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Mt  13  53-58

S. Jérôme. Après ces paraboles que Notre-Seigneur avait proposées au peuple et que les apôtres seuls avaient comprises, il vint dans sa patrie pour y enseigner plus ouvertement. C’est ce que l’Évangéliste rapporte en ces termes : « Lorsque Jésus eut achevé ces paraboles, » etc. — S. Augustin. (de l’accord des Evang., 2, 45.) Saint Matthieu passe de ces discours en paraboles à un autre sujet sans indiquer qu’il suit un ordre rigoureux d’autant plus que saint Marc (Mc 4) et saint Luc (Lc 8), en cela différents de saint Matthieu, paraissent avoir disposé leur narration d’une manière plus conforme à l’ordre chronologique des faits, en plaçant après ces paraboles les deux miracles du sommeil de Jésus dans la barque pendant la tempête et des démons chassés, miracles que saint Matthieu a entremêlés précédemment dans son récit.

S. Chrys. (hom. 49.) L’Évangéliste appelle ici Nazareth sa patrie ; il n’y fit pas beaucoup de miracles, ainsi qu’il le dit plus bas, mais il les multiplia dans Capharnaüm, où il développa en même temps sa doctrine qui ne devait pas moins les frapper d’admiration que ses miracles. — S. Rémi. Il enseignait dans les synagogues où les Juifs se rassemblaient en foule, parce qu’il était descendu du ciel sur la terre pour le salut d’un grand nombre. — « De sorte qu’étant saisis d’étonnement, ils disaient : D’où lui est venue cette sagesse et cette puissance ? » La sagesse se rapporte à sa doctrine, la puissance aux miracles qu’il opérait.

S. Jérôme. Aveuglement inconcevable des Nazaréens, ils s’étonnent que la sagesse possède la sagesse, et que la puissance fasse éclater la puissance (cf. 1 Co 1, 24). La cause de leur erreur est évidente ; ils ne voient dans Jésus que le fils d’un charpentier. — S. Chrys. (hom. 49.) Leur aveuglement et leur folie s’étendent à tout, ils cherchent à le rabaisser par celui qu’ils regardent comme son père ; cependant l’histoire des temps anciens leur offrait un grand nombre d’exemples d’enfants illustres nés de parents sans distinction : David était fils de Jessé, simple laboureur ; Amos était fils de bergers et berger lui-même. C’était au contraire une raison de lui témoigner plus d’honneur, puisque, malgré sa naissance si humble, il prêchait une doctrine si relevée, car il était évident quelle n’était pas le résultat d’une éducation tout humaine, mais un effet de la grâce divine. — S. Augustin. (Serm. pour la Nativ. de Notre-Seign.). Le Père du Christ est en effet ce divin charpentier qui a fait l’univers avec tout ce qu’il renferme, qui a donné le plan de l’arche de Noé et fait connaître à Moïse l’ordonnance du tabernacle, établi l’arche d’alliance ; divin charpentier, dis-je qui aplanit les intelligences raboteuses et retranche toutes les pensées orgueilleuses. — S. Hil. (can. 14.) Il était aussi le Fils de cet ouvrier qui dompte le fer par le feu, qui dissout toute la puissance du monde dans les ardeurs de son jugement, qui plie la matière aux usages de l’homme et qui donne à nos corps leur forme pour que les membres puissent remplir leurs divers offices et concourir aux oeuvres de la vie éternelle.

