Accueil  >  Bibliothèque  >  Un entretien…  >  Tome 2 : L’humilité de Dieu  >  Jésus face aux autorités religieuses

 

27. Jésus face aux autorités religieuses

Daria Klanac : Ce qui surprend le plus c’est l’attitude de l’Église officielle de son époque, avec ses autorités qui ne voulaient rien comprendre à sa divinité malgré tant de preuves évidentes. Ont-ils consciemment refusé la grâce d’accueillir le Messie ?

Arnaud Dumouch : Il faut dire d’abord que Jésus a véritablement annoncé, c’est indubitable, qu’il était Dieu fait homme. Dans un passage de saint Jean Jésus explicitement affirme : « En vérité, en vérité, je vous le dis, avant qu’Abraham existât, Je Suis. »[38] Je Suis se traduit en hébreu par Yahvé.[39] Et voilà les juifs qui ramassent des pierres pour le lapider. Aujourd’hui, si un homme disait publiquement dans la rue : « Je suis Dieu, avant qu’Abraham existât Je Suis », on rirait, on prendrait cela avec humour. Jésus a prouvé ses dires par des miracles qui ne peuvent venir que de Dieu seul, comme la résurrection de Lazare et bien d’autres. Alors, les grands prêtres, dit l’Écriture, décidèrent de tuer Lazare et de tuer aussi Jésus. Comment cela est-il possible ?

Il faut regarder toute la tension qu’il y a entre Jésus et les grands prêtres tout au long de l’Évangile. Jésus est venu pour les pauvres, pour ceux qui ont besoin de médecin et on constate qu’envers les orgueilleux, c’est-à-dire l’inverse de la pauvreté, envers ceux qui sont sûrs d’être bons, d’être sauvés, il a une attitude extrêmement dure, intransigeante.

C’est comme cela que Jésus a parlé aux pharisiens. En disant la vérité, il les a provoqués et s’est acquis définitivement leur haine.

Il y a dans l’attitude des pharisiens une véritable volonté d’humilier Jésus jusqu’au bout, de le réduire à néant, de le faire disparaître, éventuellement dans les pires souffrances pour se venger de ce qu’il a dit d’eux. Cette attitude est donc liée à un sentiment de colère et de haine, mais quand il est porté par des hommes calmes, maîtres d’eux-mêmes, des théologiens de haut niveau, des théologiens qui savent analyser ce que c’est qu’un miracle, on peut dire qu’il y a un péché grave quand on refuse de croire. Le péché ultime que Jésus appelle le blasphème contre l’Esprit-Saint. Une chose est son propre honneur, son humiliation, autre chose est la vérité de Dieu.

Le prétexte théologique, à savoir qu’ils ont crucifié Jésus parce qu’il se disait Dieu, moi-même comme théologien, je peux dire qu’il ne tient pas. Il y a autre chose là-dessous. Je crois que ces personnes-là sont prêtes à tout perdre, y compris leur salut éternel, plutôt que d’accepter Jésus. Ils le méprisent parce qu’ils se sont trouvés insultés par lui. C’est un péché maîtrisé, dans une parfaite connaissance de ce qu’on fait, lucide, dans une liberté totale. Ont-ils consciemment refusé la grâce d’accueillir le Messie ? Je pense que seulement quelques prêtres ont consciemment refusé le Messie. Beaucoup d’autres ont suivi, simplement en disant que Jésus ne pouvait pas être Dieu fait homme, que cela ne pouvait pas exister, que ce n’était pas possible théologiquement. Quant à la majorité du peuple, elle a suivi le discours dominant du temps, sans savoir ce qu’elle faisait.

Jésus, pour son retour dans sa gloire, prépare un scénario où les autorités du peuple juif cette fois se comporteront bien avec lui. Cela ressemble un peu à ce qu’a connu Joseph quand il a été vendu en Égypte par ses frères qui n’ont eu aucune pitié pour ses cris au fond du puits. Mais, plus tard, sauvés par Joseph, ils ont mûri, ils ont changé, ils ont vu leur cœur devenir de chair et non plus de pierre.

 

38. Jn 8,58. [↩]

39. Quand Dieu apparaît à Moïse et lui donne son nom. Il dit bien à Moïse : « Je suis celui qui est. Et il dit : Voici ce que tu diras aux Israélites : Je Suis m’a envoyé vers vous. » [↩]

Arnaud Dumouch et Daria Klanac, Un entretien pour notre temps, Montréal, 2012.

 

Plan du site    |    Contact    |    Liens    |    Chapelle