Auteur: Arnaud Dumouch (---.88.238.189.codenet.be)
Date: 03/10/2004 16:08
Cher Jean-Marie,
J'ai relu le cette question et je vous prie de m'excuser. J'avais attribué à Philippe une intervention dont vous étiez à l'origine mais à laquelle il ne faisait qu'acquiescer.
Suite à la remarque que vous relevez chez sur le chiffre 666 marqué au front, voici le commentaire de saint Thomas sur le fameux texte de 2 Thessaloniciens II qui annonce la venue du
dernier Antéchrist, celui qui précèdera de peu la fin du monde.
Le texte est un peu long mais il comprend des perles. Les commentaires de saint Tomas sur l'Ecriture sont formidables car ils vont droits au but et soulèvent comme en passant, les
prophéties les plus étonnantes.
Amicalement
Arnaud
2 Thess. 2, 1 à 5: L’Antéchrist, l’homme de péché.
1. Or, nous vous conjurons, mes frères, par l’avènement de Notre Seigneur Jésus-Christ, et par notre réunion avec lui,
2. Que vous ne vous laissiez pas légèrement ébranler dans votre sentiment, et que vous ne vous troubliez pas en croyant sur la foi de quelque esprit prophétique, ou sur quelque
discours, ou quelque lettre qu’on supposerait venir de nous, que le jour du Seigneur soit près d’arriver.
3. Que personne ne vous séduise en quelque manière que ce soit ; Car ce jour-là ne viendra point que la révolte et l’apostasie ne soit arrivées auparavant et qu’on n’ait vu paraître
cet homme de péché qui doit périr misérablement;
4. Qui s’opposant à Dieu, s’élève au-dessus de tout ce qui est appelé Dieu, ou qui est adoré, jusqu’à s’asseoir dans le temple de Dieu, voulant lui-même passer pour Dieu.
5. Ne vous souvient-il pas que je vous ai dit ces choses, quand j’étais encore avec vous ?
S. Paul, dans le chapitre qui précède, a expliqué ce qui doit arriver, quant à la punition des méchants et à la récompense des bons; il annonce ici les périls qui attendent l'Eglise au
temps de l’Antéchrist. Et d’abord il établit ce qui est vrai, quant à ces périls futurs; il recommande ensuite de ne point s’écarter de la vérité sur ce point. (verset 1.4) : "C’est
pourquoi , mes frères, demeurez fermes, etc." Sur la première de ces questions, premièrement il rejette ce qui est faux; secondement, il enseigne ce qui est vrai (verset 3): "Car il
faut auparavant, etc."
I. La première partie se subdivise en trois. D’abord l’Apôtre rappelle les raisons qui doivent les déterminer; ensuite il montre la détermination qu’ils ont à prendre (verset 2): "Que
vous ne vous laissiez pas légèrement ébranler; " enfin, il écarte ce qui pourrait les ébranler (verset 2): "En ajoutant foi à quelque esprit, etc."
1. Les raisons par lesquelles il les détermine sont au nombre de trois. D’abord sa propre prière (verset 1) : "Or, nous vous conjurons, mes frères," nous n’usons pas de commandement
(Philémon, 8): " Encore que je puisse prendre en Jésus-Christ une entière liberté de vous ordonner une chose qui est de votre devoir, néanmoins la charité fait que j’aime mieux vous
supplier." Ensuite l’avènement de Jésus-Christ, désirable pour les bons, quoique terrible aux méchants (Amos V, 18): "Malheur à ceux qui désirent le jour du Seigneur! " (II Timoth.,
IV, 8): "Il ne me reste plus qu’à recevoir la couronne qui m’est réservée, et non seulement à moi, mais encore à tous ceux qui désirent son avènement;" (Apoc., XXII, 20) : "Venez,
Seigneur Jésus!" Enfin, le désir et l’amour de toute l’assemblée des saints (verset 11) : "Et par notre réunion avec lui." C’est-à-dire, là où est Jésus-Christ, parce que (Matth., XXIV,
28) " partout où se trouvera le corps, les aigles s’assembleront." Ou encore " en lui," c’est-à-dire dans le terme, car tous les saints, et quant au lieu et quant à la gloire, seront
réunis en lui (Ps. XLIX, 5): "Assemble devant lui ses saints."
