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Mc  14  61-65

Bède. Plus Jésus se tait devant ces faux témoins et devant ces prêtres qui ne méritent pas qu’il leur réponde, et plus le grand-prêtre dominé par la fureur, le presse de répondre afin de trouver à tout prix dans ses paroles un sujet d’accusation. " Alors le grand-prêtre se levant au milieu de rassemblée, " etc. Ce prince des prêtres, dont l’impatience égale la colère, irrité de ne trouver aucun chef d’accusation, se lève de son siège pour faire éclater par les mouvements de son corps la rage de son cœur. — S. Jérôme. Mais le Dieu Sauveur qui a sauvé le monde et si puissamment secouru le genre humain par sa bonté, se laisse conduire sans dire un mot, comme une brebis que l’on conduit à la boucherie (Is 53, 7 ; Ac 8, 22). " Il se tient en silence et ne dit pas le bien qu’il pouvait répondre. " (Ps 37, 3.) " Mais Jésus se taisait et ne répondait rien. " Le silence de Jésus expie la défense, c’est-à-dire l’excuse coupable d’Adam. — Théophile. Il se taisait, parce qu’il savait bien qu’ils ne tiendraient aucun compte de ses paroles ; c’est l’observation qu’il leur fait d’après le récit de saint Luc : " Si je vous le dis, vous ne me croirez point. " — " Le grand-prêtre l’interrogea de nouveau et lui dit : Etes-vous le Christ, le Fils du Dieu béni ? " Le grand-prêtre lui fait cette question, non pour s’instruire et croire, mais pour saisir dans la réponse du Sauveur matière à condamnation. Il lui demande : " Etes-vous le Christ, le Fils du Dieu béni ? " Il y avait beaucoup de christs, c’est-à-dire de personnes qui avaient reçu l’onction, comme les rois et les grands-prêtres, mais aucun d’eux n’était appelé : " Le Fils du Dieu béni, " du Dieu loué à jamais.

S. Jérôme. Ils attendaient pour un avenir éloigné celui qu’ils ne voyaient point si près d’eux ; de même qu’Isaac, dont les yeux obscurcis ne reconnaissaient point Jacob, que ses mains touchaient (Gn 27, 23), tout en lui annonçant pour l’avenir de magnifiques destinées : " Jésus lui répondit : Je le suis, " afin de leur ôter toute excuse. — Théophile. Il savait très-bien qu’ils ne croiraient pas en lui ; cependant il répond pour ne point leur donner lieu de dire : " S’il nous avait parlé, nous aurions cru en lui. " Or ce qui les condamne ouvertement, c’est qu’ils l’ont entendu et qu’ils n’ont pas cru en lui. — S. Augustin. (De l’acc. des Evang., 3, 6-7.) Suivant saint Matthieu, Jésus ne répondit point : Je le suis, mais : " Vous l’avez dit. " Saint Marc, en adoptant la première version : " Je le suis, " fait voir qu’elle a le même sens que cette autre : " Vous l’avez dit. "

" Et vous verrez un jour le Fils de l’homme assis à la droite de la Majesté divine, et venant sur les nuées du ciel. " — Théophile. C’est-à-dire, vous me verrez comme le Fils de l’homme assis à la droite du Père, car ici la puissance signifie le Père. Or le Fils de l’homme ne viendra point sans son corps, mais il apparaîtra au jour du jugement tel qu’il est apparu à ceux qui l’ont crucifié. Si donc, qui que vous soyez, païen, juif ou hérétique, le mépris, l’infirmité et la croix vous paraissent outrageantes pour le Sauveur, rappelez-vous que c’est par là que le Fils de l’homme s’est élevé jusqu’à la droite du Père, et qu’il redescendra dans sa Majesté sur les nuées du ciel. — S. Jérôme. Le grand-prêtre lui demande s’il est le Fils de Dieu ; Jésus répond qu’il est le Fils de l’homme, pour nous faire comprendre que le Fils de Dieu et le Fils de l’homme sont une seule et même personne, et afin que nous ne soyons pas tentés de faire de la Trinité une quaternité, mais que nous admettions que l’homme est en Dieu et Dieu en l’homme, Jésus dit : " Assis à la droite de la puissance, " c’est-à-dire, régnant au sein d’une vie éternelle et d’une puissance toute divine : " Et venant sur les nuées au ciel " il est monté au ciel sur une nuée, il en redescendra sur une nuée, c’est-à-dire, qu’il est monté au ciel revêtu de ce corps qu’il avait pris dans le sein de la Vierge, et qu’il viendra juger le monde avec l’Eglise, qui est son corps, sa plénitude, et qui est si variée dans ses membres.

S. Léon, pape. (serm. 6 sur la Pass.) Caïphe, pour faire éclater l’envie que lui inspirent les paroles qu’il vient d’entendre, déchire ses vêtements, et sans savoir ce que signifie cet acte de folie, il se dépouille de l’honneur du sacerdoce, oubliant ce précepte de la loi au grand-prêtre : " Il n’ôtera point la tiare de son front et il ne déchirera point ses vêtements. " (Lv 21, 10) " Aussitôt le grand-prêtre, déchirant ses vêtements, leur dit : Qu’avons-nous encore besoin de témoins ? Vous avez entendu le blasphème, " etc. — Théophile. Le grand-prêtre se conforme ici à l’usage des Juifs qui déchiraient leurs vêtements dans toutes les afflictions et les malheurs qui venaient fondre sur eux. C’est donc pour faire ressortir l’énormité du blasphème qu’il attribue à Jésus-Christ que le grand-prêtre déchire ses vêtements.

Bède. Mais c’est par l’effet d’un dessein mystérieux et plus profond que dans la passion du Seigneur, ce grand-prêtre des Juifs déchire ses vêtements, c’est-à-dire l’Ephod (Jg 7, 5 ; Ex 25, 7 ; 1 R 2, 28), tandis que la tunique du Seigneur ne put être partagée par les soldats mêmes qui le crucifièrent. C’était une figure que le sacerdoce des Juifs allait être détruit en punition des crimes des prêtres eux-mêmes, tandis que l’Eglise, souvent appelée la robe du Sauveur, résisterait à tons les efforts que l’on ferait pour la déchirer.

Théophile. La raison pour laquelle le sacerdoce des Juifs fut retranché et détruit, c’est la condamnation à mort de Jésus-Christ : " Ils le jugèrent tous digne de mort, " dit l’Evangéliste. — S. Jérôme. Ils le condamnent à mort comme un criminel, afin que par cette condamnation il pût expier nos propres crimes, " Alors quelques-uns commencèrent par lui cracher au visage. " Par ces crachats qui couvrent sa face adorable, il lave la face intérieure de notre âme ; le voile qu’ils jettent sur son visage fait disparaître le voile qui couvrait nos cœurs ; les soufflets qu’ils déchargent sur sa tête, guérissent la tête du genre humain, c’est-à-dire Adam ; les soufflets que leurs mains appliquent sur ses joues, nous méritent de pouvoir le louer des mains et des lèvres, selon la prédiction du Roi-prophète : " Nations, frappez toutes des mains. " (Ps 46) — Bède. En lui disant : " Prophétise qui t’a frappé ; " ils veulent outrager en lui la qualité de prophète qu’il s’est donnée aux yeux du peuple. — S. Augustin. (De l’acc. des Evang., 3, 6.) Or, Notre-Seigneur a souffert tous ces outrages jusqu’au matin dans la maison du grand-prêtre où il fut conduit tout d’abord.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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