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Lc  5  8-11

Bède. Pierre était dans l’admiration des dons de Dieu, et plus il avait éprouvé de crainte, moins il était porté à la présomption : « Ce que voyant Simon Pierre, il tomba aux pieds de Jésus, en disant : Eloignez-vous de moi, Seigneur, parce que je suis un pécheur. » — S. Cyrille. Rappelant en son souvenir les fautes qu’il avait commises, il est saisi de crainte et d’effroi, il n’ose croire, impur qu’il est, qu’il puisse recevoir celui qui est la pureté même ; car il avait appris de la loi, que ce qui est souillé doit être séparé de ce qui est saint (Lv 10, 10 ; cf. Ez 22, 26 ; 44, 23). — S. Grég. de Nysse. Dès que Jésus eut ordonné de jeter les filets, on prit le nombre de poissons que lui, le Seigneur de la mer et de la terre, avait déterminé ; car la voix du Verbe est toujours une voix de puissance, et c’est par son commandement, que l’origine du monde, la lumière et les autres créatures sortirent du néant. À la vue de ce miracle, Pierre est dans l’admiration : « Il était plongé dans la stupeur, lui et tous ceux qui étaient avec lui. » — S. Augustin. (de l’acc. des Evang., 2 17.) Saint Luc ne fait point mention d’André, bien qu’il fût dans cette barque, d’après le récit de saint Matthieu et de saint Marc.

« Jésus dit à Simon : Ne craignez point. » — S. Ambr. Et vous aussi, dites à Jésus : Eloignez-vous de moi, parce que je suis un pécheur, et Dieu vous répondra : « Ne craignez point, » confessez votre péché au Seigneur qui est disposé à vous pardonner. Vous voyez combien il est bon, lui qui daigne accorder à des hommes le pouvoir de communiquer la vie : « Désormais, dit-il à Simon, vous serez pêcheurs d’hommes. » — Bède. C’est à Pierre que cette prérogative est spécialement accordée ; le Seigneur lui explique le sens mystérieux de cette pêche miraculeuse, c’est-à-dire qu’il prendra un jour des hommes par ses discours, comme il vient de prendre des poissons dans ses filets ; et toute la suite de ce fait miraculeux montre ce qui se fait tous les jours dans l’Église, dont Pierre est ici la figure. — S. Chrys. (Hom. 14 sur S. Matth.) Considérez la foi et l’obéissance des Apôtres. Au milieu même des occupations de la pèche (et vous savez combien les pêcheurs sont avides du succès de leur pêche), dès qu’ils entendent l’ordre du Sauveur, sans aucun délai, ils quittent tout, et le suivent. Telle est l’obéissance que Jésus-Christ demande de nous, elle doit être notre premier soin, au milieu même des diverses nécessités de la vie : « Et, aussitôt, ramenant leurs barques à terre. » etc. — S. Augustin. (de l’acc. des Evang.) Le récit de saint Matthieu et de saint Marc est ici beaucoup plus court que celui de saint Luc, qui raconte le fait dans tous ses détails. Il y a d’ailleurs entre les deux récits cette différence que, d’après saint Luc, c’est à Pierre seul que le Sauveur aurait dit : « Désormais vous serez pécheur d’hommes, » tandis que suivant les deux autres Évangélistes, c’est aux deux frères que Jésus aurait adressé ces paroles. Mais Notre-Seigneur a pu très bien les dire d’abord à Pierre seul, surpris et étonné de la grande quantité de poissons qu’on avait pris, comme saint Luc paraît l’insinuer, et les avoir redites ensuite aux deux frères, ainsi que le racontent les deux premiers Évangélistes. Ou bien encore, on peut entendre que la pèche miraculeuse, racontée par saint Luc, arriva en premier lieu, mais sans que les deux disciples fussent dès lors appelés par le Seigneur Jésus. Il se contenta de prédire à Pierre qu’il serait un jour pêcheur d’hommes. On peut donc légitimement supposer qu’ils retournèrent au métier de la pêche, et qu’alors eut lieu le fait raconté par saint Matthieu et saint Marc ; alors, en effet, ils ne ramenèrent pas leurs barques à terre, avec la pensée de retourner à leurs anciennes occupations, mais ils suivirent Jésus en obéissant pleinement à l’ordre qu’il leur avait donné. Une autre difficulté se présente ; si, d’après saint Jean, ce fut sur les bords du Jourdain que Pierre et André se mirent à la suite de Jésus, comment les autres Évangélistes peuvent dire que c’est dans la Galilée qu’il les trouva se livrant à la pèche, et qu’il les appela à l’apostolat ? Nous répondons que lorsqu’ils virent le Seigneur sur les bords du Jourdain, ils ne s’attachèrent pas inséparablement à lui, ils connurent seulement qu’il était le Messie, et pleins d’admiration pour lui, ils retournèrent à leurs occupations.

S. Ambr. Dans le sens allégorique, Pierre, en disant : « Seigneur, éloignez-vous de moi, » refuse de reconnaître que ceux qu’il prend dans les filets de ses enseignements soient sa conquête et son butin. Vous aussi, n’hésitez pas à renvoyer à Dieu le bien qui est en vous, puisque c’est Dieu qui vous communique ses propres dons — S. Augustin. (Quest. évang.) Ou bien dans un autre sens, Pierre représente l’Église remplie d’hommes charnels, quand il dit au Seigneur : « Eloignez-vous de moi, parce que je suis un pécheur. » L’Église, remplie de cette foule d’hommes charnels et presque submergée par leurs moeurs dépravées, semble éloigner d’elle le règne des hommes spirituels (dont la personne de Jésus-Christ est la plus haute représentation.) Ce n’est point de bouche que les hommes tiennent ce langage aux vertueux ministres de Dieu pour les éloigner d’eux, c’est par la voix de leurs moeurs et de leurs actions, qu’ils les pressent de se retirer pour se soustraire à la direction des bons. Et leurs instances sont d’autant plus vives, qu’ils leur témoignent en même temps de l’honneur et du respect. Pierre figurait ce respect, en se jetant aux pieds du Seigneur, et leurs moeurs, en disant : « Eloignez-vous de moi. » — Bède. Or, le Seigneur dissipe la crainte des hommes charnels qui, tremblant pour quelques-uns à la vue de leur conscience coupable, ou découragés par le spectacle de l’innocence des autres, redouteraient d’entrer dans la voie de la sainteté. — S. Augustin. (Quest. évang.) Le Seigneur, en ne se rendant pas à leurs désirs, apprend aux hommes vertueux et spirituels à ne pas se laisser aller au désir d’abandonner le ministère ecclésiastique pour mener une vie plus calme et plus tranquille, parce qu’ils ne peuvent supporter les désordres de la foule. Ils ramènent leurs barques à terre, et quittent tout pour suivre Jésus ; et en cela ils figurent la fin des temps, où ceux qui se seront attachés à Jésus-Christ quitteront pour toujours la mer agitée du monde.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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