2. Mais à quoi l’Apôtre veut-il les déterminer? (verset 2): "Que vous ne vous laissiez point légèrement ébranler dans votre sentiment." Autre chose est d’être détourné, autre d’être
effrayé. On est détourné de son sentiment, quand on délaisse ce qu’on tenait d’abord. C’est comme si l’Apôtre disait : N’abandonnez pas légèrement ce que je vous ai enseigné. (Eccli.,
XIX, 4): "Celui qui est trop crédule est léger de coeur." La frayeur est une sorte de trouble, accompagné de la crainte d’un danger. C’est ce qui fait dire à S. Paul (verset 2) : "Et
que vous ne vous troubliez pas." (Job. XV, 21) : "Son oreille est toujours frappée de bruits effrayants." Si on lui dit : Paix, il redoute toujours des ombres (Sagesse, XV, 10): "Comme
sa méchanceté est timide, elle se condamne par son propre témoignage."
3. Quand S. Paul ajoute (verset 2) : "En croyant à quelque esprit, etc.," il écarte ce qui pourrait les ébranler. D’abord d’une manière spéciale; ensuite en général (verset 3) : "Que
personne ne vous séduise, etc." 1° On peut être séduit par une fausse révélation, c’est pourquoi l’Apôtre dit (verset 2): "En croyant à quelque esprit," c’est-à-dire, si quelqu’un dit
que quelque chose lui a été révélé par le Saint Esprit," comme venant du Saint-Esprit, contre ma doctrine, (verset 2) "ne vous en troublez pas." (I S. Jean, IV, 4): "Ne croyez pas à
tout esprit." (Ezéch., XXII, 3): "Malheur aux prophètes insensés, qui suivent leur propre esprit, et qui ne voient rien." Quelquefois aussi Satan se transfigure en ange de lumière,
ainsi qu’il est dit (II Corinth., XI, 15, et 11) et (I Rois, XXII, 22) : "J’irai, et je serai un esprit menteur dans la bouche de tous ses prophètes." En second lieu, par le
raisonnement, ou par une fausse exposition de l’Ecriture, c’est pourquoi il dit (verset 2): "Ou à quelque discours." (II Tim, II, 17) : "Les discours qu’ils tiennent sont comme une
gangrène qui répand insensiblement sa corruption;" (Eph. V, 6): "Que personne ne vous séduise par de vains discours." Troisièmement, par quelque autorité citée dans un mauvais sens (II
Pierre, III, 15) : "Et c’est aussi ce que Paul, notre très cher frère, vous a écrit, selon la sagesse qui lui a été donnée ; comme il fait aussi en toutes ses lettres, où il parle de
ces mêmes choses, dans lesquelles il a quelques endroits difficiles à entendre, que les hommes ignorants et légers détournent en de mauvais sens, aussi bien que les autres Ecritures, à
leur propre ruine." Or, sur quoi étaient-ils séduits? (verset 2) "Comme si le jour du Seigneur était près d’arriver." L’Apôtre dit (verset 2): "Pas même par quelques lettres qu’on
supposerait venir de nous," parce que dans sa première lettre, à moins qu’on ne la prenne dans son véritable sens, il paraît dire que l’avènement du Seigneur est proche, par exempte,
dans ce pas sage (II Thessaloniciens IV, 17) : "Pour nous autres qui sommes vivants, etc." 2° En disant (verset 3): "Que personne ne vous séduise en quelque manière que ce soit, etc."
il fait la même recommandation en termes généraux (Luc XXI, 8) : "Prenez garde de ne vous laisser pas séduire, etc." (I Corinth., XV, 33) : "Ne vous laissez point séduire, etc." Le
motif qui porte S. Paul à prémunir les fidèles contre la séduction sur le temps de l’avènement du Seigneur, c’est qu’un supérieur ne doit consentir en aucune manière à procurer quelque
bien au moyen du mensonge (I Cor., XV, 15) : "Nous serons même convaincus d’avoir été de faux témoins à l’égard de Dieu, puisque nous avons rendu témoignage contre Dieu même, etc."
