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PREMIÈRE PARTIE : LA FIN DU MONDE
 
 
CHAPITRE 3

Quatrième jour, l’annonce de l’Évangile

 

Annonce de l’évangile.

 

Les trois sens des textes sur la fin du monde
Le signe de la croix dans chaque génération
Chaque génération connaît sa fin du monde
Le temps des persécutions (33-313 après J.C.)
La génération des premiers moines
L’orgueil des premiers théologiens et l’élaboration du Credo
A partir de 632. L’islam, fouet de Dieu pour la sanctification des chrétiens
La subsistance des paganismes
Le Moyen-âge de la beauté et de la peste
Le protestantisme et les guerres de religion
Le déclin de l’Église, vu par un frère Protestant

 

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Les trois sens des textes sur la fin du monde

(Il existe bien d’autres sens possibles mais je m’arrête ici aux principaux sens eschatologiques)

Jésus a lui-même annoncé la fin du monde pour sa génération : « En vérité je vous le dis, cette génération ne passera pas que tout cela ne soit arrivé. Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point.[1] » S’est-il trompé ? C’est ce que crurent des générations dès le début de l’Église catholique. Le premier pape Pierre en témoigne[2] : « Les incroyants diront: "Où est la promesse de son avènement? Depuis que les Pères sont morts, tout demeure comme au début de la création. »

Or Jésus n’est pas le seul à avoir annoncé avec autorité la fin du monde pour son époque. Saint Vincent Ferrier se le permit de manière solennelle. Il fit même de grands miracles pour prouver ses dires. On raconte que, devant le scepticisme des théologiens catholiques de son époque, il ressuscita une femme morte qui confirma ses dires. Pourtant, depuis sa mort en Bretagne en 1419, rien n’est venu. S’est-il trompé ? L’Église ne le pense pas puisqu’elle le canonisa avec le titre d’ange du jugement, en référence à un verset de l’Apocalypse de saint Jean où un ange proclame d’une voix forte: « Plus de délais ![3] »

La solution à ce problème vient de l’ambiguïté de la lettre des textes. Ils sont parole de Dieu et non parole d’homme. Il semble que Dieu regarde en un seul regard trois sortes d’évènements qui paraissent différents à un regard humain :

1 -La mort des individus[4]

2 -La fin des sociétés humaine (la fin d’un monde)

3 -La fin du monde, (les évènements de la dernière génération qui vivra sur terre)

On trouve une preuve de ces sens multiples dans un texte de l’évangile de Matthieu 24, 37-42. Il s’agit d’un passage où Jésus parle de son retour dans la gloire, mystère habituellement réservé à la fin du monde. Or il y décrit aussi dans le même passage, sans qu’il y ait rupture du texte, la mort individuelle d’un homme, puis d’une femme : « Comme les jours de Noé, ainsi sera l’avènement du Fils de l’homme. En ces jours qui précédèrent le déluge, on mangeait et on buvait, on prenait femme et mari, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche, et les gens ne se doutèrent de rien jusqu’à l’arrivée du déluge, qui les emporta tous. Tel sera aussi l’avènement du Fils de l’homme. Alors deux hommes seront aux champs: l’un est pris, l’autre laissé; deux femmes en train de moudre: l’une est prise, l’autre laissée. »

Jésus et saint Vincent Ferrier se sont-ils trompé ? L’explication de leur étonnante affirmation est simple. La fin du monde signifie plusieurs choses. On pense d’abord à la fin des fins, telle que je la décrirai à la fin de cet ouvrage. Mais Jésus pensait aussi à la mort de chaque individu et la fin de chaque génération. Tout ceci constitue d’ailleurs un seul et même mystère puisque, cent ans après sa naissance, toute une généra­tion a vu le retour du Christ, individu après individu. Autrement dit, dans cent vingt ans maximum, nous serons tous morts. Avant que cela n’arrive, dans les jours de sa vieillesse, il n’est pas de génération humaine qui ne récolte les fruits de l’orgueil de sa jeunesse. Il est important, pour le salut, que cela se passe ainsi. Application simple : Que reste-t-il des jeunes immortels musclés qui partirent bouter l’ennemi en 1914 ? Cherchez.

Conclusion : Attention à ne jamais interpréter les textes eschatologiques comme s’ils annonçaient en premier lieu la fin des fins. Curieusement, c’est ce sens (qui n’est pas non plus à exclure, nous le verrons) qui fascine le plus les théologiens débutants, sans doute parce que sa dimension à la fois politique et curieuse à tendance à rendre fou le croyant non formé. Il y a deux sens beaucoup plus concrets et éducatifs à considérer :

« Prépare-toi à la venue de ton Juge. Ta mort est proche. »

« Ne mets pas trop ton espoir dans ton système politique. Elle passe, la figure de ton monde. »

Cette façon de contempler la fin du monde permet d’expliquer bien des choses.

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Le signe de la croix dans chaque génération

(Chose certaine) 

Face à sa fatuité.

L’annonce de l’Évangile aux nations* à travers des luttes sans merci, voilà donc ce que le Seigneur promet pour le premier temps de l’Église. L’histoire montre que cette période est déjà en grande partie derrière nous. Dans ce chapitre, je voudrais essayer de manifester de manière concrète l’action de Dieu à travers l’exemple de quelques générations chrétiennes.

Il existe, cachée sous l’apparente anarchie de l’histoire, une logique profonde[5]. Il existe une Sagesse qui éclaire le tout. L’unité vient d’un principe simple que je me suis efforcé de résumer dans l’introduction de ce livre. Son but est de faire sortir de chaque génération le maximum d’humilité et d’amour. Tout cela sert au salut du plus grand nombre. Tout cela a un rapport avec le mystère de la Trinité.

Face à sa fatuité.

— Puisque Dieu veut introduire chaque génération dans la vision béatifique, il la prépare.

— Puisque l’humilité est une condition fondamentale au salut, Dieu se plait à la créer.

— Puisque le défaut fondamental de chaque génération est de se croire plus intelligente, plus réussie que la précédente, Dieu prend le moyen de la mettre face à sa fatuité.

— Puisque enfin rien n’est plus efficace que l’échec pour apprendre un peu d’humilité, Dieu se plaît à confronter chaque génération à sa ruine. Tout se résume à cette parole de Marie : « Il renverse les puissants de leur trône, il élève les humbles[6]. » Il dose pour chaque époque réussites et échecs, paix et guerres, maladies et fléaux. Il dose tout cela jusqu’à l’extrême, jusqu’à ce que la génération passe de la vieillesse à la mort[7]. Il s’agit donc bien, à chaque génération, d’une fin du monde.

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Chaque génération connaît sa fin du monde

(Chose certaine)

“Dis-nous, demandèrent les disciples, quel sera le signe de ton avènement et de la fin du monde?” Et Jésus leur répondit: « Prenez garde qu’on ne vous abuse car il en viendra beaucoup sous mon nom, qui diront: ‘c’est moi le Christ’, et ils abuseront bien des gens. Vous aurez aussi à entendre parler de guerres et de rumeurs de guerres. Voyez, ne vous alarmez pas. Car il faut que cela arrive, mais ce n’est pas encore la fin. On se dressera en effet nation contre nation et royaume contre royaume. Il y aura par endroit des famines et des tremblements de terre. Et tout cela ne fera que commencer les douleurs de l’enfantement. Alors on vous livrera aux tourments et on vous tuera; Vous serez haïs de toutes les nations à cause de mon nom. Et alors beaucoup succomberont; ce seront des trahisons et des haines intestines. Des faux prophètes surgiront nombreux et abuseront bien des gens (…) Cette bonne nouvelle du Royaume sera proclamée dans le monde entier en témoignage à la face de toutes les nations.[8]

Décrivons à titre d’exemple et pour mieux comprendre l’universalité de cette sagesse divine, l’expérience telle qu’elle a été vécue par la génération de la première guerre mondiale. Son orgueil majeur est sa foi dans la science qui doit, croit-elle, lui apporter la totalité du bonheur. Son idole principale est la Patrie qu’elle exalte jusqu’à en faire un monstre dévoreur d’hommes. Il s’agit bien d’un monstre puisqu’on se prépare mentalement dès 1870 à tout lui offrir en sacrifice. Pour la patrie, chacun bombe le torse. En France, on se targue de faire rendre gorge aux Boches. En Allemagne, on chante Deutschland über alles[9]. L’idéologie est mondiale.

Dieu laisse faire les lois de ce péché d’idolâtrie. Mais il commence par avertir en donnant un signe, visible par tous. Le regard obsessionnel des Occidentaux pour le naufrage du Titanic en 1912, montre que ce malheur a été compris dès cette époque, au moins confusément, comme une prophétie. Le Titanic est l’image du monde séparé en classes sociales qui précède la première guerre mondiale : « Même Dieu ne pourrait pas le couler »[10].

La génération des poilus de la grande guerre a été profondément éduquée à l’humilité. Avant de rejoindre l’autre monde, elle a dû, à travers trois coups de boutoir, admettre son erreur. La boue des tranchées, la défaite de 40 et de manière ultime, la révolution libertaire de mai 68 sont les trois principales leçons apocalyptiques qu’elle reçut. Vers la fin de sa vie terrestre, cette génération a bu jusqu’à la lie la coupe de son échec, de la main même de ses petits-enfants. Se croyants plus intelligents (l’orgueil était aussi leur lot), ceux-ci ont craché à la face de leurs pères et grand-pères, leurs « valeurs criminelles de patrie, honneur, sacrifice, devoir ». Ils ont exalté les valeurs opposées. Quel échec pour les patriotes de 14… Pour celui qui sait lire les signes des temps, il y a ici une application de la théologie de fin du monde. Ce fut, pour toute cette génération, une véritable souffrance mais surtout, pour qui sait lire l’action de Dieu, une véritable action de salut produite par les lois de Dieu. Beaucoup, grâce à cela, ont été sauvés, efficacement. Dès cette terre puis face à l’apparition glorieuse du Christ, ils ont renié pour toujours la morgue nationaliste de leur jeunesse.

Je vais le montrer, cette pratique de Dieu peut s’appliquer à chaque génération. Une fois cette sagesse comprise, chacun peut même aisément devenir prophète et prévoir comment la génération suivante vivra sa fin du monde. Faisons le prophète. L’exemple de la génération de mai 68 dont je viens d’esquisser l’orgueil mérite d’être développé ici. Son péché majeur est sa foi dans sa puissante intelligence des choses de la vie. « Nos pères furent des idiots. Nous avons enfin compris que la tolérance absolue, les droits de l’homme sont l’Alpha et l’Oméga de la sagesse ». Son idole principale (le fondement de sa conception du bonheur) s’appelle « plaisirs et bonheur immédiats, sexualité libre et spontanée ». Il s’agit à nouveau d’un monstre puisqu’on invite chacun à tout lui offrir en sacrifice: mariage (un couple sur trois divorce au nom du devoir d’être heureux tout de suite), enfants (un sur trois avorté, « parce que cela vaut mieux pour lui »), vieux parents (souvent délaissés). Elle chantait sur les pavés de Paris : « Faites l’Amour, pas la guerre. »

On peut prévoir que la génération de mai 68 sera, elle aussi, profondément éduquée à l’humilité. Elle se croyait intelligente. Ses élites avaient soutenu Mao, Pol Pot, Castro sans jamais faire repentance de leur aveuglement. On peut observer que la leçon est déjà commencée. Dieu laisse faire jusqu’à aujourd’hui les conséquences de son péché. Mais il a commencé à l’avertir en lui donnant des signes, visibles par tous. Trois coups de boutoir se sont déjà produits : l’échec mortel du communisme, le SIDA apparu en 1980 et qui vint atteindre de plein fouet la civilisation de la luxure[11] et, au moment où j’écris, la haine de plus en plus inquiétante de banlieues jeunes, islamisées et fécondes. Au plan politique, ne peut-on pas craindre une véritable fin de leur monde ? L’avortement de toute une génération[12] remplacée par des immigrés dont l’islam est souvent non intégrable, prépare-t-il un triste réveil ?

On peut prévoir que la leçon se terminera sur terre avec l’age. Ce sera une bien pauvre cohorte de personnes âgées qui récoltera les fruits d’un amour qui ne s’est construit que dans l’immédiateté. La solitude sera sa dernière plaie. Ses enfants, élevés dans le culte du bonheur immédiat, auront-ils le sens moral de l’accompagner dans les maisons de retraite ? Pire, elle devra affronter dans la nuit l’approche de la mort car elle est la première génération sans religion et sans prêtres. Elle sent confusément approcher ce moment. Agée de 50 ans au moment où j’écris, elle se concocte, partout en Occident, des lois pour s’euthanasier.

Ce portrait est humainement très pessimiste. Il ne l’est qu’au plan d’un jugement humaniste terrestre. Il doit être complété par son vrai sens spirituel. C’est par ces épreuves que cette génération, à l’image de toutes les générations précédentes, sera sauvée par Dieu. Frappée par où elle a péché, ses membres de bonne volonté apprendront peu à peu l’humilité. La plus grande épreuve sera celle de sa confrontation avec l’apparition du Christ glorieux lorsque, un par un, ses membres passeront la porte de la mort. Le jour du Seigneur est terrible car il a le pouvoir de dévoiler la vérité des cœurs. Tout se terminera pour la majorité dans le repentir et la Vie.

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Le temps des persécutions (33-313 après J.C.)

« Alors on vous livrera aux tourments et on vous tuera; vous serez haïs de toutes les nations à cause de mon nom. Et alors beaucoup succomberont; ce seront des trahisons et des haines intestines.[13] »

A travers quelques événements chronologiques de l’histoire de l’Église, essayons de contempler l’action très sage de Dieu pour le salut du plus grand nombre. A chacun, en s’appuyant sur ces exemples, de prolonger ce travail pour chaque génération de toutes les civilisations du monde.

