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Lc  22  43-46

Théophile. Le Seigneur veut être fortifié par un ange alors qu’il priait, pour nous faire comprendre la puissance de la prière et nous apprendre à y recourir avant tout dans nos adversités. — Bède. Nous lisons dans un autre endroit, que les anges s’approchèrent de lui et le servaient. (Mt 4.) Nous avons donc une preuve de sa double nature dans ces anges qui tour à tour le servent et le fortifient, car le Créateur n’a pas besoin du secours de ses créatures, mais s’étant fait homme, il a voulu être fortifié pour notre instruction, de même qu’il s’est soumis à nos tristesses par amour pour nous. — Théophile. Selon quelques-uns, cet ange apparut au Sauveur pour le glorifier et lui dire : Seigneur, c’est à vous qu’appartient la puissance, car vous pouvez délivrer le genre humain de la mort et de l’enfer.

S. Chrys. Notre-Seigneur s’est revêtu véritablement de notre chair, et c’est pour établir la vérité de son incarnation et fermer la bouche aux hérétiques, qu’il se soumet à toutes les faiblesses de notre nature : « Et étant tombé en agonie, il priait encore plus. » — S. Ambr. Cette tristesse, cette agonie, sont un sujet de difficultés pour un grand nombre de ceux qui inclinent à voir dans la tristesse du Sauveur une preuve de l’infirmité essentielle à sa nature plutôt que la suite d’une faiblesse qu’il n’avait acceptée que pour un temps. Quant à moi, non seulement je ne crois pas devoir excuser ce sentiment, mais nulle part je ne trouve plus à admirer sa miséricorde et sa puissance. En effet, la rédemption de Notre-Seigneur m’eût été beaucoup moins avantageuse, s’il n’avait pris sur lui toutes nos passions, toutes nos faiblesses, car il a pris ma tristesse pour me communiquer sa joie. C’est avec confiance que je parle de la tristesse, parce que je suis prédicateur de la croix. Le Sauveur a dû prendre sur lui nos douleurs pour en triompher, car ceux en qui les souffrances produisent la stupeur et l’insensibilité plutôt que la douleur, n’ont point le mérite du véritable courage. Jésus a donc voulu nous apprendre à triompher de la mort, et surtout des tristesses de la mort. Vous êtes affligé, Seigneur, mais ce n’est pas de vos blessures, c’est des miennes, car c’est à cause de nos péchés qu’il a été blessé. Peut-être aussi est-il triste de ce que depuis la chute d’Adam, la mort est la seule voie par laquelle nous puissions sortir de ce monde. Ajoutons qu’il n’est pas moins vraisemblable que sa tristesse eût pour cause les châtiments que le crime sacrilège de ses persécuteurs devait attirer sur eux.

S. Grég. (Moral., 7, 24.) Aux approches de sa mort, le Sauveur a voulu reproduire en lui les combats de notre âme qui est aussi en proie à la terreur et à l’effroi, lorsque la dissolution prochaine de notre corps nous annonce l’heure du jugement éternel, et ce n’est pas sans raison, puisqu’elle est sur le point d’entendre la sentence qui doit fixer immuablement son sort pour l’éternité.

Théophile. Une nouvelle preuve que la prière du Sauveur était un acte de la nature humaine et non de la divinité, c’est la sueur dont il est inondé : « Et il eut une sueur comme des gouttes de sang découlant jusqu’à terre. » — Bède. Il ne faut point attribuer cette sueur à la faiblesse, une sueur de sang est contre nature, mais reconnaître plutôt l’enseignement que Notre-Seigneur a voulu nous y donner, c’est qu’il avait obtenu l’effet de sa prière, qui était d’épurer par son sang la foi de ses disciples encore entachée des imperfections de la fragilité humaine. — S. Augustin. (sur les max. de Prosp.) Cette sueur sanglante, qui accompagne la prière du Sauveur, figurait encore, que tous les martyres découleraient de son corps sacré qui est l’Église. — Théophile. Ou encore, c’est ici une manière de parler au figuré, et cette sueur de sang signifie une sueur très-abondante. L’Évangéliste voulant nous représenter Notre-Seigneur inondé de sueur, nous dit qu’il eut une sueur de sang. Cependant il trouve ses disciples endormis sous le poids de la tristesse, et il leur en fait un reproche en même temps qu’il leur recommande de prier : « S’étant levé après sa prière, il vint à ses disciples, et les trouva endormis à cause de la tristesse. » — S. Chrys. On était au milieu de la nuit, les yeux des disciples étaient appesantis par le chagrin, et ils succombaient au sommeil plutôt par tristesse que par épuisement. — S. Augustin. (De l’acc. des Evang., 3, 4.) Saint Luc ne dit pas combien de fois le Seigneur avait adressé à Dieu sa prière avant de venir trouver ses disciples, mais il n’y a ici aucune contradiction entre son récit et celui de saint Marc.

Bède. Notre-Seigneur apprend à ses disciples que c’est pour eux qu’il a prié, et il les engage à entrer en participation de ses prières, en veillant et en priant eux-mêmes. « Et il leur dit : Pourquoi dormez-vous ? levez-vous et priez, afin de ne point entrer en tentation. » — Théophile. C’est-à-dire, pour n’être point vaincu par la tentation ; car ne pas entrer en tentation, signifie n’en être pas victime. Ou encore, il nous recommande de prier pour obtenir une vie calme et tranquille, exempte de tout mal, car c’est en suivant les inspirations du démon et de l’orgueil qu’os se jette dans la tentation. Aussi l’apôtre saint Jacques ne dit pas : Jetez-vous dans la tentation, mais : « Considérez comme le sujet d’une grande joie lorsque vous tomberez dans les tentations, en acceptant volontiers et avec joie ce qui vous arrive malgré vous. » (Jc 2.)

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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