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Lc  1  34-35

S. Ambr. Marie ne devait point refuser de croire aux paroles de l’ange, elle ne devait point non plus accepter témérairement les prérogatives divines qu’il lui annonçait. Que fait-elle ? « Or, Marie dit à l’ange : Comment cela se fera-t-il ? » question bien plus mesurée que celle du prêtre Zacharie. « Comment cela se fera-t-il ; » demande Marie ; à quoi connaîtrai-je la vérité de ce que vous m’annoncez, » dit Zacharie. il refuse donc de croire ce qu’il déclare ne pas comprendre, et il demande pour appuyer sa foi d’autres motifs de crédibilité. Marie, au contraire, se rend aux paroles de l’ange, elle ne doute nullement de leur accomplissement, elle n’est inquiète que de la manière dont elles s’accompliront. Elle avait lu dans les prophètes : « Voici qu’une vierge concevra et enfantera un fils, » elle croit donc. à l’accomplissement de cette prophétie ; mais elle n’avait pas lu comment elle s’accomplirait, car Dieu ne l’avait pas révélé même au premier des prophètes ; ce n’était pas à un homme, mais à un ange, qu’il était réservé de faire connaître un si grand mystère.

S. Grég. de Nysse. (disc. sur la Nativ. du Seig.) Considérez encore les paroles de cette Vierge si pure. L’ange lui prédit qu’elle enfantera, elle s’attache à sa virginité, la conservation de sa chasteté est à ses yeux d’un plus grand prix que l’apparition miraculeuse de l’ange. Aussi entendez-la dire : « Je ne connais point d’homme. » — S. Basile. (Chaîne des Pères grecs.) Le mot connaître est susceptible de plusieurs sens. On appelle connaissance, la science de Dieu notre créateur, la notion que nous avons de ses perfections et des voies qui mènent à lui, l’observation de ses commandements, et aussi les rapports des époux entre eux, et c’est dans ce dernier sens qu’il faut l’entendre ici. — S. Grég. de Nysse. (comme précéd.) Ces paroles de Marie nous dévoilent les pensées les plus intimes de son âme ; car si elle eût épousé Joseph pour la fin qu’on se propose dans tout mariage, pourquoi cet étonnement, lorsqu’on lui parle de conception ? puisqu’elle pouvait s’attendre à devenir mère un jour selon les lois de la nature. Mais il fallait conserver dans toute sa pureté ce chaste corps qui avait été offert à Dieu comme une chose sacrée, aussi dit-elle à l’ange : « Je ne connais point d’homme. » Comme si elle lui disait : Vous êtes un ange, cependant c’est pour vous chose naturellement impossible à savoir que je ne connais point d’homme ; comment donc deviendrai-je mère sans avoir d’époux, puisque je reconnais Joseph pour mon époux ?