Au cours des trois premiers siècles, il permit que la jeune Église soit persécutée par la puissance de des dirigeants de l’Empire romain. Ceux-ci n’agissaient pas par haine lucide de Dieu. Leur ignorance du christianisme, leur zèle politique pour la religion de l’État et l’influence sournoise du démon qui sait amplifier les peurs, les rendaient souvent sincères. De cette persécution décrite par saint Mathieu comme de toutes les persécutions de l’histoire, il sortit des fruits immenses pour la vie éternelle. Jamais on ne vit Église plus sainte car plus pauvre. C’était une grande joie au Ciel que de voir arriver ces vierges chrétiennes, Blandine, Agnès, Cécile, fortes dans leur confiance en Jésus, toutes petites à cause de leur peur et de leurs larmes, et dignes de devenir reines pour l’éternité. Il n’y avait pas beaucoup d’orgueil en ce temps là dans l’Église. Quant aux bourreaux païens, quelle n’a pas été pas leur stupéfaction de se voir accueillis par leurs victimes au moment de leur mort. Il n’est pas naïf d’affirmer que beaucoup, après avoir expérimenté leur propre misère par la mort, se convertirent et furent sauvés. Beaucoup réalisèrent cette parole de Jésus : « Ses péchés, ses nombreux péchés, lui sont remis parce qu’elle a montré beaucoup d’amour. Mais celui à qui on remet peu montre peu d’amour.[14] » En ce temps là, on vivait sans difficulté, au jour le jour, les prophéties concernant le retour imminent du Christ puisqu’on pouvait être mis à mort n’importe quand.

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La génération des premiers moines

« Vous aurez aussi à entendre parler de guerres et de rumeurs de guerres; voyez, ne vous alarmez pas: car il faut que cela arrive, mais ce n’est pas encore la fin.[15] »

A cette époque, tout n’était cependant pas saint chez les chrétiens. Certains ne vivaient pas l’attente du jour du Seigneur en paix, tel qu’il convient à un croyant fidèle. Ils s’exaltaient avec orgueil et donnaient même des dates précises pour le retour du Christ, se faisant l’égal de Dieu. Ils invitaient à ne plus se marier. La sagesse de Dieu qui conduit à l’humilité se trouvait donc parfois vaincue par l’orgueil, même en ces temps douloureux. Devant la multiplication des persécutions, certains théologiens et chrétiens inventèrent une conception orgueilleuse et intransigeante du martyre. On le vanta tant qu’on en fit l’acte suprême du courage humain, de la force d’âme. On prétendit conquérir le Ciel par le mérite de sa résistance aux tourments. On en a des preuves dans des textes de l’époque. Des évêques refusaient le pardon à des chrétiens repentants pour le péché suivant : ils avaient renié leur foi par peur des tortures. On les appelait « lapsi » et parfois « relaps » quand ils avaient failli deux fois. Ainsi, le don de sa vie pouvait devenir un acte d’autosuffisance humaine! Cela déplut au Ciel. Ne voyait-on pas arriver des martyrs dans l’autre monde, empreints d’une attitude revendicatrice, exigeant la récompense qui n’est donnée qu’aux humbles. Alors Dieu agit. Se servant des rouages multiples qui font l’histoire, il permit que la paix se fasse avec l’Empire. Constantin, en signant l’Édit de Milan (313), reconnaissait au christianisme le droit d’exister. En raison de la fin des persécutions, des foules de païens hésitants demandèrent leur entrée dans l’Église. Mais, par la même occasion, en raison de l’arrivée de cette masse de pauvres gens peu faits pour l’héroïsme, le zèle pour Dieu se refroidit. L’Église devint moins élitiste et marquée des graves défauts d’un peuple mal évangélisé. Il y avait moins de ferveur mais aussi moins d’orgueil dans l’héroïsme. Beaucoup adhéraient par arrivisme politique…

Cette deuxième étape de l’histoire de l’Église fut ressentie par beaucoup de chrétiens jadis fervents (surtout par les assoiffés du martyre) comme la fin du monde. A la pureté des premiers âges succédait une foule à peine dégrossie et encore empreinte de superstitions païennes. Ce n’était pourtant que la fin de leur monde devenu trop élitiste. Dieu l’avait détruit en vue du salut du plus grand nombre.

Ceux que décevait cette décadence reçurent souvent de la part de l’Esprit Saint l’appel explicite de se retirer au désert et d’y vivre comme des moines. Cet appel fut particulièrement ressenti en Égypte. Mieux que par le martyre sanglant, le martyre quotidien disposa des milliers de moines à la vie éternelle en les confrontant à leur misère. Il y eut en premier lieu de grands saints, suscités par Dieu. Saint Antoine du désert, par exemple, fut violemment attaqué par le démon qui le tentait de tous les péchés possibles. Loin de se contenter de simplement lui résister en restant vertueux, il devint un homme humble et aimant. Lorsqu’il eut découvert que l’ordre spirituel qui plait à Dieu est celui qui met au sommet de tout l’amour de Dieu et du prochain, qui établit comme base de tout l’humilité et qui, en troisième lieu, cultive le reste des vertus, il fut béni de Dieu. Aidé par des charismes (don de faire des miracles par exemple), il reçut de Dieu la mission de créer un ordre monastique pour faire découvrir aux jeunes moines la véritable vie de sainteté.

Mais Dieu prit aussi le moyen de sauver les moines orgueilleux, ceux qui venaient au désert afin de gagner le Ciel à la puissance de leur vertu. Logiques avec eux-mêmes, ceux-là s’imposèrent des pénitences terribles. Dieu les laissait faire avec patience. Sa seule arme fut le temps. Après quelques mois et, pour les plus entêtés, quelques années de résistance, la plupart s’écroulait. Ils retombaient d’abord dans leurs faiblesses sexuelles puis ils étaient frappés par un ennui particulier de l’âme qu’on nomme l’acédie[81] (sorte d’overdose des choses spirituelles, maladies des contemplatifs). Leur existence devenait tantôt monotone, tantôt attaquée de tout côté par leurs passions. Ils péchèrent, furent déçus par eux-­mêmes. Presque tous se découvrirent bien misérables. Or, je l’ai dit, il y a dans cette découverte de sa misère un premier pas dans la mise à mort de l’orgueil… En fin de compte, seuls restaient en danger ceux qui mourraient en se croyant digne du Ciel.

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L’orgueil des premiers théologiens et l’élaboration du Credo

« Des faux prophètes surgiront nombreux et abuseront bien des gens.[16] »

Parallèlement, dans les cités de l’Empire, les évêques et les chrétiens libérés de la crainte du martyre eurent du temps pour faire de la théologie. Diverses conceptions de la Trinité naquirent. Chacun cherchait la vérité sur Dieu et le peuple se passionnait pour ces débats. Dieu permit la prédication de beaucoup d’hérétiques. Il laissait faire afin que, de la lutte, sorte la prière et, de la prière, apparaisse la vérité. Mais il ne permit jamais que l’Église tombe tout entière dans l’erreur[17]. Par contre, la venue de faux prophètes poussa les évêques à mieux le connaître.

Mais, très vite, parce que la science enfle, on se mit à défendre la vérité plus par amour de sa propre intelligence que par amour pour Dieu. On en fit même un motif politique, allant jusqu’à adhérer à telle théorie parce qu’elle était soutenue par tel prince. Il y eut des mensonges, de la corruption, des meurtres. Cela déplut au Ciel. Dans l’autre monde, à l’heure de la mort, arrivait une foule de chrétiens hérétiques ou non et tout aussi sûrs les uns que les autres d’aller au paradis pour avoir défendu avec dureté la vraie doctrine.

Arrivé à ce niveau de notre description de l’Histoire Sainte, on peut constater qu’elle se résume ainsi : « A chaque génération son péché. A chaque génération sa forme d’orgueil. A chaque génération son fléau envoyé par Dieu en vue de l’humilité ».

Alors Dieu se comporta de la même façon qu’au temps de la tour de Babel[18]. « Dieu dit: Voici que tous ne font qu’un seul peuple et ne parlent qu’une seule langue, et ce n’est que le début de leurs entreprises! Main­tenant, aucun dessein ne sera irréalisable pour eux. Allons! Descendons! Et là, confondons leur langage pour qu’ils ne s’entendent plus les uns les autres ». Dieu[19] divisa donc l’Église en plusieurs communautés séparées et ennemies. Divisée, elle était plus faible; plus faible, elle obtenait moins de gloire humaine. Plus humble, elle était mieux préparée à l’amour donc à la vie éternelle.

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A partir de 632. L’islam, fouet de Dieu pour la sanctification des chrétiens

(Selon moi… Au lecteur d’en juger[20])

« A l’Ange de l’Église de Laodicée, écris: Ainsi parle l’Amen, le Témoin fidèle et vrai, le Principe de la création de Dieu. Je connais ta conduite: tu n’es ni froid ni chaud - que n’es-tu l’un ou l’autre! -- Ainsi, puisque te voilà tiède, ni chaud ni froid, je vais te vomir de ma bouche. Tu t’imagines: me voilà riche, je me suis enrichi et je n’ai besoin de rien; mais tu ne le vois donc pas: c’est toi qui es malheureux, pitoyable, pauvre, aveugle et nu! Aussi, suis donc mon conseil: achète chez moi de l’or purifié au feu pour t’enrichir.[21] »

La mosquée du prophète.

Parmi toutes les divisions envoyées ou permises par Dieu, une est particulière. Il s’agit de l’islam*. Dieu vit un homme qui marchait en conduisant une caravane dans le désert d’Arabie. Lorsque arriva la nuit, il se retira loin de ses compagnons pour méditer. Il s’appelait Mahomet. Attention, les pensées de Dieu ne sont pas celles des hommes. Avant de rejeter l’islam dans le rang des sectes qui auraient réussi, il faut se souvenir de la remarque pleine de sagesse de Gamaliel rapportée par les Actes des Apôtres[22] à propos du christianisme naissant. Lui aussi était persuadé que Jésus était un imposteur, que Dieu ne pouvait avoir un fils ou se faire homme. Il pensait sincèrement que les disciples avaient caché le corps de cet illuminé pour faire croire à sa résurrection. Pourtant, il était sage. Il savait que le mystère de Dieu est grand. Les chefs des Juifs avaient envoyé partout des émissaires chargés de faire arrêter et exécuter les premiers chrétiens. L’un d’entre eux, Saul de Tarse, « ne respirait que menaces et carnage à l’égard des disciples du Seigneur »[23]. Or, lors d’une réunion au Sanhédrin, Gamaliel prit la parole. « C’était un docteur de la Loi respecté de tout le peuple. Il dit aux sanhédrites: "Hommes d’Israël, prenez bien garde à ce que vous allez faire à l’égard de ces gens-là. A présent donc, je vous le dis, ne vous occupez pas de ces gens-là, laissez-les. Car si leur propos ou leur oeuvre vient des hommes, elle se détruira d’elle-même; mais si vraiment elle vient de Dieu, vous n’arriverez pas à les détruire. Ne risquez pas de vous trouver en guerre contre Dieu." On adopta son avis. »

Il est important que nous jugions de l’islam avec la même sagesse. Plus d’une fois dans l’Écriture, Dieu a surpris son peuple. Ce qui d’un premier abord apparaît comme impossible, il le fait. L’un des exemples les plus étonnants de son action mystérieuse se trouve dans l’Ancien Testament. Dieu peut-il lutter contre lui-même? Dieu peut-il vouloir la destruction de son propre Temple? Non répondirent unanimement les Docteurs d’Israël. Ils jugèrent fou le pseudo-prophète qui venait de vaticiner le contraire[24]: « Et maintenant, puisque vous avez commis tous ces actes -oracle de Yahvé- puisque vous n’avez pas écouté quand je vous parlais instamment et sans me lasser, et que vous n’avez pas répondu à mes appels, je vais traiter ce Temple qui porte mon nom, et dans lequel vous placez votre confiance, ce lieu que j’ai donné à vous et à vos pères, comme j’ai traité Silo. Je vais le détruire. » Jérémie paya son audace. Mais le Temple fut vraiment détruit quelques années plus tard. Les chefs des Juifs comprirent qu’ils avaient été trop rapides à qualifier Jérémie d’hérétique. Ils lui construisirent un mausolée…

L’islam vient-il de Dieu ?

A propos de l’origine de l’islam, il est très difficile d’être absolument concluant car l’Écriture sainte et le Magistère de l’Église ne donnent pas d’enseignements définitifs sur son origine. Depuis le concile Vatican II, l’Église appelle simplement à un regard de respect. Il distingue la marque du nom de Dieu, non seulement dans l’islam, mais aussi dans les autres traditions religieuses qu’il cite. Il a reconnu la riche valeur de la foi et de la morale musulmane[25]. « Le dessein de salut enveloppe également ceux qui reconnaissent le Créateur, en tout premier lieu les musulmans qui professent avoir la foi d’Abraham, adorent avec nous le Dieu unique, miséricordieux, futur juge des hommes au dernier jour. » Ce respect de l’Église est important. Il montre qu’il n’est plus possible de considérer l’islam ou les autres religions comme de simples "Antichristianismes", venus du démon.

Mais une telle position ne nourrit que le cœur. Elle ne peut suffire à une intelligence croyante. D’où vient l’islam? Pour répondre, il faut s’efforcer de voir s’il existe des prophéties bibliques à propos de cette religion et si elle s’y reconnaît. Il s’agit de la deuxième religion monothéiste du monde. Elle touche plus d’un milliard de fidèles. Il ne peut manquer d’y avoir quelque texte biblique prophétisant sur son avenir.

Or il est remarquable de constater que la référence première des musulmans est le patriarche Abraham, et ils désirent se soumettre à Dieu comme lui-même s’est soumis. Ils se disent fils d’Abraham par son fils Ismaël. C’est donc du côté des promesses faites à Abraham qu’il faut chercher.

La lettre des Écritures est alors surprenante. On y apprend effectivement qu’Abraham a eu deux fils, et non un seul et que ces fils reçurent tous deux une promesse de bénédiction de Dieu. Il convient de rappeler ici l’histoire, en la prenant à sa source même.

La grande tristesse d’Abraham, ce pasteur sémite, était de ne jamais pu avoir d’enfant.