C’est aussi que cette croyance, à savoir, que le jour du Seigneur est proche, était pleine de périls. D’abord, parce qu’après la mort des apôtres, il en était quelques-uns qui devaient
prétendre être le Crucifié (Luc, XXI, 8): "Plusieurs viendront en mon nom, disant : Je suis le Christ." L’Apôtre ne veut donc pas les favoriser. Satan a souvent voulu se faire passer
pour le Christ, ainsi qu’on le voit dans la vie de S. Martin. S. Paul ne veut pas laisser les fidèles exposés à ces séductions. S. Augustin donne encore une autre raison. C’est qu’il y
avait danger pour la foi, et qu’on pouvait dire, celui-ci : Le Christ viendra tard, et alors je me préparerai pour son avènement; celui-là : Le Christ viendra bientôt, je vais donc me
préparer maintenant; un troisième : Je ne sais quand viendra le Christ. Ce dernier, sans doute avec plus de sagesse, puisqu’il parle avec le Christ lui-même. Des deux autres, celui qui
dit : Il viendra bientôt, est davantage dans l’erreur, car le terme passé, les hommes se laisseraient aller au désespoir et regarderaient comme faux ce qui est écrit.
II° (verset 3): "Il faut d’abord que la séparation se fasse, etc.," S. Paul établit ici ce qui est vrai. En premier lieu, il explique ce qui doit arriver à l’avènement du Christ. Il y
aura deux événements, dont l’un précédera la venue de l’Antéchrist, l’autre sera la venue même de l’Antéchrist.
1. L’événement qui précédera est la séparation qu’on explique de diverses manières, dans la Glose. On dit d’abord que ce sera l’apostasie de la foi. La foi, en effet, dans les temps à
venir devait être reçue dans le monde entier (Matthieu XXIV, 14) : "Cet évangile du royaume des cieux sera prêchée dans toute la terre."
Voilà donc ce qui précédera, et suivant S. Augustin, ce qui n’est point encore accompli. Mais le temps venu, un grand nombre se sépareront de la foi, etc. (I Tim., XV, 1) : "Dans les
temps à venir, quelques-uns abandonneront la foi, etc." (Matthieu XXXV, 12): "La charité de plusieurs se refroidira." Ensuite, on peut entendre cette séparation de l’empire romain, au
quel l’univers entier était alors soumis. S. Augustin dit que cette séparation est figurée au ch. II du prophète Daniel, 31-35, par la statue qui désigne les quatre royaumes, et ces
quatre royaumes finis, arrivera l’avènement du Christ. Cette figure était pleine de vérité, parce que l’empire romain fut établi pour qu’à l’ombre de son autorité, la foi fût prêchée
dans tout l’univers.
Mais comment cela serait-il vrai, quand depuis longtemps déjà les nations se sont séparées de l’empire romain, sans toutefois que l’Antéchrist soit encore venu?
Il faut dire que l’empire romain n’a point cessé encore, mais que de royaume temporel qu’il était, il est changé en royaume spirituel, comme S. Léon l’a remarqué dans son sermon sur
les Apôtres. Disons donc que la séparation de l’empire romain doit être entendue, non pas seulement dans le sens temporel, mais dans le sens spirituel, c’est-à-dire de l’apostasie de
la foi catholique dans l’Eglise romaine. Et le signe donné est de toute justesse, car de même que le Christ est venu au temps où l’empire romain dominait sur tous les peuples, ainsi,
dans un sens opposé, le signe de la venue de l’Antéchrist sera la séparation des peuples d’avec l’empire romain.
2. L’Apôtre prédit le second de ces futurs événements, c’est-à-dire la venue de l’Antéchrist lui-même. Et d’abord ce qui regarde son crime et son châtiment, ensuite l’étendue de sa
puissance (verset 9): "Celui qui doit venir accompagné de la puissance de Satan, etc." Sur la première de ces questions, S. Paul indique d’abord en général et d’une manière implicite
le crime et la punition de l’Antéchrist; il explique ensuite l’un et l’autre (verset 4): "Qui s’opposera à Dieu, S’élèvera, etc."
