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Lc  12  27-31

S. Chrys. (hom. 23, sur S. Matth.) Notre-Seigneur donne ici pour le vêtement, la même leçon qu’il vient de donner pour la nourriture : « Considérez les lis, comment ils croissent ; ils ne travaillent ni ne filent, » pour se faire des vêtements. En nous proposant dans ce qui précède l’exemple des oiseaux qui ne sèment, ni ne moissonnent, le Sauveur n’a point condamné l’ensemencement des champs, mais les soins superflus ; de même ici en nous proposant celui des lis qui ne travaillent point, et ne filent point, il ne condamne pas le travail, mais les vaines sollicitudes.

Eusèbe. Que celui qui désire se parer de vêtements précieux considère que Dieu étendant sa providence jusqu’aux fleurs qui naissent sur la terre, les a ornées de couleurs variées en donnant à leurs membranes délicates, des teintes plus vives que celles de la pourpre et de l’or, à ce point que les plus grands rois, et Salomon lui-même qui fut si célèbre parmi les anciens par ses richesses, sa sagesse et sa magnificence, n’eurent jamais une si riche parure, au témoignage de Notre-Seigneur : « Je vous déclare que Salomon même, dans toute sa gloire, n’était pas vêtu comme l’un deux. »

S. Chrys. (comme précéd.) Pourquoi Notre-Seigneur n’apporte pas ici l’exemple des oiseaux, tels que le cygne et le paon, mais celui des lis ? C’est pour faire ressortir davantage ces deux extrêmes, la fragilité des choses qui brillent d’un si vif éclat, et la richesse de la parure qu’il a donnée aux lis. Aussi dans la suite de son discours, il ne les appelle plus les lis ; mais l’herbe des champs : « Or, si l’herbe qui est aujourd’hui dans les champs. » Il ne dit pas non plus : Et qui ne sera plus demain, mais : « Qui demain sera jetée au feu. » Remarquez encore qu’au lieu de dire simplement : Si Dieu la revêt, il emploie cette locution plus expressive : « Si Dieu la revêt ainsi, » et qu’il ajoute : « Combien plus le fera-t-il pour vous, » paroles qui expriment à la fois l’excellence du genre humain, et la providence dont il est l’objet. Enfin, au lieu des reproches que méritaient ses disciples, il leur parle avec douceur, et les accuse, non pas de leur manque absolu de foi, mais de leur peu de foi : « Combien plus le ferait-il pour vous hommes de peu de foi ? » Langage persuasif qui a pour objet de nous ôter la préoccupation des vêtements et de l’éclat des vaines parures. — S. Cyrille. (Ch. des Pèr. gr.) Il suffit aux sages en effet d’avoir, pour satisfaire à la nécessité, des vêtements convenables et simples, et la nourriture dont ils ont besoin. Et quant aux saints ils se contentent de ces délices spirituelles que donne l’union avec Jésus-Christ, et de la gloire qui doit les suivre. — S. Ambr. Notre-Seigneur met une simple fleur en comparaison avec l’homme, il lui donne même la préférence sur l’homme dans la personne de Salomon, pour nous faire voir dans l’éclat de ses vives couleurs une image de la grâce des anges du ciel, qui sont véritablement les fleurs de ce monde, parce qu’ils en sont l’ornement par l’éclat de leur perfection, qu’ils répandent partout le parfum de leur sainteté, et que sans être préoccupés d’aucun souci, ni fatigués d’aucun travail, ils conservent en eux les dons de la libéralité divine et de leur nature toute céleste. Aussi est-ce avec raison qu’il est dit ici que Salomon était revêtu, et dans saint Matthieu (Mt 6, 9), qu’il était couvert de sa gloire, parce qu’en effet il revêtait de la gloire de ses oeuvres la faiblesse de sa nature corporelle, qui était comme couverte et enveloppée par les vertus de son âme. Quant aux anges dont la nature plus parfaite est exempte des infirmités du corps, ils sont justement mis au-dessus du plus grand des hommes. Cependant nous ne devons pas pour cela désespérer de la miséricorde de Dieu, nous à qui Dieu promet par la grâce de la résurrection, des qualités aussi éclatantes que celles des anges.

S. Cyrille. Il eût été contraire à la raison que les Apôtres, qui devaient donner aux autres la règle et l’exemple d’une vie parfaite, se rendissent coupables des défauts dont ils devaient préserver les autres. Aussi écoutez la recommandation du Sauveur : « Ne vous mettez donc pas en peine de ce que vous mangerez, ou de ce que vous boirez. » En détachant ainsi ses disciples des préoccupations de la terre, il les applique tout entiers aux intérêts de la prédication. Remarquez cependant qu’il ne dit pas : Ne vous occupez pas, ne vous inquiétez point de la nourriture, ou de la boisson, ou du vêtement ; mais : « Ne vous mettez pas en peine de ce que vous mangerez, ou de ce que vous boirez. » Paroles qui condamnent ceux qui, dédaignant la manière de vivre, ou de se vêtir du commun des hommes, recherchent un genre de nourriture, ou de vêtement plus somptueux, ou plus austère que ne l’adoptent ceux au milieu desquels ils vivent.