S. Grég. (ou Géom., Ch. des Pèr. gr.) Considérez comment l’ange lève le doute de la Vierge, et lui explique la chaste union et l’enfantement ineffable qui doit la suivre : « Et l’ange lui répondit : L’Esprit saint surviendra en vous, » etc. — S. Chrys. (hom. 49 sur la Genèse.) Ne semble-t-il pas lui dire : Ne cherchez pas les lois de la nature, là où la nature est dépassée par la sublimité des choses que je vous annonce ? Vous dites : « Comment cela se fera-t-il, parce que je ne connais point d’homme ? » Et c’est justement parce que vous êtes demeurée vierge vis-à-vis de votre époux, que ce mystère doit s’accomplir en vous ; car si vous étiez une épouse ordinaire, Vous n’en auriez pas été jugée digne ; non pas, sans doute, que le mariage soit une chose profane aux yeux de Dieu, mais parce que la virginité lui est supérieure. Il convenait, en effet, que le Seigneur de tous les hommes eût avec nous, dans sa naissance, des rapports de conformité, comme aussi des traits de dissemblance. Il naît du sein d’une femme, et en cela il nous est semblable ; mais il naît en dehors des lois des conceptions ordinaires, et par là il nous est supérieur. — S. Grég. de Nysse. (comme précéd.) Bienheureux ce corps qui, par suite de l’incomparable pureté de Marie, a mérité d’être intimement uni à l’Esprit saint ; dans les autres, à peine si une âme pure mérite la présence de ce divin esprit ; ici c’est la chair elle-même qui devient son tabernacle. (Et dans le liv. de la vie de Moïse ou de la vie parf.) Ces tables de notre nature que le péché avait brisées, le vrai législateur les taille et les façonne de nouveau avec notre terre ; il prend, sans union charnelle, un corps capable d’être uni à sa divinité, et que le doigt de Dieu lui-même a sculpté, c’est-à-dire l’Esprit saint qui est survenu dans la Vierge. (Dans le disc. sur la nativ. du Christ.) « Et la vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre. » La vertu du Très-Haut c’est le Christ lui-même qui est formé dans le sein de Marie par la venue de l’Esprit saint. — S. Grég. (Moral., 18, 12.) Ces paroles : « Vous couvrira de son ombre, » signifient les deux natures du Dieu incarné ; car l’ombre est le résultat de la lumière et de l’interposition d’un corps. Or, le Seigneur est lumière par sa divinité, et comme cette lumière incorporelle devait se revêtir d’un corps dans le sein de Marie, l’ange lui dit avec raison : « La vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre, » c’est-à-dire le corps de l’humanité qui est en vous, recevra la lumière incorporelle de la divinité. Ces paroles peuvent aussi s’entendre des consolations célestes que Dieu devait répandre dans son âme. — Bède. Ce n’est donc point par le concours de l’homme que vous n’avez jamais connu, que vous concevrez, mais par l’opération de l’Esprit saint dont vous serez toute remplie, et vous demeurerez inaccessible aux ardeurs de la concupiscence, parce que le Saint-Esprit vous couvrira de son ombre. — S. Grég. de Nysse. (comme précéd.) « La vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre. » L’ombre d’un corps est produite par un objet préexistant, et reçoit de lui sa forme, ainsi les preuves de la divinité de son Fils éclateront dans la vertu miraculeuse de sa génération. Car de même que la matière corporelle qui est en nous, possède une vertu vivifiante qui sert à former l’homme ; ainsi la vertu du Très-Haut, par l’opération de l’Esprit vivificateur, a pris dans le corps virginal de Marie la partie de matière qui devait servir à former l’homme nouveau. C’est ce qu’indiquent les paroles suivantes : « C’est pourquoi le fruit saint qui naîtra de vous, sera appelé le Fils de Dieu. » — S. Athan. (lettre contre les hérétiq. à Epict.) Nous faisons profession de croire que le corps du Sauveur, formé des éléments matériels de la nature humaine, a été un véritable corps, de même nature que le nôtre ; car Marie est notre soeur, puisque tous, comme elle, nous sommes descendus d’Adam. — S. Basile. (de l’Esprit saint, ch. 5.) Voilà pourquoi saint Paul dit : Dieu a envoyé son Fils né d’une femme, il ne dit point par le moyen d’une femme, mais d’une femme ; car cette expression : par une femme aurait pu donner l’idée d’une génération qui ne serait qu’un passage, tandis que ces paroles : né d’une femme établissent clairement l’identité de nature entre le fils et la mère.

S. Grég. (Mor., 18, 27.) L’ange déclare que Jésus sera saint dès sa naissance, mais d’une sainteté toute différente de la nôtre. En effet, nous pouvons acquérir la sainteté ; mais nous ne la possédons pas dès notre naissance, enchaînés que nous sommes dans les liens d’une nature sujette à la corruption, ce qui nous fait dire avec le prophète (Ps 50) : « Voilà que j’ai été conçu dans l’iniquité, » etc. Celui-là seul est véritablement saint, dont la conception n’est pas la suite d’une union charnelle ; qui n’est point autre dans son humanité, autre dans sa divinité, comme le rêvent les hérétiques, qui n’a point commencé par être simplement un homme dans sa conception, dans sa naissance, et mérité ensuite de devenir Dieu ; mais qui, aussitôt que l’ange eut parlé, et que l’Esprit saint fut survenu, fut le Verbe descendu dans le sein de Marie, et immédiatement le Verbe fait chair dans ses chastes entrailles. C’est ce que prouvent les paroles suivantes : « Il sera appelé le Fils de Dieu. »

S. Grég. (Ch. des Pèr. gr.) Considérez comment l’ange, parlant à Marie, fait intervenir toute la Trinité, en mentionnant distinctement l’Esprit saint, le Verbe et le Très-Haut ; car la Trinité est indivisible.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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