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Jn  1  32-34

S. Chrys. (hom. 17 sur S. Jean.) Le témoignage que Jean-Baptiste avait rendu à Jésus, qu’il pouvait seul remettre les péchés du monde entier, avait pour objet un mystère si relevé qu’il pouvait jeter dans l’étonnement et la stupeur ceux qui l’entendaient, et c’est pour le rendre plus digne de foi qu’il le fait remonter jusqu’à Dieu et à l’Esprit saint. En effet, on pouvait dire à Jean : « Comment donc l’avez-vous connu ? » C’est, répond-il par l’Esprit saint qui est descendu sur lui : « Et Jean rendit encore ce témoignage : J’ai vu l’Esprit saint descendre sur lui, » etc. — S. Augustin. (de la Trin., 15, 20.) Ce n’est pas cependant que Jésus n’ait reçu l’onction de l’Esprit saint, que lorsqu’il descendit sur lui, après son baptême, sous la forme d’une colombe. Le Sauveur daignait alors représenter son corps mystique, c’est-à-dire son Eglise, dans laquelle surtout ceux qui sont baptisés reçoivent l’Esprit saint. Il serait, en effet, de la dernière absurdité de croire que Jésus ne reçut l’Esprit saint qu’à l’âge de trente ans, puisqu’il avait cet âge lorsqu’il fut baptisé et qu’il vint recevoir le baptême de Jean sans aucun péché, mais aussi sans avoir reçu l’Esprit saint. Il est écrit de Jean, son serviteur et son précurseur : « Il sera rempli de l’Esprit saint dès le sein de sa mère, » et quoiqu’il eût un homme pour père, il reçut l’Esprit saint dès le sein de sa mère, que devrons-nous donc penser et croire de Jésus-Christ fait homme, lui dont la conception dans le sein de sa mère eut pour principe, non point la chair, mais l’Esprit ?

S. Augustin. (du comb. chrét., 22) Nous ne disons pas que Jésus-Christ seul avait un véritable corps, tandis que l’Esprit saint ne se manifesta aux yeux des hommes que sous une apparence trompeuse. Il est aussi indigne de l’Esprit saint que du Fils de Dieu, d’induire les hommes en erreur. Aussi disons-nous que Dieu, qui a créé tout de rien, a pu fort bien créer un véritable corps de colombe sans l’intermédiaire d’aucun oiseau de cette espèce, avec la même facilité qu’il forma un véritable corps dans le sein de la Vierge, sans le concours d’aucun homme.

S. Augustin. (Traité 6, sur S. Jean.) L’Esprit saint s’est manifesté aux hommes sous deux formes visibles différentes, sous la forme d’une colombe lorsqu’il descendit sur Notre-Seigneur après son baptême, et sous la forme de langues de feu quand il descendit sur les Apôtres réunis. D’un côté, c’est le symbole de la simplicité, de l’autre, l’emblème de la ferveur. La forme de la colombe apprend à ceux qui ont été sanctifiés par l’Esprit saint, à fuir toute duplicité ; et le feu enseigne à la simplicité, à ne point faire ses actions avec froideur. Ne vous étonnez pas que les langues soient divisées. Ne craignez pas la division, reconnaissez dans la colombe le symbole de l’unité. Il fallait que l’Esprit saint descendît sur Notre-Seigneur sous la forme d’une colombe, pour apprendre à tous les chrétiens qu’on reconnaîtra qu’ils ont reçu l’Esprit saint, s’ils ont la simplicité de la colombe et s’ils vivent avec leurs frères dans cette paix véritable que figurent les baisers des colombes. Les corbeaux donnent aussi des baisers, mais en même temps ils déchirent ; la colombe ne sait point déchirer, les corbeaux se nourrissent de corps qui ont été mis à mort, ce que ne fait pas la colombe, qui ne se nourrit que des fruits de la terre. Que si la colombe fait entendre des gémissements d’amour, ne soyons pas surpris que l’Esprit saint ait voulu apparaître sous la forme d’une colombe, lui qui prie pour nous par ses gémissements ineffables. (Rm 9) Ce n’est point en lui même, mais en nous que l’Esprit saint gémit par les gémissements qu’il nous inspire. Celui qui gémit d’être accablé sous le poids de ce corps mortel, et de vivre éloigné du Seigneur, gémit d’une manière agréable à Dieu. Mais il en est beaucoup qui gémissent d’être privés de la félicité de ce monde, ou d’être brisés par les épreuves, accablés sous le poids écrasant des infirmités du corps, ce ne sont pas là les gémissements de la colombe. Sous quelle forme devait se manifester l’Esprit saint pour représenter l’unité, si ce n’est sous la forme de la colombe, afin de pouvoir dire à l’Eglise, après lui avoir donné la paix ; « Ma colombe est unique ? » (Ct 6) Quel symbole plus convenable de l’humilité, que cet oiseau simple et gémissant ? La sainte et véritable Trinité apparut tonte entière dans cette circonstance ; le Père, dans cette voix qui dit : « Vous êtes mon Fils bien-aimé. » Le Fils dans celui qui est baptisé, et l’Esprit saint dans la colombe. C’est au nom de cette Trinité, que les Apôtres ont été envoyés pour baptiser au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. (Mt 28)

