Cher Arnaud,
Mon ami d'Aveyron m'a dit qu'il met un peu mal-à-l'aise les musulmans de sa famille en les amenant à reconnaître eux-mêmes que le Coran affirme :
1. que Jésus est fils de Dieu :
En effet , le Coran dit qu'il est fils de Marie et du souffle de Dieu.
2. que Jésus est Dieu :
En effet, le Coran dit qu'Il a l'Esprit de Dieu, le Souffle de Dieu, qu'il est la Parole de Dieu, qu'il est sans péché et qu'il manifeste la Miséricorde de Dieu. Or seul Dieu est sans péché et
est miséricordieux. D'autre part, quelqu'un qui a votre esprit, votre souffle et votre parole, qui est-ce, sinon vous-même ?
J'ai parcouru aussi hier le texte sur la vocation d'Israël. Je n'ai pas encore tout lu. Mais puis-je vous faire partager le message que j'ai envoyé à mon cousin après avoir lu les mémoires de
son père Simon (le frère de mon père) ? Nous sommes d'origine juive lui à 100%, moi à moitié. Notre grand'père est mort à Auschwitz en 1942. Mon cousin a découvert récemment des mémoires
(qu'il ignorait) de son père, mort il y a plusieurs années, où celui-ci raconte son enfance d'enfant juif à Paris puis en zone libre pendant l'occupation.
..."J'ai été en particulier très touché par les souffrances de ton père liées à sa judéité, et par les sentiments de malaise, de honte et de rancoeur mêlés qu'il
éprouvait par rapport à ses origines et aux attitudes des gens.
Contrairement à ce qu'il s'imagine dans le seul passage où il est question de nous deux, ma conversion n'était pas une réaction à mon demi-judaïsme, puisqu'elle me rendit alors plutôt fier
d'être ainsi lié par le sang aussi bien aux martyrs des camps de concentration qu'au Christ et aux chrétiens des premiers temps. C'est plutôt ma mère qui, au contact des amis et connaissances
de la famille I... devint peu à peu, au cours des années, très remontée contre les défauts de la race. Pour moi, par la famille catho-tradi instrument de ma conversion, tout en étant très
sensible à la richesse et à la noblesse originelle du judaïsme, j'étais très critique face à l'influence délétère tant politique, financière qu'idéologique de l'esprit juif détourné de sa
finalité. Et c'est vrai qu'à l'époque je souscrivais assez aux mythes de droite, comme celui des complots, etc.
En fait, l'âme juive est, par excellence, faite pour l'adoration et la louange du Père, l'attente amoureuse du Messie et l'annonce du Royaume de Dieu pour les nations. Faite pour l'infini, si
elle se détourne de sa vocation, elle cherche l'infini dans le fini et elle peut infiniment chûter. Son adoration se dégrade en idolâtrie des biens de ce monde, et l'espérance du Royaume de
Dieu se défigure en une quête éperdue de la tour de Babel, c'est à dire d'une recherche d'efficacité et de puissance au service des idéologies d'un utopique "lendemain qui chante" qui se
révèle de jour en jour un enfer de plus en plus prégnant. Cette chute est le propre de toute âme qui se détourne de sa vocation à l'absolu de l'amour divin et de la vérité. Mais l'âme juive
ayant cette vocation de manière éminente et devant être phare pour les nations, "corruptio optimi pessima", la corruption du meilleur est la pire.
Contrairement à ce qu'il paraissait à Simon ("curieuse parenté" dit-il à mon propos), je suis le seul de la famille à avoir gardé (retrouvé) la foi d'Abraham, et à être resté (redevenu) juif
dans le sens de la mission divine telle que je viens de te la rappeler plus haut. Mais c'est vrai qu'il y a un péché historique de l'Eglise qui, pour s'ouvrir au monde païen, a souvent renié
ses origines, et je communie en même temps, étant catholique et à moitié païen, à la grande repentance que le pape a demandé à toute l'Eglise de faire en l'année sainte 2000, pour toutes les
fautes, les crimes et les péchés de ses enfants envers le peuple de la première alliance. Je suis même lié à des mouvements charismatiques qui vivent de plus en plus de la dimension judaïque
du christianisme, allant jusqu'à célébrer le shabbat et les fêtes juives. Ces mouvements sont interconfessionnels (toutes les dénominations chrétiennes et même des juifs messianiques
reconnaissant Jésus comme Messie).
C'est ma foi chrétienne qui me donne une conscience de plus en plus profonde de mon enracinement charnel et spirituel dans le judaïsme."
Je veux aussi compléter ce que
vous dîtes aussi sujet de la repentance que le Pape a faite au nom de l'Eglise :
Le pape a voulu montrer l’exemple de la seule attitude qui puisse mettre en route le
processus d’une vraie paix entre les hommes : la repentance et le pardon. D’ailleurs dans la lettre apostolique « Tertio millennio adveniente » où il en parle bcp, le pape souligne bien
cet aspect : montrer l’exemple en se mettant les premiers à genoux, afin que les autres suivent et fassent eux aussi de même. Car il est au cœur de la vocation de l’Eglise d’opposer à la loi
du Talion le fameux « à qui te frappe sur une joue, présente encore l’autre » (Lc 6, 29) et la surabondance de la Miséricorde.
D'autre part, il s'agit aussi d'un acte de
guérison de l'arbre généalogique de l'Eglise qui, demandant pardon au nom de ses enfants pécheurs, les dégagent de l'errance et du purgatoire, et dégage aussi leur descendants (nous) des liens héréditaires contractés avec l'Adversaire. Encore faut-il évidemment se
joindre de coeur à cette demande du Pape (ce que ne font pas les tradis de toute sorte).
Amicalement
Serge