S. Jérôme. Après s’être trompés sur le père de Jésus, il n’est point surprenant qu’ils se trompent également sur ses frères : « Est-ce que sa mère ne s’appelle pas Marie et ses frères Jacques et Joseph ? » — S. Jérôme. (contre Helvid.) Ceux qu’ils appellent les frères du Seigneur sont les enfants de sa tante, Marie de Cléophas, femme d’Alphée et mère de Jacques et de Joseph : Cette Marie était aussi la mère de Jacques le Mineur. — S. Augustin. (Quest. évang., quest. 17 sur S. Matth.) Il n’est pas étonnant qu’on ait appelé frères du Seigneur tous ses parents du côté maternel, puisque les Juifs, qui pensaient que Joseph était son père, appellent également ses frères tous ceux qui étaient parents de Joseph. — S. Hil. Le Seigneur se voit donc méprisé à cause de ses parents, et quoique la sagesse de son enseignement et l’éclat de ses miracles dussent exciter leur admiration, ils ne peuvent croire que c’est Dieu qui agit ici dans l’homme, parce qu’ils cherchent à l’outrager en lui rappelant le métier de son père. Au milieu donc de tant de merveilles qu’il opérait sous leurs yeux, son humanité seule fait impression sur eux, et ils disent : « D’où lui viennent toutes ces choses ? »

« Et il leur était un sujet de scandale. » — S. Jérôme. Cette erreur des Juifs est la cause de notre salut et en même temps la condamnation des hérétiques ; ils s’obstinaient tellement à ne voir qu’un homme en Jésus-Christ, qu’ils le regardaient comme le fils d’un charpentier. — S. Chrys. (hom. 49.) Mais admirez ici la douceur de Jésus-Christ : il ne leur dit aucune injure, mais leur répond avec la plus grande modération : « Et Jésus leur dit : Un prophète n’est sans honneur que dans son pays et dans sa maison. » — S. Rémi. Il se donne le nom de prophète et c’est le nom que Moïse lui avait donné, lorsqu’il disait : « Dieu vous suscitera un prophète du milieu de vos frères. » (Dt 18) Remarquons ici que ce n’est pas seulement Jésus-Christ, le chef de tous les prophètes, mais encore Jérémie et Daniel, et les autres prophètes qui ont reçu plus d’honneur et de gloire parmi les étrangers qu’au milieu de leurs concitoyens. — S. Jérôme. En effet, il est presque dans la nature que les habitants d’un même pays se jalousent mutuellement ; ils ne considèrent pas les oeuvres actuelles de l’homme fait, ils ne se rappellent que les faiblesses de son enfance, comme s’ils n’avaient point eux-mêmes passé par les mêmes degrés pour arriver à la maturité de l’âge.

S. Hil. (can. 14.) Il déclare qu’un prophète est sans honneur dans sa patrie, parce qu’il ne devait recevoir que des mépris dans la Judée jusqu’au jour où il devait être condamné à la mort de la croix, et que ce n’est qu’au milieu des fidèles qu’il a été reconnu comme la vertu de Dieu. Il ne voulut point faire de miracles par suite de leur incrédulité, comme le remarque l’Évangéliste : « Et il ne fit pas là beaucoup de miracles, à cause de leur incrédulité. » — S. Jérôme. Ce n’est pas que leur incrédulité rendît ces miracles impossibles, mais il ne voulait pas que ces nombreux miracles fussent une cause de condamnation pour ses concitoyens. — S. Chrys. (hom. 49.) Mais puisqu’ils ne pouvaient s’empêcher d’admirer les prodiges qu’il opérait, pourquoi ne pas les multiplier parmi eux ? C’est que le Sauveur n’agissait point par ostentation et ne recherchait que l’utilité des autres ; or, il ne voyait pas ici cette utilité, il néglige donc ce qui lui est personnel pour ne pas augmenter leur culpabilité et leur châtiment. Mais pourquoi donc en fit-il quelques-uns ? Afin de leur ôter tout prétexte de dire : « Si vous aviez fait des miracles, nous aurions cru. » — S. Jérôme. On peut encore entendre ces paroles dans un autre sens, c’est-à-dire que Jésus a été méprisé dans sa maison et dans sa patrie (par le peuple juif), et qu’il n’y a fait que peu de miracles, afin qu’ils ne fussent pas entièrement inexcusables. Tous les jours, au contraire, il opère par ses Apôtres de plus grands prodiges au milieu des nations, moins pour la guérison des corps que pour le salut des âmes.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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