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PREMIÈRE PARTIE : LA FIN DU MONDE
 
 
CHAPITRE 1

Le grand spectacle de la fin[1]

« Depuis l’Ascension, l’avènement du Christ dans la gloire est imminent même s’il ne nous “appartient pas de connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa seule autorité”. Cet avènement eschatologique peut s’accomplir à tout moment même s’il est “retenu”, lui et l’épreuve finale qui le précédera[2]. »

Le grand spectacle de la fin.

 

Pas de date
Comment se produira la fin du monde?

 

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Pas de date

(Chose certaine)

La Révélation chrétienne est explicite pour enseigner que le monde ne durera pas toujours. Dieu sait combien d’êtres humains doivent naître. A l’heure dite, celle que lui seul connaît, il mettra fin au monde terrestre. Cette heure n’a rien à voir avec les prédictions des astronomes sur l’évolution du soleil. Elle n’est pas naturelle donc non prévisible. Elle concerne Dieu seul et son projet sur l’homme. La dernière génération, celle qui vivra sur terre à cette époque, assistera à des événements étonnants. Dieu prépare sur la terre une nouvelle manifestation de son amour. Ce sera un spectacle grandiose, digne de ce que la Bible appelle « le jour du Seigneur ».

Mais tout spectacle de Dieu est avant tout spirituel car Dieu est esprit. Cette fois, l’amour ne sera pas manifesté par la douleur silencieuse. Il le sera par la victoire joyeuse. Cette heure a rapport avec ce que le Credo appelle « le retour du Christ dans sa gloire ».

L’Église ne connaît pas la date de ces événements[3]. Jésus dit en Mathieu[4]: « Quant à la date de ce jour, et à l’heure, personne ne les connaît, ni les anges dans les Cieux, ni le Fils, personne si ce n’est le Père ». Bien plus, afin de couper court à des indiscrétions qui s’étaient produites, elle n’a pas hésité à défendre sous peine d’excommunication d’annoncer pour époque déterminée la venue de l’Antéchrist ou le jour du Jugement dernier. C’est sous Léon X, en l’an 1516, le 14 des Calend. de janvier, au Ve concile oecuménique de Latran (sess. XI, Constit. Supernæ majestatis præsidio) que ce décret, dont voici la teneur, a été porté : « Nous ordonnons à tous ceux qui exercent la charge de la prédication ou qui l’exerceront dans l’avenir qu’ils ne présument pas de fixer dans leurs prédications ou dans leurs affirmations un temps déterminé pour les maux futurs, soit pour l’avènement de l’Antéchrist, soit pour le Jugement : attendu que la Vérité dit : Ce n’est pas à vous de connaître les temps ou les moments que le Père a fixés de sa propre autorité : ceux donc qui, jusqu’à présent, ont osé émettre de pareilles choses, ont menti, et il est avéré que, par leur fait, un grand dommage a été porté à l’autorité de ceux qui prêchent sagement[5]. » La raison en est simple. Il s’agit d’un événement tout à fait comparable à la mort individuelle de chaque homme. Dieu se réserve l’heure de la mort de chacun. Le suicide lui déplaît puisque nul ne peut juger avec les yeux de Dieu qu’il a assez appris de son passage ici-bas. De même, nulle communauté humaine ne peut connaître sa fin (il s’agit ici de la fin d’un monde et non du monde) avant d’avoir compris qu’elle n’est rien. Il doit en être de même pour le monde dans son ensemble (la fin des fins).

Le Christ a, par contre, laissé des prophéties suffisamment précises et nombreuses pour permettre de comprendre le déroulement de ce qui précèdera la fin du monde. Des signes de la proximité des événements seront donnés aux hommes, permettant à ceux qui auront la foi en ces jours là de les vivre de l’intérieur, de sentir l’imminence du retour du Christ. D’autres signes seront plus extérieurs, adressés à ceux qui n’auront pas la foi. Appuyés sur ces Révélations contenues dans les Écritures, il est possible de dire quelque chose de concret sur ces sujets.