S. Grég. de Nysse. (1 Disc. sur l’orais. dom.) Il en est qui ont demandé et obtenu en priant la puissance, les honneurs, les richesses, pourquoi donc nous défend-on d’en faire l’objet de nos prières ? Que tous ces biens dépendent de la volonté divine, il n’est personne qui n’en soit convaincu ; cependant Dieu les accorde à ceux qui les demandent, afin que nous nous élevions au désir de biens plus parfaits, en voyant que Dieu nous accorde des grâces bien moins importantes ; c’est ainsi que nous voyons les enfants, aussitôt qu’ils sont nés, s’attacher de toutes leurs forces au sein maternel, mais lorsque l’enfant grandit, il laisse le sein de sa mère, et demande des parures ou quelqu’autre chose qui charme ses yeux ; lorsqu’enfin son esprit s’est développé avec le corps, il rompt avec tous les désirs de l’enfance, et demande à ses parents ce qui est en rapport avec son âge plus parfait.

S. Augustin. (quest. évang., 2, 29.) Après avoir défendu toute sollicitude de la nourriture et du vêtement, Notre-Seigneur nous recommande conséquemment d’éviter l’orgueil : « Ne vous élevez pas si haut. » Car l’homme recherche d’abord ces choses pour satisfaire à ses besoins, mais lorsqu’il les a en abondance, il en conçoit de l’orgueil, semblable à un homme qui, s’étant blessé, se vanterait d’avoir quantité de remèdes dans sa maison, alors qu’il lui serait mille fois plus avantageux d’être sans blessure, et de n’avoir point besoin de remèdes. — Théophile. Ou bien cette élévation de l’esprit que le Sauveur défend, c’est un mouvement inconstant de l’âme qui embrasse une foule de pensées, et passe de l’une à l’autre pour nourrir son orgueil. — S. Basile. (Ch. des Pèr. gr.) Voulez-vous bien comprendre en quoi consiste cette élévation, rappelez-vous la vanité de vos jeunes années, alors qu’étant seul, vous pensiez à la vie et à ses honneurs, promenant vos désirs de dignité en dignité, amassant des richesses, bâtissant des palais, comblant de bienfaits vos amis, et vous vengeant de vos ennemis. Or, de telles pensées sont coupables, parce qu’en mettant son plaisir dans les choses superflues, l’âme s’éloigne de la vérité ; aussi Notre-Seigneur ajoute : « Car ce sont ces choses que les nations du monde recherchent. » — S. Grég. de Nysse. Car c’est le propre de ceux qui n’ont ni l’espérance de la vie future, ni la crainte du jugement, de s’inquiéter de tous ces biens extérieurs. — S. Basile. Quant aux choses nécessaires : « Votre Père sait que vous en avez besoin. » — S. Chrys. (hom. 23, sur S. Matth.) Il ne dit pas : Votre Dieu, mais : « Votre Père, » pour leur inspirer une plus grande confiance, car quel est le Père qui laisserait manquer ses enfants du nécessaire ? Et vous ne pouvez pas objecter qu’il est Père, il est vrai, mais qu’il ne connaît pas vos besoins ; car celui qui a créé notre nature, sait bien ce qui lui est nécessaire.

S. Ambr. Notre-Seigneur montre ensuite que la providence et la grâce de Dieu ne feront jamais défaut aux fidèles, ni pour le temps présent, ni pour l’avenir, à la condition toutefois qu’en désirant les biens du ciel, ils ne chercheront pas avec inquiétude les biens de la terre, car il serait honteux à des hommes qui combattent pour un royaume de s’inquiéter de la nourriture. Est-ce que le roi ne sait pas comment il doit entretenir, nourrir et vêtir sa maison ? « Cherchez donc premièrement le royaume de Dieu et sa justice, et toutes ces choses vous seront données par surcroît. » — S. Chrys. (Ch. des Pèr. gr.) Ce n’est pas seulement son royaume, mais des richesses que Jésus-Christ nous promet ; car si nous-mêmes nous nous faisons un devoir de délivrer de tout souci, ceux qui sacrifient leurs intérêts pour s’occuper des nôtres, à plus forte raison Dieu agira-t-il de la sorte. — Bède. Il distingue dans les dons de Dieu, ce qui est essentiel de ce qui n’est que de Surcroît, parce qu’en effet nous devons nous proposer les biens éternels comme la fin de notre vie, et faire simplement usage des biens du temps présent.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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