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Le shéol des âmes

 

 

Je m’appelle Christophe Viseur, j’ai été assassiné le 25 février 1994. Il était 22h30 quand on sonna à ma porte. Je me suis dirigé vers celle-ci. Au moment où je l’ai ouverte, j’ai entendu un grand bruit et puis plus rien.

J’ouvre les yeux. Je suis au plafond, je me regarde. C’est étrange, je me vois couché au sol, gisant dans une mare de sang. Un trou surplombe mon crâne. En fait, ce sang dans lequel je gis, c’est mon sang. Un tas de questions se bousculent dans ma tête : « Pourquoi moi ? » « Qu’ai-je fait ? ».

Soudain, une lumière apparaît, une sorte de long tunnel en forme de lumière, une silhouette encore plus lumineuse s’y tient. Elle me fait signe de venir mais je m’en détourne. À ce moment-là, je me dis « Je ne peux pas mourir ! » En fait, je pense surtout « je ne veux pas mourir ». À peine ma pensée formulée, le tunnel et la silhouette disparaissent.

À partir de ce moment, je « vis » dans ma maison. Mais bientôt, d’autres personnes viennent s’y installer. Je ne les connais pas ! Qui sont-elles ? Je décide de les chasser. Soudain, un film me passe par la tête : et si je les effrayais ? C’est décidé, ils vont partir ! Je bouge les meubles, j’allume la télévision, la radio, je fais tomber les postures, les cadres du mur,…

Un jour, la jeune fille qui habite ici s’assied sur son lit, on dirait qu’elle me regarde. Soudain, elle commence à me parler : « Tu sais, ma mère a très peur de toi, mais moi je sais que tu ne nous veux pas de mal ! J’ai parlé de toi à mon professeur de religion et il m’a dit de te faire savoir que tu ne devais pas avoir peur de la Lumière, il faut que tu y ailles. » Puis, elle s’est levée et est partie dans la cuisine, auprès de sa mère. Je l’ai suivie, me suis assis sur une chaise et les ai regardées préparer le repas. Je me disais qu’elles avaient l’air heureuses quand je ne troublais pas leur paix. Je me disais aussi que je faisais une bêtise en les effrayant ainsi, et que je devais accepter ma mort.

« C’est décidé, me suis-je dit, je dois entrer dans la lumière ». Aussitôt dit, aussitôt fait, la lumière est revenue. Je me suis dirigé vers la silhouette lumineuse. Et là, à mon grand étonnement, Jésus-Christ m’attendait les bras ouverts. Il m’a aidé à découvrir qui j’étais vraiment.

Puis un être bizarre m’est apparu, c’était le diable. Tous deux, Jésus-Christ et Lucifer, m’ont proposé de choisir entre le paradis et l’enfer. L’enfer ressemblait à un grand parc d’attractions où je pouvais vivre fier mais seul. Par contre, le paradis m’a été présenté comme une pièce grise mais avec tous les gens que j’aime. Je n’ai pas hésité, j’ai choisi ceux que j’aime.

J’ai regardé Jésus et je lui ai dit que je l’aimais tellement que je voulais devenir digne de lui. Et lui m’a accepté, dans une grande joie, sans vouloir me dissuader de ma résolution. C’est ainsi que je suis entré dans le purgatoire, par moi-même et pour lui.

Je me suis isolé dans un endroit désert et triste du monde où j’étais entré. J’ai choisi un désert rocheux. Je me suis dit que si je choisissais un endroit triste, je deviendrais plus vite digne de Dieu. Le temps a passé et je me sens de plus en plus triste ici. L’angoisse me mine. J’ai choisi le paradis pour être avec les gens que j’aime, mais ils ne sont pas là. J’y pense tout le temps et je me demande pourquoi je me sens si mal.

Un jour où je pensais encore à tous les gens que j’aime, une idée m’est passée par l’esprit. Découragé, je me suis rendu compte que je ne serais jamais digne de Dieu, que je suis simplement comme tout le monde, un pauvre type. Et j’ai pensé que le Dieu si simple que j’avais vu, devait m’aimer comme j’étais.

Le Seigneur a vu que je n’étais pas bien et il est venu me voir.

Que se passe-t-il, mon enfant ?

Tu me manques. Ma famille, mes amis, les gens que j’aime me manquent !

Tu les reverras un jour.

Dieu, je sais que je ne suis pas digne de toi, mais dis seulement une parole et je serai guéri.

À cette parole, une lumière intense m’a illuminé. Une sorte de grande barrière s’est ouverte, un passage que je n’avais jamais vu et qui était là. Jésus m’a pris par la main et m’a conduit jusqu’à lui. Il m’a dit :

Mon enfant, depuis tout ce temps que tu erres de purgatoires en purgatoires ! Maintenant tu es devenu tout humble et tout amour. Tu es admis au paradis. Prépare-toi.

Maintenant, j’ai vraiment ouvert les yeux. Je vis face à face avec Dieu. C’est un être extraordinaire. Sur terre, on parlait d’un être de lumière, je trouve que c’est une belle image pour le décrire, car il rayonne d’amour et d’humilité. Il m’a aidé à devenir comme lui. Je lui en suis reconnaissant. J’ai compris que la terre n’était qu’un des six purgatoires. Ici, au paradis, c’est la vraie vie, la vie éternelle.

Jennifer Wouters, 31 mai 2006
Illustrations : Maximilie Sente

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