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25. Les scandales causés par des chrétiens

Daria Klanac : Jésus n’a choisi ni les meilleurs ni les pires à sa suite et c’est ainsi depuis l’époque de ses premiers apôtres où il y avait des traîtres, des peureux, des incrédules. Faut-il se scandaliser au point de quitter l’Église lorsqu’on découvre de telles personnes qui œuvrent depuis longtemps dans son sein ?

Arnaud Dumouch : Je dirais, comme le dit saint Paul quand il regarde les chrétiens, qu’il y en a plusieurs sortes. Il y a les enfants dans la foi, ceux qui ne sont pas encore bien formés, et il y a les adultes dans la foi. Il en parle à l’occasion de la question faut-il manger des viandes immolées aux idoles.[32] Pour saint Paul, il n’y a pas de problème, puisque les idoles de toute façon n’existent pas. Seulement, il précise que si nous, adultes dans la foi, ne sommes pas scandalisés, il faut penser à ceux qui démarrent qui sont encore enfants dans la foi et qui parfois, scandalisés s’ils nous voient à la table des idoles, peuvent quitter l’Église. C’est exactement la même chose par rapport aux péchés des prêtres, des diacres, des évêques, des papes, des chrétiens. Pour ceux qui ont atteint une foi solide, je dirais que rien ne doit pouvoir les séparer du Christ. L’Église, on le sait, n’est pas sainte dans ses membres terrestres. Quand le Credo dit : « Je crois en l’Église une, sainte, catholique et apostolique », elle entend par là que l’Église est menée saintement par l’Esprit Saint. Cela veut dire qu’il est en train de la conduire, de l’affiner, de purifier ses membres pour la mener au paradis céleste. La sainteté, c’est cela.

L’Église est faite d’hommes et là où il y a homme, il y a hommerie.[33] Celui qui fréquente de près les prêtres s’apercevra que c’est exactement comme dans toute communauté humaine : des mesquineries, des discussions, des saintetés, des bons, des mauvais. Il n’y a vraiment aucune différence, à la distinction près que la plupart croient tout de même en Jésus-Christ. On peut dire que l’on aime vraiment le Seigneur pour lui-même le jour où l’on est indifférent aux faiblesses de ceux qui le servent.

Par contre, pour les jeunes chrétiens, pour ceux qui démarrent et qui ont trouvé l’origine de leur foi dans une considération de ceux qui représentent le visage du Christ, c’est-à-dire les chrétiens, là il peut y avoir de véritables catastrophes. Et l’on pense en particulier aux cas de ces prêtres pédophiles qui ont défiguré le visage de l’Église, depuis sans doute des générations.

Le scandale est sorti en 2010, mais c’était une tradition dans tous les milieux éducatifs. L’Église catholique avait beaucoup d’œuvres éducatives, et il y avait là sans doute un peu plus de pédophilie. C’est extrêmement dommageable, mais ce n’est pas la raison de ne pas croire au Christ, à cause de nous, pauvres pécheurs.

En lisant la vie des saints du Ciel, on s’aperçoit qu’ils sont pleins d’imperfections, sauf la Vierge Marie. Ces saints qui nous protègent et qui nous aident dans notre vie sur terre avaient des défauts. Sainte Marguerite-Marie Alacoque n’a-t-elle pas vu son confesseur, qui est béatifié, au purgatoire ? La vie de saint Louis est semée de fautes graves, comme l’antisémitisme qu’actuellement nous n’accepterions pas. On peut penser qu’il a fait son purgatoire sur terre en mourant misérablement, dans le désespoir, au pied de Tunis.

Quand on progresse dans la foi, il faut essayer de relativiser en se disant : « Je veux être miséricordieux avec mes frères chrétiens parce que je vois d’abord ces péchés en moi. Jésus dit que nous serons mesurés avec la mesure dont on s’est servi pour les autres.[34] Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas lutter contre ces péchés abominables. On le voit très bien, Benoît XVI a vraiment voulu éradiquer les prêtres, les diacres, tous les éducateurs chrétiens qui ont sombré dans la pédophilie et les chasser du ministère, c’est clair. Donc ce que je dis au niveau spirituel n’empêche pas une justice humaine parfaite par rapport à ces actes qui sont intolérables.

 

32. 1Cor 8,7-13. [↩]

33. Bassesse, corruption de l’homme ; ses manifestations. [↩]

34. Mt 7,2 ; Mc 4,24 ; Lc 6,38. [↩]

Arnaud Dumouch et Daria Klanac, Un entretien pour notre temps, Montréal, 2012.

 

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