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Lc  15  8-10

S. Chrys. (Ch. des Pèr. gr.) La parabole précédente où le genre humain était comparé à une brebis égarée, nous apprenait que nous sommes les créatures du Dieu très-haut, qui nous a faits, car nous ne nous sommes pas faits nous-mêmes, et nous sommes les brebis de sa bergerie. (Ps 94.) Le Sauveur à cette première parabole en ajoute une seconde, qui nous rappelle que nous avons été faits a l’image et à la ressemblance d’un roi, c’est-à-dire à l’image et à la ressemblance du Dieu tout-puissant, car la drachme est une pièce de monnaie qui porte l’empreinte de la figure du roi : « Ou quelle est la femme qui ayant dix drachmes, si elle en perd une, » etc. — S. Grég. (hom. 34, sur les Evang.) Celui dont le pasteur était la figure nous est encore représenté par cette femme ; c’est Dieu lui-même, c’est la sagesse de Dieu. Il a créé les anges et les hommes pour qu’ils puissent le connaître, et il les a faits à sa ressemblance. Il avait dix drachmes, parce qu’il y a neuf choeurs des anges, et que pour rendre complet le nombres des élus, l’homme a été créé le dixième. — S. Augustin. (quest. Evang., si, 33.) Ou bien ces neuf drachmes comme les quatre-vingt-dix-neuf brebis représentent ceux qui par un sentiment de présomption se préfèrent aux pécheurs repentants, car il manque une unité au nombre neuf pour faire dix, et au nombre quatre-vingt-dix-neuf pour faire cent, et c’est à cette unité qu’il compare tous ceux qui obtiennent la réconciliation par la pénitence. — S. Grég. (hom. 34.) Comme la drachme porte l’empreinte d’une figure royale, cette femme a perdu sa drachme, lorsque l’homme qui avait été créé à l’image de Dieu, a perdu par le péché sa ressemblance avec son Créateur. Le Sauveur ajoute : « Si elle en perd une, n’allume-t-elle pas sa lampe ? » etc. Cette femme qui allume sa lampe, c’est la sagesse de Dieu qui s’est manifestée sous une forme humaine, car une lampe est une lumière dans un vase de terre, et cette lumière dans un vase de terre c’est la divinité dans une chair mortelle. Après qu’elle a allumé sa lampe, « elle bouleverse sa maison, » c’est-à-dire qu’aussitôt que la divinité a brillé à nos yeux dans l’humanité dont elle s’était revêtue, notre conscience a été tonte bouleversée. Cette expression, « elle bouleverse toute sa maison, » ne diffère point de cette autre qu’on lit dans certains manuscrits : « elle balaye sa maison ; » car l’âme du pécheur ne peut être purifiée de ses habitudes vicieuses qu’après avoir été profondément remuée par la crainte de Dieu. La maison ainsi mise sens dessus dessous, la drachme se retrouve : « Et elle cherche soigneusement jusqu’à ce qu’elle la trouve, » car c’est grâce à ce trouble salutaire de la conscience, que l’homme répare en lui l’image de son Créateur.

S. Grég. de Nazianze. (Disc. 42, 2° sur la fête de Pâques.) Aussitôt qu’il a retrouvé la drachme qu’il avait perdue, il veut faire partager sa joie aux esprits célestes qu’il a établis les ministres de sa miséricorde : « Et lorsqu’elle l’a retrouvée, elle assemble ses amies et ses voisines, » etc. — S. Grég. (hom. 34.) En effet les vertus des cieux sont d’autant plus voisines de la divine sagesse qu’elles en sont plus rapprochées par la grâce de la claire vision de Dieu. — Théophile. Ou encore : elles sont ses amies, parce qu’elles exécutent ses volontés ; elles sont ses voisines, parce qu’elles ont une nature incorporelle. Ou encore, toutes les vertus célestes sont les amis de Dieu ; ses voisines sont celles qui sont plus rapprochées, c’est-à-dire : les trônes, les chérubins et les séraphins.

S. Grég. de Nysse. (De la virginité, ch. 12.) Ou bien dans un autre sens, voici la vérité que Notre-Seigneur a voulu nous enseigner sous la comparaison de cette drachme qui est perdue et que l’on cherche ; c’est que nous ne pouvons retirer aucune utilité des vertus purement extérieures, figurées ici par les drachmes, (les eussions-nous toutes réunies), si notre âme est dépourvue et comme veuve de celle qui seule peut lui donner l’éclat de la ressemblance divine. La première chose qu’il nous ordonne de faire, c’est d’avoir une lampe allumée ; c’est-à-dire la parole divine qui découvre les choses cachées : ou bien encore la lampe de la pénitence. Or, c’est dans sa propre maison, (c’est-à-dire en soi-même et dans sa conscience), qu’il faut chercher cette drachme qu’on a perdue, c’est-à-dire cette image de notre roi qui n’est pas entièrement effacée et perdue, mais qui est cachée sous le fumier, qui figure les souillures de la chair. Il faut enlever ces souillures avec soin, et lorsqu’on les a fait disparaître de la drachme, la sainteté de la vie est alors dans tout son jour ce que l’on cherchait. Il faut donc se réjouir de l’avoir retrouvée et appeler à partager sa joie ses voisines, c’est-à-dire les puissances de notre âme, la partie raisonnable, et la partie irascible ou sensible et toutes les autres puissances de notre âme qui doivent se réjouir dans le Seigneur. Le Sauveur conclut ensuite cette parabole par ces paroles : « Ainsi, je vous le dis, sera la joie parmi les anges de Dieu pour un pécheur qui fait pénitence. Faire pénitence, c’est pleurer les fautes passées, et cesser de commettre celles qu’on déplore ; car celui qui déplore ses fautes anciennes, sans cesser d’en commettre de nouvelles, ne sait pas encore ce que c’est de faire pénitence, ou fait l’hypocrite. Il faut encore bien réfléchir qu’une des satisfactions à offrir au Créateur, c’est de s’interdire même les choses permises, parce qu’on s’est permis des choses défendues, c’est d’être sévère pour soi dans les plus petites circonstances, parce qu’on se rappelle d’avoir été infidèle dans les plus grandes.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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