I° Il dit donc (verset 3): La séparation se fera donc d’abord, "et on verra paraître cet homme de péché, qui est le fils de perdition, etc." L’Antéchrist est appelé " l’homme de péché
et le fils de perdition," dit la Glose, parce que de même qu’abonda dans le Christ la plénitude de la vertu, la multitude de tous les péchés abondera dans l’Antéchrist, et comme le
Christ est au-dessus de tous les saints, dans ses perfections infinies, l’Antéchrist est pire que tous les méchants. Voilà pourquoi S. Paul l’appelle "l’homme de péché," c’est qu’il
sera entièrement livré au péché. Toutefois, cette expression ne veut pas dire que l’Antéchrist ne pourrait pas être pire, car jamais le mal ne corrompt complètement le bien; néanmoins,
sous le rapport des actes, l’Antéchrist ne pourra pas devenir pire, tandis que nul homme mortel ne saurait jamais dépasser en bonté Jésus-Christ. Il est appelé aussi "le Fils de
perdition," c’est-à-dire, descendu au dernier degré de perdition (Job, XXI, 30) : "Le méchant est réservé pour le moment où il doit périr, et Dieu le conduira jusqu’au jour où il doit
répandre sur lui sa fureur." Ou encore "de perdition," c’est-à-dire, fils de Satan, non par nature, mais en raison du dernier degré de malice, que Satan viendra compléter en lui.
L’Apôtre dit aussi : "sera révélé," parce que de même que toutes les bonnes oeuvres et les vertus des saints, qui ont précédé le Christ, ont été la figure de Jésus-Christ, ainsi dans
toutes les persécutions de l’Eglise, les persécuteurs ont été comme la figure de l’Antéchrist qui s’est caché en eux. Toute la malice donc, qui est cachée en eux, sera manifestée dans
ce temps. 2° Quand S. Paul dit (verset 4): "Qui s’opposant à Dieu, etc.," il explique ce qu’il vient de dire. Et d’abord il montre comment l’Antéchrist sera l’homme de péché; ensuite
comment il sera le fils de perdition (V. 8): "Et alors se découvrira l’impie, etc." Il indique donc premièrement le crime dont il se rendra coupable; secondement, il en assigne la
cause (verset 6): "Et vous savez bien ce qui empêche, etc." Dans cette première subdivision, d’abord il caractérise le crime; ensuite il rappelle qu’il n’annonce point une doctrine
nouvelle (verset 5): "Ne vous souvient-il point que je vous ai dit ces choses?"
1° Il fait ressortir la grandeur du crime; puis il donne une marque pour le reconnaître (verset 4) : "Jusqu’à s’asseoir dans le temple de Dieu, etc." A) Le crime de l’Antéchrist est de
deux sortes. C’est d’abord de s’opposer à Dieu (verset 4): "Qui s’oppose" à tout bon Esprit (Job, XV, 20) : "Il a couru contre lui la tête levée, il s’est armé d’un orgueil
inflexible," comme font tous ses partisans (Isaïe, III, 8): "Leurs paroles et leurs oeuvres se sont levées contre le Seigneur, pour éviter les yeux de Sa Majesté." La seconde iniquité
c’est de se préférer au Christ (verset 4): "Et s’élever au-dessus de tout ce qui est appelé Dieu." Or, le nom de Dieu se donne dans un triple sens. D’abord à raison de la nature
(Deutéronome, VI, 4) : "Ecoute, Israël, le Seigneur notre Dieu est le seul et unique Seigneur! " Ensuite à raison de l’opinion (Ps. CCV, 5): "Tous les dieux des nations sont des
démons." Enfin, par participation (Ps. LXXXI, 6): "J’ai dit : Vous êtes des dieux, et vous êtes tous enfants du Très-Haut." Or, l’Antéchrist se préfère à tous, quels qu’ils soient
(Daniel, XX, 36) : "Il s’élèvera (Antiochus 1) et il portera le faste de son orgueil contre tout Dieu, il parlera insolemment contre le Dieu des dieux et il réussira jusqu’à ce que la
colère de Dieu soit accomplie."
