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Lc  10  1-2

S. Cyrille. Dieu avait annoncé clairement par les prophètes, que la prédication de l’Évangile s’étendrait non seulement au peuple d’Israël, mais à toutes les autres nations ; et c’est pourquoi Jésus-Christ, après avoir choisi les douze apôtres, institua soixante-douze disciples : « Après cela, le Seigneur choisit encore soixante-douze autres disciples, » etc. — Bède. Ce choix des soixante-douze disciples est providentiel, parce que l’Évangile devait être prêché dans le monde à autant de nations ; les douze apôtres avaient été choisis pour les douze tribus d’Israël, et ceux-ci sont destinés à enseigner les nations étrangères. — S. Augustin. (Quest. évang., 2, 44.) De même que la lumière parcourt et éclaire tout l’univers dans l’espace de vingt-quatre heures, ainsi la fonction mystérieuse d’éclairer tous les hommes par la prédication du mystère de la Trinité, est confiée à soixante-douze disciples ; car trois fois vingt-quatre font soixante-douze. — Bède. C’est un fait hors de doute que les douze apôtres représentent l’ordre des évêques, de même que les soixante-douze disciples représentent ceux à qui l’Écriture donne le nom d’anciens (c’est-à-dire les prêtres du second ordre.) Cependant, dans les premiers temps de l’Église, on donnait indifféremment aux uns comme aux autres, le nom d’anciens et d’évêques, dont l’un signifie la maturité de la sagesse, et l’autre la sollicitude de la charge pastorale. — S. Cyrille. L’élection des soixante-douze disciples avait été figurée par Moïse, qui, par l’ordre de Dieu, avait choisi soixante-dix hommes d’entre le peuple, sur lesquels Dieu répandait son esprit. (Nb 11.) Nous lisons dans le même livre des Nombres (Nb 33), que les enfants d’Israël vinrent à Elim (qui signifie action de monter), où ils trouvèrent douze sources d’eau vive, et soixante-dix palmiers. Or, si nous nous élevons jusqu’à l’interprétation spirituelle, nous trouverons aussi les douze fontaines, c’est-à-dire les saints Apôtres, où nous puisons la science du salut comme aux sources du Sauveur (Is 12, 5), et les soixante-dix palmiers, c’est-à-dire ceux qui sont ici choisis par Jésus-Christ. En effet, le palmier est un arbre qui a une sève abondante, de profondes racines, une fécondité merveilleuse, qui naît au milieu des eaux, et dont le tronc et le feuillage s’élèvent à une très-grande hauteur.

« Et il les envoya deux à deux devant lui. » — S. Grég. (hom. 17 sur les Evang.) Le Sauveur envoie ses disciples prêcher deux à deux, parce qu’il y a deux préceptes de charité, le précepte de l’amour de Dieu, et le précepte de l’amour du prochain, et que d’ailleurs il faut être au moins deux pour exercer la charité. Notre-Seigneur nous fait entendre implicitement par là, que celui qui n’a pas de charité pour son prochain, ne doit nullement se charger du ministère de la prédication. — Origène. Saint Matthieu, dans l’énumération qu’il nous fait des Apôtres, les compte deux par deux, et l’Écriture nous représente comme un usage très ancien cette association de deux personnes pour l’exécution des oeuvres de Dieu. C’est ainsi que Dieu délivra Israël de l’Egypte par les mains de Moïse et d’Aaron (Ex 12) ; et que Josué et Caleb se réunirent pour apaiser le peuple soulevé par les douze hommes envoyés pour explorer la terre de Chanaan (Nb 13 et 25). Aussi lisons-nous dans le livre des Proverbes (Pv 18, 49) : « Le frère qui est aidé par son frère, est comme une ville fortifiée. » — S. Basile. Notre-Seigneur nous enseigne encore par là, que ceux qui ont reçu les mêmes dons spirituels, ne peuvent point faire prévaloir opiniâtrement leur sentiment personnel. — S. Grég. (hom. 17.) Remarquez la mystérieuse signification des paroles qui suivent : « Dans toutes les villes et dans tous les lieux où il devait lui-même arriver. » En effet, le Seigneur vient à la suite de ses prédicateurs ; la prédication lui ouvre les voies, et c’est alors qu’il fait son entrée dans notre âme ; la parole marche devant lui, et introduit ainsi la vérité dans notre coeur, voilà pourquoi le prophète Isaïe dit (Is 40) : « Préparez les voies du Seigneur, rendez droits les sentiers de notre Dieu (cf. Mt 3, 3 ; Mc 1, 5 ; Jn 1, 23). »