« La parole de Yahvé fut adressée à Abram[26], dans une vision: "Ne crains pas, Abram! Je suis ton bouclier, ta récompense sera très grande." Abram répondit: "Mon Seigneur Yahvé, que me donnerais-tu? Je m’en vais sans enfant…". Alors cette parole de Yahvé lui fut adressée: "Ce n’est pas un serviteur qui sera ton héritier, mais bien quelqu’un issu de ton sang." Il le conduisit dehors et dit: "Lève les yeux au ciel et dénombre les étoiles si tu peux les dénombrer" et il lui dit: "Telle sera ta postérité." Abram crut en Yahvé, qui le lui compta comme justice. »[27]

Ismaël, figure allégorique de l’islam

Ismaël

Quelques mois après, la promesse tardait à se réaliser. Sarah, épouse d’Abraham, s’impatienta et lui dit, dans son bon sens[28]: « "Vois, je te prie: Yahvé n’a pas permis que j’enfante. Va donc vers ma servante. Peut-être obtiendrai-je par elle des enfants." Et Abram écouta la voix de Sarah. Ainsi, au bout de dix ans qu’Abram résidait au pays de Canaan, sa femme Sarah prit Agar l’Égyptienne, sa servante, et la donna pour femme à son mari, Abram. Celui-ci alla vers Agar, qui devint enceinte. »

Ainsi, le fils aîné d’Abraham fut celui d’une esclave, d’une muslim selon la terminologie sémitique.

Ici, il convient d’être attentif. Quel est cet enfant premier-né et que dit la Bible de lui, de son avenir?

« Lorsque Agar se vit enceinte, sa maîtresse ne compta plus à ses yeux. Alors Sarah dit à Abram: "Tu es responsable de l’injure qui m’est faite! J’ai mis ma servante entre tes bras et, depuis qu’elle s’est vue enceinte, je ne compte plus à ses yeux. Que Yahvé juge entre moi et toi!" Abram dit à Sarah: "Eh bien, ta servante est entre tes mains, fais-lui comme il te semblera bon." Sarah la maltraita tellement que l’autre s’enfuit de devant elle. L’Ange de Yahvé la rencontra près d’une certaine source au désert, la source qui est sur le chemin de Shur. Il dit: "Agar, servante de Sarah, d’où viens-tu et où vas-tu? "Elle répondit: "Je fuis devant ma maîtresse Sarah." L’Ange de Yahvé lui dit: "Retourne chez ta maîtresse et sois-lui soumise." L’Ange de Yahvé lui dit: "Je multiplierai beaucoup ta descendance, tellement qu’on ne pourra pas la compter." L’Ange de Yahvé lui dit: "Tu es enceinte et tu enfanteras un fils, et tu lui donneras le nom d’Ismaël, car Yahvé a entendu ta détresse. Celui-là sera un onagre d’homme, sa main contre tous, la main de tous contre lui, il s’établira à la face de tous ses frères". »[29]

Ainsi, l’enfant fut béni par Dieu après sa conception. Dieu ne fut pas à l’origine de sa naissance mais il le bénit tout de même, à cause d’Abraham. Et sa bénédiction fut grande!

D’autres prophéties bibliques furent données par la suite concernant Ismaël. Sarah, qui était une femme terrible, chassa à nouveau l’enfant de la servante après la naissance d’Isaac, le fils qui lui vint dans sa vieillesse[30]: « Lorsque cela arriva, Dieu dit à Abraham: "Ne te chagrine pas à cause du petit et de ta servante, tout ce que Sara te demande, accorde-le, car c’est par Isaac qu’une descendance perpétuera ton nom, mais du fils de la servante je ferai aussi une grande nation car il est de ta race." Abraham se leva tôt, il prit du pain et une outre d’eau qu’il donna à Agar, et il mit l’enfant sur son épaule, puis il la renvoya. Elle s’en fut errer au désert de Bersabée. Quand l’eau de l’outre fut épuisée, elle jeta l’enfant sous un buisson et elle alla s’asseoir vis-à-vis, loin comme une portée d’arc. Elle se disait en effet: "Je ne veux pas voir mourir l’enfant!" Elle s’assit vis-à-vis et elle se mit à crier et à pleurer. Dieu entendit les cris du petit et l’Ange de Dieu appela du ciel Agar et lui dit: "Qu’as-tu, Agar? Ne crains pas, car Dieu a entendu les cris du petit, là où il était. Debout! Soulève le petit et tiens-le ferme, car j’en ferai une grande nation." Dieu dessilla les yeux d’Agar et elle aperçut un puits. Elle alla remplir l’outre et fit boire le petit. Dieu fut avec lui, il grandit et demeura au désert, et il devint un tireur d’arc. Il demeura au désert de Parân et sa mère lui choisit une femme du pays d’Égypte. »

Ainsi, une deuxième fois, Ismaël fut béni et quelques précisions sur son destin furent données: son lien avec le désert (l’islam naquit dans le Sahara), le fait qu’il devint tireur d’arc, (donc une religion de la guerre).

Parce que la figure d’Ismaël semble une allégorie* de l’islam, la fin de sa vie d’Ismaël mérite aussi d’être rapportée[31]. « Voici la descendance d’Ismaël, le fils d’Abraham, que lui enfanta Agar, la servante égyptienne de Sara. Voici les noms des fils d’Ismaël, selon leurs noms et leur lignée: le premier-né d’Ismaël Nebayot, puis Qédar, Adbéel, Mibsam, Mishma, Duma, Massa, Hadad, Téma, Yetur, Naphish et Qédma. Ce sont là les fils d’Ismaël et tels sont leurs noms, d’après leurs douars et leurs camps, douze chefs d’autant de clans. Voici la durée de la vie d’Ismaël: 137 ans. Puis il expira; il mourut et il fut réuni à sa parenté. Il habita depuis Havila jusqu’à Shur, qui est à l’est de l’Égypte, en allant vers l’Assyrie. Il s’était établi à la face de tous ses frères. »

Isaac, figure du christianisme

Isaac

Le second fils d’Abraham fut appelé Isaac. L’annonce de sa naissance fut très différente. Elle fut décidée par Dieu lui-même lors de son apparition au chêne de Mambré sous la forme de trois personnes (la Trinité fut révélée ce jour-là pour la première fois). Il fut conçu par la femme libre d’Abraham, c’est-à-dire par Sara. Et Dieu dit à propos d’Isaac et d’Ismaël[32]: « C’est par Isaac qu’une descendance perpétuera ton nom mais du fils de la servante je ferai aussi une grande nation car il est de ta race. »

Isaac et Ismaël, deux frères, deux religions

Il y a là une allégorie* qui concerne les deux religions issues du judaïsme, à savoir l’islam et le christianisme. Les détails de ressemblance sont plus que frappants.

En effet, le christianisme fut créé immédiatement par une initiative de Dieu qui vint lui-même le prêcher sur terre. De plus, cette religion reçut la révélation du Mystère de la Trinité symbolisée dans l’histoire d’Isaac au chêne de Mambré[33] par les trois personnes qui étaient un seul Dieu. Les chrétiens sont appelés enfants et amis de Dieu de même qu’Isaac est enfant d’Abraham par son épouse légitime, sans passer par la servante. Les musulmans se nomment eux-mêmes les esclaves de Dieu (muslim), ce qui est symbolisé dans cette prophétie par leur mère qui était esclave égyptienne. Le mot arabe ‘islam’ signifie ‘soumission, abandon a Dieu’ La formule ‘inch Allah’ (Si Dieu le veut) exprime la foi et la soumission en l’action constante et souveraine de Dieu dans sa création. La formule ‘Mektoub’ (c’était écrit) est plus populaire. Elle exprime une tendance à la passivité respectueuse de Dieu devant les malheurs.

Si l’on suit la lettre de l’Écriture, le christianisme est l’Alliance voulue explicitement par Dieu et symbolisée par Isaac. Quant à l’islam, si on en croit cette prophétie, il vient de l’initiative des hommes, de même qu’Ismaël naquit par l’initiative personnelle d’Abraham et de Sarah, sans ordre de Dieu. Il fut inventé par Mahomet. Mais Dieu le bénit par la suite et le rendit extrêmement fécond à cause de la foi dont faisaient preuve les musulmans, suivant en cela l’exemple de leur Père Abraham.

Si l’on regarde avec précision les diverses prophéties qu’ajoute la Bible concernant le destin d’Ismaël, on est frappé de constater qu’il s’agit du portrait de l’islam tel que nous le voyons depuis 1422 ans. Le livre de la Genèse 16 donne un portrait prophétique d’Ismaël, donc de l’islam, qui correspond trait pour trait à sa façon d’exister depuis des siècles: Il sera un onagre d’homme (c’est-à-dire comme un âne indomptable, obtus, peu cultivé mais intransigeant pour ce qui concerne sa foi)­. Sa main contre tous et la main de tous contre lui (à cause de cette intransigeance pour la foi, qu’il aura tendance à imposer). Il s’établira à la face de tous ses frères (à commencer par son frère chrétien qu’il supplanta en Afrique du Nord, puis en Turquie). La Genèse précise[34] qu’il devint un tireur d’arc (donc par métaphore, un peuple guerrier se répandant par la conquête militaire). « Douze tribus sortirent de lui », à l’image des nations revendiquées comme terres musulmanes: Arabes, Perses, Égyptiens, Indonésiens, Pakistanais (d’origine indienne), Africains noirs, Turcs, nations Slaves du Caucase, peuples musulmans de Chine, Afghans.

Première objection : L’islam ne peut avoir été dicté par Dieu…

Diverses objections viennent à l’esprit de tout chrétien. Comment Dieu peut-il bénir* une hérésie? L’islam enseigne des dogmes contradictoires avec la foi chrétienne. Tout ce qui a rapport avec la possibilité d’une vie surnaturelle est nié: La Trinité, l’incarnation du Verbe, sa passion et sa résurrection, l’élévation de l’homme à l’amitié avec Dieu. Selon beaucoup d’auteurs musulmans, le paradis est réduit à un bonheur humain et la vision face à face de Dieu est impossible. En ce sens, on peut dire que cette religion consiste en une dégradation grave des promesses du Christ. D’ami, elle réduit l’homme à être serviteur de Dieu. En conséquence, à cause de ses erreurs, il est impossible pour un croyant chrétien que l’islam ait été directement dicté par Dieu, quoiqu’en dise Mahomet. On voit mal Dieu dicter de lui-même des choses fausses. On le voit souvent parler dans la Bible de manière ambiguë. Il laisse l’homme se fourvoyer dans des interprétations qui ne sont pas les siennes, parce que les mots n’ont pas le même sens pour lui que pour l’homme. Mais on ne le voit jamais mentir. Par contre, souvent il joue de l’ambiguïté des mots.[35]

… mais il a été béni de Dieu

En effet, une religion ne peut subsister 1423 ans et devenir la deuxième au monde si elle n’en reçoit pas de Dieu l’autorisation. Quand je dis que Dieu béni* tel ou telle communauté humaine, cela signifie qu’il la laisse se multiplier. Il lui donne du pouvoir, de la réussite. Jésus l’affirme à Pilate lorsqu’il se vantait de son pouvoir sur lui: « "Tu ne me parles pas? Ne sais-tu pas que j’ai pouvoir de te relâcher et que j’ai pouvoir de te crucifier?" Jésus lui répondit: "Tu n’aurais aucun pouvoir sur moi, si cela ne t’avait été donné d’en haut.[36] »

Dieu préfère l’humilité à l’orthodoxie arrogante

Pour répondre de manière chrétienne, il est nécessaire de revenir à ce qui transparaît dans l’évangile et qui semble être une des bases de la révélation du Christ. Il arrive que, dans son obstination, l’homme contraigne Dieu à choisir entre deux termes qui, normalement, devraient être unis. Il s’agit de l’humilité et de la compréhension de la vérité. Dans ce but, il préfèrera l’humilité à la vérité. Dès le début du christianisme, saint Jean Chrysostome l’affirmait: « Donnez-moi deux attelages pour une course de chars. Que les chevaux du premier s’appellent Vérité (christianisme) et Orgueil, ceux du second s’appellent Hérésie et Humilité. Et bien vous verrez le second attelage remporter la victoire, non à cause de l’erreur mais à cause de la force du cheval Humilité. » Concrètement, il importe moins pour Dieu qu’un homme soit chrétien si, parallèlement, il se conduit comme un égoïste ou avec la morgue d’un pharisien. C’est, semble-t-il, l’explication de la bénédiction de l’islam par Dieu[37].

C’est un travail spirituel extrêmement douloureux car il remet en question des aspects habituels et déviés de notre espérance. Il ne nous a jamais été promis que le christianisme vaincrait les autres religions ou l’athéisme et implanterait sa foi ici-bas, sur terre. Il a été promis que le Christ vaincrait puissamment à l’heure la mort et dans l’autre monde par son apparition glorieuse, accompagné des saints et des anges. Nous confondons souvent espoir et espérance théologale. L’espoir attend quelque chose d’humain, ici-bas. L’espérance attend la victoire finale de Dieu dans l’éternité. En ce qui concerne l’Église, il nous a été annoncé que sa fin serait extrêmement glorieuse, c’est-à-dire (et c’est la seule interprétation légitime d’après le catéchisme de l’Église catholique[38]), qu’elle ressemblera à la fin du Christ: l’Église finira petite humble, crucifiée et priante. Elle sera si humble qu’elle provoquera le retour glorieux du Christ. Évidemment, ceux qui rêvent du retour du succès politique ici-bas ne peuvent qu’être choqués.

Une seule chose importe à Dieu en définitive: sauver tous les hommes et donc façonner leur cœur dans la plus grande disposition à son mystère. Ces qualités se résument à deux: humilité et amour. Peu lui importe la survie de l’Afrique du Nord ou de l’Égypte chrétienne si leur christianisme devient objet de perdition pour leurs peuples.

Dieu peut parfois autoriser (c’est-à-dire, selon l’expression biblique, bénir*) ce qui apparaît à un regard superficiel comme un désastre, à cause d’un bien plus profond qu’il en fait sortir et qui a rapport avec le salut éternel des hommes[39].

Tout au long de l’histoire biblique, des exemples de ce comportement sont donnés. Il semble se faire ennemi des projets de l’homme, à chaque fois qu’il y discerne l’orgueil et le désir de puissance.

