Accueil > Bibliothèque > La Chaîne d’or > Évangile selon saint Jean > chapitre 12, versets 34-36
S. Augustin. (Traité 47.) Les Juifs ayant compris que Notre-Seigneur avait parlé de sa mort, lui demandent comment il pouvait dire qu’il devait mourir : » Le peuple lui répondit : Nous avons appris par la loi que le Christ demeure éternellement, comment dites-vous donc : Il faut que le Fils de l’homme soit élevé ? » Ils avaient conservé dans leur mémoire que le Seigneur se disait continuellement le Fils de l’homme, car le Sauveur n’avait point employé ici cette dénomination : Lorsque le Fils de l’homme sera élevé, comme précédemment : « L’heure vient où le Fils de l’homme sera glorifié. » Ils avaient donc présent à l’esprit ce nom qu’il se donnait, lorsqu’ils lai font cette question : « Si le Christ demeure éternellement, comment sera-t-il élevé sur la terre ? » c’est-à-dire, comment mourra-t-il de la mort de la croix ? — S. Chrys. Nous voyons ici qu’ils comprenaient un grand nombre des choses que le Sauveur leur disait dans un sens parabolique ; il leur avait prédit plus haut sa mort, et ils entendent dans ce sens ce qu’il dit de son élévation. — S. Augustin. Ou bien ils comprirent qu’il leur parlait de ce qu’ils avaient l’intention de faire, ce ne fut donc point une lumière reçue d’en haut, mais leur conscience agitée par le remords qui leur révèle l’obscurité de ces paroles. — S. Chrys. Voyez quelle malice dans cette question ; ils ne s’expriment pas de cette manière : Nous avons appris par la loi que le Christ doit être exempt de souffrances (car dans une foule d’endroits, les saintes Ecritures annoncent en même temps sa passion et sa résurrection), mais ils disent : « Nous avons appris que le Christ demeure éternellement. » Et il n’y avait en cela aucune contradiction, car la passion du Sauveur n’est point devenue un obstacle à son immortalité. Mais les Juifs s’imaginaient qu’ils prouveraient par là qu’il n’était pas le Christ, parce que le Christ doit demeurer éternellement. Ils ajoutent : « Quel est ce Fils de l’homme ? » question également pleine de malice et dont voici le sens : N’allez pas dire que nous vous faisons cette question par un sentiment de haine, car nous ne savons pas de qui vous voulez parler. Notre-Seigneur leur répond en leur démontrant que sa passion n’est pas un obstacle à ce qu’il demeure éternellement : « Jésus leur dit : La lumière est encore pour un peu de temps au milieu de vous. » Il leur apprend par là que la mort n’est qu’un passage, de même que la lumière du soleil ne s’éteint pas, mais se retire un peu de temps pour reparaître bientôt. — S. Augustin. Ou bien encore, la lumière qui vous fait comprendre que le Christ demeure éternellement est pour un peu de temps au milieu de vous ; marchez donc à cette lumière, tandis que vous en jouissez, en d’autres termes : Approchez, comprenez la vérité tout entière, c’est-à-dire, que le Christ doit mourir et vivre éternellement. — S. Chrys. Il veut parler ici du temps de cette vie tout entière, de celui qui devait précéder sa croix comme de celui qui devait la suivre, car un grand nombre crurent en lui après la passion : « De peur que les ténèbres ne vous surprennent. » — S. Augustin. Si vous ne voulez croire l’éternité du Christ, qu’en niant l’humiliation de sa mort.
« Et celui qui marche dans les ténèbres ne sait où il va. » De quels crimes énormes les Juifs se rendent maintenant coupables ! Ils ne savent ce qu’ils font, mais tout en marchant dans les ténèbres, ils s’imaginent suivre le droit chemin, tandis qu’ils s’égarent dans une fausse voie, et c’est pour cela que le Sauveur ajoute : « Pendant que vous avez la lumière, croyez en la lumière. » — S. Augustin. C’est-à-dire, tandis que vous retenez encore quelque parcelle de la vérité, croyez en la vérité, pour que vous puissiez renaître à la vérité : « Afin que vous soyez des enfants de lumière. » — S. Chrys. (hom. 68.) C’est-à-dire, mes enfants. Au commencement de son Evangile, saint Jean dit qu’ils sont nés de Dieu, c’est-à-dire, du Père ; ici, d’après ses paroles, c’est lui-même qui les engendre, pour vous faire comprendre que le Père et le Fils ont une seule et même action.
« Jésus dit ces choses, puis il s’en alla et se cacha d’eux. » — S. Augustin. Il ne se cacha pas de ceux qui avaient commencé à croire en lui et à l’aimer, mais de ceux qui, témoins de ces merveilles, nourrissaient contre lui une noire envie. En se dérobant ainsi à ses ennemis, il a égard à notre faiblesse, il ne déroge pas à sa puissance divine. — S. Chrys. Mais pourquoi se cacher, alors qu’ils ne cherchaient pas à le lapider, et qu’ils ne proféraient aucun blasphème ? Il pénétrait le fond de leurs cœurs, il y voyait la fureur dont ils étaient animés contre lui, et il n’attendit pas qu’elle se traduisît en excès sacrilèges. Il se cache donc pour calmer ainsi leur jalousie.
Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.