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Lc  16  19-21

Bède. Le Sauveur venait d’exhorter à se faire des amis avec les richesses d’iniquité, et comme les pharisiens se moquaient de ses enseignements, il les confirme par l’exemple suivant : « Il y avait un homme riche, » etc. — S. Chrys. (hom. sur les riches.) « Il y avait, » et non : li y a, car il a passé comme une ombre fugitive. — S. Ambr. Toute pauvreté n’a pas le privilège de la sainteté, comme aussi toute richesse n’est pas nécessairement criminelle, mais de même que c’est la vie molle et sensuelle qui déshonore les richesses, c’est la sainteté qui rend la pauvreté recommandable.

« Il était vêtu de pourpre et de fin lin. » — Bède. La pourpre est la couleur des habits des rois, on la tire de coquillages marins par une incision faite avec le fer. Ce que la Vulgate traduit par byssus est une espèce de lin très-blanc et très-doux. — S. Grég. (hom. 40 sur les Evang.) Si la recherche des vêtements fins et précieux n’était pas coupable, le Sauveur n’aurait pas détaillé avec tant de soin ces diverses circonstances. En effet, on ne désire de luxe dans les vêtements, que par un motif de vaine gloire, pour obtenir plus de considération ; car quel est celui qui voudrait se revêtir d’habits somptueux, s’il ne devait être vu par personne ? — S. Chrys. (comme précéd.) Cet homme recouvrait de pourpre et de soie, la cendre, la poussière et la terre, ou bien la cendre, la poussière et la terre portaient la pourpre et la soie. Sa table répondait à ses vêtements. Il en est ainsi de nous, telle est notre table, tels sont nos vêtements : « Et il faisait tous les jours une chère splendide. » — S. Grég. (Moral., 1, 5.) Remarquons ici avec attention qu’il est presque impossible de faire fréquemment des festins sans se rendre coupable ; car presque toujours la volupté est la compagne inséparable de ces festins, lorsque le corps est amolli par les plaisirs de la terre, le coeur s’abandonne lui-même à une joie déréglée.

« Il y avait aussi un mendiant nommé Lazare. » — S. Ambr. Il semble que ce soit ici une histoire plutôt qu’une parabole, puisqu’il y a désignation précise du nom. — S. Chrys. (comme précéd.) Dans la parabole, au contraire, on propose un exemple et on passe les noms sous silence. Le mot Lazare signifie qui est secouru ; en effet, il était pauvre et il avait Dieu pour soutien. — S. Cyrille. Ou encore ce récit du mauvais riche et de Lazare, est présenté sous forme de parabole, pour apprendre à ceux qui possèdent de grandes richesses, qu’ils encourront une sévère condamnation, s’ils refusent de secourir les nécessités des pauvres. Une tradition juive rapporte qu’il y avait alors à Jérusalem un homme nommé Lazare, accablé tout à la fois sous le poids de l’indigence et de la maladie, et c’est lui que Notre-Seigneur prend ici pour exemple pour donner plus de clarté à ses divins enseignements. — S. Grég. (hom. 40 sur les Evang.) Remarquez encore que dans le peuple on connaît bien mieux le nom des riches que celui des pauvres ; or Notre-Seigneur nous fait connaître ici le nom du pauvre et passe sous silence le nom du riche, pour nous apprendre que Dieu connaît et chérit les humbles, tandis qu’il ne connaît point les superbes. Une nouvelle épreuve venait s’ajouter à sa pauvreté, il était victime à la fois de la pauvreté et de ta souffrance : « Il était couché à sa porte, couvert d’ulcères. »

S. Chrys. (comme précéd.) Il était couché devant la porte, afin que le riche ne pût dire : Je ne l’ai pas vu, personne ne m’en a parlé. Il le voyait donc toutes les fois qu’il entrait et sortait. Le Sauveur ajoute que ce pauvre était couvert d’ulcères pour faire ressortir par ce trait toute la cruauté du riche. O le plus malheureux des hommes, vous voyez votre corps dans celui de votre semblable, mourant et étendu à votre porte, et vous n’en avez aucune pitié ! Si vous êtes peu sensible aux commandements de Dieu, souvenez-vous au moins de votre condition, et craignez d’être un jour réduit à ce triste état. Mais encore la maladie trouve-t-elle quelque soulagement dans les richesses, quand elle les possède ; qu’elle est donc grande la misère de ce pauvre, puisque couvert de tant de plaies, il oublie ses douloureuses souffrances pour ne se souvenir que de la faim qu’il éprouve : « Il désirait se rassasier des miettes qui tombaient de la table du riche, » et semblait lui dire : Faites-moi l’aumône de ce que vous rejetez de votre table, et faites-vous un gain avec ce que vous perdez.

S. Ambr. L’insolence et l’orgueil des riches se révèlent ici à des signes non équivoques : « Et personne ne lui en donnait. » Les riches, en effet, sont si oublieux de leur condition, qu’ils s’imaginent être d’une nature supérieure, et trouvent dans la misère même des pauvres un nouveau stimulant pour leurs voluptés, ils se moquent du pauvre, ils insultent aux malheureux, et ils vont jusqu’à dépouiller ceux dont ils auraient dû prendre pitié. — S. Augustin. (serm. 25 sur les par. du Seign.) En effet, l’avarice des riches est insatiable, elle n’a ni crainte pour Dieu, ni égard pour les hommes, elle n’épargne pas son père, elle trahit les droits sacrés de l’amitié, elle opprime la veuve et s’empare des biens de l’orphelin.

S. Grég. (hom. 40.) Ajoutez que le pauvre voyait tous les jours le riche s’avancer, entouré d’un nombreux cortége de gens obséquieux, tandis qu’il était complètement délaissé dans son infirmité et dans son indigence, car une preuve évidente que personne ne venait le visiter, c’est que les chiens venaient paisiblement lécher ses ulcères : « Et les chiens venaient, ajoute le Sauveur, et léchaient ses ulcères. » — S. Chrys. (comme précéd.) Ces animaux compatissants viennent lécher ces plaies qu’aucun homme ne daignait laver et panser.

S. Grég. (hom. 40.) Dans un seul fait, Dieu exerce un double jugement. Il permet que le pauvre Lazare soit étendu devant la porte du riche, afin que ce riche impitoyable aggravât ainsi la sévérité de sa condamnation, et aussi pour que le pauvre augmentât ses droits à la récompense, car le premier voyait tous les jours celui dont il devait avoir pitié, et le second avait sans cesse sous les yeux ce qui faisait le sujet de son épreuve et de son mérite.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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