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Lc  7  24-28

S. Cyrille. (Tres., 2, 24.) Le Seigneur qui pénétrait le secret des coeurs, comprit qu’il s’en trouverait pour dire : Si Jean-Baptiste a été jusqu’à ce jour sans connaître Jésus, comment a-t-il pu le montrer au peuple en disant : « Voici l’Agneau de Dieu qui efface les péchés du monde ? » C’est donc pour guérir cette impression défavorable, qu’il éloigne de leur esprit ce qui pouvait être pour eux un sujet de scandale : « Lorsque les envoyés de Jean furent partis, il commença à dire au peuple, en parlant de Jean : Qu’êtes-vous allés voir dans le désert ? un roseau agité par le vent ? » comme s’il disait : Vous avez été pleins d’admiration pour Jean-Baptiste, bien des fois vous avez été le trouver malgré les difficultés d’un voyage long et pénible dans le désert. Or, pourquoi cette admiration, cet empressement, si vous le croyez léger comme le roseau qui plie à tous les vents ? car voilà ce qu’il serait, si par légèreté d’esprit, il déclarait ignorer ce qu’il a connu. — Tite de Bostra. Mais vous n’auriez point quitté les villes pour vous enfoncer dans le désert qui ne peut vous offrir aucun agrément, si vous n’aviez de cet homme une plus haute idée. — Siméon. (Ch. des Pèr. gr.) Notre-Seigneur attendit le départ des disciples pour parler ainsi de Jean-Baptiste, il n’avait pas voulu faire en leur présence l’éloge du saint Précurseur, voulant éviter tout ce qui aurait l’apparence de la flatterie. — S. Ambr. Ce n’est point sans raison que le Sauveur fait ici l’éloge de Jean-Baptiste qui, sacrifiant généreusement l’amour de la vie aux intérêts de la vérité et de la justice, demeura inébranlable en face même de la mort. Ce monde, en effet, peut être comparé à un désert stérile et inculte, où le Seigneur nous défend de marcher sur les traces, et en suivant les exemples de ces hommes remplis des pensées de la chair, vides de toute vertu intérieure, et qui s’enorgueillissent de l’éclat fragile de la gloire mondaine. Constamment agités par les tempêtes de ce monde, ils sont toujours en proie à la mobilité de leurs désirs, et méritent par là d’être comparés à des roseaux. — Siméon. Le vêtement de Jean-Baptiste est un témoignage de la sainteté de sa vie, aussi bien que la prison, où il est détenu ; car jamais il n’aurait été jeté dans les fers, s’il eût flatté les passions des princes : « Qu’êtes-vous allés voir ? un homme vêtu avec mollesse ? Mais ceux qui portent des vêtements précieux et vivent dans les délices, habitent les maisons des rois. » Ces hommes vêtus mollement, représentent ceux qui passent leur vie dans les délices. — S. Chrys. (hom. 29 sur l’Ep. aux Héb.) La mollesse des vêtements affaiblit la vigueur de l’âme, et le corps fût-il ami de l’austérité et de la mortification, est bientôt énervé par cette molle délicatesse. Or, quand le corps est amolli, l’âme ne tarde pas à l’être ; car les inclinations de l’âme sont presque toujours conformes aux dispositions du corps. — S. Cyrille. (Très., 2, 4.) Comment donc Jean-Baptiste, avec ce soin religieux de soumettre les passions de la chair, aurait-il pu tomber dans une si grande ignorance, sinon par la légèreté d’un esprit qui a horreur des austérités, et se laisse séduire par les délices du monde ? Si donc Jean vous paraît digne d’imitation, parce qu’il fuit cette vie délicate et mondaine, accordez-lui la fermeté qui convient à cette vie mortifiée ; si au contraire, vous ne devez rien à cette vie pénitente et austère, pourquoi donc refuser votre admiration aux délices du monde, pour l’accorder à cet habitant du désert, à l’antre misérable qui lui sert de demeure, et à la peau de chameau dont il est couvert.

S. Chrys. (hom. 38 sur S. Matth.) Par ces deux comparaisons, le Sauveur veut faire comprendre que Jean-Baptiste n’était point d’un caractère mobile et inconstant, et qu’aucune volonté n’était capable de le faire fléchir. — S. Ambr. Bien qu’il soit vrai de dire que la recherche de la mollesse dans les vêtements, énerve la vigueur de l’âme dans le plus grand nombre ; Notre-Seigneur paraît vouloir indiquer ici un autre genre de vêtement, c’est-à-dire le corps dont notre âme est comme revêtue. Ces vêtements délicats sont les oeuvres de la volupté et du plaisir. Or, ceux qui laissent énerver leurs membres au contact de ces fausses délices sont bannis du royaume des cieux ; les princes de ce monde et les puissances des ténèbres s’en emparent ; car ils sont les rois qui exercent leur empire absolu sur les imitateurs de leurs oeuvres.