Le premier exemple biblique est donné à Babel[40]. « Comme les hommes se déplaçaient à l’orient, ils trouvèrent une vallée au pays de Shinéar et ils s’y établirent. Ils se dirent l’un à l’autre: "Allons! Faisons des briques et cuisons-les au feu!" La brique leur servit de pierre et le bitume leur servit de mortier. Ils dirent: "Allons! Bâtissons-nous une ville et une tour dont le sommet pénètre les cieux! Faisons-nous un nom et ne soyons pas dispersés sur toute la terre!" Or Yahvé descendit pour voir la ville et la tour que les hommes avaient bâtie. Et Yahvé dit: "Voici que tous font un seul peuple et parlent une seule langue, et tel est le début de leurs entreprises! Maintenant, aucun dessein ne sera irréalisable pour eux. Descendons! Et là, confondons leur langage pour qu’ils ne s’entendent plus les uns les autres." Yahvé les dispersa de là sur toute la face de la terre et ils cessèrent de bâtir la ville. Aussi la nomma-t-on Babel, car c’est là que Yahvé confondit le langage de tous les habitants de la terre et c’est de là qu’il les dispersa sur toute la face de la terre. »

On pourrait croire que ce texte est périmé, qu’il ne s’applique plus à l’humanité. C’est l’erreur que firent les Juifs à l’époque de Salomon. Dieu avait donné à ce roi une puissance et une unité populaire jamais observée. Alors, comme il est naturel dans ce cas, Salomon s’enorgueillit, prit un nombre incroyable de femmes, imposa à son peuple des corvées et des impôts insupportables. Yahvé dit à Salomon[41]: « "Parce que tu t’es comporté ainsi et que tu n’as pas observé mon alliance et les prescriptions que je t’avais faites, je vais sûrement t’arracher le royaume et le donner à l’un de tes serviteurs. Seulement je ne ferai pas cela durant ta vie, en considération de ton père David; c’est de la main de ton fils que je l’arracherai. Encore ne lui arracherai-je pas tout le royaume: je laisserai une tribu à ton fils, en considération de mon serviteur David et de Jérusalem que j’ai choisie. »

 

Élie
Élie, figure de l’islam

Deuxième objection : La guerre peut-elle être voulue par le Dieu de Jésus Christ ?

Le Seigneur dit en saint Mathieu[42]: « Vous aurez aussi à entendre parler de guerres et de rumeurs de guerres: voyez, ne vous alarmez pas, il faut que cela arrive, mais ce n’est pas encore la fin »[43] Et ailleurs[44]: « Lorsque l’on dira paix et sécurité, c’est alors que fondra sur eux tout d’un coup la perdition, comme les douleurs de la femme enceinte, et ils ne pourront y échapper. »

L’islam a connu, après Mahomet: Deux grandes expansions dues à des nomades aguerris et galvanisés par leur foi: 1- A la fin du VIIe siècle, des arabes, “les cavaliers d’Allah”, iront porter l’islam jusqu’à l’Indus et jusqu’à Tours et Poitiers. 2- Au XVe siècle, les Turcs s’empareront des Balkans et parviendront aux portes de Vienne, qui les verra revenir en 1682. Il connaîtra aussi deux régressions: la perte de l’Espagne au XVe siècle, la perte des Balkans au XIXe siècle. Certes, la guerre sainte est un devoir pour la communauté islamique, mais les conversions des masses furent le plus souvent opérées sous l’influence des commerçants, des marins, et des pèlerins. Toute expédition militaire des musulmans n’est pas à identifier au devoir de la guerre sainte

Pour comprendre comment la guerre a pu être permise par Dieu, il faut revenir aux sources mêmes de la révélation judaïque. J’aborderai ultérieurement[45] plus à fond la question du sens de toutes les souffrances. Je montrerai à quel point la révélation du Christ achève et donne sens à ce que les Juifs devinaient déjà. Mais, là où nous sommes rendus, la sagesse laborieusement apprise par les Juifs suffit.

Que faisons-nous sur terre? Pourquoi nous faut-il passer par ce lieu de fragilité où le mal frappe, sans cause apparente? Visiblement, comprirent les Juifs, il est une qualité qui tient au cœur de Yahvé plus que toute autre: Il ne supporte pas l’orgueil. L’humilité semble être appréciée par lui au-dessus de tout. En conséquence, toute personne que Dieu crée ici-bas, afin d’apprendre l’humilité, est marqué tôt ou tard par la faiblesse et la mort. Marie, mère de Jésus, jeune fille formée par le plus pur des judaïsmes, avait compris ce fait. Elle le chante dans son Magnificat[46]: « Il a déployé la force de son bras, il a dispersé les hommes au cœur superbe. Il a renversé les potentats de leurs trônes et élevé les humbles, Il a comblé de biens les affamés et renvoyé les riches les mains vides. »

Il semblerait que Dieu veut apprendre quelque chose d’important à l’homme, quelque chose en rapport avec son salut. Ainsi en va-t-il de la guerre. Celui qui prend l’épée fait périr les autres par l’épée mais finit, tôt ou tard par périr lui-même. Et la chose semble universelle.

Le peuple juif en fut le témoin et victime. Pour le comprendre, une histoire vaut mieux qu’une théorie. Il s’agit de la plus horrible histoire que la Bible contienne. Elle met en scène l’homme dans sa nature la plus réaliste et la façon dont il apprend, à ses dépends, qu’il n’est décidément rien[47]. En fait, elle nous met en scène nous-mêmes, mais nous ne le comprenons pas encore.

« En ce temps-là, il y avait un homme, un lévite, qui résidait au fond de la montagne d’Éphraïm. Dans un moment de colère sa concubine le quitta pour rentrer dans la maison de son père, et elle y resta quatre mois. Son mari alla la trouver pour parler à son cœur; quand elle le vit arriver, elle se réjouit fort. Le cinquième jour, le lévite se leva pour partir et sa concubine le suivit. Ils arrivèrent en vue de Gibéa. Il s’assit sur la place de la ville. Survint un vieillard qui dit: "Sois le bienvenu chez moi, mais ne passe pas la nuit sur la place." Pendant qu’ils se réconfortaient chez lui, voici que des gens de la ville, des vauriens, s’attroupèrent autour de la maison et, frappant à la porte à coups redoublés, ils dirent au maître de la maison: "Fais sortir l’homme qui est venu chez toi, que nous couchions avec lui." Alors le maître de la maison sortit vers eux et leur dit: "Non, mes frères, je vous en prie, ne soyez pas des criminels. Je vous donnerai plutôt ma fille qui est vierge". Ces gens ne voulurent pas l’écouter. Alors l’homme prit sa concubine et la leur amena dehors. Ils la violèrent, ils abusèrent d’elle toute la nuit jusqu’au matin et, au lever de l’aurore, ils la lâchèrent. Vers le matin la femme s’en vint tomber à l’entrée de la maison de l’homme chez qui était son mari et elle resta là jusqu’au jour. Au matin son mari se leva et, ayant ouvert la porte de la maison, il sortait pour continuer sa route, quand il vit que la femme, sa concubine, gisait à l’entrée de la maison, les mains sur le seuil. "Lève-toi, lui dit-il, et partons!" Pas de réponse. Alors il la chargea sur son âne et il se mit en route pour rentrer chez lui. Arrivé à la maison, il prit un couteau et, saisissant sa concubine, il la découpa, membre par membre, en douze morceaux, puis il l’envoya dans tout le territoire d’Israël. Il donna des ordres à ses émissaires, disant: "Vous direz à tous les Israélites: A-t-on jamais vu pareille chose?"

Tous les Israélites sortirent donc, et, comme un seul homme, la communauté se réunit. Les chefs de tout le peuple, toutes les tribus d’Israël assistèrent à l’assemblée du peuple de Dieu, 400.000 hommes de pied, sachant tirer l’épée. Les tribus d’Israël envoyèrent des émissaires dans toute la tribu de Benjamin pour dire: "Maintenant, livrez ces hommes, ces vauriens, qui sont à Gibéa, pour que nous les mettions à mort et que nous fassions disparaître le mal du milieu d’Israël." Mais les Benjaminites ne voulurent pas écouter leurs frères les Israélites.

Les gens d’Israël se mirent en marche pour monter à Béthel, pour consulter Dieu: "Qui de nous montera le premier au combat contre les Benjaminites?" Et Yahvé répondit: "C’est Juda qui montera le premier." Au matin, les gens d’Israël s’avancèrent au combat contre Benjamin. Mais les Benjaminites sortirent de Gibéa et, ce jour-là, ils massacrèrent 22.000 hommes d’Israël. Les Israélites vinrent pleurer devant Yahvé jusqu’au soir, puis ils consultèrent Yahvé en disant: "Dois-je encore engager le combat contre les fils de Benjamin mon frère?" Et Yahvé répondit: "Marchez contre lui!" Le second jour les Israélites s’approchèrent donc des Benjaminites, mais, en cette seconde journée, Benjamin massacra encore 18.000 hommes des Israélites. Alors tous les Israélites et tout le peuple s’en vinrent à Béthel, ils pleurèrent, ils s’assirent là devant l’Arche d’alliance de Yahvé, ils jeûnèrent toute la journée jusqu’au soir et ils offrirent des holocaustes et des sacrifices de communion devant Yahvé; puis les Israélites consultèrent Yahvé. Et Yahvé répondit: "Marchez, car demain, je le livrerai entre vos mains." Alors Israël plaça des troupes en embuscade tout autour de Gibéa. Les Benjaminites se dirent: "Les voilà battus devant nous comme la première fois", mais l’embuscade d’Israël surgit de sa position. Yahvé battit Benjamin devant Israël et, en ce jour, les Israélites tuèrent à Benjamin 25.100 hommes. Ceux de l’embuscade se hâtèrent de s’élancer contre Gibéa; ils se déployèrent et passèrent toute la ville au fil de l’épée, femmes et enfants compris. Six hommes de Benjamin tournèrent le dos et s’enfuirent au désert. Ils y restèrent quatre mois.

Fatigué, le peuple se rendit à Béthel, il resta là assis devant Dieu jusqu’au soir, poussant des gémissements et pleurant à gros sanglots: "Yahvé, Dieu d’Israël, disaient-ils, une tribu a été retranchée d’Israël. Que ferons-nous pour procurer des femmes à ceux qui restent, puisque nous avons juré par Yahvé de ne pas leur donner de nos filles en mariage?" Ils s’informèrent alors: "Quel est celui d’entre les tribus d’Israël, qui n’est pas monté auprès de Yahvé à Miçpa?" Et il se trouva que personne de Yabesh en Galaad n’était venu au camp, à l’assemblée. Alors la communauté y envoya 12.000 hommes d’entre les vaillants avec cet ordre: "Allez, et vous passerez au fil de l’épée les habitants de Yabesh en Galaad, ainsi que les femmes et les enfants mais vous laisserez la vie aux vierges." Et c’est ce qu’ils firent. Parmi les habitants de Yabesh de Galaad ils trouvèrent 400 jeunes filles vierges, et ils les emmenèrent au camp. Toute la communauté envoya alors des émissaires aux six Benjaminites qui se trouvaient au Rocher de Rimmôn pour leur proposer la paix. Benjamin revint alors. On leur donna les femmes de Yabesh. Les Israélites se dispersèrent alors pour regagner chacun sa tribu et son clan, et s’en retournèrent de là chacun dans son héritage. En ce temps-là il n’y avait pas de roi en Israël et chacun faisait ce qui lui semblait bon. »

Cette histoire est probablement réelle. Les détails sont crédibles car peu flatteurs pour Israël. On aurait du mal à y discerner un travail d’embellissement. Les femmes y sont traitées comme du bétail par des hommes durs dont pas un seul n’est juste. Ils veulent la guerre. Ils l’ont. Dieu l’accepte et se fait même pour eux prophète. Il leur parle mais ses paroles sont ambiguës. Eux se trompent, ne comprennent pas. Le malheur fond sur eux tous. De tout ce malheur, une seule chose apparaît: l’humanité est bien pitoyable.

Or ces hommes du passé sont à l’image de tous les habitants de la terre, de nous-mêmes. Nous sommes persuadés que nous sommes justes car nous n’avons jamais été confrontés à notre vraie nature. Il suffit de rester sans nourriture deux jours pour voir se réveiller en nous la réalité. Qui pourra nous faire comprendre à quel point nous ne sommes que des pauvres pécheurs[48]? Comment fait Dieu pour révéler à l’homme installé sur la terre ce qu’il ne veut pas voir? Il le soumet à des expériences négatives. Parmi elles, la guerre extérieure manifeste la proximité de sa propre fin, de ses limites. Non seulement chaque individu est amené à penser à sa propre mort mais aussi les nations et les religions dont le destin dépend du sort des armes.

Au contraire, il arrive que la paix civile rende l’homme et les religions inconscients de la précarité de leur être. On peut alors se croire juste tout en se complaisant dans l’égoïsme et la vanité. Une fausse paix peut conduire l’homme ou la religion à oublier Dieu, le jugement dernier, la nécessité de bien se comporter, la nécessité d’être sans illusion sur soi… La recherche de Dieu dans la prospérité est exceptionnelle, à cause de la nature sensible de l’homme.

Le mal et les guerres perpétuelles qui règnent dans le monde provoquent chez beaucoup le rejet et la haine de Dieu. Mais, curieusement, cet effet est particulièrement visible chez ceux qui n’ont jamais subi la guerre. Ils accusent Dieu car ils n’ont pas encore eu l’occasion de prendre conscience que la guerre naît d’abord dans leur propre cœur.

