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4. Les vérités bibliques

Daria Klanac : Donc, déjà en ce qui concerne le tout début du monde, le Magistère a établi des vérités qui sont à la base de notre foi, afin de nous conduire vers une meilleure compréhension de Dieu et de son plan de salut pour l’humanité.

Arnaud Dumouch : Par rapport à l’Ancien Testament, par rapport au tout début de la Terre, l’Église a prononcé cinq dogmes. Cinq vérités qu’elle déclare s’être vraiment réalisées et auxquelles elle croit. Ces cinq vérités, l’Église les a maintenues même dans les années 60-70 où on se moquait d’elle. De grands théologiens comme le père Gustave Martelet[10] disait que l’interprétation du péché originel est ridicule, qu’il n’a pas existé. Il disait que tout cela n’est que la symbolique d’un peuple qui a évolué, un peuple de singes. Et bien l’Église, mordicus, a maintenu ses cinq dogmes.

Premièrement, Adam et Eve ont vraiment existé. C’étaient un homme et une femme réels. Leurs âmes ont directement été créées par Dieu. Le fait que leurs âmes aient été créées directement par Dieu, c’est le deuxième dogme. Pour ce qui est de leurs corps, est-ce qu’ils procèdent ou non de l’évolution ? L’Église dit que cela ne concerne pas vraiment le Salut, mais plutôt la manière dont Dieu a procédé. Que la science se prononce ! Et Jean-Paul II, dans une allocution à l’Académie des Sciences en 1988, a dit : « Il semble bien que la théorie de l’évolution est plus qu’une hypothèse. » Ce qui compte, c’est qu’Adam et Eve ont existé et même si le corps a été pris d’espèces hominidés qui ont évolué, ils sont les premiers à avoir une âme spirituelle qui, elle, ne procède pas de l’évolution. L’Église l’a toujours dit. Elle l’a dit face à Teilhard de Chardin, théologien, philosophe et paléontologue français, qui proclamait : « L’âme, la spiritualité vient de l’évolution. » L’Église a dit non. Elle est créée par Dieu à partir de rien, elle n’est pas faite de matière.

Troisième dogme : Adam et Ève, quand ils furent créés, en tant que patriarche et matriarche de l’humanité, ils reçurent une grâce originelle de Dieu directement. Une grâce non seulement de connaissances, mais de sagesse en vue du Salut. Ils connaissaient tout ce qu’il leur fallait. Pas au point de vue des sciences. Pas au point de vue des techniques, on le voit bien. La paléontologie le montre, leurs descendants ont tout inventé. D’abord, des cailloux grossiers, puis des cailloux plus fins. Mais au point de vue de la sagesse, Adam et Ève connaissaient d’une manière précise qu’ils pouvaient s’engager pour leurs descendants, à savoir nous, leurs enfants. S’engager pour ou contre Dieu. Avec la grâce de connaissances, ils ont bénéficié aussi de la grâce de maîtrise de leur corps. Leur corps, leur sensibilité étaient parfaitement soumises à leur volonté, si bien qu’ils étaient nus et qu’ils n’avaient pas honte. Ils ne pouvaient pas pécher de ce côté-là, c’était impossible, ils étaient immortels. C’est un dogme, qui fait partie du troisième dogme sur la grâce originelle. Les plus grands théologiens disent qu’il suffit de regarder la Vierge Marie, la nouvelle Ève. Adam et Ève auraient vieilli, mûri.[11] Ils étaient immortels en ce sens qu’un accident ne pouvait pas leur arriver, les anges les protégeaient. Mais avant que leurs âmes soient incapables d’assumer leurs corps, Dieu leur aurait permis de monter directement dans l’autre monde par assomption, sans passer par la destruction du corps. Tout est cohérent dans la foi puisque la nouvelle Ève l’a vécu.

Le quatrième dogme, toujours dans cette histoire du début, consiste à dire qu’ils ont péché par orgueil. C’est un péché d’orgueil qui les a fait chuter. Cela ne peut pas être un péché sexuel, comme l’enseignaient certains pères de l’Église. Pourquoi ? Parce que c’est impossible. S’ils avaient couché ensemble, c’était par amour, c’était très bien. Ils avaient même reçu le commandement de le faire, donc ce n’était pas un péché, car c’est Dieu qui a créé la sexualité. Non, ils ont chuté par orgueil, et l’Église l’a confirmé.

D. Klanac : Comment la Bible le précise-t-elle ?

A. Dumouch : C’est dans la Tradition. Sous la forme d’un serpent, Lucifer, les trompa malgré leur lucidité : « Vous devez obéir à Dieu, il vous a dit d’obéir. Ce n’est pas du tout parce que si vous n’obéissez pas que vous mourrez, mais c’est parce que Dieu sait très bien que si vous choisissez vous-mêmes le bien et le mal, vous serez comme Dieu : libre, maître du bien et du mal. C’est cela qui est fantastique. » Ève et Adam trouvèrent cette voie plus intéressante que celle d’être tout humbles et tout obéissants à ce Dieu. C’est sûr que cela procure du bonheur, mais pour eux c’était moins excitant que de se faire maîtres du bien et du mal. Ils en mangèrent de cet arbre-là. Et c’est le quatrième dogme.

Le cinquième dogme dit : « À cause de ce péché originel, la mort entra dans le monde, » la mort de l’homme et de la femme. D’abord la mort spirituelle. Par le péché mortel, ils se séparèrent de Dieu, qui d’ailleurs disparut en se cachant simplement. Deuxièmement, un peu plus tard, survient leur mort physique. Cela veut dire que quand leur corps fut usé, Dieu ne vint pas les chercher par assomption, mais il laissa la biologie faire son action jusqu’au bout. À partir de là, évidemment, si on fait le pari d’être fidèle à ce Magistère quand il parle, et puis à la Sainte Tradition qui interprète, on obtient un récit absolument précis et en même temps intégrant profondément les données de la science les plus récentes pour expliquer l’origine du monde. Ce qui spécifie la théologie catholique, c’est qu’à la différence des protestants évangéliques par exemple, l’Église a toujours dit qu’il fallait que la foi – avec les trois sources dont je viens de parler – et la science marchent ensemble comme deux affectionnés. Il ne devrait pas y avoir d’opposition.

La science est parfois très orgueilleuse et on prétend scientifiques des choses qui ne sont que l’opinion de philosophes athées. De même, la théologie quelquefois va trop loin. Avec le sens critique, science et foi peuvent marcher ensemble et c’est cohérent puisque la réalité a été créée par Dieu, donc il ne saurait y avoir de contradictions fondamentales entre les deux manières de connaître la réalité. La science par sa raison propre et la foi par la Révélation venant de Dieu.

 

10. Gustave Martelet, (1916), jésuite, professeur de théologie pendant plus de cinquante ans au Centre Sèvres (Facultés jésuites de Paris), à Lyon et à l’Université grégorienne de Rome. Il a participé à Vatican II comme théologien des évêques francophones d’Afrique. [↩]

11. La Vierge Marie, qui est immortelle comme Adam et Ève à cause de sa grâce originelle, ne l’est pas pour cause biologique, mais par protection de Dieu et assomption. [↩]

Arnaud Dumouch et Daria Klanac, Un entretien pour notre temps, Montréal, 2012.

 

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