Théophile. Le Seigneur avait choisi les soixante-douze disciples pour répondre aux besoins de la multitude qui manquait de prédicateurs ; car de même que nos champs, couverts de nombreux épis, semblent appeler la faux des moissonneurs ; ainsi la multitude innombrable de ceux qui devaient embrasser la foi, avait besoin de docteurs et de maîtres : « La moisson est grande, » disait Jésus à ses disciples. — S. Chrys. Mais comment peut-il appeler moisson, ce qui ne fait encore que commencer ? Il n’a pas encore mis la charrue dans les champs, ni tracé de sillons, et il parle de moissons. Cette parole pouvait jeter ses disciples dans l’incertitude, et les porter à se dire : Comment, si peu nombreux que nous sommes, pourrons-nous convertir tout l’univers ? comment, nous, ignorants, nous présenter devant des savants, pauvres devant des riches, sujets devant les puissants du siècle. C’est donc pour leur épargner ce trouble intérieur, que le Sauveur appelle l’Évangile une moisson ; comme s’il disait : Tout est prêt, je vous envoie recueillir des fruits parvenus à leur maturité ; car le même jour, vous pourrez semer et moissonner. Voyez le laboureur entrer plein de joie dans les champs, couverts d’une abondante moisson. Or, votre joie doit être beaucoup plus grande en entrant dans le monde, car l’oeuvre à laquelle Dieu vous appelle, est une moisson abondante qui vous présente ses champs, n’attendant que la faux du moissonneur.

S. Grég. (hom. 17.) Mais nous ne pouvons répéter les paroles qui suivent, sans un profond sentiment de douleur : « Les ouvriers sont en petit nombre. » Il en est beaucoup, sans doute, pour écouter les paroles de vie, mais très-peu pour les leur adresser. Voici que le monde est rempli de prêtres, mais qu’il est rare de rencontrer dans la moisson du Seigneur un seul véritable ouvrier. Et la raison, c’est que nous recevons le caractère et la charge du sacerdoce, mais que nous nous mettions peu en peine d’en remplir les devoirs. — Bède. De même que cette moisson abondante représente le grand nombre de ceux qui embrassent la foi, ainsi les ouvriers peu nombreux sont les Apôtres, et ceux qui, à leur exemple, sont envoyés pour recueillir la moisson.

S. Cyrille. De vastes champs exigent un grand nombre de moissonneurs, ainsi en est-il de la multitude de ceux qui doivent croire en Jésus-Christ. Le Sauveur ajoute : « Priez donc le maître de la moisson qu’il envoie des ouvriers dans sa moisson. » Remarquez qu’après avoir dit ces paroles : « Priez le maître de la moisson », il envoie lui-même les ouvriers dans la moisson. Il est donc le maître de la moisson, et c’est par lui et avec lui que le Père exerce son empire sur tous les hommes. — S. Chrys. (hom. 33 sur S. Matth.) Il a multiplié dans la suite les ouvriers, non pas en augmentant leur nombre, mais en leur communiquant une vertu toute céleste. Il nous fait entendre encore l’excellence de la grâce qui appelle les ouvriers à recueillir cette mission divine, en les exhortant à demander cette grâce au maître de la moisson. — S. Grég. (hom. 17.) Il faut aussi profiter de ces paroles pour exhorter les fidèles à prier pour leurs pasteurs, à demander à Dieu qu’ils travaillent dignement au salut de leurs âmes, et que leur langue ne cesse jamais de les instruire. Car souvent, ce sont les iniquités des prédicateurs qui retiennent leur langue ; mais souvent aussi il arrive que c’est en punition des fautes des simples fidèles, que Dieu retire à ceux qui les dirigent la parole de la prédication.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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