Lorsqu’un homme frappé dans ce qu’il aime le plus rejette Dieu, c’est différent. Ce sentiment part alors non de l’orgueil mais de l’expérience. Il ne peut comprendre pourquoi il a été atteint. Il ne peut saisir que c’est en vue d’un bien éternel. Car la clef de tout est là: s’il n’y avait pas de vie après la mort, si le destin des hommes s’arrêtait ici-bas, alors l’histoire biblique de l’homme de Galaad qui livra sa concubine amoureuse afin de ne pas être lui-même violé, n’aurait pas de sens. Elle serait simplement réaliste et désespérée. Mais s’il est vrai que cette vie n’est pas la vraie vie, tout prend sens. S’il est vrai que Dieu recueille de l’autre côté du voile toutes ces vies détruites, qu’il les réconforte, leur explique pourquoi il a paru les tromper, alors il y a une justice. « C’était pour vous sauver. » L’homme agit un peu comme le petit enfant, qui recevant de son père une punition qui lui parait injustifiée, n’en découvre que plus tard le bien-fondé. De même les hommes, en découvrant au moment de leur mort la vraie raison du gouvernement divin sur eux, n’en éprouveront plus de scandale, sauf si l’orgueil est resté en eux. Telle est la finalité de la souffrance. Telle est la raison ultime de toutes les peines que subissent les hommes en ce monde. Le peuple juif en est témoin: les justes massacrés à Auschwitz ont appris dans leur chair à appeler Dieu, leur Sauveur.

Parmi les chrétiens, beaucoup refusent cette interprétation judaïque du mal[49]. Dieu ne peut de lui-même permettre ou vouloir le malheur, même pour éduquer les hommes. Le Dieu de Jésus-Christ est un Dieu de liberté! Pour ces théologiens, tout le mal sans exception vient du pari que Dieu a fait: il a laissé l’homme libre. Alors certains en ont profité pour faire le mal. Cette conception n’est qu’en partie réaliste. Elle expliquera sans problème le mal dont est source ou qui frappe un homme maître de ses actes comme Hitler. Il sème le vent et récolte la tempête. C’est justice. Mais elle n’expliquera jamais des maux qui ne concernent en aucun cas la liberté: la mort de ces nourrissons qu’à Auschwitz, par manque de place dans les chambres à gaz, on jeta vivant dans le feu.

Troisième objection : La disparition des Églises patriarcales

« Puisque tu n’auras pas servi Yahvé ton Dieu dans la joie et le bonheur que donne l’abondance de toutes choses, Yahvé suscitera contre toi une nation lointaine, des extrémités de la terre; comme l’aigle qui prend son essor. Ce sera une nation dont la langue te sera inconnue, une nation au visage dur, sans égard pour la vieillesse et sans pitié pour la jeunesse. Elle mangera le fruit de ton bétail et le fruit de ton sol, jusqu’à te détruire, sans te laisser ni froment, ni vin, ni huile, ni portée de vache ou croît de brebis, jusqu’à ce qu’elle t’ait fait périr. Elle t’assiégera dans toutes tes villes, jusqu’à ce que soient tombées tes murailles les plus hautes et les mieux fortifiées, toutes celles où tu chercheras la sécurité dans ton pays. Elle t’assiégera dans toutes les villes, dans tout le pays que t’aura donné Yahvé ton Dieu.[50] »

Une troisième objection va encore plus loin. L’islam s’est implanté dans des nations qui avaient été originellement gagnées au Christ, supprimant les Églises patriarcales en convertissant ses fidèles. Dieu peut-il avoir béni* un tel désastre pour son Évangile ? L’islam prêche une forme de guerre sainte qui lui permet de réussir son implantation par le calcul politique. La méthode habituelle est celle de l’impôt de capitation. Dans son Dictionnaire élémentaire de l’islam, Tahar Gaïd reconnaît et justifie cette pratique de l’islam qui ne consiste pas directement à convertir par la force mais par l’usage de l’impôt et par l’établissement des non-musulmans dans l’état de citoyens de seconde zone: « Il ne fait aucun doute, dit-il, que l’islam soumit à son influence de nombreuses contrées. La raison fondamentale de cette expansion territoriale ne visait pas tant la domination politique qu’à combattre le mal et l’iniquité, à établir la paix et la justice, en d’autres termes à rendre à Dieu ce qui lui est dû sur terre. Les populations conquises étaient libres de ne pas embrasser l’islam puisque trois possibilités leur étaient offertes avant le déclenchement des hostilités (sic): la conversion, le paiement d’un tribut qui assurerait leur protection, et en troisième lieu la guerre. De plus, après la victoire, il n’y avait pas recours à la violence pour imposer la nouvelle foi. La soumission à l’islam était un acte volontaire. Les populations avaient accueilli l’islam comme une religion libératrice, véhiculant les idées propres à relever la dignité humaine bafouée par le despotisme féodal et la tyrannie politique sous lesquelles elles étaient écrasées. Les grands hommes de l’islam qui portèrent haut l’étendard de la foi islamique ne pouvaient pas s’opposer à la théorie coranique qui n’habilite pas le croyant à faire usage de la force pour rallier les non-musulmans à leur religion: " Si Dieu l’avait voulu, il aurait fait de vous une seule communauté. Mais il égare qui il veut; il dirige qui il veut. Vous seriez interrogés sur ce que vous faisiez"[51]. » Par cette méthode, insensiblement, les chrétiens et les Juifs manquant de ferveur basculaient dans l’islam.

Mais une telle pratique, pourtant canonisée par le Coran, est-elle digne de Dieu? Selon l’Apocalypse[52], il s’agit plutôt d’une action du mal: « Nul ne pourra rien acheter ni vendre s’il n’est marqué du nom de la Bête. » Comme je l’ai déjà dit, Dieu peut bénir une telle religion, malgré ses pratiques douteuses, pour le salut des âmes. En effet, historiquement, le christianisme a eu deux propriétés sur les peuples. D’abord, il les libère. Il leur donne une maturité spirituelle et intellectuelle qui se traduit vite dans une grande prospérité matérielle. En un second temps, à cause de la nature d’un peuple devenu riche et cultivé, le christianisme a pour effet de provoquer un abus de la liberté au profit de la plus grande décadence. Saint Paul le dénonçait déjà à son époque[53]: « Vous en effet, mes frères, vous avez été appelés à la liberté; seulement, que cette liberté ne se tourne pas en prétexte pour la chair; Mais par la charité mettez-vous au service les uns des autres. »

A chaque fois qu’une nation chrétienne est ainsi entrée en décadence, les guerriers de l’islam sont arrivés et, tel l’aiguillon de la peur, ont forcé les chrétiens à retrouver leur ferveur ou à disparaître. Par deux fois, Dieu a préféré livrer des nations chrétiennes à l’esclavage de la soumission ou de la conversion à l’islam, plutôt que de laisser les fidèles chrétiens se perdre pour l’éternité (Afrique du Nord puis Grèce Asiatique). Cela pourrait se produire une troisième fois. L’Occident est, de façon très forte, confronté à cette décadence de la liberté chrétienne. Au nom de quoi en effet voit-on de nos jours les plus grandes abominations se réalisent dans un calme civique total contre ce qu’il y a de plus précieux au monde à savoir ses enfants, son conjoint et ses vieux parents ? La famille s’écroule au nom du bonheur individuel devenu dieu, au nom de l’équilibre de sa vie, de son plan de carrière ou de ses loisirs. Or, comme par hasard, en même temps que mai 68 faisait de l’hédonisme sa sagesse jusqu’à la mort, il introduisait les guerriers de l’islam dans ses banlieues. N’y-t-il pas là une surprenante coïncidence, « un esprit d’erreur venant de Dieu »[54], dirait la Bible?

« Celui-là sera un onagre d’homme, sa main contre tous, la main de tous contre lui, il s’établira à la face de tous ses frères.[55] » « Voici la durée de la vie d’Ismaël: 137 ans. Puis il expira; il mourut et il fut réuni à sa parenté. Il habita depuis Havila jusqu’à Shur, qui est à l’est de l’Égypte, en allant vers l’Assyrie. Il s’était établi à la face de tous ses frères.[56] »

Au VIIe siècle, au moment de la naissance de l’islam, l’Église chrétienne d’Orient était la religion officielle de l’Empire romain. Dans sa partie africaine, elle attiédissait le feu de la charité par un souci trop grand des choses du pouvoir. On adhérait trop souvent à tel ou tel courant de foi à cause de l’empereur de Constantinople, sans souci réel de la vérité. On s’enlisait dans des discussions théologiques sans fin qui avaient abouti à l’apparition de multiples hérésies et schismes. L’islam eut donc peu de peine à amener à elle les foules, à cause de la ferveur de sa jeunesse. Ceux qui ne se convertirent pas après la conquête militaire furent respectés mais réduits à l’état de citoyens de second ordre. Le monde fut donc divisé en deux religions qui, si elles voulaient subsister, devaient sans cesse réformer leurs mœurs et convertir leurs regards vers Dieu. L’islam reçut une part de gloire. Il donna son unité au monde arabe. Par la conquête et une habile occupation, elle déchristianisa le Proche Orient et l’Afrique du Nord. L’islam édifia une civilisation originale: agriculture, industrie, commerce se développent. Des grandes cités arabes eurent bientôt leurs universités célèbres, de riches bibliothèques: théologiens, philosophes, savants s’y rencontrèrent. Quant à la genèse de l’islam elle est la réalisation de la prophétie faite par Dieu à propos d’Ismaël[57]: « Il s’établira à la face de tous ses frères. »

L’islam n’échappa pas au gouvernement de ce Dieu qui aime l’humilité. Devenue puissante en quelques années, cette religion nouvelle s’était répandue de l’Égypte à l’Inde. Parce que l’homme est homme, partout où il réussit, les chefs musulmans furent contents d’eux. Ils se croyaient dignes du paradis. Le pouvoir leur faisait perdre la tête. Les musulmans se prirent pour les maîtres de l’univers. Dieu les divisa donc, très vite, avec l’urgence et la force qu’il convient à cette religion de la guerre: Sunnites*, chiites*, ismaéliens sont nés dans le sang et le meurtre des luttes de pouvoir.

Sept siècles plus tard, une deuxième fois, l’islam emporta la victoire sur un christianisme devenu tiède. Ce fut la perte de Byzance et de l’Empire romain d’Orient tout entier. Celui qui va en Turquie constate avec tristesse que bien des mosquées sont des églises reconverties. La cathédrale sainte Sophie est, pour toute âme orthodoxe*, un mur des lamentations. Mais les orthodoxes* furent guéris de leurs « byzantinades sans fin. »

Le fait que l’Église ait pratiquement disparu en Afrique du Nord et dans d’autres régions du monde pour être remplacée par l’islam est un désastre du moins en ce qui concerne la connaissance et l’amour immédiat de Jésus à court terme. Pourtant, pour celui qui sait regarder avec le regard de la foi et avec la distance de Dieu, il est certain qu’il sortit du bien pour la vie éternelle. Ce fut un bien pour l’Église qui, divisée et diminuée, en sortit moins sûre d’elle-même, plus pauvre devant le mystère des permissions de Dieu. C’est un bien pour l’islam qui l’oblige à constater que la puissance de son extension n’est pas infinie. Quant aux musulmans qui vivent avec pureté les préceptes du Coran*, mettant au premier plan Dieu et leurs frères humains et non la recherche du pouvoir au nom de Dieu, ils sont disposés de l’intérieur à se tourner vers Jésus quand il se manifeste à eux à l’heure de la mort. Dans les années qui suivirent la mort de Mahomet (632), l’histoire sainte de l’humanité est marquée par la pauvreté d’Églises soumises par l’islam en Orient, mais ferventes dans leur pauvreté et d’une Église qui tel le levain dans la pâte, façonne les peuples d’Occident.

Ce fut aussi un bien pour le salut des âmes. Les hommes avaient reçu la liberté du Christ. Ils en avaient abusé pour la transformer en une vie dissolue dans une fausse liberté. Soumis provisoirement sur cette terre à la soumission de l’islam, ils furent en fait libérés. L’esclavage de ses propres turpitudes est parfois plus lourd à porter que celui d’une religion de soumission. L’islam possède en effet de riches valeurs spirituelles. Il ne fait pas entrer dans le salut, c’est-à-dire dans une vie intime d’amour pour Dieu mais il y dispose.

Les musulmans peuvent devenir de bons serviteurs de Dieu, humbles et attentifs à sa parole. Pour le moment, ils nient que Dieu ait un fils, non par haine de Dieu mais à cause de leur zèle de la grandeur de Dieu.

Que se passera-t-il à l’heure de leur mort, lorsque le Christ leur apparaîtra, accompagné de la Vierge Marie et de leur Prophète Mahomet? Refuseront-ils obstinément de le reconnaître comme Dieu fait homme s’il se présente à eux comme tel? Seuls une obstination totale dans l’erreur, donc un orgueil incompréhensible pourrait justifier une telle attitude[58]. Pour la théologie catholique, le cinquième blasphème contre l’Esprit Saint, l’obstination, est aisé à comprendre: tout homme qui, face à face avec Jésus, s’obstine à maintenir son choix définitif et lucide dans le sens de son égoïsme, se met librement en enfer. Et son enfer est éternel car, dans la lumière de Jésus, le choix est arrêté pour toujours; Il n’y a pas de fin à l’enfer car la personne obstinée veut demeurer sans fin dans son péché.

Les musulmans sont donc disposés à accueillir favorablement la plénitude de la révélation chrétienne, lorsqu’elle leur apparaîtra à la fin du monde. Il est convenable de penser que cette religion a été bénie à cause de la confiance d’Abraham, c’est-à-dire à cause de son attitude très humble et prête à accepter tout de Dieu parce qu’il est Dieu.

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La subsistance des paganismes

Parallèle­ment, des centaines de millions d’hommes vivent loin de l’Évangile sur des continents non encore visités par les missionnaires. Pourquoi l’évangélisation des peuples fut-elle si difficile et incomplète? Les Actes des apôtres montrent que l’Esprit Saint ne voulut pas que l’Évangile soit annoncé tout de suite partout. “Paul voulut aller en Asie mais l’Esprit Saint l’en empêcha.[59]” Cela peut nous paraître scandaleux mais c’est un fait qui explique aussi pourquoi Jésus a tant tardé après le péché originel à s’incar­ner. Aussi effrayant que cela paraisse pour des chrétiens, l’Esprit n’a jamais voulu que le monde d’ici-bas soit totalement chrétien. De même, il ne voudra jamais qu’il soit entièrement musulman[60]. Qu’on se rappelle à cet égard que la Chine et son milliard d’habi­tants n’est pas chrétienne aujourd’hui à cause d’un malentendu papal et d’un conflit entre jésuites et dominicains. L’Empereur de Chine voulait bien adhérer à la foi, entraînant à sa suite tout son peuple, dans les mains de ses astronomes jésuites. Mais les conditions qu’il y mettait furent dénoncées au pape comme paganisantes par des dominicains trop sourcilleux (peut-être jaloux). N’allons pas trop vite charger ces religieux de la perte de ce peuple. Dieu qui est maître de toute chose sait ce qu’il fait en permettant ce contretemps[61]. Face aux non-chrétiens, l’Église ne peut s’endormir sur ses conquêtes. Le salut de ceux qui ne connaissent pas encore l’amour de Dieu ne peut que l’inquiéter et augmenter en elle prière et zèle pour Dieu. De plus, n’étant pas maîtresse du monde entier, elle se souvent qu’elle doit rester modeste.

