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Mc  10  35-40

S. Chrys. Les disciples, qui avaient souvent entendu Jésus leur parler de son royaume, pensaient que l’établissement de ce royaume aurait lieu avant sa mort. Or, comme il vient de leur annoncer celle mort comme prochaine, il s’empressent de solliciter de lui les honneurs de son royaume. " Alors Jacques et Jean s’approchèrent de lui, " etc. Ils rougissent, ce semble, de céder à une inspiration toute humaine, et ils s’approchent de Jésus-Christ pour le tirer à l’écart, loin des autres disciples. Le Sauveur, connaissait bien leurs intentions, mais voulant les amener à formuler leur demande, leur fait cette question : " Que voulez-vous que je fasse pour vous ? " — Théophile. Ces deux disciples s’imaginaient qu’il allait à Jérusalem pour y établir son royaume, avant de souffrir la mort qu’il venait de prédire, et dans cette pensée ils désiraient d’être assis l’un à droite, l’autre à gauche de son trône : " Et ils lui dirent : Accordez-nous que nous soyons assis dans votre gloire, l’un à votre droite, l’autre à votre gauche." — S. Augustin. (De l’acc. des Evang., 2, 64.) D’après saint Matthieu, ce ne sont point les deux disciples eux-mêmes qui formulent cette demande, mais leur mère qui exprime au Sauveur le désir de ses enfants ; voilà pourquoi saint Marc, dans son récit abrégé, leur attribue plutôt cette démarche. — S. Chrys. (hom. 65.) On peut dire avec autant de vraisemblance que ce désir fut exprimé à la fois par la mère et les enfants ; ces deux disciples se voyant honorés plus particulièrement par Jésus, espéraient obtenir l’effet de leur demande, et pour en assurer le succès, ils se font accompagner de leur mère.

S. Augustin. (De l’accord des Evang., 2, 64.) Aussi, dans le récit de saint Matthieu comme dans celui de saint Marc, c’est à eux plutôt qu’à leur mère que s’adresse la réponse du Sauveur : " Jésus leur répondit : Vous ne savez ce que vous demandez. " — Théophyl. C’est-à-dire : Il n’en est pas comme vous le pensez ; ce n’est point un royaume temporel que je dois établir à Jérusalem ; tout ce qui a rapport à ce royaume surpasse toute intelligence, et l’honneur d’être assis à ma droite est si élevé, qu’il est au-dessus même des prérogatives des anges. — Bède. Ou bien ils ne savent ce qu’ils demandent, en sollicitant du Sauveur un honneur qu’ils n’ont pas encore mérité. — S. Chrys. (hom. 65.) Un bien encore : " Vous ne savez ce que vous demandez, " c’est-à-dire : Vous parlez d’honneurs et de dignités, lorsque je ne vous entretiens que de combats et de fatigues. Ce n’est point ici le temps des récompenses, mais celui du sacrifice, des combats et des dangers ; c’est pour cela qu’il ajoute : " Pouvez-vous boire le calice ? " etc. Il emploie cette forme interrogative pour exciter dans leurs cœurs un plus vif désir de participer à ses souffrances.

Théophile. C’est sa croix qu’il appelle un calice et un baptême ; un calice, parce qu’elle est pour lui un breuvage qu’il accepte avec joie ; un baptême, car c’est par elle que nous sommes purifiés de nos fautes. Les disciples lui répondirent sans comprendre le sens de ses paroles : " Ils lui répondirent : Nous le pouvons. " Ils s’imaginaient qu’il n’était question que d’une coupe ordinaire et de purifications en usage chez les Juifs, et qui précédaient les repas. — S. Chrys. (hom. 65.) Ils se hâtent de répondre, persuadés que leur demande va être exaucée. " Mais Jésus leur dit : Vous boirez en effet le calice que je boirai, " etc., c’est-à-dire vous serez jugés dignes de la gloire du martyre, et d’être associés à mes souffrances.

Bède. Comment Jacques et Jean ont-ils bu la coupe du martyre, comment ont-ils été baptisés du baptême du Seigneur, puisque d’après le livre des Actes, l’apôtre saint Jacques fut seul décapité par Hérode, tandis que saint Jean mourut de sa mort naturelle ? Si nous lisons l’histoire ecclésiastique, nous y verrons que Jean souffrit le martyre lorsqu’il fut plongé dans une chaudière d’huile bouillante et puis exilé ensuite dans l’île de Pathmos. Jean a donc eu l’esprit du martyre, et il en a bu la coupe (comme les trois enfants dans la fournaise), bien que son sang n’ait pas été répandu par les bourreaux.

" Mais d’être assis à ma droite, " etc. — S. Chrys. (hom. 65.) On peut faire ici deux questions : premièrement, est-il dans le ciel une place préparée pour quelqu’un à la droite du Sauveur ? secondement, le souverain Seigneur de toutes choses a-t-il le pouvoir d’accorder cette place à ceux à qui elle a été préparée ? Je réponds à la première question, que personne dans le ciel n’est assis, soit à la droite, soit à la gauche de Jésus-Christ, son trône est inaccessible à toute créature ; comment donc expliquer ces paroles : " D’être assis à ma droite ou à ma gauche, ce n’est pas à moi de vous l’accorder, " comme si quelques-uns devaient occuper ces places ? Notre-Seigneur répond ici à la pensée de ceux qui lui font cette question, et condescend au sentiment qui l’a dictée. Les disciples ne connaissaient pas ce trône élevé, ce siège à la droite du Père ; ils ne demandaient qu’une chose : c’était l’autorité même et la prééminence sur les autres Apôtres. Ils avaient entendu de la bouche même du Sauveur que les Apôtres seraient assis sur douze sièges ; ils ne savent ce que signifie cette promesse, ce qu’ils demandent, c’est d’être élevés au-dessus des autres. Quant à la seconde question, je réponds qu’une si grande faveur ne dépasse point le pouvoir du Fils de Dieu. Ces paroles de saint Matthieu : " Ceux à qui mon Père l’a préparé, " ont le même sens que ces autres : " A qui je l’ai préparé. " Aussi saint Marc s’est contenté de dire ici : " ceux à qui ces places ont été préparées. " Voici donc le sens des paroles du Sauveur : Vous donnerez votre vie pour moi, mais ce n’est pas assez pour obtenir les premières places. Si un autre, martyr comme vous se présente avec une moisson de vertus supérieure à la vôtre ; il obtiendra des récompenses beaucoup plus grandes. Les premières places sont réservées à ceux que leurs œuvres placent au premier rang. Par cette réponse, le Seigneur ne veut pas les contrister, mais il leur apprend à cesser toutes ces vaines et inutiles questions sur la préséance. — Bède. Ou bien encore, il ne m’appartient point de vous accorder cette première place, c’est-à-dire de l’accorder aux superbes, car ils l’étaient encore. C’est pour d’autres qu’elle a été préparée, soyez tout autres que vous n’êtes, c’est-à-dire soyez humbles et cet honneur vous est assuré.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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