Accueil  >  Bibliothèque  >  La Chaîne d’or  >  Évangile selon saint Luc  >  chapitre 2, versets 1-5

Lc  2  1-5

Bède. Le Fils de Dieu ayant résolu de paraître au monde dans une chair mortelle, voulut naître d’une vierge et montrer ainsi combien la gloire de la virginité lui était chère ; il voulut aussi naître dans un temps de paix générale, parce qu’il devait enseigner aux hommes à chercher la paix, et qu’il daigne visiter ceux qui aiment la paix. Quelle preuve plus évidente de cette paix universelle que ce dénombrement de tout l’univers sous l’empereur Auguste, qui, vers le temps de la naissance du Sauveur, après avoir terminé les guerres par toute la terre, régna pendant douze ans au milieu d’une paix si profonde, qu’il semble avoir accompli à la lettre la prédiction du prophète Isaïe (Is 2, 4) ? L’Évangéliste commence donc en ces termes : « Or, il arriva en ces jours, qu’il parut un édit », etc. — S. Grég. (ou Métaphraste et le moine Alexandre, Ch. des Pèr. gr.) Remarquez encore que Jésus-Christ vient au monde lorsque le sceptre de la souveraineté n’est plus entre les mains des Juifs, mais entre celles des empereurs romains dont ils sont devenus tributaires. Ainsi se trouve accomplie la prophétie qui annonçait que le sceptre ne sortirait point de Juda, ni le prince de sa postérité, jusqu’à ce que vint celui qui devait être envoyé. (Gn 49.) Ce fut la quarante-deuxième année du règne de César-Auguste que parut cet édit qui ordonnait de procéder au recensement de tout l’univers pour établir le paiement des impôts. L’empereur Auguste confia le soin de ce dénombrement à Cyrinus, qu’il avait nommé gouverneur de la Judée et de la Syrie. « Ce premier dénombrement se fit, » etc. — Bède. Ces paroles signifient que ce dénombrement fut le premier de ceux qui s’étendirent à tout l’univers, puisque plusieurs parties du monde avaient déjà été soumises à ce dénombrement ; ou bien que l’opération du recensement commença lorsque Cyrinus fut envoyé en Syrie. S. Ambr. L’Évangéliste fait mention du nom du gouverneur, et avec raison, pour bien préciser l’époque dont il parle ; si, en effet, on inscrit en tête des contrats de vente le nom des consuls, n’est-il pas bien plus juste de déterminer d’une manière certaine, par cette inscription, le temps de la rédemption du monde ?

Bède. Ce dénombrement, par une disposition divine, ordonnait à chacun de se rendre dans son pays : « Et tous allaient se faire enregistrer dans sa ville. » Dieu le voulut ainsi, afin que la conception et la naissance du Seigneur ayant lieu dans deux endroits différents, il pût échapper plus facilement à la fureur du perfide Hérode : « Alors Joseph partit aussi de Galilée, » etc. — S. Chrys. (pour la nativ. de J.-C.) En publiant cet édit, l’empereur Auguste ne fût que l’instrument de la Providence divine, qui voulait qu’il secondât ainsi la présence de son Fils unique à Bethléem ; car cet édit amenait nécessairement sa mère dans cette ville prédite par les prophètes, c’est-à-dire à Bethléem de Juda : « Joseph vint en Judée, à la ville de David, appelée Bethléem. » — S. Grég. (ou Irénée, cont. les hér., 3, 2.) L’Évangéliste désigne cette ville sous le nom de ville de David, pour nous apprendre que la promesse que Dieu avait faite à David (que le Roi éternel sortirait de sa race) (cf. 2 R 7, 12 ; Ps 131, 11), se trouvait accomplie ; c’est aussi pour cela qu’il ajoute : « Parce qu’il était de la maison et de la famille de David. » Par là même que Joseph était de la race de David, l’Évangéliste prouvait que la Vierge en descendait également, puisque la loi divine ordonnait que les mariages fussent contractés dans la même famille, il se contente donc d’ajouter : « Avec Marie son épouse, » etc. — S. Cyrille. (Ch. des Pèr. gr. Comme préc.) L’auteur sacré dit : sa fiancée, insinuant que Joseph et Marie n’étaient que fiancés au moment de la conception ; car cette conception s’est faite toute entière en dehors de l’action de l’homme.

