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Lc  4  22-27

S. Chrys. (hom. 49 sur S. Matth.) Notre-Seigneur s’abstient de faire des miracles dans la ville de Nazareth, pour ne point exciter contre lui une plus grande envie dans le coeur de ses habitants. Mais il leur annonce une doctrine non moins admirable que ses miracles, car les paroles du Sauveur étaient accompagnées d’une grâce ineffable et divine qui charmait tous ceux qui l’entendaient : « Et tous lui rendaient témoignage, » etc. — Bède. Ils lui rendaient témoignage, en attestant qu’il était vraiment, comme il le disait, celui que le prophète avait annoncé. — S. Chrys. (hom. 49 sur S. Matth.) Mais les insensés, tout en admirant la puissance de sa parole, n’ont que du mépris pour sa personne, à cause de celui qu’ils regardent comme son père : « Et ils disaient : N’est-ce pas là le fils de Joseph ? » — S. Cyrille. Mais fut-il, comme vous le pensez, le fils de Joseph en serait-il moins digne de votre admiration et de vos hommages ? Ne voyez-vous pas les miracles divins qu’il opère, Satan terrassé, et les nombreux malades qu’il a délivrés de leurs infirmités ? — S. Chrys. (hom. 49.) Longtemps après, et lorsqu’il avait rempli la Judée de l’éclat de ses miracles, il revint à Nazareth ; et ils ne purent le supporter davantage, et ils manifestèrent contre lui l’envie la plus noire et la plus ardente : « Et il leur dit : Sans doute vous m’appliquerez ce proverbe : Médecin, guéris-toi toi-même, » etc. — S. Cyrille. C’était chez les Hébreux un proverbe de mépris ; ainsi on criait aux médecins qui étaient malades : « Médecin, guéris-toi toi-même. » — La glose. Ils veulent lui dire : Nous avons appris que vous aviez guéri un grand nombre de malades à Capharnaüm, guérissez-vous vous-même, c’est-à-dire, faites les mêmes prodiges dans votre ville, lieu de votre conception et de votre première éducation.

S. Augustin. (de l’acc. des Evang., 2, 12.) Puisque saint Luc rappelle ici les grands prodiges que Notre-Seigneur a déjà opérés, et qu’il sait bien n’avoir pas racontés lui-même, il est donc évident que c’est en connaissance de cause qu’il place en premier lieu cet événement. En effet, la distance qui le sépare du baptême du Sauveur, est trop peu grande pour qu’on puisse supposer qu’il a oublié qu’il n’a encore rien dit de ce qui s’est passé dans la ville de Capharnaüm.

S. Ambr. Ce n’est pas sans raison que le Sauveur s’excuse de n’avoir fait aucun miracle dans sa patrie, il ne voulait pas qu’on pût croire que nous devions faire peu de cas de l’amour de la patrie : « Et il dit : Je vous dis en vérité, qu’aucun prophète n’est accueilli dans sa patrie, » etc. — S. Cyrille. Comme s’il leur disait : Vous voulez me voir opérer de nombreux prodiges au milieu de vous, parmi lesquels se sont passées mes premières années ; mais je n’ignore pas un sentiment trop commun à la plupart des hommes ; ils n’ont que du mépris pour les choses les plus excellentes, lorsqu’elles se répètent fréquemment et comme à volonté. Il en est de même des hommes, celui avec lequel on vit dans une espèce de familiarité cesse d’être respecté par ses proches qui ont l’habitude de le voir toujours au milieu d’eux. — Bède. Que le Christ soit appelé prophète dans les Écritures, Moïse en fait foi quand il dit : « Dieu vous suscitera un prophète d’entre vos frères. » (Dt 18.) — S. Ambr. Cet exemple nous apprend qu’en vain nous espérons le secours de la miséricorde céleste, si nous portons envie au mérite de la vertu de nos frères. Dieu, en effet, méprise souverainement les envieux, et prive des miracles de sa puissance ceux qui persécutent dans les autres les bienfaits de sa main divine. Les oeuvres que Notre-Seigneur faisait pendant sa vie mortelle, étaient des preuves de sa divinité, et ses perfections invisibles nous étaient manifestées par ce qui paraissait aux yeux. Voyez quel mal produit l’envie, la patrie de Jésus est jugée indigne, à cause de son envie, d’être témoin des oeuvres du Sauveur, elle qui avait été jugée digne d’être le lieu de sa conception divine.

