Accueil > Bibliothèque > La Chaîne d’or > Évangile selon saint Marc > chapitre 15, versets 39-41
La glose. Après avoir raconté la passion et la mort du Sauveur, l’Evangéliste passe au récit des événements qui suivirent sa mort : " Et le voile du temple se déchira en deux, " etc. — S. Jérôme. Le voile du temple qui se déchire, c’est le ciel qui s’ouvre. — Théophile. Dieu permit que le voile se déchirât, afin de signifier que la grâce de l’Esprit saint s’éloignait et se séparait du temple pour découvrir aux yeux de tous les secrets du saint des saints, et aussi que le temple serait dans la désolation, lorsque les Juifs déploreront leur malheur et déchireront leurs vêtements. Ce voile est aussi le symbole de ce temple vivant du corps de Jésus-Christ qui, dans sa passion, vit ses vêtements, c’est-à-dire son corps déchiré. Il a encore une autre signification ; notre chair est le voile de notre temple, c’est-à-dire, de notre âme. Or, la puissance de la chair dans la passion de Jésus-Christ, a été déchiré et détruit du haut en bas, c’est-à-dire, depuis Adam jusqu’au dernier rejeton de sa postérité. En effet, Adam est sauvé par la passion de Jésus-Christ, sa chair ne demeure plus sous la malédiction, elle n’est plus sujette à la corruption, mais elle reçoit en même temps le don de l’incorruptibilité.
" Or le centurion voyant, " etc. Le centurion est l’officier qui commandait à cent hommes. A la vue de Jésus expirant avec tant de puissance et d’autorité, il est dans l’admiration et confesse sa divinité. — Bède. L’Evangile nous fait connaître clairement la cause de l’étonnement du Centurion, c’est qu’ayant vu le Seigneur mourir de la sorte, il s’écria : " Cet homme était vraiment le Fils de Dieu. " Car le Créateur des âmes a seul, à l’exclusion de tout autre, le pouvoir de remettre son âme. — S. Augustin. (De la Trin., 4, 13.) Ce qui étonna surtout le Centurion, c’est qu’après ce grand cri qui était comme l’expression figurée de notre péché, il expira aussitôt. L’esprit du Médiateur nous apprenait ainsi que la mort de son corps n’était la suite d’aucun péché, qu’il ne s’en séparait point malgré lui, mais quand il le voulut, parce qu’il était uni au Verbe de Dieu en unité de personne. — S. Jérôme. Les derniers sont maintenant devenus les premiers, les Gentils confessent Jésus-Christ, les Juifs aveugles le renient, et leur erreur devient pire que la première. — Théophile. L’ordre naturel se trouve ainsi renversé, les Juifs mettent à mort celui que les Gentils reconnaissent comme Dieu, ses disciples s’enfuient, et les pieuses femmes persévèrent.
" Il y avait aussi là des femmes, " etc. Celle qui est appelée Salomé, est la mère des enfants de Zébédée. — Origène. (Traité 35 sur S. Matth.) Le récit comparé de saint Matthieu et de saint Marc, m’amène à penser qu’il est ici question de trois femmes principales ; deux d’entre elles sont désignées par les deux Evangélistes, Marie-Madeleine et Marie, mère de Jacques ; la troisième est appelée par saint Matthieu, la mère des enfants de Zébédée, et par saint Marc, Salomé. — Bède. Saint Marc appelle Jacques le Mineur, Jacques, fils d’Alphée, on l’appelait aussi frère du Seigneur, parce qu’il était fils de Marie, tante du Sauveur, dont saint Jean fait mention : " Debout, près de la croix de Jésus, étaient sa mère et la sœur de sa mère, Marie, femme de Cléophas, et Marie-Madeleine. " (Jn 19) Or, l’une de ces femmes est appelée Marie de Cléophas, ou comme fille de Cléophas, ou du nom de sa famille. Jacques le Mineur est ainsi appelé pour le distinguer de Jacques le Majeur, fils de Zébédée, qui a été un des premiers que le Seigneur a choisi pour ses Apôtres. C’était chez les Juifs une coutume consacrée par les mœurs antiques, et que personne ne songeait à blâmer, que les femmes prissent soin de fournir de leur bien, la nourriture à ceux qui les instruisaient, c’est ce que saint Marc rappelle ici : " Elles le suivaient lorsqu’il était en Galilée, et l’assistaient de leur bien. " Elles assistaient le Seigneur de leur avoir, et lui permettaient ainsi de moissonner leurs biens matériels, alors qu’elles moissonnaient elles-mêmes ses grâces spirituelles. Notre-Seigneur voulait ainsi donner l’exemple à ceux qui devaient enseigner l’Evangile, et leur apprendre à se contenter de la nourriture et du vêtement qu’ils recevraient de leurs disciples. Mais voyons quelles étaient celles qui les accompagnaient : " Et plusieurs autres qui étaient venues avec lui à Jérusalem. " — S. Jérôme. De même que la femme est associée au salut du monde dans la personne de la Vierge Marie ; ainsi Dieu la rattache à la science du mystère de la croix et de la résurrection dans Marie-Madeleine, qui est veuve, et dans les autres mères qui l’accompagnent.
Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.