Quant aux païens, s’ils ne sont pas encore dans la bergerie de Jésus, ils ont leur propre chemin conduisant au salut qu’ils ignorent encore[62]. Dieu est maître de l’histoire. Il dose toute chose, y compris la permission qu’il laisse à ce que nous appelons le mal (quand il s’agit d’autres formes religieuses que la nôtre).

Prenons l’exemple du pire des paganismes, celui qui parfois va jusqu’à rendre un culte à des démons sanguinaires. C’est encore la main de Dieu qui permet cela. Si ces païens ne savent pas encore que Jésus est le Créateur fait homme, ils l’apprennent au moment de leur mort par la prédication du Christ lui-même qui leur apparaît[63]. Les chemins de la pire des superstitions servent Dieu pour leur salut car lorsque des peuples écrasés par la domination des sorciers dont la puissance vient du démon, découvrent à l’heure de la mort la liberté de l’Évangile, ils se convertissent en masse.

A ce propos, je voudrais rappeler ici l’une de ces mystérieuses permissions de Dieu qui aboutit au salut éternel de grandes nations païennes, quoiqu’à leur perte sur la terre (une véritable fin, apocalyptique, de leur monde). L’histoire nous montre que ce n’est pas la première ni la dernière fois qu’une prophétie à la fois étonnement proche de la réalité et trompeuse[64] dans sa lettre aboutit à la ruine politique d’une nation, donc à son humiliation. Quel exégète biblique accepterait comme authentique une histoire racontant comment Dieu livra un empire de dix millions d’âmes, aussi puissant que l’empire romain … à une armée composée de moins de 200 guerriers? Ce n’est pas la Bible qui rapporte cette histoire mais les annales du XVIe siècle. Elle concerne l’empire des Incas. Les chroniqueurs espagnols, pour expliquer cette victoire inouïe, rapportent que ce peuple religieux croyait en une prophétie: « Des dieux portant la barbe, montés sur de grands cerfs viendront de l’Orient et apporteront le salut. » Les Indiens d’Amérique du sud sont heureux d’avoir reçu le christianisme. Ils ont été délivrés à la fois des sacrifices humains et du culte des démons grimaçants. Mais ils se souviennent de la façon dont Francisco Pissarro, accompagné de 160 aventuriers espagnols, massacra le 16 novembre 1532 en deux heures, par traîtrise, la fleur de leur armée. Le dieu de Pissarro était l’or. Mais, caché dans ce sillage de sang, le Christ se donna aux indiens.

On raconte qu’avant d’être exécuté, l’empereur inca Atahualpa se vit proposer le baptême par l’aumônier. Il le refusa en disant que si le paradis était dirigé par Jésus Christ, dieu de ces guerriers adorateurs de l’or, il préférait aller en enfer avec ses idoles[65]. Il agit bien, selon sa conscience, selon cette parole de Jésus[66]: « Eh bien! Je vous dis que beaucoup viendront du levant et du couchant prendre place au festin avec Abraham, Isaac et Jacob dans le Royaume des Cieux, tandis que les fils du Royaume (les chrétiens pervers) seront jetés dans les ténèbres extérieures: là seront les pleurs et les grincements de dents. » Si le peuple inca a obtenu le salut, ce n’est certainement pas au sens terrestre du terme.

Nous voudrions une efficacité immédiate et terrestre d’un christianisme en profondeur et en nombre d’adhérents. Dieu ne désire qu’une chose, que tous soient sauvés par l’amour de son Fils. Et puisqu’un christianisme fort au plan social contient des chrétiens fiers politiquement et des clercs sûrs d’eux, à tout point de vue, il préférera un christianisme faible, divisé, frappé d’hérésies, honteux des péchés de ses fils perdus mais plus conscient de sa pauvreté.

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Le Moyen-Age de la beauté et de la peste

« Lorsque l’Agneau de Dieu ouvrit le quatrième sceau, j’entendis le cri du quatrième Vivant: "Viens!" Et voici qu’apparut à mes yeux un cheval verdâtre; celui qui le montait, on le nomme: la Mort; et l’Hadès le suivait. Alors, on leur donna pouvoir sur le quart de la terre, pour exterminer par l’épée, par la faim, par la peste, et par les fauves de la terre.[67] »

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Abordons quelques autres exemples de la fin du monde telle qu’elle fut vécue par les générations précédentes. Au Moyen Age, l’Occident protégé de la domination de l’islam* voit se développer une civilisation chrétienne. La vie quotidienne des peuples est façonnée par la foi. Les signes de cette richesse spirituelle sont encore visibles dans nos villes. Les cathédrales gothiques élèvent leurs flèches vers le ciel car on cherchait Dieu à cette époque. C’est aussi l’âge de la floraison de la théologie à travers les grandes Sommes.

Dieu regardait cette civilisation non seulement de l’extérieur mais surtout à travers chacune des âmes qui seules comptaient à ses yeux. Il voyait beaucoup de bien mais aussi, c’est fatal, beaucoup de péchés. Pourquoi faut-il que la paix et la réussite religieuse char­rient avec elles tant d’orgueil, de certitude de tenir le Ciel? Pourquoi l’homme a-t-il du mal à être réellement pauvre? De l’existence de cet orgueil fatal, nous avons une preuve dans la constante persécutions des Juifs de cette époque. Leur souvenir du Moyen Age ne ressemble pas au nôtre. Curieusement, saint Louis de France est pour eux symbole de souffrance, d’errance et de persécution permanente. Or, la haine de ce petit peuple, nous le montrerons, est toujours le signe de la présence, dans une civilisation, d’un amour arrogant de sa propre réussite. Dans une unité religieuse ou nationale, leur petit nombre représente une insupportable résistance spirituelle, un coin de différence. Ils étaient une épine dans l’idée qu’on se fait d’une chrétienté pure et universelle.

Si les chrétiens du Moyen Age ne discernaient pas leur orgueil, Dieu le voyait. Alors, afin de sanctifier cette génération en danger, il permit la multiplication des guerres, des famines. “Il faut que cela arrive, ne vous alarmez pas”, avait-il prévenu dans l’Évangile[68]. Il autorisa même que l’islam vienne menacer de très près le magnifique temple de l’Occident chrétien. Les premières croisades étaient une nécessité vitale pour soutenir la chrétienté d’Orient attaquée militairement. Elles ressemblent à tout ce qui se fait à cette époque. Elles sont un élan de foi et de zèle pour Dieu mélangé à la soif pour la gloire et la possession. Leur réussite puis leur échec ne représentent somme toute que l’action habituelle et mystérieuse de Dieu qui apprend l’humilité à son peuple.

Mais comment expliquer ce qu’il permit à partir de l’année 1347, alors même que la civilisation chrétienne atteignait son apogée? En cette année, trois galères s’approchèrent par escale de l’Europe, en provenance de Crimée, emmenant avec elles le plus terrible des passagers clandestins, la peste. Le fléau, qui sévissait à l’état endémique dans les steppes d’Asie Orientale, se répandit inexorablement au gré des escales, se transmettant de port en port, de bateau en bateau, frappant aveuglement le musulman comme le chrétien. En deux ans, (1348-1350), la peste tuera un tiers de la chrétienté latine. Le bilan est pire en proportion que les guerres mondiales modernes. Pendant plusieurs siècles et de façon massive jusqu’en 1722, la peste couvera tel un feu jamais éteint, puis éclatera en de violentes poussées, réapparaissant tous les huit, dix ou quinze ans. Les âmes en sortiront profondément marquées. Au joyeux optimisme du début du Moyen Age succèdent les danses macabres de la période sans nom. Pourquoi Dieu permit-il une catastrophe d’une telle ampleur, détruisant les élites des villes, faisant tourner en amertume morbide l’œuvre chrétien­ne entreprise pour lui? Rappelons qu’il pouvait arrêter le fléau par sa puissance comme il le montra maintes fois par les miracles. Pourquoi aussi une maladie comme celle-là, la « male mort » comme on l’appela à l’époque puisqu’elle ne laisse même pas le temps de se confesser avant de mourir? Pourquoi permet-il jusqu’à aujourd’hui famines et maladies, guerres et ruine de tout, même de ce qui est bon sur la terre? C’est la question que soulève avec larmes l’apocalypse de saint Jean* sous le symbole des sept mystères scellés que nul ni au Ciel ni sur la terre ne peut ouvrir, sauf l’Agneau de Dieu. Le dernier de ces mystères, le silence de Dieu[69] fut sans doute le plus terrible pour ces pauvres familles détruites par la peste.

Dieu tient tout entre ses mains. Chaque âme brisée par une vie courte et douloureuse, était accueillie et recevait l’explication de tout par la vision de sa croix, lui montrant en un seul regard ce qu’elle serait devenue si elle n’avait pas souffert. Alors ces âmes devenues pauvres entraient au Ciel, là où il n’y a plus de larmes, où on oublie les angoisses anciennes, où l’on ne se souvient pas du passé de douleur[70] si ce n’est pour en rendre grâce, puisque c’est grâce à cette croix, vécue ou non dans la foi chrétienne qu’on est si proche de Dieu au Ciel. La peste, la guerre de cent ans marquèrent les XIVe et XVe siècles en Europe. De même, par la peste, chaque nation reçut sa part de croix et put mesurer à quel point l’homme est peu de chose. Ainsi furent sanctifiées ces générations.

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Le protestantisme et les guerres de religion

(Chose probable)

Pourtant, renaissant sans cesse à chaque génération, la bête blessée de l’orgueil[71] repousse. Elle est plus forte et dirige les nations humaines. Ainsi, à la fin du XVe siècle, alors que la vie humaine restait fragile et courte, les théologiens catholiques élaboraient des systèmes théologiques rigides où l’orthodoxie de la foi était conservée avec beaucoup de menaces venant du clergé, où la défense de la vérité s’accompagnait d’un goût du luxe matériel, d’un culte pour la beauté. Le monde de la Renaissance est comme toutes les époques un mélange de ce qu’il y a de mieux et de pire dans l’homme. Mais, pour ce qui est de l’Église, encore maîtresse du monde occidental mais déjà contestée en raison des abus de ses hommes de pouvoir, le bilan est ambigu. Devant les excès des papes sou­cieux de construire de grands temples pour Dieu (et pour que leur nom demeure), des voix s’élevaient et protestaient. De grands saints, poussés par l’Esprit de Dieu, sentaient l’approche du malheur et réclamaient une réforme de l’Église. Mais la décadence était profonde, et plus profond encore était la méconnaissance du clergé catholique vis-à-vis de l’Évangile. L’erreur ne se situait pas dans les dogmes gardés infailliblement par l’Église en raison de la promesse faite à Pierre*. Elle se situait dans l’enseignement concret de l’Évangile, au jour le jour, et dans sa pratique.

En 1514, le dominicain Tetzel avait entrepris de persuader les fidèles que le salut s’opère aisément par les oeuvres. Il proposait “les passeports pour franchir l’océan en furie, et arriver tout droit au paradis ». Il utilisait volontier le dicton: « Sitôt l’argent tinte dans la cassette, sitôt l’âme en faveur de qui l’on donne saute hors du purgatoire ». Le Ciel voyait arriver à l’heure de la mort des hommes bardés de sacrements et d’indulgences, assurés ainsi de leur salut alors que leur cœur ne se souciait que d’eux-mêmes. Que sert à l’homme un sacrement reçu à l’heure de sa mort s’il le prend comme un moyen quasi magique d’aller au Ciel? Si ce n’est pas l’amour mais la peur de souffrir en enfer qui guide sa vie chrétienne, à quoi lui servent les sacrements? Le mal était si profond et si dangereux pour le salut de ceux qu’il aimait que Dieu agit. Il utilisa encore son habituelle sagesse : « Il compte les jours des constructions humaines, il les pèse pour voir si elles ont une utilité pour le salut, il les divise et fait naître l’humilité[72] ».

En Allemagne, il trouva un jeune moine augustin, prêtre depuis peu de temps (1507). Son nom était Martin Luther. Il était rongé par l’angoisse de son salut à la vue de ses propres péchés. Lors de son noviciat, il avait été nourri d’une théologie en apparence pleine de dignité, mais hélas fallacieuse. Le salut était promis à ceux qui par leurs œuvres de piété et leurs vertus méritaient le Ciel[73]. Il avait donc essayé d’être vertueux mais tous les jours, il retombait dans les mêmes travers. Il lisait, méditait, cherchait une règle capable de rendre un homme certain de son salut. Dans saint Paul, il lut que l’homme sera sauvé par sa foi, c’est-à-dire par sa confiance en Dieu. Ce fut pour lui un baume de réconfort. Une paix totale l’envahi. A partir de ce jour, il s’opposa aux prédicateurs vendant des indulgences. Poussant plus loin son intuition, son successeur Calvin élabora une théorie selon laquelle ceux qui meurent sans avoir cette confiance en Dieu sont à coup sûrs damnés, non de par leur faute mais par un choix mystérieux de Dieu qui ne leur a pas communiqué sa grâce.

Cette thèse excessive, en contradiction avec ce qu’est Jésus, lui fut suggérée par des écrits mal interprétés de saint Augustin. Il n’eut pas l’idée que Dieu proposait sa grâce à tout homme… à l’heure de la mort.