Origène. (hom. 33.) A s’en tenir au récit de saint Luc, on n’y voit point que Jésus ait fait jusque-là aucun miracle à Capharnaüm, car cet Évangéliste raconte simplement qu’avant de venir à Capharnaüm, Jésus avait passé plusieurs années de sa vie à Nazareth. Je pense donc que ces paroles des habitants de Nazareth : « Les grandes choses qu’on nous a racontées que vous faisiez à Capharnaüm, » renferment quelque mystère, et que Nazareth représente ici les Juifs, et Capharnaüm les Gentils. En effet, il viendra un temps où le peuple d’Israël dira : Montrez-nous aussi ce que vous avez fait voir à tout l’univers, prêchez votre doctrine au peuple d’Israël, afin que lorsque toutes les nations seront entrées, le peuple d’Israël puisse aussi avoir part au salut. En leur disant donc : Aucun prophète n’est accueilli dans sa patrie, Notre-Seigneur leur répondit dans un sens plus figuré que littéral. » Il est vrai que Jérémie ne fut pas bien reçu dans son pays, et qu’il en fut de même des autres prophètes. Cependant, voici le sens le plus probable de ces paroles : Le peuple de la circoncision fut la patrie de tous les prophètes, et les nations reçurent avec plus d’empressement le témoignage de Moïse et des prophètes qui annonçaient Jésus-Christ, que ceux d’entre les Juifs qui refusèrent de reconnaître Jésus pour le Sauveur du monde.

S. Ambr. Notre-Seigneur apporte ici un exemple bien propre à réprimer l’arrogance de ses concitoyens envieux et jaloux, et il leur montre que sa conduite est conforme aux anciennes Écritures : « Je vous le dis en vérité, il y avait beaucoup de veuves en Israël aux jours d’Elie, » non que ces jours appartinssent à Elie, mais parce qu’il opéra ses prodiges dans ces jours (cf. Is 1 ; Os 1 ; Am 1 ; Za 14, etc.). — S. Chrys. (hom. sur les Ep. de S. Paul.) Cet ange terrestre, cet homme tout céleste, qui n’avait ni demeure, ni table, ni vêtements, ce que le plus grand nombre des hommes possède, portait dans une de ses paroles, pour ainsi dire, la clef des cieux ; ce que Notre-Seigneur indique par ce qui suit : « Lorsque le ciel fut fermé pendant trois ans. » Or, lorsqu’il eut ainsi fermé le ciel, et frappé la terre de stérilité, elle fut en proie à la famine, et tous les corps dépérirent : « Et qu’il y eut une grande famine sur la terre. » — S. Basile. (Ch. des Pèr. gr.) Lorsque, en effet, Elie eut considéré que l’abondance était la source des plus grands scandales, il imposa aux hommes par la famine, un jeûne nécessaire, pour mettre ainsi un frein à leurs excès qui ne connaissaient plus de bornes. C’est alors que l’on vit des corbeaux qui, d’ordinaire, dérobent aux autres leur nourriture, devenir les messagers du ciel pour nourrir cet homme juste. — S. Chrys. (comme précéd.) Mais comme le fleuve où il se désaltérait était desséché, Dieu lui dit : « Allez à Sarepta, ville des Sidoniens, là je commanderai à une femme veuve de vous nourrir, » Et Notre-Seigneur ajoute : « Et Elie ne fut envoyé à aucune d’elles, mais à une veuve de Sarepta, dans le pays des Sidoniens. » Elie agit en cela par une disposition toute particulière de Dieu, qui le conduisit par un long chemin jusque dans le pays de Sidon, afin qu’étant témoins de la famine qui désolait ces contrées, il priât Dieu de répandre la pluie sur la terre. Or il y avait alors bien des riches dans ce pays, et aucun d’eux n’imita l’exemple de cette veuve, la vénération qu’elle eut pour le prophète lui fit trouver des richesses, non dans les biens qu’elle n’avait pas, mais dans sa bonne volonté.