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Comment se produira la fin du monde ?

(Chose certaine)

Il peut être intéressant de se livrer à un petit exercice. Mettons-nous à la place de Dieu. Imaginons que nous recevions la responsabilité de préparer la fin de la dernière génération humaine avec les objectifs suivants.

The adoration of the magi.

1 - Former les hommes à l’humilité, cette vertu qui dispose le cœur à l’amour ;

2 - Leur laisser le temps d’approfondir leur soif consciente ou inconsciente du salut;

3 - Leur prouver d’une manière définitive et grandiose l’amour de Dieu, en vue de les sauver.

Comment nous y prendrions-nous? Il va de soit que, étant Dieu, nous aurions le droit d’utiliser tous les moyens à notre disposition, à savoir une puissance infinie, tout en respectant au moment du choix final, la liberté de ceux qui refusent l’amour. Il faut en effet remarquer qu’avant ce choix final, Dieu ne respecte pas toute la liberté de l’homme. Au contraire, il forme cette liberté en la soumettant à toutes sortes de contraintes que nous expérimentons tous les jours.

La première solution qui vient à l’esprit des enfants du catéchisme, surtout des garçons, consiste à organiser un festival du miracle, un spectacle avec mouvements d’astres, feu d’artifices d’étoiles se terminant par le bouquet final, l’atterrissage dans le plus pur style Albator, d’un Christ lumineux. Les descriptions de ce scénario ne manquent pas dans l’Écriture. Les anges ne disent-ils pas aux apôtres le jour de l’Ascension: « Ce même Jésus viendra comme cela de la même manière dont vous l’avez vu s’en aller vers le ciel ». Il est vrai qu’un tel spectacle supprimerait l’athéisme. C’est l’argument principal des enfants. Cependant, répond-il aux trois critères imposés plus haut ? Il est vrai que le critère 3 (La manifestation de Dieu), serait en partie réalisé. Mais qu’en serait-il de la charité et de sa mère, l’humilité, les seules réalités importantes pour la vie éternelle? Jésus, dans l’Évangile de saint Jean, montre les effets ambigus des miracles sur les hommes[6]. Il multiplie pour une foule des pains; Les gens croient et applaudissent puis décident de le couronner roi d’Israël… pour qu’il chasse les Romains. Le Christ, voyant qu’ils ont détourné ses miracles pour en faire un outil de puissance politique, est obligé de se retirer dans la montagne. Ce scénario n’est donc pas apparemment le meilleur possible, au moins pour ce qui concerne le critère 1.

Il ne faut pas se moquer des enfants. Les adultes ne trouvent pas mieux, malgré leur bonne volonté, et ils se servent souvent mal de leurs trouvailles[7].

On peut donc être certain qu’avant que le Christ revienne en descendant du Ciel, il aura préparé le cœur des hommes par une série d’évènements. Existe-t-il des textes du Magistère papal les décrivant? Au cours de ses 2 000 ans d’histoire, l’Église s’est très peu prononcée sur ces événements, sauf pour condamner certaines interprétations trop fondamentalistes de la Bible. Pourtant, depuis quelques décennies, elle parle. Le phénomène est nouveau et, nous le verrons, il constitue certainement un signe. Le Catéchisme de l’Église Catholique donne en deux paragraphes un enseignement nouveau et précis[8]. C’est la première fois qu’un texte doté d’une infaillibilité ordinaire[9] est aussi explicite:

« Avant l’avènement du Christ, l’Église doit passer par une épreuve finale qui ébranlera la foi de nombreux croyants. La persécution qui accompagne son pèlerinage sur terre dévoilera le “mystère d’iniquité” sous la forme d’une imposture religieuse apportant aux hommes une solution apparente à leurs problèmes au prix de l’apostasie de la vérité. L’imposture religieuse suprême est celle de l’Anti-Christ, c’est-à-dire d’un pseudo-messianisme où l’homme se glorifie lui-même à la place de Dieu et de son Messie venu dans la chair.

