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6. Croire à l’impossible

Daria Klanac : Peut-on avec notre raison saisir les mystère de la foi comme celui de la Sainte Trinité ?

Arnaud Dumouch : La raison ne peut pas prouver ni même adhérer par elle-même à ce mystère. La raison toute seule, quand elle est confrontée à cela, ne peut le regarder que comme un mythe. Pour comprendre, il faut recevoir la foi et la foi est un don de Dieu. Concrètement, il faut avoir la grâce de Dieu explicitement.

Maintenant, nous sommes des peuples adultes, avec un sens de la raison, aussi nous faut-il recevoir une foi personnelle pour y adhérer.

Quand il s’agit de la Trinité, le Coran contient une théologie dans laquelle on a l’impression qu’il y a trois Dieux, la Vierge Marie en faisant éventuellement partie. Pour les musulmans, philosophiquement et rationnellement, Dieu est un créateur unique, simple, comme aurait pu le découvrir Aristote. Lors d’une conversation avec un musulman, j’expliquais la Trinité en lui disant que le Verbe, autrement dit le Fils de Dieu, c’est simplement Dieu Allah qui éternellement vit avec son intelligence, se connaît parfaitement, se contemple lui-même et sa propre connaissance. On a bien un seul Dieu en deux. « Vous voyez bien que nous sommes monothéistes », lui dis-je. – « Vous êtes monothéistes, sauf que Dieu et sa propre connaissance forme un seul être. » – « Oui, il forme un seul être. Il s’aime infiniment parce qu’il est magnifique et c’est ce qui va produire la création. Cet amour étant infini, on l’appelle le Saint-Esprit. » – « Mais vous mettez trois en un seul Dieu… » – « Non, le Saint-Esprit, qui est l’amour total de Dieu et de sa propre connaissance, est infini donc il est exactement identique à Dieu, sauf qu’Il procède du Père et du Fils, puisqu’il est leur amour réciproque. »

Une fois qu’on l’explique avec ce raisonnement, c’est cohérent, mais la raison seule ne peut pas le découvrir, de même qu’elle ne peut pas découvrir les folies suivantes, à savoir que ce Verbe qui est Dieu, qui est semblable au Père, choisit de se faire homme, prenant une humanité complète, une humanité avec sa propre volonté humaine. Dans la foi, la raison affirme que c’est possible. C’est la philosophie de saint Thomas d’Aquin qui, ayant pris tout ce qu’il y a d’intelligent chez ces prédécesseurs, montre le plus clairement cette cohérence entre raison et foi. Il fait confiance à la raison grecque et se sert de leurs concepts pour montrer que Dieu trinitaire n’est pas contradictoire et qu’il est parfait. C’est la théologie la plus réussie sous cet aspect-là.

Arnaud Dumouch et Daria Klanac, Un entretien pour notre temps, Montréal, 2012.

 

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