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Lc  2  51-52

Chaîne des Pères Grecs. (ou Géom.) Toute la vie de Jésus-Christ qui s’est écoulée depuis ce moment jusqu’au temps de sa manifestation et de son baptême, et qui n’a été signalée ni par la publicité d’aucun miracle, ni par l’éclat de sa doctrine, se trouve résumée dans ces seules paroles de l’Évangéliste : « Et il descendit avec eux, et il vint à Nazareth, et il leur était soumis. » — Origène. Nous voyons que Jésus descendait fréquemment avec ses disciples, et qu’il ne restait pas toujours sur la montagne ; car ceux qui étaient travaillés de diverses maladies ne pouvaient le suivre sur la montagne. C’est pour le même motif qu’il descend aujourd’hui vers ceux qui habitent une région inférieure à la sienne.

« Et il leur était soumis. » — Chaîne des Pères Grecs. Notre-Seigneur suit tour à tour ces deux méthodes : Tantôt il commence par établir la loi, et puis il la confirme par ses oeuvres, comme lorsque ayant dit : « Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis, » lui-même, quelque temps après, sacrifia sa propre vie pour notre salut. Quelquefois, au contraire, il donne tout d’abord l’exemple, et trace ensuite dans ses enseignements la règle qu’il faut suivre. C’est ce qu’il fait ici en nous apprenant, par sa conduite, ces trois principaux devoirs : Aimer Dieu, honorer ses parents, et savoir leur préférer Dieu quand il le faut. En effet, au reproche que lui font ses parents, il répond en mettant au premier rang, et avant tout, le service de Dieu ; puis il rend ensuite à ses parents l’obéissance qui leur est due. — Bède. Comment, en effet, celui qui venait nous enseigner toute vertu aurait-il pu ne pas remplir ce devoir de piété filiale ? Que pourrait-il faire parmi nous, que ce qu’il veut que nous fassions nous-mêmes ? — Origène. Apprenons donc nous aussi à être soumis à nos parents ; si nous avons eu le malheur de les perdre, soyons soumis à ceux qui, par leur âge, nous tiennent leur place. Jésus, le Fils de Dieu, se soumet à Joseph et à Marie, je me soumettrai à l’évêque que Dieu m’a donné pour père. Sans doute, Joseph devait comprendre que Jésus était au-dessus de lui, et n’exercer qu’en tremblant son autorité sur ce divin enfant. Que chacun donc réfléchisse aussi que souvent il est bien inférieur à celui qui lui obéit ; cette pensée le défendra contre tout sentiment d’orgueil, lorsqu’il verra que celui au-dessus duquel il est placé par sa dignité lui est de beaucoup supérieur en vertu. — S. Grég. de Nysse. Disons encore que l’esprit de discernement et la raison sont très imparfaits dans les enfants, et qu’ils ont besoin d’être développés par ceux qui sont plus âgés, ou si l’on veut, d’être conduits par des mains sages et expérimentées à un degré plus éminent de vertu. Or, c’est pour confirmer cette vérité que Jésus, parvenu à l’âge de douze ans, nous donne l’exemple de l’obéissance à ses parents ; et il nous apprend ainsi que tout ce qui ne peut s’élever à la perfection que par degrés successifs, pour arriver à cette fin désirée, doit embrasser la pratique de l’obéissance, comme une des voies les plus sûres qui puisse l’y conduire.

S. Basile. (Cons. monast., ch. 4.) Par cette obéissance parfaite qu’il professe à l’égard de ses parents dès sa première enfance, Jésus accepte humblement, et avec respect, tous les pénibles travaux de leur condition. Car bien qu’ils fussent vertueux, honorés, ils étaient pauvres cependant, et dans la gène (comme le prouve la crèche qui reçut l’enfant divin à sa naissance), et ils devaient pourvoir à leur existence par un travail assidu et à la sueur de leur front. Or, Jésus qui leur obéissait (comme le déclare l’Écriture), devait partager tous ces travaux avec une entière soumission. — S. Ambr. Vous êtes surpris qu’il puisse être soumis à son Père céleste, tout en obéissant à sa mère ? Rappelez-vous que cette obéissance n’est pas chez lui la suite de la faiblesse, mais un acte de piété filiale. Les hérétiques ont beau lever ici la tête, et prétendre que celui qui est envoyé par son Père a besoin d’un secours étranger. Avait-il besoin du secours des hommes, parce qu’il était soumis à l’autorité de sa mère ? Il était soumis à l’humble servante de Dieu, il était soumis à celui qui n’était son père que de nom, et vous êtes étonné qu’il soit soumis à Dieu ? C’est un devoir de piété filiale, que d’obéir à l’homme, serait-ce un acte de faiblesse que d’obéir à Dieu ?