B) L’Apôtre indique le signe auquel on reconnaîtra le crime de 1’Antéchrist, quand il dit (verset 4): "Jusqu’à s’asseoir dans le temple de Dieu." Car l’orgueil de l’Antéchrist
dépassera l’orgueil de tous ceux qui l’auront précédé. De même qu’on rapporte de l’empereur Caïus 2, qu’il voulut, de son vivant, se faire adorer, en mettant sa statue dans le temple
de Jérusalem et du roi de Tyr (Ezéchiel XXVI v. 2): "Parce que vous avez dit : Je suis Dieu, etc." Aussi est-il croyable que l’Antéchrist agira de même, prétendra être Dieu et Homme,
et en preuve (verset 4) " s’assoira dans le temple de Dieu, voulant lui-même passer pour Dieu."
Mais dans quel temple viendra-t-il s’asseoir? Le temple de Jérusalem a été détruit par les Romains. Quelques écrivains disent que l’Antéchrist est de la tribu de Dan, qui n’est point
nommée parmi les douze tribus, au chapitre septième de l’Apocalypse, 5-8. Les Juifs le recevraient d’abord, le temple de Jérusalem serait rebâti, et ainsi s’accomplirait ce qui est dit
au prophète Daniel (XX, 27) : "L’abomination de la désolation sera dans le temple; on y verra aussi l’idole;" (Matth., XXXV, 15): "Quand donc vous verrez dans le lieu saint
l’abomination de la désolation qui a été prédite par le prophète Daniel, que celui qui lit entende bien ce qu’il lit." D’autres écrivains prétendent que jamais ni Jérusalem, ni le
temple ne seront rebâtis, et que la désolation durera jusqu’à la consommation de la fin. C’est aussi le sentiment de quelques Juifs. On explique donc "dans le temple de Dieu," par
l’Église, car beaucoup, parmi les enfants de l’Église, recevront l’Antéchrist. Ou bien encore, suivant S. Augustin "jusqu’à ce qu’il vienne s’asseoir dans le temple de Dieu,"
c’est-à-dire, qu’il y ait la puissance et la domination, en sorte qu’il forme lui-même avec les siens, comme le temple de Dieu, ainsi qu’il en est du Christ et de ceux qui croient en
lui.
2. Quand enfin S. Paul dit (verset 5): "Ne vous souvient-il pas que je vous ai dit ces choses, lorsque j’étais encore avec vous," il témoigne qu’il n’écrit rien, qui soit nouveau;
comme s’il disait: "Autrefois, quand j’étais au milieu de vous, je vous ai déjà dit ces choses (I S. Jean, II, 7) : "Je ne vous écris point un commandement nouveau; mais le
commandement ancien que vous avez reçu dès le commencement; (Corinth., X, 11): "Tels nous parlons dans nos lettres étant absents, tels nous sommes clans nos actions quand nous sommes
présents, etc."
2 Thess, 2, 6-10: La mort de l’Antéchrist, et la cause du retard dans sa venue
6. Et vous savez bien ce qui empêche qu’il ne vienne, afin qu’il paraisse en son temps.
7. Car le mystère d’iniquité se forme dès à présent, attendant seulement pour paraître que celui qui l’arrête maintenant ait disparu.
8. Et alors se découvrira l’impie que le Seigneur Jésus détruira par le souffle de sa bouche, et qu’il perdra par l’éclat de sa présence.
9. Cet impie qui doit venir accompagné de la puissance de Satan, avec toutes sortes de miracles, de signes et de prodiges trompeurs,
10. Et avec toutes les illusions qui peuvent porter à l’iniquité ceux qui périssent...
I° L’Apôtre vient de prédire et d’annoncer la venue ainsi que le crime de l’Antéchrist; il explique ici la cause du retard de sa venue. Et d’abord, il leur déclare qu’ils savent quelle
est cette cause; ensuite il la leur fait entrevoir sans la révéler complètement (verset 7) : "Car le mystère d’iniquité, etc."