S. Grég. (hom. 8 sur les Evang.) Dans le sens mystique, le dénombrement du monde s’opère lorsque le Seigneur est sur le point de naître, parce qu’on allait voir paraître dans une chair mortelle celui qui inscrivait le nom de ses élus sur les livres de l’éternité. — S. Ambr. Il ne s’agit extérieurement que d’un dénombrement profane ; mais nous y voyons s’accomplir le recensement spirituel qui se fait, non pour le roi de la terre, mais pour le roi des cieux. La profession de la foi chrétienne, c’est le recensement des âmes ; l’antique recensement de la synagogue n’existe plus, le nouveau recensement de l’Église chrétienne lui succède. Enfin ce dénombrement doit s’étendre à tout l’univers, n’est-ce pas vous dire que ce n’est pas le dénombrement d’Auguste, mais celui de Jésus-Christ ? car qui pouvait décréter le recensement du monde entier, si ce n’est le Maître souverain de tout l’univers. La terre, en effet, est à Dieu (Ps 23), et non pas à César. — Bède. Il remplit aussi parfaitement la signification du nom d’Auguste, puisqu’il a tout à la fois la volonté et la puissance nécessaires pour augmenter le nombre des siens. — Théophile. Il convenait que le Christ remplaçât la religion du polythéisme par le culte d’un seul Dieu. — Origène. (hom. 11.) Si nous voulons y faire attention, nous découvrirons la signification mystérieuse de l’inscription du Christ dans le dénombrement de l’univers. Il fut inscrit sur le registre commun à tous, pour les sanctifier tous ; il fut compris dans le dénombrement de tout l’univers, pour entrer ainsi en communion avec tous les hommes. — Bède. De même qu’alors sous l’empire d’Auguste et le gouvernement de Cyrinus, chacun allait dans son pays pour s’y faire enregistrer et y déclarer ses biens ; de même aussi sous l’empire de Jésus-Christ, qui nous gouverne par les docteurs (chefs de son Église), nous devons nous soumettre au recensement qui a pour objet la pratique de la justice. — S. Ambr. C’est donc ici le premier recensement, mais le recensement des âmes. Tous viennent s’y soumettre, parce que nul n’en est excepté. Ils obéissent, non à la proclamation des officiers publics, mais à la prédiction du prophète qui, bien des siècles à l’avance, avait dit (Ps 46) : « Nations, applaudissez toutes des mains, chantez la gloire de Dieu par des cris d’allégresse, parce que le Seigneur est élevé et redoutable, qu’il est le roi suprême sur toute la terre. » Et pour qu’on sache bien que c’est ici le recensement spirituel de la justice, Marie et Joseph, c’est-à-dire un juste et une vierge viennent s’y soumettre, l’un qui devait être le gardien du Verbe, l’autre qui allait l’enfanter. — Bède. Notre ville et notre patrie, c’est le repos bienheureux vers lequel nous devons nous avancer chaque jour par un progrès continuel dans les vertus. Chaque jour la sainte Église, à la suite de ses docteurs, se dégage du cercle toujours agité de la vie mondaine (ce que signifie le mot Galilée), pour venir dans la ville de Juda (c’est-à-dire de la confession et de la louange), et y payer au roi éternel le tribut de sa piété. A l’exemple de la bienheureuse Vierge Marie, elle nous a conçus par l’opération de l’Esprit saint ; épouse d’un autre, elle est fécondée par ce divin Esprit, elle est unie visiblement au souverain pontife, qui est son chef, mais elle est comblée des dons et de la vertu invisible de l’Esprit saint ; son nom même nous indique que le zèle du Maître qui enseigne ne peut rien, si l’assistance du secours divin ne vient ouvrir le coeur de ceux qui sont enseignés.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

Plan du site    |    Contact    |    Liens    |    Chapelle