S. Cyrille. (Trés., 2, 4.) Mais vous jugez sans doute qu’il est superflu d’excuser Jean-Baptiste de légèreté et de mollesse, puisque vous avouez qu’il est digne d’imitation ; alors : « Qu’êtes-vous donc allés voir ? Un prophète. Oui, je vous le dis, et plus qu’un prophète, car les prophètes prédisaient seulement qu’il allait venir ; mais pour Jean-Baptiste, non seulement il a prédit sa venue, mais il a démontré sa présence au milieu des hommes, lorsqu’il a dit : Voici l’agneau de Dieu. » — S. Ambr. Oui certes, il est plus grand ou plus qu’un prophète, lui qui atteint la fin que se proposaient les prophètes, car beaucoup ont désiré contempler celui qu’il a mérité de voir et de baptiser (Mt 13 ; Lc 10). — S. Cyrille. (Trés., 2, 4.) Après avoir fait l’éloge de la vie de Jean-Baptiste et par le lieu qu’il habitait, et par ses vêtements, et par le concours qui se faisait autour de lui, Notre-Seigneur cite en sa faveur le témoignage du prophète Malachie : « C’est de lui qu’il est écrit : Voilà que j’envoie mon ange. » — Tite de Bostra. Il lui donne le nom d’ange, non pas qu’il le fût en réalité, puisqu’il était homme par nature, mais parce qu’il remplissait les fonctions d’un ange en annonçant la venue du Christ. — Siméon. Ces paroles : « Devant votre face, » nous montrent les rapports étroits de Jean-Baptiste avec Jésus-Christ ; il parut, en effet, au moment de la venue de Jésus-Christ, et c’est pour cela que nous devons l’estimer plus qu’un prophète, car ceux qui, dans les armées, se tiennent aux côtés du roi, sont les premiers dignitaires du royaume et ses familiers les plus intimes.

S. Ambr. Jean-Baptiste a préparé la voie au Seigneur, non seulement par le caractère miraculeux de sa naissance, et par la prédication de la foi, mais en précédant Jésus dans sa glorieuse passion : « Qui préparera la voie devant vous. » — S. Ambr. Mais si Jésus-Christ est prophète, comment Jean-Baptiste est-il plus grand que tous les prophètes ? Il est le plus grand de ceux qui sont nés de la femme et non d’une vierge, c’est-à-dire, qu’il a été le plus grand de tous ceux qui lui étaient semblables par leur naissance : « Je vous le dis, parmi ceux qui sont nés des femmes, il n’est point de prophète plus grand que Jean-Baptiste. » — S. Chrys. (hom. 38 sur S. Matth.) Il suffisait sans doute de ce témoignage rendu par le Sauveur, que Jean était le plus grand des enfants des hommes ; cependant, si vous voulez voir cette vérité confirmée par les faits, considérez quelle était la nourriture du saint Précurseur, sa vie, sa grandeur d’âme ; en effet, il vivait sur la terre comme un homme descendu du ciel, ne prenant aucun soin de son corps, l’esprit toujours occupé des pensées du ciel, uni à Dieu seul, n’ayant aucun souci des choses de la terre ; sa Parole était à la fois pleine de sévérité et de douceur ; il parlait au peuple juif avec vigueur et fermeté, au roi Hérode avec courage, et il instruisait ses disciples avec douceur ; rien de vain et de léger dans sa conduite toujours pleine de dignité. — S. Isidore. Jean est encore le plus grand de ceux qui sont nés de la femme, parce qu’il prophétisa dans le sein même de sa mère, et qu’au milieu des ténèbres qui l’environnaient, il reconnut la lumière qui allait éclairer l’univers.

S. Ambr. Il est si vrai qu’il ne pouvait exister aucune comparaison entre Jean-Baptiste et le Fils de Dieu, que le Sauveur le place même au-dessous des anges : « Celui qui est le plus petit dans le royaume des cieux est plus grand que lui. » — Bède. Ce passage peut être interprété de deux manières, ou bien par ce royaume de Dieu, le Sauveur veut entendre ce royaume dont nous ne sommes pas encore en possession et qu’habitent les anges ; or, le plus petit dans ce royaume est plus grand que tout juste revêtu de ce corps qui appesantit l’âme. (Sg 9, 15.) Ou bien, le royaume de Dieu, dans l’intention du Sauveur, c’est l’Église du temps présent, et alors c’est de lui-même que Notre-Seigneur veut parler, lui qui est inférieur à Jean par la date de sa naissance, mais qui est plus grand par son autorité divine et par sa souveraine puissance. Dans le premier sens, il faut donc ainsi séparer les membres de cette proposition : « Celui qui est le plus petit dans le royaume de Dieu, » ajoutez : « Est plus grand que lui ; » dans le second sens : « Celui qui est plus petit que lui, » ajoutez : « Dans le royaume de Dieu est plus grand que lui. » — S. Chrys. (hom. 38 sur S. Matth.) Notre-Seigneur fait cette réserve, de peur que la grandeur des louanges qu’il vient de donner à Jean-Baptiste, ne fût pour les Juifs une occasion de le mettre au-dessus du Christ. Ne croyez pas cependant qu’il ait voulu établir une comparaison en déclarant que Jean est plus grand que lui. — S. Ambr. En effet, sa nature est toute différente et ne peut être comparée en aucune façon à la nature humaine, car nulle comparaison n’est possible entre Dieu et l’homme.

S. Cyrille. Dans le sens mystique, en même temps que le Sauveur proclame la supériorité de Jean-Baptiste sur tous les enfants des femmes, il lui oppose quelque chose de plus grand, celui qui devient Fils de Dieu par la naissance qu’il reçoit de l’Esprit saint, car le royaume du Seigneur, c’est l’Esprit de Dieu. Aussi, bien que sous le rapport des oeuvres et de la sainteté de la vie, nous soyons inférieurs à ceux qui ont pénétré le mystère de la loi, et dont Jean-Baptiste est la figure ; cependant nous nous élevons plus haut par Jésus-Christ qui nous rend participants de la nature divine (2 P 1, 4).

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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