Le protestantisme est aux yeux des catholiques et des orthodoxes une véritable hérésie en ce sens qu’il fait sien une erreur importante pour le salut. Ces deux Églises enseignent que Dieu promet la vie éternelle à celui qui ose l’aimer comme un ami, dans une réciprocité d’épouse adulte. Les théologiens protestants réduisent l’amour à l’attitude confiante d’une épouse incapable d’aider son aimé, en état de minorité légale, trop incapable au plan intellectuel et moral pour penser, hériter et simplement prendre la parole à table. Dieu ne fut bien sûr pas à l’origine d’une telle perte. Luther l’inventa lui-même, à travers une réflexion sincère mais trop nourrie des erreurs catholiques du personnel ecclésial catholique de son époque. Luther n’eut pas assez d’audace pour vérifier auprès du rocher de Pierre, ce qu’enseigne réellement la Sainte Église.

Pour comprendre pourquoi Dieu bénit* cette Réforme après sa naissance, lui permettant de s’étendre dans près de la moitié du catholicisme, il faut se rappeler la très belle remarque de saint Jean Chrysostome, citée plus haut[74]. C’est ainsi que pense Dieu. Que sert à l’homme d’avoir la plénitude de la révélation s’il s’en sert mal? S’il y a une hérésie dans la Réforme, il existe aussi des richesses immenses en oraison, lecture de la Bible, liberté des enfants de Dieu. Le peuple des protestants trouve souvent l’amour dans l’Écriture Sainte, au-delà de la théologie complexe de ses docteurs. Mais Dieu, en divisant l’Église d’Occident de l’intérieur, fit sortir du bien[75], obligeant le catholicisme à se réformer d’urgen­ce, laissant le protestantisme dans la pauvreté de ses propres divisions, suscitant par les compétitions entre ces confessions un zèle nouveau pour Dieu et les missions[76]. C’est pour ce bien-là et surtout pour l’humilité que suscite l’humiliation que Dieu veut parfois la division. La Bible illustre magistralement cette sagesse par l’histoire de la division d’Israël* en deux nations après la mort de Salomon[77]. Parce qu’il vaut mieux une Église divisée qu’une Église orgueilleuse, il se peut que l’unité des chrétiens (tant désirée depuis quelques années par le courant de l’œcuménisme) ne se fasse que dans l’humiliation extrême vécue au temps de l’Antéchrist* ou encore au moment du retour glorieux du Christ.

Quant aux hommes qui s’adonnè­rent à la violence de part et d’autre dans les guerres du fanatisme religieux, qu’advint-il d’eux? Ils furent disposés au salut par cela même qui faisait leur péché. Jésus nous a prévenu dans les Évangiles[78]: “Celui qui prend l’épée périt par l’épée“, ce qui signifie qu’il récolte de sa violence un salaire de souffrance finalisé par sa conversion. Pour ceux qui moururent dans cette violence, sans s’être repentis, Jésus agit comme il le fait pour tout pécheur, comme il le fit pour saint Paul au jour de sa conversion. Il les enveloppe de sa lumière, celle de la vérité sur leur péché, il les fait tomber à terre, par la mort qui les effraie, puis il leur parle de sa voix: “Pourquoi me persécutes-tu?[79]” Devant cette voix, Paul, de persécuteur religieux devint après trois jours de prostration (correspondant par symbole au purgatoire qui éduque les violents repentis avant leur entrée au Ciel) le plus grand des serviteurs de l’Évangile. Il ne refusa pas la conversion car, s’il agissait ainsi, c’était sincèrement pour Dieu, avec un zèle mal éclairé. Il en fut de même pour la plupart des sectateurs de guerres de religions et même aujourd’hui pour les fanatiques de toute confession.

 

Nous pourrions prolonger à l’infini notre regard sur l’histoire sainte de l’humanité et faire les mêmes remarques par rapport aux situations multiples d’aujourd’hui. Il n’y a pas de nos jours davantage de malheurs physiques que jadis, au moins dans la partie développée du monde. Mais quand ces événements arrivent, ils peuvent être interprétés comme des signes de la fin du monde tels qu’ils peuvent s’appliquer à chaque génération. Jusqu’à la fin du monde, Dieu et ses anges combattront l’orgueil sans cesse renaissant de chaque génération. Évidemment, lorsque le mal est actuel, il est difficile voire impossible d’en parler de cette manière sans se montrer indélicat. On ne va pas près du lit d’un malade pour lui dire: Tu apprends l’humilité! Ce regard est de l’ordre de la contemplation, non de la prédication.

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Le déclin de l’Église, vu par un frère Protestant

Le livre d’un théologien protestant, écrit vers 1950, L’avenir selon les prophéties de la Bible[80], permet de synthétiser ce chapitre (avec quelques corrections nécessaires, l’auteur n’étant pas exempt de quelques préjugés anti-catholiques). Ce théologien montre à quel point toute cette histoire trouve son explication dans la phrase suivante: « Dieu résiste aux orgueilleux ».

 

« Les chapitres 2 et 3 de l’Apocalypse nous offrent, à travers sept lettres de Jésus à sept Églises, une vision prophétique de l’histoire de l’Église. Cette dernière y est décrite, non pas telle que l’homme la perçoit et la juge, mais telle que la voit celui qui a les yeux comme des flammes de feu. La déchéance morale du christianisme, ainsi que les causes de sa corruption, sont clairement détaillées.

1 - Éphèse (les temps apostoliques)

Nous avons là le début de l’histoire de l’Église. En apparence, tout est encore en ordre. Quelle série de points positifs le Seigneur ne relève-t-il pas ! Mais ses yeux, qui sont comme une flamme de feu, décèlent déjà les premiers signes du déclin : « mais j’ai contre toi que tu as abandonné ton premier amour ». C’est là l’origine de tout éloignement. Même si les habitudes sont encore intactes, le cœur n’est plus attaché à lui de la même manière. De plus, les œuvres des Nicolaïtes se manifestent déjà.

2 - Smyrne (deuxième et troisième siècles)

Cette lettre nous présente les grandes persécutions menées aux deuxième et troisième siècles par les empereurs romains. « Vous aurez une tribulation de dix jours. » Comme chacun le sait, il y eut dix persécutions, dont la dernière dura exactement dix ans. Dieu permit de telles souffrances pour ramener à lui le cœur de l’assemblée. À l’assemblée de Smyrne, aucun reproche n’est adressé. Le feu de la persécution maintient les cœurs étroitement unis au Seigneur.

3 - Pergame (après Constantin)

À ce point, les circonstances ont déjà bien changé. L’Assemblée n’est plus une étrangère sur la terre ; bien au contraire, elle a désormais un lieu de domicile fixe, non pas dans le désert, mais « là où est le trône de Satan ». Elle a cherché refuge dans le monde, dans le lieu même où le prince et dieu de ce monde a dressé son trône. Constantin le Grand, en embrassant le christianisme, l’a promu au rang de religion d’État au prix de sa liberté. L’Assemblée est désormais liée au monde ; celui-ci la tient en son pouvoir et contrôle même les domaines touchant sa foi. Elle n’est plus l’« ekklésia », « celle qui a été appelée en dehors », mais elle est devenue une église nationale, avec quelques croyants disséminés ici et là.

Désormais, nous ne trouvons plus seulement les œuvres des Nicolaïtes, mais ces dernières se sont érigées en doctrine, en dogmes. Le verset 14 nous en décrit les conséquences. Nicolaos signifie « vainqueur, ou dominateur, du peuple ». C’est le règne du pouvoir politique dans l’espérance religieuse. La doctrine de Balaam avait consisté à donner un conseil de perdition à des fins intéressées ; ce conseil devait entraîner Israël à renoncer à sa position de peuple mis à part, pour manger des mets sacrifiés aux idoles et s’adonner à la fornication, en communion avec les Moabites.

4 - Thyatire (l’orgueil que donne le pouvoir)

Thyatire représente le système corrompu duquel est issue de ce pouvoir. Il transparaît particulièrement dans les déviations de la papauté du Moyen Age. La cause n’en est pas le système papal lui-même, mais le pouvoir politique absolu qu’il obtient de l’histoire à cette époque. La gloire enfle… Jésabel caractérise désormais l’assemblée. La doctrine chrétienne n’est plus prêchée à travers une vie d’amour mais la hiérarchie ecclésiastique exige la reconnaissance absolue, car elle détient le pouvoir (bras séculier) pour l’imposer par force.

À Thyatire, le goût du pouvoir remplace donc la charité. Elle utilise cette position pour poursuivre l’œuvre de Balaam. L’œuvre de Jésabel consiste en effet à soumettre la religion à une poursuite de finalités mondaines (construction de temples de pierre plutôt que de temple de chair et d’esprit).

La manière dont le Seigneur se présente dans cette lettre n’est-elle pas significative ? « Voici ce que dit le Fils de Dieu » ! Qu’y a-t-il de plus frappant dans le comportement des chrétiens de cette époque, si ce n’est le fait qu’ils réduisent Jésus Christ au rang d’un simple critère d’unité politique ? On lui enlève donc sa place de roi du Ciel pour en faire un outil royal terrestre.

À ce stade, la corruption est déjà trop étendue : le Seigneur ne peut plus attendre aucun retour de l’ensemble. Mais bien que le Seigneur retire sa lampe de son lieu parce qu’il ne peut plus la reconnaître comme témoignage, Thyatire subsistera jusqu’à sa venue.

5 - Sardes (renouveau venu du schisme)

Nous avons avec Sardes un nouveau commencement. On ne trouve plus les grands péchés de Thyatire. Il n’est plus question de culte du pouvoir, d’aspiration à la suprématie mondiale. Le mal est ici d’ordre négatif : la vie est tout simplement absente.

Lors de la Réformation, Dieu divisa l’Église et par là, lui retira son illusion de toute-puissance sur terre. Par son action bénie, il établit plusieurs façons de vivre en chrétien. Mais les Églises n’en tirèrent pas toutes les conséquences, celui d’un retour total à l’esprit d’humilité.

La Réformation était à l’origine un acte de conversion, mais l’élément politique s’y mêla très vite car la séparation entre l’ivraie et le bon grain ne se fait pas entre telle ou telle Église. Elle se trouve dans le cœur des hommes.

La férule inflexible de Rome avait suscité bien du mécontentement ; c’est pourquoi beaucoup utilisèrent la Réforme comme un moyen politique pour lutter contre le pape. Combien il fut difficile de refuser l’aide offerte par les princes, les politiciens et les soldats ! Il en fut de même du côté de la contre-réforme catholique qui fut aussi un acte de conversion incomplète. Ce n’était plus l’assemblée de Dieu, mais un monde christianisé, avec quelques chrétiens disséminés çà et là.

A cette période, les églises (catholiques comme protestantes) ne dominèrent plus le monde, mais s’appuyèrent sur lui ; elles lui étaient donc assujetties désormais. « Tu as la réputation d’être vivante, et tu es mort. » Quelle valeur peut avoir une confession de foi de la plus pure orthodoxie si la vie de Dieu est absente ?

Le Seigneur ne peut plus reconnaître Sardes comme le témoignage ; néanmoins, celle-ci demeurera elle aussi jusqu’à son retour (Apoc. 3:3 ; 1 Thess. 5:2).

6 - Philadelphie (les fruits de l’humiliation, XVIIIe et XIXe siècles)

Un double attachement caractérise Philadelphie : à la parole de Dieu d’une part, et au nom du Seigneur d’autre part. N’est-ce pas justement là ce qui a caractérisé le puissant réveil de toutes les formes du christianisme que le Saint Esprit a opéré après les guerres napoléoniennes ? Dans tous les pays, dans toutes les Églises (catholique et nationales), la vie a jailli à nouveau dans les ossements desséchés de la chrétienté. L’Esprit de Dieu a poussé les croyants ainsi réveillés à centrer leur vie non sur le côté politique de leur Église, mais sur la parole de Dieu et le nom du Seigneur Jésus.

Certes, ils n’ont pas tous complètement rompu avec l’orgueil mondain, ni tous eu connaissance des pensées de Dieu dans la même mesure. Mais n’y avait-il pas un désir général d’agir en accord avec les principes divins, selon la lumière reçue ? Notre cœur est tout réchauffé à la pensée de ces hommes qui se sont consacrés entièrement au service de Dieu, qui ont sondé sa Parole pour en recevoir sagesse et connaissance, et qui ont marché alors avec lui, animés d’une foi inébranlable, dans un chemin inconnu ? Jamais le christianisme ne fut autant missionnaire qu’à cette époque.

Nous trouvons l’appréciation du Seigneur sur ce réveil en Apocalypse 3:7-13. Les lettres à Smyrne et à Philadelphie sont les seules à ne contenir aucun reproche de sa part. Il se présente à ces deux assemblées dans l’essence même de sa personne, et donne de précieuses promesses aux vainqueurs.

Mais là comme partout ailleurs, l’homme a tout gâté. Philadelphie subsistera certes jusqu’au retour du Seigneur, et sera enlevée à lui par sa puissance, mais elle ne constituera plus alors qu’un faible petit résidu. La grande majorité des Philadelphiens n’ont en effet pas vaincu ni tenu ferme ce qu’ils avaient. De Philadelphie est donc issue

7 - Laodicée (la tiédeur des Églises d’aujourd’hui)

Quel changement ! « Je connais tes œuvres, — que tu n’es ni froid ni bouillant. Je voudrais que tu fusses ou froid ou bouillant ! Ainsi, parce que tu es tiède et que tu n’es ni froid ni bouillant, je vais te vomir de ma bouche. » Laodicée se trouve partout où l’on s’est arrogé la grâce et attribué présomptueusement la position de chrétien, où le vocabulaire chrétien est devenu coutumier, où la position ecclésiastique est en apparence correcte, sans que tout cela exerce une influence quelconque sur l’âme.

Ne trouvons-nous pas dans cette église issue de Philadelphie une description frappante de notre état actuel ?

La connaissance abonde, ainsi que les belles paroles, et les brillantes professions de foi sont tenues en grande estime. Les cercles missionnaires, les sociétés pieuses, les écoles confessionnelles, et que sais-je encore, foisonnent.

