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Mt  19  13-15

S. Chrys. (sur S. Matth.) Notre-Seigneur venait de parler de la chasteté ; quelques-uns de ceux qui l’avaient écouté lui présentèrent des enfants d’une grande pureté, car ils pensaient que le Sauveur n’avait relevé le mérite que de la pureté du corps : « On lui présenta alors des enfants, » etc. — Origène. Ils savaient par l’expérience de ses miracles que l’imposition seule de ses mains, jointe à la prière, suffisait pour repousser tout accident funeste ; ils lui présentent donc des enfants, dans la pensée, qu’après que le Seigneur leur aurait communiqué, en les touchant, une vertu toute divine, ils seraient à l’abri de tout malheur, et des attaques du démon (cf. Ps 110, 6). — S. Rémi. C’était une coutume chez les anciens de présenter les petits enfants aux vieillards, pour que ces derniers pussent les bénir de la main ou par leurs paroles, et c’est en vertu de cet usage que ces petits enfants sont présentés au Seigneur.

S. Chrys. (sur S. Matth.) L’homme charnel, qui ne peut se réjouir dans le bien, l’oublie facilement, tandis qu’il ne perd jamais le souvenir du mal qu’il a entendu. Jésus venait à peine de prendre un enfant et de dire : « Si vous ne devenez comme cet enfant, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux, » et voilà qu’aussitôt les disciples, oubliant l’innocence de cet âge, éloignaient les enfants du Sauveur comme indignes de s’approcher de lui. « Et comme ses disciples les repoussaient, » etc. — S. Jérôme. Ce n’est pas qu’ils voulussent s’opposer à ce que Jésus les bénît de la main et de la voix, mais n’ayant pas encore une foi très grande, ils s’imaginaient qu’en cela, semblable aux autres hommes, le Sauveur était fatigué de l’importunité de ceux qui lui présentaient ces enfants. — S. Chrys. (hom. 62.) Ou bien encore, les disciples repoussaient les enfants par égard pour la dignité de Jésus-Christ ; mais le Seigneur, voulant les former à l’humilité et leur apprendre à fouler aux pieds les prétentions de l’orgueil humain, prend ces petits enfants, les tient dans ses bras, et promet le royaume des cieux à ceux qui leur ressemblent. « Et Jésus leur dit : Laissez les enfants, et ne les empêchez pas, » etc. — S. Chrys. (sur S. Matth.) Qui mériterait, en effet, d’approcher de Jésus si on éloigne de lui la simplicité de l’enfance ? Aussi ajoute-t-il : « Et ne les empêchez pas, » etc. ; car, s’ils doivent être un jour des saints, pourquoi défendre aux fils d’approcher de leur père ; et s’ils doivent devenir pécheurs, pourquoi prononcer la sentence de condamnation avant d’avoir vu leurs fautes. — S. Jérôme. C’est avec dessein qu’il dit : « C’est à ceux qui leur ressemblent qu’appartient le royaume des cieux, » et non pas « à ceux-ci ; » il veut montrer que ce n’est pas à l’âge, mais à la pureté des moeurs qu’appartient le royaume des cieux, et que c’est à ceux qui imitent leur innocence et leur simplicité que la récompense est promise.

« Et lorsqu’il leur eut imposé les mains, » etc. — S. Chrys. (sur S. Matth.) Ce passage de l’Évangile apprend à tous les parents qu’ils doivent présenter leurs enfants aux prêtres ; car ce n’est pas le prêtre qui leur impose alors les mains, c’est Jésus-Christ, au nom duquel se fait cette imposition. En effet, si celui qui offre à Dieu par la prière la nourriture qu’il va prendre, mange cette nourriture, sanctifiée par la parole de Dieu et la prière, selon la doctrine expresse de l’Apôtre (1 Tm 4, 5), combien plus est-il nécessaire d’offrir les enfants à Dieu pour qu’il les sanctifie. La raison pour laquelle nous bénissons notre nourriture avant de la prendre, c’est que le monde tout entier est sous l’empire de l’esprit malin (1 Jn 5, 19), et que, par conséquent, toutes les choses corporelles qui forment une grande partie du monde créé lui sont soumises ; les enfants eux-mêmes, lorsqu’ils viennent au monde, sont donc également sous son empire quant à leur corps.

Origène. Dans le sens mystique, nous appelons enfants ceux qui sont encore charnels en Jésus-Christ, et qui ont encore besoin de lait. (1 Co 3.) Ceux au contraire, qui professent la doctrine du Verbe, mais qui sont encore simples et nourris d’un enseignement approprié à la faiblesse du jeune âge, sont encore novices, ce sont eux qui présentent au Sauveur les enfants et les petits ; mais ceux qui sont plus parfaits, c’est-à-dire les disciples de Jésus, avant de connaître les dispositions de la justice divine à l’égard des enfants, s’élèvent contre ceux qui, à l’aide d’une doctrine élémentaire, présentent à Jésus-Christ les enfants et les petits, c’est-à-dire les moins instruits. Or, le Seigneur veut apprendre à ses disciples parvenus à la maturité de l’âge, à condescendre à la faiblesse des enfants et aux exigences de leur âge, et à devenir comme des enfants pour les enfants, afin de les gagner à Jésus-Christ, et il leur dit : « Le royaume des cieux est pour ceux qui leur ressemblent, car lui-même, qui avait la nature de Dieu, a daigné se faire enfant ». (1 Ph 2.) Voilà donc ce qu’il nous faut considérer attentivement afin que le désir d’une sagesse plus excellente et d’un progrès spirituel plus avancé ne nous porte à mépriser les petits enfants comme si nous étions au-dessus d’eux, et à les empêcher de s’approcher de Jésus. Et comme les enfants ne sont pas capables de suivre tous les enseignements de Jésus, il leur impose les mains, et après leur avoir communiqué une vertu particulière par ce divin attouchement, il les laisse comme étant encore incapables de le suivre, à l’exemple des autres disciples plus parfaits. — S. Rémi. Il bénit les enfants en leur imposant les mains, pour signifier que les humbles d’esprit sont dignes de sa grâce et de sa bénédiction. — La glose. Il leur imposa aussi les mains pour marquer que la grâce du secours divin serait départie à ceux dont la pureté égale l’humilité. — S. Hil. (can. 19 sur S. Matth.) Les enfants sont encore la figure des Gentils qui ont retrouvé le salut par la foi et par ce qu’ils ont entendu. Cependant les disciples, dans le désir qu’ils ont de sauver d’abord le peuple d’Israël, les empêchent d’approcher. Le Seigneur, alors, leur défend de les éloigner ; car le don du Saint-Esprit devait être accordé aux Gentils par l’imposition des mains et par la prière, après l’abolition des prescriptions légales.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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