S. Grég. (Moral., 28, 41.) Jean-Baptiste ajoute : « Et demeurer sur lui, » car l’Esprit descend, il est vrai, dans le cœur de tous les fidèles, mais c’est dans le médiateur seul qu’il demeure d’une manière spéciale, parce qu’il ne s’est jamais séparé de l’humanité de Jésus, de la divinité duquel il procède. Or le Sauveur parlant à ses disciples de cet Esprit, leur dit aussi : « Il demeurera en vous. » (Jn 16) A quel titre particulier demeure-t-il donc en Jésus-Christ ? C’est ce qu’il nous sera facile de reconnaître si nous faisons une distinction entre les dons de l’Esprit saint. S’agit-il des dons sans lesquels il est impossible de parvenir à la vie, comme la douceur, l’humilité, la foi, l’espérance et la charité, l’Esprit saint demeure dans tous les fidèles. Mais quant aux dons qui out pour objet la manifestation de l’Esprit saint, et qui tendent moins à conserver la vie spirituelle en nous qu’à l’établir dans les autres, l’Esprit saint ne demeure pas toujours en ceux qui ont reçu ces dons, et il se dérobe quelquefois à l’éclat des miracles pour rendre plus humbles les vertus qu’il a inspirées ; Jésus-Christ, au contraire, a eu toujours et en tontes circonstances l’Esprit saint en lui.

S. Chrys. (hom. 17 sur S. Jean.) Que personne ne pense que Jésus-Christ eut besoin de recevoir l’Esprit saint, comme nous avons besoin de le recevoir nous-mêmes ; Jean-Baptiste détruit jusqu’à l’ombre de ce soupçon, en déclarant que l’unique motif de la descente du Saint-Esprit sur Jésus était de le faire connaître : « Et moi je ne le connaissais pas, mais celui qui m’a envoyé baptiser dans l’eau, m’a dit : Celui sur qui tu verras l’Esprit saint descendre et se reposer, c’est lui qui baptise dans l’Esprit saint. » — S. Augustin. (Traité 5 sur S. Jean.) Mais qui donc a envoyé Jean-Baptiste ? Si nous disons : le Père, nous disons vrai ; si nous disons : le Fils, nous disons vrai encore, mais beaucoup plus vrai, si nous disons le Père et le Fils. Mais comment pouvait-il ne pas connaître celui qui l’avait envoyé ? S’il ne connaissait pas celui des mains duquel il voulait recevoir le baptême, il parlait donc d’une manière inconsidérée, lorsqu’il lui disait : « C’est moi qui dois être baptisé par vous. » Il le connaissait donc, pourquoi donc alors affirme-t-il qu’il ne le connaissait pas ? — S. Chrys. (hom. 17 sur S. Jean.) Jean-Baptiste, en disant : « Je ne le connaissais pas, » veut parler d’une époque antérieure et non de celle du baptême, où il dit à Jésus : « C’est moi qui dois être baptisé par vous. » S. Augustin. (Traité 5 sur S. Jean.) Si nous lisons les autres évangélistes qui se sont étendus davantage sur le baptême du Sauveur, nous y verrons de la manière la plus claire que la colombe est descendue sur le Seigneur, lorsqu’il sortit de l’eau. Or, si la colombe n’est descendue qu’après le baptême, et que Jean-Baptiste ait dit à Jésus avant son baptême : « C’est moi qui dois être baptisé par vous, » il le connaissait donc avant son baptême ; et comment alors a-t-il pu dire : « Je ne le connaissais pas, mais celui qui m’a envoyé baptiser m’a dit : Celui sur lequel vous verrez descendre l’Esprit saint ? » etc. Sont-ce ces dernières paroles qui lui ont fait connaître celui qu’il ne connaissait pas ? Jean-Baptiste savait que le Sauveur était le Fils de Dieu, il savait également qu’il baptiserait dans l’Esprit saint. Car avant que Jésus-Christ se rendît sur les bords du Jourdain, alors que le peuple venait en foule trouver Jean-Baptiste, il leur dit : « Celui qui vient après moi est plus grand que moi, c’est lui qui vous baptisera dans l’eau et dans le feu. » Mais que ne savait donc pas Jean-Baptiste ? Il ne savait pas que le pouvoir du baptême devait appartenir exclusivement en propre au Seigneur, qui devait le conserver, de manière à ce que ni Pierre ni Paul ne pussent dire : « Mon baptême, » comme nous voyons que Paul a dit : « Mon Evangile ; » et que l’administration de ce sacrement devait être confié également aux bons et aux mauvais. Que vous importe un mauvais ministre, alors que le Seigneur est bon ? On a rebaptisé après le baptême de Jean-Baptiste, ou n’a point rebaptisé après le baptême d’un homicide, parce que Jean n’a donné que son baptême, et que l’homicide a donné le baptême de Jésus-Christ, et que la sainteté de ce sacrement est si grande, qu’elle ne peut être souillée par un ministre coupable d’homicide. Le Seigneur aurait pu, s’il avait voulu, donner à l’un de ses serviteurs le pouvoir d’administrer le baptême en son propre nom, et attribuer au sacrement de baptême conféré au nom de son serviteur, une efficacité aussi grande que celle du baptême donné par le Seigneur lui-même. Il ne l’a pas voulu, afin que ceux qui reçoivent son baptême missent toute leur espérance en celui au nom duquel ils reconnaîtraient avoir été baptisés, et il n’a point voulu qu’un serviteur plaçât son espérance dans un autre serviteur. S’il avait transmis ce pouvoir à ses serviteurs, il y aurait autant de baptêmes qu’il y a de serviteurs ; et comme on a dit le baptême de Jean, on aurait dit aussi le baptême de Pierre ou de Paul. Ce pouvoir que Jésus-Christ s’est exclusivement réservé, est le fondement de l’unité de l’Eglise, dont il est dit : « Une seule est ma colombe. » (Ct 6) Il peut se faire que quelqu’un ait reçu le baptême d’un autre que de la colombe, mais il est impossible que ce baptême ait pour lui la moindre efficacité.