S. Ambr. Dans le sens mystique, ces paroles : « Dans les jours d’Elie », signifient qu’Elie était pour eux comme la lumière du jour, parce qu’ils voyaient dans ses oeuvres l’éclat de la grâce spirituelle qui était en lui. Ainsi le ciel s’ouvrait pour ceux qui étaient témoins des divins mystères, et il se fermait durant la famine, alors qu’il n’y avait aucun moyen facile d’arriver à la connaissance de Dieu. Cette veuve, à laquelle Elie fut envoyé, est une figure de l’Église. — Origène. Pendant que la famine désolait le peuple d’Israël, affamé d’entendre la parole de Dieu, le prophète est venu trouver cette veuve, dont il est dit dans le prophète Isaïe (Is 54) : « L’épouse abandonnée est devenue plus féconde que celle qui a un époux, et en demeurant chez elle il multiplia son pain et ses autres aliments. — Bède. Sidonie veut dire chasse inutile ; Sarepta signifie incendie ou disette du pain ; toutes significations qui conviennent parfaitement au peuple des Gentils. En effet, livré tout entier à une chasse stérile, c’est-à-dire, à la recherche des richesses et des gains du commerce de la terre, il était en proie à l’incendie des concupiscences charnelles et à la disette du pain spirituel, jusqu’à ce que l’intelligence des Écritures ayant disparu complètement par suite de la perfidie des Juifs, Elie, c’est-à-dire, la parole prophétique, vint trouver l’Église pour nourrir et fortifier les coeurs des vrais croyants qui le recevraient. — S. Basile. On peut encore voir ici la figure de toute âme veuve, pour ainsi dire, dénuée de force et privée de la connaissance de Dieu, lorsque cette âme reçoit la parole divine, en reconnaissant ses fautes, Dieu lui apprend à nourrir cette parole avec le pain des vertus, et à arroser la science de la vertu avec la source de la vie.

Origène. (hom. 33.) Notre-Seigneur cite encore un autre fait à l’appui de la même vérité, en ajoutant : « Il y avait aussi beaucoup de lépreux en Israël, au temps du prophète Elisée, et aucun d’entre eux ne fut guéri, si ce n’est Naaman le Syrien, » qui ne faisait point partie du peuple d’Israël. — S. Ambr. Nous avons dit précédemment que cette veuve vers laquelle Elie fut envoyé, était la figure de l’Église. Or, dans un sens allégorique, le peuple s’approche de l’Église pour marcher à sa suite. C’est ce peuple composé des nations étrangères, ce peuple couvert de lèpre avant qu’il fût plongé dans le baptême du fleuve mystique, mais qui après avoir reçu le sacrement de baptême qui l’a purifié de toutes les souillures du corps et de l’âme, a commencé à devenir une Vierge immaculée sans rides comme sans taches. — Bède. En effet, Naaman qui veut dire beau, représente le peuple des Gentils ; il lui est ordonné de se laver sept fois, parce que le baptême qui nous sauve est celui qui nous régénère par les sept dons de l’Esprit saint. Sa chair, après avoir été lavée, devient comme celle d’un enfant, parce que la grâce, qui est notre mère, nous fait tous renaître à une seule et même enfance, ou bien parce que nous sommes rendus semblables à Jésus-Christ dont il est dit : « Un enfant nous est né. » (Is 9.)

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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