il ne veut pas voir détruit l’effet de sa confession et de la récompense qu’il en a reçue du Sauveur, et qu’il ne croit point que le Fils de Dieu puisse être mis à mort, il le prend dans son affection et le conduit à l’écart pour ne point paraître blâmer son Maître en présence des autres disciples. Il commence donc à le reprendre par un sentiment d’amour, et à le contredire en lui disant : « A Dieu ne plaise, Seigneur. » Ou suivant le texte grec qui est préférable : « Soyez vous favorable, cela ne vous arrivera pas. » — Origène. Comme si le Sauveur avait besoin de cette disposition favorable à son égard. Jésus, tout en acceptant ce témoignage d’affection, lui reproche son ignorance. « Mais Jésus, se retournant, dit à Pierre Retirez-vous derrière moi, Satan. » — S. Hil. Le Seigneur, qui connaît la nature des artifices du démon, dit à Pierre : « Retirez-vous derrière moi, » c’est-à-dire suivez l’exemple de ma passion. Il se retourne vers celui qui avait suggéré à Pierre les paroles qu’il venait de prononcer, et il ajoute : « Satan, vous m’êtes un sujet de scandale, » car il n’est pas convenable de rapporter à Pierre ce nom de Satan, et de faire tomber sur lui ce reproche de scandale après les promesses magnifiques de bonheur et de puissance qui lui ont été faites. — S. Jérôme. Pour moi, je ne verrai jamais une suggestion du démon dans l’erreur de l’Apôtre, erreur qui a pour cause un sentiment d’affection. Que le lecteur prudent veuille bien remarquer que cette béatitude et cette puissance ne lui sont pas données en ce moment, mais seulement promises pour l’avenir ; car si Jésus lui eût accordé immédiatement cette faveur, jamais cette grossière erreur n’eût trouvé accès dans son esprit.

S. Chrys. (hom. 54.) Qu’y a-t-il de surprenant que Pierre soit dans ces dispositions, puisque ce mystère ne lui avait pas été révélé. Voulez-vous être convaincu que la profession de foi qu’il vient de faire à l’égard du Christ n’est pas le fruit de ses propres pensées ? Voyez quel trouble lui inspire la perspective des choses qui ne lui ont pas été révélées. Il ne considère tout ce qui a rapport au Christ qu’à un point de vue tout terrestre et tout humain, et il lui semble que c’est une honte et une indignité pour le Sauveur d’être soumis aux souffrances et à la mort, et c’est pour cela que le Sauveur ajoute : « Vous ne goûtez pas les choses de Dieu, mais celles des hommes. » — S. Jérôme. C’est-à-dire c’est la volonté de mon Père et la mienne, que je meure pour le salut des hommes. Pour vous, vous ne considérez que votre volonté, vous ne voulez pas que le grain de froment tombe dans la terre pour produire beaucoup de fruits (Jn 12, 24), et puisque votre langage est opposé à ma volonté, vous méritez d’être appelé mon ennemi. En effet, le mot Satan signifie adversaire ou ennemi. Ce n’est pas cependant, comme plusieurs le pensent, que Pierre soit frappé de la même condamnation que Satan. Jésus dit à Pierre : « Retirez-vous derrière moi, Satan, » c’est-à-dire : Suivez-moi, vous qui êtes opposé à ma volonté, Il dit au contraire à Satan : « Retire-toi, Satan, » sans qu’il ajoute : derrière, de manière que l’on puisse sous-entendre : va dans le feu éternel. — Origène. (traité 1 sur S. Matth.) Jésus dit donc à Pierre : « Retirez-vous derrière moi, » parce qu’il avait cessé, par son ignorance, de marcher à la suite du Christ. Il l’appelle Satan à cause de cette même ignorance qui l’a mis en opposition avec Dieu. Cependant, heureux celui vers lequel se tourne le Christ, quand même ce serait pour le réprimander ! Mais pourquoi dit-il à Pierre : « Vous m’êtes un sujet de scandale, » alors que nous lisons dans le Psaume 118 : « Une paix abondante est le partage de ceux qui aiment votre loi, et il n’y a point de scandale pour eux. » Nous répondons que Jésus n’est pas le seul qui ne puisse être scandalisé, mais encore tout homme qui a dans le cœur la charité parfaite ; et cependant on peut être par ses actions ou par ses paroles un sujet de scandale pour cet homme, bien qu’il ne puisse en être victime.

Ou bien on peut dire qu’il appelle un sujet de scandale pour lui, tout fidèle qui pèche ; dans le sens de saint Paul, qui disait (2 Co 11) : « Qui est scandalisé sans que je sois brûlé de douleur ? »

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

Plan du site    |    Contact    |    Liens    |    Chapelle