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ÉVANGILE DE JÉSUS-CHRIST SELON SAINT MARC

Préface

Le prophète Isaïe prédit clairement la vocation des Gentils et ce qui devait être la cause de leur salut, lorsqu’il dit : " Mon Dieu est devenu ma force et il a dit : C’est peu que tu sois, mon serviteur pour réveiller de leur assoupissement les tribus de Jacob, et pour convertir les restes d’Israël. Je t’ai établi la lumière des nations, et le salut que j’envoie jusqu’aux extrémités delà terre. " — S. Jérôme. (Ps 21) Nous voyons dans ces paroles que Jésus-Christ est appelé le serviteur de Dieu en tant qu’il a été formé dans le sein d’une femme, car nous lisons un peu auparavant : " Voilà ce que dit le Seigneur, lui qui m’a formé dès le sein de ma mère pour être son serviteur. " La volonté du Père était que ces vignerons pervers fissent bon accueil à son Fils qu’il leur envoyait, et c’est d’eux que Jésus-Christ parlait lorsqu’il disait à ses disciples : " N’allez pas dans le chemin des Gentils, mais allez plutôt aux brebis perdues de la maison d’Israël. " Mais comme le peuple d’Israël n’a pas voulu revenir à Dieu, le Fils de Dieu s’adresse en ces termes aux Juifs incrédules : " Mon Dieu est devenu ma force, et il m’a consolé de la tristesse que m’a causée l’abandon de mon peuple. Et il m’a dit : Ce n’est point assez que vous me serviez pour relever les tribus de Jacob (qui sont tombées par leur faute) et pour convertir la lie, c’est-à-dire, les tristes restes d’Israël. Je vous ai établi en échange pour être la lumière de toutes les nations pour éclairer le monde entier, et faire parvenir jusqu’aux extrémités de la terre le salut que j’envoie aux hommes. " — La glose. Des paroles qui précèdent, nous pouvons conclure deux choses : la première, c’est la puissance divine qui était en Jésus-Christ et qui lui donna la force d’éclairer toutes les nations : " Mon Dieu est devenu ma force. " Dieu était donc dans Jésus-Christ pour se réconcilier le monde, comme l’Apôtre le dit aux Corinthiens : " L’Evangile qui sauve ceux qui croient, est donc la force de Dieu pour tout croyant, " comme le même Apôtre l’écrit aux Romains. La seconde chose à conclure, c’est que toutes les nations ont été éclairées, et le monde sauvé par Jésus-Christ d’après une disposition particulière de Dieu le Père, et qui se trouve exprimée dans ces paroles : " Je t’ai établi pour être la lumière des nations. " Aussi est-ce pour accomplir cette volonté de son Père, que le Seigneur, après sa résurrection, envoie les uns prêcher l’Evangile aux Juifs, et les autres aux Gentils. Mais comme l’Evangile ne devait pas être seulement prêché pour ceux qui vivaient alors, mais qu’il devait être écrit pour les générations à venir, la même différence s’observe à l’égard des Evangélistes, car saint Matthieu écrivit son Evangile en hébreu pour les Juifs, et saint Marc l’écrivit le premier pour les Gentils.

Eusèbe. Lorsque la lumière éclatante du Verbe de Dieu se fut levée sur la ville de Rome, la parole de vérité et de lumière que prêchait saint Pierre, remplissait les âmes de tous les fidèles d’une clarté paisible, et quoiqu’ils l’entendissent tous les jours, ils n’en étaient jamais rassasiés. Aussi ne leur suffisait-il pas de l’entendre, ils conjurèrent donc Marc, son disciple, d’écrire les prédications de son maître pour qu’ils pussent en conserver le souvenir et les méditer en toute circonstance, et ils ne cessèrent leurs prières qu’après avoir obtenu ce qu’ils demandaient. Tel fut le motif qui porta saint Marc à écrire l’Evangile qui porte son nom. Lorsque saint Pierre vit que l’Esprit saint l’avait ainsi dépouillé par un pieux larcin, il fut dans la joie, et voyant dans ce fait une preuve de la foi et de la piété des fidèles, il approuva cet Evangile écrit et le donna aux Eglises pour y être lu à jamais.

S. Jérôme. Saint Marc commence par la prédication de Jésus-Christ, lorsqu’il fut arrivé à l’âge parfait, et comme il traite de la perfection du Fils de Dieu, il ne s’arrête pas à décrire sa naissance comme petit enfant.

S. Chrys. Le récit de saint Marc est court et abrégé, et en cela il imite son maître saint Pierre, dont le style est toujours concis. — S. Augustin. Saint Matthieu, qui avait pour but de montrer surtout le caractère royal de la personne de Jésus-Christ, s’est adjoint comme suivant, et comme abréviateur, saint Marc, pour marcher en quelque sorte sur ses traces, car les rois ne vont jamais sans avoir des personnes à leur suite. Au contraire, comme le grand-prêtre entrait seul dans le saint des saints, l’Evangéliste saint Luc, qui s’est appliqué à faire ressortir le caractère sacerdotal de Jésus-Christ, n’a pas eu de compagnon à son service pour abréger son récit.

Bède. Il faut remarquer également que les saints Evangélistes ont terminé chacun leur récit comme ils l’avaient commencé d’une manière différente. Saint Matthieu commence par la naissance du Seigneur, et conduit son récit jusqu’à sa résurrection. Saint Marc débute par le commencement de la prédication du Sauveur, et va jusqu’à son ascension, et jusqu’à la prédication de ses disciples par tout l’univers. Saint Luc commence son récit par la naissance du Précurseur, et le termine par l’ascension du Seigneur. Saint Jean ouvre son Evangile, en remontant jusqu’à l’éternité du Verbe de Dieu, et continue son récit jusqu’à la résurrection du Sauveur. — S. Ambr. C’est avec raison que saint Marc, qui commence son Evangile par la description de la puissance divine, nous est représenté sous la figure d’un lion. — S. Rémi. Il nous est peint encore sous cette figure, parce que semblable au lion qui fait retentir le désert de ses terribles rugissements, saint Marc commence par ces paroles : " Voix de celui qui crie dans le désert. " — S. Augustin. Cependant on peut expliquer différemment ces symboles ; saint Marc, qui ne s’est proposé, ni de raconter l’origine royale de Jésus-Christ, comme saint Matthieu (qui pour cela est figuré par le lion), ni sa descendance sacerdotale comme saint Luc (qui nous est figuré par le bœuf), ni sa parenté ou sa consécration, mais qui paraît avoir voulu raconter ce que Jésus-Christ a fait comme homme, nous est représenté sous la figure d’un homme dans le tableau symbolique des quatre animaux. — Théophyl. Ou bien l’Evangile de saint Marc est figuré par l’aigle, car il le commence par la prophétie, qui a pour objet Jean-Baptiste, et la prophétie, comme l’aigle, embrasse dans son regard perçant les choses les plus éloignées.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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