Bède. Cependant l’auguste Vierge renfermait toutes ces choses dans son coeur pour les repasser, pour les méditer avec soin, soit qu’elle les comprit dans toute leur étendue, soit que leur sens mystérieux demeurât encore voilé pour elle : « Et sa mère conservait toutes ces choses en son coeur. » — Chaîne des Pères Grecs. Considérez l’admirable prudence de Marie, cette mère de la vraie sagesse, comme elle se rend le disciple, l’élève de son divin enfant. Car ses leçons n’étaient point pour elle les leçons d’un enfant, ni d’un homme ordinaire, mais les leçons d’un Dieu. Elle repassait ensuite dans son âme ses paroles et les actions dont elle était témoin, elle n’en laissait perdre aucune ; et de même qu’elle avait autrefois conçu le Verbe lui-même dans son chaste sein, ainsi elle concevait pour ainsi dire ses paroles et ses actions, et les fécondait dans son coeur par une pieuse méditation. Elle contemplait avec bonheur ce qu’elle pouvait en comprendre, et elle attendait la révélation plus claire que l’avenir lui en réservait. Telle fut la règle dont elle se fit comme une loi dans tout le cours de sa vie.

« Et Jésus croissait en sagesse et en âge, » etc. — Théophile. Jésus n’est pas devenu sage progressivement, mais la sagesse qui était en lui se déclarait successivement et par degrés, comme par exemple, lorsque discutant avec les scribes, la prudence et la haute portée de ses questions jetaient dans l’étonnement tous ceux qui l’entendaient. Il croissait donc en sagesse, en ce sens qu’il se révélait en présence d’un plus grand nombre et les ravissait d’admiration ; la manifestation de sa sagesse en était chez lui comme le progrès. Considérez comment l’Évangéliste, expliquant ce qu’était pour Jésus ce progrès dans la sagesse, ajoute aussitôt : « Et en âge. » Il veut par là nous faire entendre que l’accroissement de l’âge était la mesure de l’accroissement extérieur de la sagesse. — S. Cyrille. (Tres., liv. 10, ch. 7.) Mais, disent les Eunomiens, comment pouvait-il être égal et consubstantiel à son Père, lui que nous voyons soumis à un accroissement successif comme une créature imparfaite ? Nous répondons que ce n’est pas en tant que Verbe, mais en tant qu’il s’était fait homme, que l’Évangéliste dit : « Il croissait en sagesse, » etc. Car si après son incarnation, il a véritablement acquis une nouvelle perfection qu’il n’avait pas auparavant, quelle reconnaissance lui devrions-nous de ce qu’il s’est incarné pour nous ? D’ailleurs s’il est la véritable sagesse, de quel accroissement était-il susceptible ? et comment celui qui est le principe et la source de la grâce pour tous les hommes, aurait-il pu croître lui-même en grâce ? Disons plus ; est-on scandalisé d’entendre dire que le Verbe s’est humilié, et en conçoit-on des idées peu favorables à la divinité ; et n’admire-t-on pas bien plutôt la grandeur de sa miséricorde ? Pourquoi donc serait-on scandalisé de ses progrès dans la sagesse ? C’est pour nous qu’il a daigné s’humilier, c’est pour nous aussi qu’il s’est soumis à ce progrès successif, et pour nous faire avancer dans sa personne, nous, que le péché avait fait tomber si bas ; car il s’est soumis, en réalité, à toutes les conditions de notre nature, pour les réformer et leur imprimer un nouveau caractère de perfection. Et remarquez encore que l’Évangéliste ne dit pas : Le Verbe croissait, mais : « Jésus croissait, » il veut nous faire comprendre que ce n’est point le Verbe considéré comme Verbe, mais le Verbe fait chair qui s’est soumis à cet accroissement. Bien que la chair seule ait été sujette à la souffrance, nous disons que le Verbe a souffert dans la chair dont il s’est revêtu, parce que c’était la chair du Verbe qui souffrait, ainsi disons-nous que le Verbe croissait, parce que l’humanité qui lui était unie était soumise à cet accroissement. Et encore, nous disons qu’il croissait en tant qu’homme, non pas que son humanité, qui était parfaite dès le premier moment de l’incarnation, pût recevoir quelque nouvel accroissement, mais parce qu’elle se développait progressivement. L’ordre naturel s’oppose à ce que l’homme fasse paraître une intelligence supérieure à son âge. Le Verbe (fait homme) avait donc toute perfection, puisqu’il est la puissance et la sagesse du Père ; mais pour se conformer aux conditions de notre nature, et ne point donner un spectacle extraordinaire à ceux qui en seraient témoins, il passait par tous les degrés du développement naturel de l’homme aux divers âges de sa vie, et ceux qui le voyaient, qui l’entendaient, trouvaient que sa sagesse s’accroissait de jour en jour. — Chaîne des Pères Grecs. (Amphil.) Il croissait en âge, parce que son corps atteignait successivement la virilité ; il croissait en sagesse dans les divines leçons qu’il donnait à ceux qu’il instruisait ; il croissait dans cette grâce qui nous fait nous — même croître et avancer avec joie dans l’espérance d’obtenir à la fin les biens qui nous sont promis. Il croissait devant Dieu, parce qu’il accomplissait l’oeuvre de son Père dans la chair qu’il avait prise ; il croissait devant les hommes en les retirant du culte des idoles pour les élever à la connaissance de la divine Trinité. — Théophile. L’Évangéliste dit qu’il croissait devant Dieu et devant les hommes, parce qu’il faut plaire à Dieu, avant de plaire aux hommes. — S. Grég. de Nysse. (hom. 3 sur le Cant. des Cant.) Le Verbe ne croît point de la même manière dans ceux qui le reçoivent, ruais il apparaît dans les divers degrés par lesquels il a passé de l’enfance, de l’âge adulte et de la perfection.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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