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Lc  22  19-20

Bède. Après avoir accompli les cérémonies solennelles de la pâque ancienne, le Sauveur institue la nouvelle pâque, et commande à son Église de la célébrer en mémoire du mystère de la rédemption. Établi prêtre selon l’ordre de Melchisédech (Ps 109, et He 7), il remplace la chair et le sang de l’agneau par le sacrement de son corps et de son sang sous les espèces du pain et du vin : « Et ayant pris du pain il rendit grâces. » Il avait déjà rendu grâces en mettant fin à la pâque ancienne, et il nous enseigne ainsi par son exemple à louer, à glorifier Dieu au commencement comme à la fin de chacune de nos bonnes oeuvres. « Il le rompit. » Il rompt lui-même le pain qu’il donne à ses disciples, pour montrer que son corps ne sera brisé dans sa passion que par sa volonté : « Et il le leur donne en disant : Ceci est mon corps qui est donné pour vous. » — S. Grég. de Nysse. (sur le bapt. de Jésus-Christ.) Avant la consécration, le pain est un pain ordinaire, mais aussitôt le mystère de la consécration, il devient et il est appelé le corps de Jésus-Christ.

S. Cyrille. Ne doutez point de cette vérité, puisque le Fils de Dieu vous dit clairement : « Ceci est mon corps. » Mais plutôt recevez avec foi les paroles du Sauveur, car il est la vérité et ne peut mentir. C’est donc une erreur autant qu’une folie, de dire que l’effet de la consécration mystérieuse cesse, lorsqu’on réserve pour le jour suivant quelques fragments du pain consacré, car aucun changement ne se fait dans le corps sacré de Jésus-Christ, et il conserve toujours la vertu de la consécration aussi bien que la grâce qui donne la vie (Liv. 4 sur Jn 14). Car la vertu vivifiante de Dieu le Père, c’est le Verbe, son Fils unique, qui s’est fait chair sans cesser d’être le Verbe, et qui a communiqué à sa chair une vertu vivifiante (chap. 23). Si vous trempez un peu de pain dans une liqueur quelconque, il s’imprègne aussitôt du goût de cette liqueur. C’est ainsi que le Verbe de Dieu, source de vie, communique cette vertu vivifiante à sa chair par l’union étroite qu’il a contractée avec elle. Pouvons-nous en conclure que notre corps a part aussi à cette vertu vivifiante, parce que la vie de Dieu est en nous, et que le Verbe de Dieu demeure dans notre âme ? Non, car il y a une différence entre la participation que le Fils de Dieu nous donne à sa vertu lorsqu’il demeure en nous, et l’union étroite par laquelle il s’est incarné dans le corps qu’il a pris dans le sein de la vierge Marie, et dont il a fait son propre corps. Il était convenable, en effet, que le Fils de Dieu s’unit à nos corps par sa chair sacrée et son sang précieux que nous recevons sous les espèces du pain et du vin, pour nous communiquer une bénédiction vivifiante. Nous aurions eu horreur de la chair et du sang placés sur les saints autels, Dieu, plein de condescendance pour notre faiblesse, a donc communiqué aux dons offerts une vertu vivifiante en les changeant véritablement en sa propre chair, afin que ce corps vivifiant soit en nous comme une semence de vie, il ajoute : « Faites ceci en mémoire de moi. » — S. Chrys. (hom. 46 sur S. Jean.) Jésus-Christ a institué ce mystère pour nous faire contracter avec lui une alliance plus étroite, et nous manifester toute l’étendue de son amour ; c’est pour cela que, non seulement il se rend visible à ceux qui désirent le voir, mais encore qu’ils les laissent le toucher, le manger, l’embrasser et rassasier leurs saints désirs. Nous sortons donc de cette table, semblables à des lions qui respirent la flamme, et devenus terribles au démon. — S. Basile. (Moral., règl. 21, chap. 3, et régl. abrég., quest. 172.) Apprenez à quelles conditions il nous est permis de manger le corps de Jésus-Christ, c’est-à-dire, en mémoire de l’obéissance qu’il a portée jusqu’à la mort, de sorte que ceux qui vivent, ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui est mort et ressuscité pour eux. (2 Co 5, 45.) — Théophile. Il est question dans saint Luc de deux coupes, l’une dont Jésus dit plus haut : « Prenez-la et distribuez-la entre vous ; » la seconde qu’il distribue lui-même à ses disciples après la fraction et la distribution du pain, et dont il est dit : « De même le calice après le souper. » — Bède. Il faut sous-entendre : Il leur donna, afin que la phrase soit complète. — S. Augustin. (De l’acc. des Evang., 3, 1.) Ou encore, saint Luc parle