Je suis certes loin de condamner tout cela. Mais où sont restées les affections du cœur ? Où est la foi puissante de nos pères ? Qu’est-il advenu de la soumission à Dieu jusque dans les plus infimes détails de la vie quotidienne ? Où trouve-t-on encore des cœurs disposés à porter l’opprobre pour le nom de Jésus, pour le nom de celui que le monde a crucifié ?

Ne sommes-nous pas tièdes et mondains ? Notre vie tranquille, le bien-être économique, ne nous ont-ils pas rendus craintifs face à la souffrance, et avides de plaisirs ?

Le Seigneur Jésus, le Témoin fidèle et véritable, se trouve-t-il encore réellement au centre de notre vie d’assemblée ?

Nous sommes remplis de honte quand nous considérons ce que nous avons fait du témoignage qu’il nous a confié. Que Dieu nous donne un esprit brisé, un cœur brisé et humilié (Ps. 51:17), afin que nous nous humiliions devant lui et reconnaissions de manière sincère notre culpabilité.

Telle est l’histoire de l’Église jusqu’à aujourd’hui aux yeux du Seigneur. Nous vivons dans les derniers jours. Bientôt le Seigneur Jésus viendra pour enlever son épouse de cette terre. »

 

 

1. Matthieu 24, 34. [↩]

2. 2 Pierre 3, 4. [↩]

3. Apocalypse 10, 6. [↩]

4. Voir du même auteur : L’heure de la mort. [↩]

5. Il s’agit d’un regard de sagesse, c’est-à-dire d’un regard sur l’action patiente et mystérieuse de Dieu. Cette contemplation, très peu développée dans l’Église en ce qui concerne sa propre histoire, peut-être qualifiée d’histoire sainte de l’humanité. [↩]

6. Luc 1, 52. Le Catéchisme de l’Église Catholique, 671 exprime cette même réalité sous l’expression : … en attendant que tout lui soit soumis. [↩]

7. Cette action est décrite dans l’Ancien Testament, Livre de l’Exode. Tous les hébreux, sans exception, moururent dans le désert. Elle n’a pas changé après la venue du Chist. Elle a simplement été expliquée. Nous en connaissons maintenant les raisons, à savoir cette humilité qui prépare l’amour, clef de l’union éternelle avec Dieu. [↩]

8. Matthieu 24, 3-11, 14. [↩]

9. « Allemagne au-dessus de tout. » [↩]

10. Le film Titanic sorti en 1999 mérite d’être revu sous cette lumière. Le Titanic est la société en miniature Elle est composée de trois classes, bien séparées. Elle se fie totalement dans sa technologie. Le film se termine dans la Lumière de la Vie éternelle où les naufragés, au-delà de leurs souffrances, se retrouvent humbles, aimant et sauvés. Il y a là une prophétie dont on ne soupçonne pas la justesse. [↩]

11. Apocalypse 16, 9 : « Et les hommes furent brûlés par une chaleur torride. Mais, loin de se repentir en rendant gloire à Dieu, ils blasphémèrent le nom du Dieu qui détenait en son pouvoir de tels fléaux. » « Le préservatif est la seule prévention du SIDA », martelait-on. Ce fut un étonnant et pitoyable combat de la part des anciens de mai 68. On criminalisait même le pape Jean-Paul II quand, sans parler directement de cette terrible maladie, il parlait de la fidélité dans l’amour… [↩]

12. Pour la France, 225 000 I.V.G. par an depuis plus de 25 ans pour 750 000 naissances. [↩]

13. Matthieu 24, 9. [↩]

14. Luc 7, 47. [↩]

15. Matthieu 24, 6. Le texte est ici interprété selon un de ses multiples sens, la guerre intérieure contre soi-même. [↩]

16. Matthieu 24, 11. [↩]

17. Il ne le permettra d’ailleurs jamais afin que l’Évangile soit toujours gardé par quelques-uns sur la terre. Certains esprits se plaisent à montrer du doigt les compromissions, les pressions politiques des Conciles œcuméniques de cette époque pour nier la sainteté de l’Église. C’est justement l’inverse. Le fait est que, depuis 2000 ans, infailliblement, l’enseignement de l’Église romaine est resté fidèle à la vérité prêchée par le Christ. [↩]

18. Genèse 11, l-9. [↩]

19. Dieu … ou plutôt la vanité humaine diraient les sociologues. Mais la sociologie ne décrit que des lois prévues par Dieu pour le salut des peuples pécheurs. Dieu et les lois humaines ne sont, pour le théologien, que les deux faces d’une même pièce. [↩]

20. Cet ensemble de détails paraîtra peut-être surprenant au lecteur. Doit-on les mépriser comme inventions imaginaires ? Non, car dans le domaine de l’histoire sainte de l’humanité, de sa marche vers Jésus-Christ, c’est le mystère même de Dieu qui s’exprime. Il faut ajouter que ni les uns ni les autres de ces détails ne se trouvent confirmés par des textes précis du Magistère, pas plus qu’ils ne reposent sur une indéniable tradition. De plus, point de textes scripturaires au sens littéral, mais seulement un incroyable concours de métaphores, qui me semblent trop nombreuses pour être simple hasard. Au lecteur de juger… [↩]

21. Apocalypse 3, 14. [↩]

22. Actes 5, 34. [↩]

23. Actes 9, 1. [↩]

24. Jérémie 7, 13-14. [↩]

25. Lumen Gentium, 16. [↩]

26. Abram ne reçut que plus tard le nouveau nom d’Abraham. [↩]

27. Genèse 15, 1-6. [↩]

28. Genèse 16, 2. [↩]

29. Genèse 16, 5-12. [↩]

30. Genèse 21, 10-21. [↩]

31. Genèse 25, 12-18. [↩]

32. Genèse 21, 11. [↩]

33. Genèse 18. [↩]

34. Au chapitre 21, 20. [↩]

35. Nous en sommes frappés à l’évocation des nombreux exemples qui jalonnent l’Écriture ou la vie des saints: Jeanne d’Arc, demandant à ses voix si elle serait sauvée s’entendit répondre: « oui, par grande victoire! » Le lendemain, elle était brûlée vive. Ses voix lui avaient-elles menties? Jeanne, dans un grand sanglot, le crut d’abord. Juste après sa mort, elle comprit à quel point ses voix avaient dit vrai, plus vrai qu’elle ne l’imaginait. Dieu n’avait pas menti mais elle avait mal compris le sens divin du mot « victoire ». Elle ne nous l’a certes pas dit mais les miracles qui ont précédés sa canonisation en sont le signe le plus grandiose. [↩]

36. Jean 19, 10. [↩]

37. Voir deuxième partie, chapitre 1. Ce mystère y est expliqué dans ses causes et ses effets, dont le plus mystérieux est le mal permis sur la terre. [↩]

38. Mame 1993, pages 149-150. [↩]

39. Finalement, toutes les erreurs possibles, les pires des idéologies sont pour un temps donné « bénies ». elle reçoivent un temps de réussite terrestre. Dieu sait se servir de leur victoire puis de leur écroulement pour en tirer un bien plus grand. Il sauve les victimes. Il les récupère de l’autre côté de la vie et beaucoup d’entre eux ont compris jusqu’à la misère la stupidité de l’orgueil humain. [↩]

40. Genèse 11, 3-8. [↩]

41. 1 Rois 11, 12, 20. [↩]

42. Matthieu 24, 6. [↩]

43. Grégoire le Grand ( Homélie sur l’Évangile, p. PL. 76, p. 1078) a pu parler d’un monde vieillissant, « car, que s’élève peuple contre peuple, et que leur cala­mité s’étende sur le pays, cela nous le constatons dans notre époque plus que nous ne le lisons dans les livres. Vous savez aussi combien de fois nous avons ouï dire, que, dans d’autres parties du monde, des tremblements de terre ont dévasté d’innombrables cités. Sans cesse nous souf­frons de pestes. Et si nous ne constatons pas encore visi­blement des signes dans le soleil, la lune et les étoiles, nous pouvons du moins conjecturer qu’ils ne sont pas éloi­gnés, puisque déjà le climat subit des modifications sensibles. C’est pourquoi on peut dire inversement. Quand les hommes se disent « Paix et sécurité », c’est alors que tout d’un coup fondra sur eux la perdition comme les douleurs sur la femme enceinte, et ils ne pour­ront y échapper. » (1 Thessaloniciens 5, 3.) [↩]

44. 1 Théssaloniciens 5, 3. [↩]

45. Voir deuxième partie: premier chapitre, que veut Dieu aux hommes pour les avoir mis sur la terre? [↩]

46. Luc 1, 51-53. [↩]

47. Livre des juges 19-20. [↩]

48. La réalité de ce fait est vertigineuse. Après la mort, face à l’apparition du Christ dont l’amour et la vérité bouleversent l’homme, tout genoux devient chancelant et découvre le profond égoïsme qui l’anime. [↩]

49. Le sommet du judaïsme est dans cette conception et l’Église catholique l’a entièrement gardée tout en pensant pouvoir, grâce à Jésus Christ, en expliquer le pourquoi (voir deuxième partie, chapitre un). La liturgie juive continue de chanter à propos d’Auschwitz et du génocide des enfants: « Yahvé, tu nous as frappé car nous avions péché. » [↩]

50. Deutéronome 28, 47-52. [↩]

51. Coran* 16, 93. [↩]

52. Apocalypse 13, 17. [↩]

53. Galates, 5.  [↩]

54. 2 Chroniques 18, 22. [↩]

55. Genèse 16, 12. [↩]

56. Genèse 25, 18. [↩]

57. Genèse 16, 12. [↩]

58. Il est remarquable de constater que les musulmans écrivent exactement la même chose des chrétiens. Pour eux, Jésus viendra nous prêcher l’islam sur notre lit de mort. Il nous expliquera qu’il n’était qu’un homme et qu’il n’est pas mort crucifié. Il balayera la croix. Alors la majorité des chrétiens, disposés par leur religion à l’humilité, se convertiront à l’islam. Dans les deux religions, seul un péché contre l’Esprit Saint conduit en enfer. Le refus de croire à une vérité suffisamment révélée en est un. [↩]

59. Actes 16, 6. [↩]

60. S’il l’avait voulu, ce serait fait depuis longtemps en raison de la puissance de l’Esprit et seuls résiste­raient aujourd’hui ceux qui en auraient fait lucidement ce choix. [↩]

61. Car ce n’est qu’un contretemps et les Chinois jusqu’à aujourd’hui découvrent l’Évangile dans sa perfection à l’heure de leur mort. On peut trouver de multiples raisons à cela qui toutes se ramènent, comme toujours, à une seule. C’est mieux ainsi à la fois pour le salut des païens que des chrétiens, cae divisés et en lutte, ils sont moins portés à l’orgueil. [↩]

62. Voir chapitre 1, les sept jours de l’histoire du monde. [↩]

63. Voir du même auteur L’heure de la mort. [↩]

64. « Trompeuse » ou plutôt ambiguë car lorsque Dieu parle de « gloire, de victoire, de salut », il entend souvent « vie éternelle, donc humilité et son chemin, crucifixion et humiliation ». Mais l’homme y voit ce qui lui plaît à savoir « succès mondain, gloire terrestre ». [↩]

65. Il finit par accepter le baptême afin de mourir garrotté plutôt que brûlé vif. [↩]

66. Matthieu 8, 12. [↩]

67. Apocalypse 6, 7. Lorsque des textes de l’Apocalypse sont cités, c’est toujours à titre d’illustration. Ils ne s’appliquent pas, quoiqu’en pense les Témoins de Jéhovah, à une seule période de l’histoire mais à chaque génération. [↩]

68. Matthieu 21, 6. [↩]

69. Apocalypse 8, 1. [↩]

70. Isaïe 65, 17. [↩]

71. Apocalypse 13, 3. « L’une de ses têtes paraissait blessée à mort, mais sa plaie mortelle fut guérie; alors, émerveillée, la terre entière suivit la Bête. » [↩]

72. Daniel 5, 25. [↩]

73. Saint Thomas disait que l’amour et les oeuvres qui sortent de lui mérite le Ciel de la part du Dieu qui aime le premier. [↩]

74. “Donnez-moi deux attelages pour une course de chars. Que le premier concurrent ait pour chevaux l’orthodoxie (la vraie foi) accompagnée de l’orgueil. Que le deuxième coure avec l’hérésie accompagnée de l’humilité. Vous verrez alors l’hérésie remporter la course, non à cause d’elle-même mais à cause de la force de l’humilité.” [↩]

75. Cf. Genèse 50, 20. [↩]

76. Marc 9, 38 : « Jean dit à Jésus: "Maître, nous avons vu quelqu’un expulser des démons en ton nom, quelqu’un qui ne nous suit pas, et nous voulions l’empêcher, parce qu’il ne nous suivait pas." Mais Jésus dit: "Ne l’en empêchez pas, car il n’est personne qui puisse faire un miracle en invoquant mon nom et sitôt après parler mal de moi. » Marc 9, 40 "Qui n’est pas contre nous est pour nous." [↩]

77. 1 Rois 12, 16. [↩]

78. Matthieu 26, 52. [↩]

79. Actes 9, 3-4. [↩]

80. Ouvrage de H. L. Heijkoop, paru en 1949 et 1950, dans le périodique hollandais « Uit het Woord der Waarheid, -Studie- en Contactblad voor Jongeren ». Voir le site protestant http://bibliquest.com. [↩]

81. L’acédie est vue comme une overdose des choses spirituelles, dixit St Augustin. Ce n’est pas toujours un excès. L’oubli de Dieu mène aussi à l’acédie. Pour certains pères, (Evagre ?), l’acédie n’est autre que la paresse spirituelle. La grande sagesse d’un St Antoine et de ce que distillent les apophtegmes des Pères nous montre l’équilibre dont ils vivaient, et qu’a bien retenu la tradition. Tous les grands fondateurs d’ordres, de S. Benoît, S. Dominique, S. François jusqu’à Thérèse d’Avila et S. Ignace, jusqu’aux fondations les plus récentes (Frères de S Jean et Fr. de Bethléem) se sont directement inspirés des Pères du désert.) [↩]

Arnaud Dumouch, La fin du monde, Éditions Docteur angélique, Avignon, 2007.

 

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