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Mt  18  18-20

S. Jérôme. Notre-Seigneur venait de dire : « S’il n’écoute pas l’Église, qu’il soit pour vous comme un païen et comme un publicain. » Celui qui se trouvait ainsi rejeté, aurait pu répondre ou du moins penser : Vous me méprisez, et moi aussi je vous méprise ; vous me condamnez, je vous condamne également ; il donne donc ici aux Apôtres un pouvoir vraiment extraordinaire, de manière à faire comprendre à ceux qui sont frappés par leur condamnation, que la sentence de la terre est confirmée par le jugement de Dieu ; c’est pour cela qu’il ajoute : « Je vous le dis en vérité, tout ce que vous lierez, » etc. — Origène. Il ne dit pas : « dans les cieux, » comme dans le pouvoir qu’il a donné à pierre, mais « dans le ciel » au singulier ; car les Apôtres n’étaient pas aussi parfaits que Pierre. — S. Hil. L’intention du Sauveur dans ces paroles est d’inspirer à tous les hommes la crainte la plus vive, pour les contenir ici-bas dans le devoir ; c’est pour cela qu’il déclare irrévocable le jugement prononcé par le tribunal sévère des Apôtres, jusque là que tous ceux qu’ils auront liés sur la terre, c’est-à-dire qu’ils auront laissés dans les liens du péché, et ceux qu’ils auront déliés en leur donnant dans la rémission des péchés le gage du salut, seront liés ou déliés dans les cieux. — S. Chrys. (hom. 60.) Et remarquez qu’il ne dit pas à celui qui est à la tête de l’Église : Liez un tel, mais : « Si vous liez, les liens ne pourront être rompus. » Il laisse ainsi à son propre jugement la conduite qu’il doit tenir. Voyez encore comme il a chargé d’une double chaîne le pécheur incorrigible, d’abord par une peine actuelle, c’est-à-dire sa séparation de l’Église, dont il a parlé plus haut en ces termes : « Qu’il soit pour vous comme un païen, » et par le supplice de l’autre vie, qui est d’être lié dans le ciel ; et c’est par cette multitude de jugements qu’il veut éteindre l’indignation du frère coupable. — S. Augustin. (serm. 16 sur les par. du Seig.) Ou bien dans un autre sens : Vous avez commencé à regarder votre frère comme un publicain, vous le liez sur la terre, mais faites attention de le lier pour des motifs justes ; car l’éternelle justice brise les liens qui sont imposés injustement. Lorsqu’au contraire vous aurez corrigé votre frère, et rétabli l’accord entre vous et lui, vous l’avez délié, et lorsque vous l’aurez délié sur la terre, il sera également délié dans le ciel. Or, en cela, vous rendez un service signalé, non pas à vous, mais à votre frère, parce qu’il s’est fait à lui-même un tort immense plutôt qu’à vous. — La glose. Ce n’est pas seulement l’efficacité de l’excommunication, mais encore la puissance de toute prière des fidèles priant de concert dans l’unité de l’Église, que Notre-Seigneur confirme en ajoutant : « Je vous dis encore que si deux d’entre vous s’unissent ensemble sur la terre (soit pour recevoir un pénitent, soit pour rejeter un orgueilleux ou pour toute autre chose qu’ils demanderont et qui ne sera pas contraire à l’unité de l’Église), ce qu’ils demandent leur sera accordé par mon Père qui est dans les cieux. » Par ces paroles : « Qui est dans les cieux, » il nous montre que son Père est au-dessus de toutes choses, et qu’il peut ainsi exaucer les prières qui lui sont adressées. Ou bien : « Il est dans les cieux, » c’est-à-dire dans les saints, ce qui prouve qu’il leur accordera certainement l’objet de leurs prières, si toutefois cet objet est digne de Dieu, parce qu’ils ont en eux-mêmes celui à qui s’adressent leurs demandes ; et voilà pourquoi Dieu exauce et ratifie les désirs de ceux qui sont unis entre eux, parce qu’il habite au milieu d’eux, suivant ces paroles : « Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis moi-même au milieu d’eux. » — S. Chrys. (hom. 60.) Comme il avait dit : « Ce qu’ils demandent leur sera accordé par mon Père, » il veut leur apprendre que c’est également de lui-même comme de son Père que découlent ces faveurs, et il ajoute ; « Là où sont réunis deux ou trois, je suis moi-même au milieu d’eux. » — Origène. Il ne dit pas : « Je serai au milieu d’eux, » mais au présent : « Je suis ; » car aussitôt que quelques personnes s’unissent entre elles, Jésus-Christ se trouve au milieu d’elles. — S. Hil. Il est lui-même la paix et la charité, et il établira son trône et son habitation dans les volontés droites et pacifiques. — S. Jérôme. Ou bien encore, tout ce qui précède était une invitation à la charité et à la concorde ; le Sauveur sanctionne cet appel par la récompense qu’il promet, et pour nous faire embrasser plus promptement la paix fraternelle, il nous déclare qu’il sera au milieu de deux ou trois personnes dès lors qu’elles seront unies entre elles.

S. Chrys. (hom. 60.) Il ne dit pas simplement : « Là où seront réunis, » mais il ajoute : « En mon nom, » comme s’il disait : Si je suis le motif principal de l’affection qu’un chrétien a pour son frère, je serai avec lui, pourvu qu’il ait d’ailleurs toutes les autres vertus. Mais comment donc se fait-il que des personnes parfaitement unies entre elles n’obtiennent pas ce qu’elles demandent ? Premièrement, parce qu’elles demandent des choses qu’il ne leur est pas avantageux d’obtenir ; en second lieu, parce qu’elles sont personnellement indignes d’être exaucées, et qu’elles n’apportent pas à la prière les dispositions convenables ; aussi Notre-Seigneur prend-il soin de dire : « Si deux d’entre vous, » c’est-à-dire de ceux dont la vie est conforme à l’Évangile ; troisièmement, parce qu’elles prient contre ceux qui les ont offensés, ou quatrièmement, enfin parce qu’elles implorent la miséricorde divine pour des pécheurs sans repentir. — Origène. Voici encore une autre cause qui détruit l’effet de nos prières ; nous ne sommes parfaitement unis entre nous, ici-bas, ni par la foi, ni par la conformité de la vie. Car de même que la musique ne peut charmer les oreilles, s’il y a défaut d’accord dans les voix, de même si l’harmonie ne règne dans l’Église, Dieu ne peut ni s’y complaire ni écouter les voix de ses enfants. — S. Jérôme. Nous pouvons encore entendre ces paroles dans un sens spirituel) et dire que là où l’esprit, l’âme et le corps sont unis entre eux, et n’offrent pas le spectacle de volontés opposées, ils obtiendront tout ce qu’ils demanderont au Père céleste ; car nul ne doute que là ou le corps a la même volonté que l’esprit, la prière n’ait pour objet des choses agréables à Dieu. — Origène. Ou bien encore, celui en qui les deux Testaments s’accordent et s’unissent entre eux, peut être certain que sa prière, quel qu’en soit l’objet, devient agréable à Dieu.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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