deux fois de la coupe, d’abord avant que Jésus distribuât le pain, et une seconde fois lorsqu’il l’eût distribué ; ce qu’il en dit en premier lieu, il le fait par anticipation, selon sa coutume, et il raconte ensuite en son temps ce dont il n’avait point parlé précédemment ; or, en réunissant ces deux parties, nous avons le même récit que nous donne saint Matthieu et saint Marc. — Théophile. Le Sauveur appelle ce calice le calice du Nouveau Testament : « Ce calice est le Nouveau Testament en mon sang qui sera répandu pour vous. » Il nous apprend ainsi que le Nouveau Testament commence dans son sang. En effet, dans l’Ancien Testament, le sang des animaux vint consacrer la promulgation de la loi, et maintenant le sang du Verbe de Dieu est pour nous le signe sacré de la nouvelle alliance. Ces paroles : « Qui sera répandu pour vous, » ne signifient pas que Jésus-Christ n’ait donné son corps et répandu son sang que pour les Apôtres seuls, car il a donné l’un et l’autre pour le salut du genre humain tout entier. La pâque ancienne avait pour objet la délivrance de la servitude d’Égypte, le sang de l’agneau avait été versé pour sauver de la mort les premiers nés des Hébreux ; la pâque nouvelle a pour fin la rémission des péchés, et le sang de Jésus-Christ est versé pour le salut éternel de ceux qui sont consacrés au service de Dieu. — S. Chrys. (hom. 46 sur S. Jean.) Ce sang imprime en nous l’image auguste de notre roi, il préserve de toute flétrissure la noblesse de notre âme, il pénètre notre coeur de sa divine rosée, et lui inspire une force surhumaine. Ce sang met en fuite les démons et fait descendre en nous les anges et le Seigneur des anges ; ce sang répandu sur la terre l’a purifiée et lui a ouvert les portes des cieux. Ceux qui participent à ce sang divin sont associés aux vertus des cieux, revêtus du manteau royal de Jésus-Christ, ou plutôt revêtus de ce divin roi lui-même. Or, si vous approchez de lui avec un coeur pur, il sera pour vous un principe de grâce et de salut ; mais si vous osez vous présenter devant lui avec une conscience coupable, vous commettez un sacrilège et vous le recevez pour votre condamnation et votre supplice. En effet, si ceux qui profanent la pourpre royale sont punis du même châtiment que ceux qui la mettent en pièces, est-il contraire à la raison de dire que ceux qui reçoivent le corps de Jésus-Christ dans une conscience souillée, méritent le même supplice que ceux qui l’ont percé de clous ? — Bède. Comme le pain a pour but de fortifier notre corps, et le vin de produire le sang dans nos membres, l’un, le pain, se rapporte au corps de Jésus-Christ, et le vin à son sang. Mais aussi comme nous devons demeurer en Jésus-Christ, et que Jésus-Christ doit demeurer en nous, on mêle au vin de l’eau dans le calice du Seigneur, car au témoignage de l’apôtre saint Jean, les eaux sont la figure des peuples (Ap 17). Le Sauveur distribue d’abord le pain, et puis ensuite le calice ; en effet, dans la vie spirituelle, il faut commencer par les actions laborieuses et pénibles qui sont comme le pain, non seulement parce que nous ne devons manger notre pain qu’à la sueur de notre front (Gn 3), mais parce que le pain quand on le mange est d’une déglutition tant soit peu difficile. Ensuite aux fatigues de cette vie laborieuse, succède la joie produite par la grâce divine dont le calice est la figure. — Bède. Les Apôtres communièrent au corps de Jésus-Christ après la cène, parce qu’il fallait d’abord accomplir et terminer la pâque figurative avant de célébrer les mystères de la véritable pâque. Mais depuis, pour l’honneur d’un si grand sacrement, l’autorité de l’Église nous a ordonné de prendre tout d’abord cette nourriture spirituelle avant tout aliment terrestre. — Eutych. Patriar. Or, celui qui communie reçoit tout le corps et tout le sang du Seigneur, alors même qu’il ne reçoit qu’une partie des espèces consacrées ; car de même qu’un sceau imprime son empreinte tout entière sur plusieurs choses à la fois, et demeure intégralement le même après l’avoir communiquée ; de même encore qu’une seule et même parole se fait entendre à un grand nombre, nous devons croire aussi sans hésiter que le corps et le sang du Seigneur sont tout entiers dans tous ceux qui communient. Quant à la fraction du pain consacré, elle est une figure de la passion.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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