1. Il dit donc : Je vous ai enseigné qu’il faut que l’homme de péché soit manifesté (verset 6): "Et ce qui le retient maintenant," c’est-à-dire, la cause qui le fait tarder, "vous le
savez bien, "car je vous l’ai dit déjà en sorte que s’il ne vient point maintenant, "c’est pour qu’il soit manifesté en son temps," c’est-à-dire, "au temps qui est marqué"
(Ecclésiastique VIII, 6): "Toutes choses ont leur temps et leurs moments favorables;" et (Ecclésiastique III, 11) : "Tout ce que Dieu a fait est bon en son temps, etc."
2. Quand S. Paul ajoute (verset 7): "Car le mystère d’iniquité se forme dès à présent, etc.," il indique la cause de ce retard. On explique de plusieurs manières le texte littéral.
L’expression "mystère" peut en effet, être placée ici soit au nominatif, soit à l’accusatif. Si elle est au nominatif, voici le sens : je dis "afin qu’il soit manifesté en son temps,"
car dès ce temps même, "ce mystère," c’est-à-dire cette oeuvre d’iniquité que nous ne voyons encore que figurément, s’opère dans les hypocrites, qui paraissent bons, et qui cependant
sont méchants. Ce sont eux qui font l’office de l’Antéchrist (II Timoth., III, 5): "Ils auront une apparence de piété, mais ils en ruineront la vérité et l’Esprit," Voici le second
sens : car Satan, sous la puissance duquel viendra l’Antéchrist, commence déjà à opérer en secret" son mystère d’iniquité," par les persécuteurs et les séducteurs; les persécutions que
subit l’Eglise dans le temps présent, sont la figure de la persécution de l’Antéchrist contre les justes et sont comme une ébauche de la sienne (verset 7) : "Seulement pie celui qui
tient, etc." Il y a encore plusieurs manières d’expliquer ce passage. D’abord la Glose et S. Augustin (La cité de Dieu, 20, 19), disent que dans la pensée de quelques uns, Néron, le
premier persécuteur des chrétiens, était l’Antéchrist, qu’il n’a point été tué, mais caché, et qu’un jour il doit revenir. L’Apôtre condamnerait cette opinion en disant: "seulement que
celui qui tient maintenant," l’Empire romain, le tienne jusqu’à ce qu’il soit enlevé de ce milieu, c’est-à-dire jusqu’à ce qu’il meure. Mais cette explication manque de justesse, car
grand nombre d’années se sont écoulées déjà depuis que Néron est mort, ce qui arriva l’année même où mourut S. Paul. Il est donc préférable de rapporter à Néron, comme personnification
publique de l’Empire romain, ces expressions : "jusqu’à ce qu’il soit enlevé de ce milieu," c’est-à-dire jusqu’à ce que l’Empire romain ait disparu du monde (Isaïe, XXIII, 9): "C’est
le Seigneur des armées qui a résolu de le traiter de la sorte, pour renverser toute la gloire des superbes, et pour taire tomber dans l’ignominie tous ceux qui paraissaient dans le
monde avec tant d’éclat." Ou encore : "seulement, que celui qui tient maintenant," c’est-à-dire qui a suspendu jusqu’à ce moment la venue de l’Antéchrist, "le retienne" et ne le laisse
pas venir : comme s’il fût nécessaire que quelques-uns vinssent encore à la foi, et que quelques-uns s’en séparassent. S. Paul semblerait dire que ces éloignements et ces
rapprochements sont sous la puissance de celui qui le retient pour le moment où il doit venir, jusqu’à ce que ce méchant disparaisse. Ou bien : que celui qui a maintenant la foi, la
conserve, c’est-à-dire se montre ferme à la garder (Apoc., III, 11): "Conservez ce que vous avez, de peur qu’un autre ne prenne votre couronne." "Jusqu’à ce qu’il soit enlevé de ce
milieu," c’est-à-dire que l’assemblée des méchants, mêlée encore aux bons, soit séparée et mise à part, ce qui se fera à la persécution de l’Antéchrist Ou enfin : "Seulement, etc.",
c’est-à-dire, en sorte que " le mystère de l’iniquité, c’est-à-dire, l’iniquité cachée, "garde ce qu’elle voile," "jusqu’à ce qu’elle soit enlevée de ce milieu," c’est-à-dire jusqu’à
ce que cette iniquité soit publiquement manifestée, et au milieu qu’elle occupait acquière une sorte de publicité. Car beaucoup commettront le mal encore en secret, mais leur iniquité
sera un jour manifestée, parce que Dieu supporte les pécheurs tant que leur crime est caché, jusqu’à ce que ce crime devienne public. Alors il ne les supportera plus, comme on le voit
par l’exemple des Sodomites (Gen., XIX). S. Augustin avoue qu’il ne sait point ce que l’Apôtre annonce aux Thessaloniciens que déjà ils savaient (verset 6) : "Et vous savez bien ce qui
empêche qu’il ne vienne." Il semble donc qu’il n’y avait pas grande nécessité à le savoir.