Cette imposture antichristique se dessine déjà dans le monde à chaque fois que l’on prétend accomplir dans l’histoire l’espérance messianique qui ne peut s’achever qu’au-delà d’elle à travers le jugement eschatologique: même sous sa forme mitigée, l’Église a rejeté cette falsification du Royaume à venir sous le nom de millénarisme, surtout sous la forme politique d’un messianisme sécularisé, “intrinsèquement pervers”.

L’Église n’entrera dans la gloire du Royaume qu’à travers cette ultime Pâque où elle suivra son Seigneur dans sa mort et sa Résurrection. Le Royaume ne s’accomplira donc pas par un triomphe historique de l’Église selon un progrès ascendant mais par une victoire de Dieu sur le déchaînement ultime du mal qui fera descendre du Ciel son épouse. Le triomphe de Dieu sur la révolte du mal prendra la forme du jugement dernier après l’ultime ébranlement cosmique de ce monde qui passe. »

Ce texte de théologie donne la clef de toutes les prophéties de l’Écriture sur la fin du monde. Jésus annonce pour son retour une Église humiliée, presque absente du fait de la réussite quasi-universelle d’un Antéchrist* qui ne sera même pas nécessairement violent puisqu’il établira “une fausse paix sur le monde[10]”. Il est clair que ce succès provisoire de ce qui s’oppose au Christ sera permis par Dieu et entrera au centre même de son projet grandiose. S’il avait voulu autre chose, il lui aurait suffi d’agir, “Lui qui peut faire naître à partir des pierres des fils à Abraham[11]”.

S’il s’agit là du scénario prévu par Dieu, c’est qu’il est le meilleur possible[12].

Or, et c’est remarquable, ce scénario ressemble à celui que choisit l’Esprit Saint pour le Christ. C’est ainsi qu’il sauva le monde. Lui aussi passa par un martyre, après une lente « kénose »[13]. La clef de l’histoire est ici. Le même Esprit qui conduisit le Christ, conduira l’Église à son Heure. C’est en passant par la croix, à l’imitation de son époux, qu’elle provoquera le retour du Messie et le salut de l’humanité entière. La fin de l’Église est donc la même, analogiquement, que celle du Christ car c’est le même Esprit Saint.

 

Nous verrons au long de ce récit à quel point la vie du Christ est une allégorie de celle de l’Église, jusqu’à la fin du monde. Ce sera même une allégorie de détail, chaque acteur du drame de la passion trouvant sa place sous forme d’un courant idéologique particulier lors du témoignage final de l’Église[14].

Avant de reconstituer cette histoire à venir pour la fin des fins, suivons pas à pas le cheminement de l’humanité au cours de son histoire. En effet, comme toutes les prophéties apocalyptiques, elles ont plusieurs manières de se réaliser dans l’histoire des hommes[15].

1- A chaque époque de l’histoire, c’est-à-dire pour chaque homme face à l’histoire de sa génération. C’est ce que je vais décrire maintenant.

2- D’une manière plus grandiose, lors de la dernière génération sur la terre. (Voir à partir du chapitre 4).

La connaissance de la fin de tel ou tel monde particulier permettra de mieux comprendre la fin des fins.

 

 

1. Cette partie intègre une lecture et une interprétation des événements de l’histoire. Elles se situent dans la logique de l’ensemble de la compréhension de l’Évangile. Nous espérons que notre manière de regarder l’histoire guérira le lecteur de toute interprétation liée à une apocalypse de peur. [↩]

2. Catéchisme de l’Église Catholique, n° 673. Ce texte, publié en 1992 par le Pape Jean-Paul II est le reflet authentique de la foi catholique. Il a donc une très grande autorité pour la foi. [↩]

3. C’est même là un des articles essentiels de la foi, ce qui distingue les catholiques et les orthodoxes de bien des prédicateurs réformés. [↩]

