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ÉVANGILE DE JÉSUS-CHRIST SELON SAINT LUC

Préface

Le prophète Isaïe qui prédit avec tant d’exactitude et de clarté les divers mystères de l’incarnation de Jésus-Christ, dit au chapitre 50 : « J’envelopperai les cieux de ténèbres, et je les couvrirai comme d’un sac. Le Seigneur m’a donné une langue savante, afin que je puisse soutenir par la parole celui qui est abattu. Il m’éveille et me touche l’oreille tous les matins, afin que je l’écoute comme un maître » (Is 50). Ces paroles peuvent nous faire connaître l’objet et le genre de l’Évangile selon saint Luc, le but que cet évangéliste s’est proposé et dans quelles conditions il l’a écrit. — S. Augustin. (De l’ac. des Ev., lib. 1, cap. 2 et 6). Saint Luc paraît s’être proposé surtout de décrire l’origine sacerdotale du Sauveur, et tout ce qui a rapport à sa personne. De là vient qu’on lui donne pour emblème un boeuf, le boeuf étant la principale victime que les prêtres offraient en sacrifice. — S. Ambr. (Préf. sur S. Luc). Le boeuf est par excellence la victime sacerdotale ; cet évangéliste est donc parfaitement figuré par un boeuf, puisqu’il ouvre son récit par l’histoire d’une famille sacerdotale, et le termine en racontant beaucoup plus au long que les autres l’immolation de cette victime, figurée par les taureaux de l’ancienne loi, et qui se chargeant des péchés de tous les hommes, a été immolée pour la vie du monde entier. — La glose. Saint Luc s’étant proposé principalement de raconter la passion de Jésus-Christ, cet objet se trouve comme indiqué dans ces paroles : « J’envelopperai les cieux de ténèbres, et je les couvrirai comme d’un sac. » Car, dans la passion du Sauveur, les ténèbres se répandirent littéralement sur la terre, et la foi des disciples fut couverte de nuages. — S. Jérôme. (sur Is 53). Jésus-Christ lui-même sur la Croix était couvert de mépris et d’opprobres, son visage était comme voilé par les ignominies, de manière que sa puissance toute divine était cachée sous l’infirmité d’un corps mortel.

S. Jérôme. Le style de saint Luc est plus pur et plus élégant que celui des autres évangélistes, et on y ressent comme un parfum de l’éloquence profane ce que semblent figurer ces paroles : « Le Seigneur m’a donné une langue savante. » — S. Ambr. (com. préc.) Car bien que les divines Écritures rejettent ces formes étudiées, qu’affecte la sagesse profane, qui s’appuie bien plus sur l’éclat prétentieux des paroles, que sur la vérité des choses ; cependant si l’on veut chercher dans les saintes Écritures elles-mêmes des modèles que l’éloquence profane ne dédaignerait pas d’imiter, on en trouvera facilement. Saint Luc, en effet, a suivi un certain ordre historique, il raconte en plus grand nombre les miracles opérés par Notre-Seigneur, et en même temps son évangile renferme des leçons de toutes les vertus. Ainsi quoi de plus sublime pour la sagesse naturelle que ce récit où saint Luc nous représente l’Esprit saint comme le créateur même de l’incarnation du Seigneur ? Il nous enseigne d’une manière non moins relevée toutes les vertus morales, comment par exemple, je dois aimer mon ennemi (Lc 6, Lc 27, Lc 32, Lc 35), j’y trouve même des leçons des choses qu’on pourrait appeler simplement rationnelles, par exemple : « Celui qui est fidèle dans les petites choses, l’est aussi dans les grandes. » (Lc 16, 10).

Eusèbe. (Hist. ecclés., 3, 4.) Saint Luc, né à Antioche, où il exerçait la profession de médecin, puisa dans la société ou dans la tradition des Apôtres, les principes d’une médecine bien différente, et composa deux livres où sont expliquées les règles de cet art céleste, qui apprend à guérir non pas les corps mais les âmes : « Afin que je puisse soutenir par la parole celui qui est abattu. » — S. Jérôme. Il nous apprend en effet lui-même que le Seigneur lui a confié le ministère de la parole pour soutenir le peuple errant et fatigué, et le ramener dans les voies du salut.

S. Grég. Or, saint Luc étant doué d’un esprit distingué et d’une vaste intelligence, se rendit habile dans les sciences des Grecs. Il acquit une connaissance parfaite de la grammaire et de la poésie, et s’instruisit à fond des règles de la rhétorique et de l’art de persuader, il excella également dans la philosophie, et enfin dans la médecine. Mais lorsque grâce à cette prodigieuse activité, il eut assez goûté les fruits de la sagesse humaine, il sentit le désir de posséder une sagesse plus élevée, il se rendit donc en toute hâte dans la Judée, et vint trouver Jésus-Christ pour jouir de sa présence et s’instruire à son école. La vérité s’étant fait connaître à lui, il devint un vrai disciple de Jésus-Christ, et resta longtemps auprès de ce divin Maître. — La glose. C’est ce qu’indiquent encore ces autres paroles : « Il m’éveille dès le matin, » (comme on forme dès la jeunesse à la science profane ; il m’éveille dès le matin et me touche l’oreille, pour la sagesse divine), pour que j’écoute attentivement les leçons du maître, c’est-à-dire de Jésus-Christ lui-même. — Eusèbe. (comme précéd.) On dit qu’il écrivit son évangile sous la dictée de saint Paul, de même que saint Marc écrivit l’évangile qui porte son nom d’après les leçons de saint Pierre. — S. Chrys. (sur S. Matth., hom. 4). Ils ont tous deux imité leur Maître, l’un à l’exemple de saint Paul répand ses eaux avec abondance, comme un fleuve majestueux, l’autre imite saint Pierre, qui s’est appliqué à être concis. — S. Augustin. (De l’ac. des Evang., 4, 8.) Les évangélistes ont écrit dans un temps où ils ont mérité de recevoir l’approbation non seulement de l’Église de Jésus-Christ, mais des apôtres eux-mêmes qui vivaient encore. Ces préliminaires suffisent.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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