II° Quand S. Paul dit (verset 8): "Et alors se découvrira l’impie, etc.," il fait connaître la venue de l’impie et son châtiment. D’abord sa manifestation, ensuite sa punition; sur la
première partie, il dit : "Cet impie" par excellence "se découvrira alors," parce que son crime deviendra manifeste (verset 8), "le Seigneur Jésus le détruira par le souille de sa
bouche" (Isaïe, XX, 7) "Le zèle du Seigneur des armées fera ce que je dis," c’est le zèle pour sa justice, zèle qui est l’amour. Car le souffle du Christ, c’est son amour, et le zèle
c’est l’Esprit-Saint qui l’anime pour son Église. On encore : "par le souffle de sa bouche," c’est-à-dire par ses ordres, parce que l’archange Michel doit mettre à mort l’Antéchrist
sur le mont des Oliviers, d’où le Christ est monté aux cieux. C’est ainsi que l’empereur Julien fut frappé de mort. Voilà son châtiment dans le temps, car dans sa vie future il sera
puni éternellement (verset 8): "Il le perdra par l’éclat de son avènement," c’est-à-dire dans son avènement dont les clartés se projetteront partout (Corinth., IV, 5): " Il exposera à
la lumière ce qui est caché dans les ténèbres." (Ps. XXVII, 5): "Vous les détruirez, ô mon Dieu, et vous ne les rétablirez plus." L’Apôtre dit, "par l’éclat," parce que l’Antéchrist
semblera obscurcir l’Église, et que les ténèbres disparaissent devant l’éclat de la lumière, car tout ce que l’Antéchrist aura voulu faire connaître, apparaîtra mensonger.
III° Quand S. Paul ajoute (verset 9): "Lui qui doit venir accompagné de la puissance de Satan, il prédit la puissance de l’Antéchrist. Il explique d’abord quelle sera sa puissance pour
séduire; ensuite il montre que la cause de cette puissance, se trouve dans la justice de Dieu (verset 10) : "Parce qu’ils n’ont pas reçu, etc." La première partie se subdivise en
trois. L’Apôtre décrit premièrement l’agent de la puissance de l’Antéchrist; secondement le mode de la séduction; troisièmement il dit quels sont ceux qui se laisseront séduire.
1° L’agent c’est Satan. Voilà pourquoi le Christ le détruira (I Jean, III v. 8): "Le Fils de Dieu est venu au monde, pour détruire les oeuvres du diable." C’est ce qui fait dire à S.
Paul (verset 9), que "l’Antéchrist doit venir, accompagné de la puissance de Satan," c’est-à-dire, par son impulsion (Apoc., XX, 7): "Satan sera délié; il sortira de prison; il séduira
les nations, etc. Or, l’Antéchrist fait ses oeuvres par l’impulsion de Satan, à la manière du serpent, quand non seulement il pousse la volonté, mais empêche même l’usage de la raison,
ce qui toutefois ne lui est point imputé à crime parce qu’il n’a pas l’usage du libre arbitre. Mais il n’en est pas ainsi de l’Antéchrist, qui aura l’usage du libre arbitre, sur lequel
Satan agit par suggestion comme il est dit de Judas (Jean, X v. 27) : " Satan entrera en lui," à savoir, en le poussant au mal.