4. Matthieu 24, 36. [↩]

5. Cit. ap. Ferraris, Prompta bibl., verbo Prædicare. - Mansi, Sacrorum Conciliorum collectio, t. XXXII, p. 945-947. [↩]

6. Jean 6, 15. [↩]

7. Chez les catholiques intégristes, l’idée est la suivante: “L’Église prêchera l’Évangile à toutes les nations. Les hommes reviendront à la foi. L’Église pourra reprendre son rang dans la société, rétablira les lois chrétiennes et sera de nouveau puissante pour évangéliser le monde. Le Christ, quant à lui, ne reviendra pas avant que l’Évangile n’ait été annoncé à tous les hommes. » Ils s’appuient sur Matthieu 24, 14: « L’Évangile sera proclamé dans le monde entier en témoignage à la face des nations, puis viendra la fin. » L’idée d’une Royauté sociale du Christ sur le monde par l’intermédiaire de l’Église ne pose qu’un seul problème mais de taille. S’est-il trouvé une seule période de l’histoire où l’on ait vu une religion à la fois puissante et humble ?
 
La solution du catholicisme progressiste est différente: “Établissons sur la terre un monde juste, équitable. Que chacun reçoive les moyens matériels et la liberté pour chercher le bonheur. Que la tolérance règne, alors les hommes seront prêts à accueillir le Christ lors de son retour, selon cette parole de l’Écriture: « A ceci on reconnaîtra que vous êtes mes disciples. Si vous vous aimez les uns les autres. » Là encore, la générosité est évidente même si on peut lui reprocher d’être tournée vers les hommes au point d’en oublier le cœur à cœur de la vie avec Dieu.
 
Les chrétiens millénaristes et les sectes apocalyptiques adoptent un scénario exactement inverse. Nourris de récits alarmistes, ils pensent que Dieu laissera les hommes vivre dans leurs péchés. Matthieu 24, 21 rapporte ainsi les paroles du Christ: « Il y aura une grande tribulation telle qu’il n’y en a pas eu depuis le commencement du monde. » Selon eux, Dieu permettra une multiplication des guerres, des maladies et de toutes autres catastrophes matérielles pour disposer le cœur de l’homme la conversion. Nous avons montré tout au long de cet écrit l’efficacité réelle de telles souffrances pour conduire l’orgueilleux à l’humilité et l’humble à la soif d’un sauveur. Mais faut-il en conclure qu’il s’agit des seules armes dont Dieu dispose.
 
Ces quatre théories sont vraies et complémentaires. Toutes se fondent sur des textes de l’Écriture. Toutes ont été ici ou là au cours de l’histoire appliquées par Dieu à telle ou telle génération. Cependant, puisqu’il s’agit de parler ici de la fin des fins, du terme des générations, quelque chose d’inédit se passera. Tout sera à la fois plus intense et plus universel. Il ne s’agira plus de la fin de tel ou tel temps dans une civilisation, mais de la fin de tous les temps pour le monde entier. [↩]

8. Catéchisme de l’Église Catholique, Mame, 1992, pages 149-150. Ce texte, publié en 1992 par le Pape Jean-Paul II est le reflet authentique de la foi catholique. Il a donc une très grande autorité pour la foi. [↩]

9. Voir décret d’introduction au Catéchisme de l’Église Catholique. [↩]

10. Voir 1 Thessaloniciens 5, 3. [↩]

11. Luc 3, 8. [↩]

12. Cependant, une question grave peut lui être objectée: Si les hommes dans leur majorité se trouvent éloignés du Christ lors de sa venue, ne seront-ils pas damnés en masse? Le fait que seuls quelques contemplatifs comprennent de l’intérieur ces événements n’a aucune importance si le reste du peuple se perd... [↩]

13. Ce terme de théologie désigne un affaiblissement, un renoncement volontaire à soi-même jusqu’à la mort. [↩]

14. Voir chapitre 5, les signes de la fin du monde dans l’Église. [↩]

15. Nous ne racontons pas ici la manière individuelle dont ces prophéties sont accomplies. Nous l’avons décrite dans le premier ouvrage sur l’heure de la mort. [↩]

Arnaud Dumouch, La fin du monde, Éditions Docteur angélique, Avignon, 2007.

 

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