S. Chrys. (hom. 17 sur S. Jean.) Le Père avait fait entendre sa voix pour proclamer son Fils, l’Esprit saint descend des cieux pour fixer les paroles du Père sur la tête de Jésus-Christ, afin que personne ne fût tenté d’attribuer à Jean ce qui ne convenait qu’à Jésus-Christ. Mais comment, me dira-t-on, les Juifs ne crurent-ils pas s’ils ont vu l’Esprit saint descendre sur Jésus ? C’est que de telles apparitions n’exigent pas seulement les yeux du corps, mais encore ceux de l’âme. Lorsqu’ils furent témoins des miracles que faisait Jésus, l’envie égara leur raison à ce point qu’ils affirmaient le contraire de ce qu’ils avaient vu ; comment donc veut-t-on que la seule apparition de l’Esprit saint ait pu dissiper leur incrédulité ? Suivant quelques-uns, tous ne virent pas l’Esprit saint, mais seulement Jean-Baptiste, et ceux dont les dispositions étaient meilleures ; car bien qu’il fût possible de voir des yeux du corps l’Esprit saint descendre sous la forme d’une colombe, il n’était pas nécessaire que tous fussent témoins de cette apparition miraculeuse. Le prophète Zacharie (Za 1-6) ; Daniel (Dn 7-10) ; Ezéchiel (Ez 1 ; 3 ; 8 ; 10-11 ; 37 ; 40 ; etc.), n’eurent-ils pas plusieurs visions sous des formes sensibles, sans qu’aucun autre en fût témoin ? Moïse lui-même, n’a-t-il pas vu des choses qui n’ont été révélées à aucun autre ? c’est pour cela que Jean-Baptiste ajoute : « J’ai vu et j’ai rendu témoignage que celui-ci est le Fils de Dieu. » Il lui avait donné le nom d’Agneau de Dieu, il avait annoncé qu’il baptiserait dans l’Esprit saint, mais jusqu’ici il ne l’avait point appelé Fils de Dieu. — S. Augustin. (Traité 7 sur S. Jean.) C’était au Fils unique de Dieu, et non point à un Fils adoptif que devait être réservé le pouvoir de baptiser. Les fils adoptifs sont les ministres du Fils unique, le Fils unique a seul le pouvoir du baptême, les fils adoptifs n’eu ont que l’administration.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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