2° L’Antéchrist trompera premièrement par la puissance séculière; secondement, en opérant des miracles. 1- Quant à la première manière, l’Apôtre dit (verset 9): "Par la puissance
suprême," à savoir dans le siècle (Daniel, X v. 43) : "Il se rendra maître des trésors d’or et d’argent et de tout ce qu’il y a de plus précieux dans l’Egypte." Ou encore, "par sa
vertu" simulée. 2- De la seconde, S. Paul dit (verset 9): "Par toutes sortes de signes et de prodiges. Les signes sont des choses merveilleuses, bien que peu considérables; les
prodiges sont des choses extraordinaires, qui font reconnaître dans quelqu’un un pouvoir au dessus des forces naturelles et semblent le faire montrer au doigt au loin (Apocalypse, x v.
13) : "Elle fit (la bête) de grands prodiges, jusqu’à faire descendre le feu du ciel sur la terre, devant les hommes;" (Matth., XXIV, V. 24) : "Ils feront de grands prodiges et des
choses étonnantes, jusqu’à séduire, s’il était possible, les élus eux-mêmes." L’Apôtre, dit des prodiges "trompeurs." On donne la qualification de trompeur à un miracle, ou parce qu’il
s’écarte de la raison véritable du fait, ou du caractère essentiel du miracle, ou de sa fin légitime. Le premier défaut se rencontre dans les prestiges, quand les démons illusionnent
par des apparences et font voir les objets autres qu’ils ne sont en réalité. Ainsi, par exemple, Simon le Magicien (1) couper le cou à un bélier, qui ensuite parut vivant, et décapiter
un homme que l’on crut d’abord véritablement décapité, mais qui parut ensuite vivant, au point qu’on le crut ressuscité. Les hommes peuvent opérer de semblables effets, en changeant
les apparences et en jetant dans l’erreur. En second lieu, on appelle improprement miracles, les choses qui provoquent l’étonnement alors qu’on voit l’effet et qu’on ignore la cause.
Un fait qui a une cause cachée, dans le sens rigoureux, est à proprement parler un miracle; ce fait tourne à la gloire de Dieu, parce qu’il dépasse l’ordre tout entier de la nature
créée. Quelquefois aussi il se passe des choses merveilleuses, qui ne vont point au delà de l’ordre naturel, mais qui ont une cause occulte. Ce sont ces sortes de choses que font de
préférence les démons, car ils connaissent les forces de la nature, ont une puissance déterminée pour certains effets spéciaux. L’Antéchrist fera des choses qui n’ont point le
caractère propre du miracle, parce que les démons ne peuvent rien dans le règne supranaturel. Enfin, on donne le nom de miracle dans un troisième sens, aux faits destinés à rendre
témoignage à la vérité de la foi, afin de ramener les fidèles à Dieu. (Marc, XVI, 20) : "Le Seigneur agissant avec eux, et confirmant sa parole par les miracles qui l’accompagnaient."
Or, si l’on a reçu le don des miracles, et que l’on ne s’en serve point dans ce but, les miracles certainement sont véritables quant à la nature du fait, et quant au caractère du
miracle, mais ils sont faux quant à la fin légitime et quant à l’intention de Dieu. Ceci toutefois ne se trouvera point dans l’Antéchrist, parce que personne ne saurait faire des
miracles véritables contre la foi, Dieu ne pouvant être témoin du mensonge. Donc quiconque prêche une doctrine fausse ne peut faire des miracles, bien que celui qui vit mal puisse en
faire.
3. Quand enfin l’Apôtre dit (verset 10) : "Et avec toutes les illusions qui peuvent porter à l’iniquité ceux qui périssent," il désigne ceux qui peuvent être séduits, c’est-à-dire,
ceux qui selon la prescience divine vont à la perdition. (Jean XVII, 12) "Et nul d’entre eux ne s’est perdu, si ce n’est le fils de perdition." Ils périssent, parce que (Jean X, 27):
"Mes brebis entendent ma voix." |
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