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Jn  1  16-17

Origène. (Traité 5 sur S. Jean.) Ces paroles sont la continuation du témoignage que Jean-Baptiste rend à Jésus-Christ, et on se trompe en attribuant les réflexions qui suivent à saint Jean l’Evangéliste, jusqu’à ces paroles : « Le Fils unique, qui est dans le sein du Père, nous l’a fait connaître. » C’est faire violence au texte que de supposer que le discours du Précurseur est interrompu par les réflexions de l’Evangéliste, et l’enchaînement des paroles est ici visible pour qui est capable de le saisir. Jean-Baptiste venait de dire : « Il a été fait plus grand que moi, parce qu’il était avant moi. » Or, poursuit-il, je suis porté à croire et à conclure qu’il est avant moi, parce que nous avons reçu, moi, et les prophètes avant moi, une seconde grâce après la première ; car l’esprit de Dieu, après les symboles figuratifs, les a conduits jusqu’à la contemplation de la vérité. En recevant ainsi de sa plénitude, nous comprenons que la loi a été donnée par Moïse, et que la grâce et la vérité ont été données ou plutôt ont été faites par Jésus-Christ ; car Dieu le Père a donné la loi par Moïse, et il a fait la grâce et la vérité par Jésus-Christ. Mais puisque Jésus a dit : « Je suis la vérité, » comment la vérité a-t elle pu être faite par lui ? Nous répondons que la vérité substantielle, la vérité première qui est le principe et le modèle de toutes les vérités qui existent dans l’esprit de ceux qui enseignent la vérité, n’a été faite ni par Jésus-Christ ni par aucun autre ; la vérité qui a été faite par Jésus-Christ est donc celle que nous remarquons dans saint Paul et dans les autres Apôtres. — S. Chrys. (hom. 13 sur S. Jean.) On peut dire encore que saint Jean l’Evangéliste joint ici son témoignage à celui de Jean-Baptiste. Ainsi ces paroles : « Et nous avons reçu tous de sa plénitude, » etc., ne sont pas les paroles du Précurseur, mais celles du disciple, et voici quel en est le sens : Et nous autres aussi, les douze Apôtres, et toute la multitude des fidèles présents et futurs, nous avons tous reçu de sa plénitude.

S. Augustin. (Traité 3 sur S. Jean.) Et qu’avez-vous donc reçu ? « Grâce pour grâce, » c’est-à-dire que nous avons reçu de sa plénitude je ne sais quoi d’ineffable, et ensuite grâce pour grâce. Ainsi nous avons reçu de sa plénitude, d’abord la grâce, et nous avons reçu ensuite grâce pour grâce. Quelle est la première grâce que nous avons reçue ? La foi, qui est appelée grâce, parce qu’elle est donnée gratuitement. Le pécheur a donc reçu cette première grâce qui a été pour lui le principe de la rémission de ses péchés ; et il a de nouveau reçu grâce pour grâce, c’est-à-dire que, pour cette grâce qui nous fait vivre de la foi, nous en recevrons une autre, c’est-à-dire la vie éternelle. Car la vie éternelle est comme la récompensé de la foi, et comme la foi est une grâce, la vie éternelle est aussi une grâce donnée pour une autre grâce. Cette grâce n’existait pas dans l’Ancien Testament, parce que la loi menaçait sans porter secours ; elle commandait sans guérir, elle montrait le mal sans le faire disparaître, et se contentait de préparer les hommes à recevoir le médecin qui devait venir avec la grâce et la vérité. Voilà pourquoi l’Evangéliste ajoute : « La loi a été donnée par Moïse, mais la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ, » car la mort de votre Seigneur a détruit la mort temporelle et la mort éternelle ; et c’est là cette grâce que la loi promettait et ne donnait pas.

S. Chrys. (hom. 14 sur S. Jean.) Ou bien, nous avons reçu grâce pour grâce, c’est-à-dire une grâce nouvelle pour la grâce ancienne. De même, en effet, qu’il y a justice et justice, adoption et adoption, circoncision et circoncision, il y a aussi grâce et grâce, la première comme figure, la seconde comme vérité. Jean-Baptiste parle de la sorte pour prouver aux Juifs qu’eux-mêmes n’étaient sauvés que par grâce, et que nous-mêmes, tous tant que nous sommes, nous ne pouvons arriver au salut par une autre voie. Ce fut donc une véritable grâce, et un acte de miséricorde que la loi qui fut donnée aux Juifs. Aussi l’Evangéliste, voulant faire ressortir la grandeur des dons qui ont été faits, ajoute : « La loi a été donnée par Moïse, mais la grâce, » etc. Il avait plus haut établi une comparaison entre Jésus-Christ et lui, en disant : « Il a été fait plus grand que moi. » Ici saint Jean fait cette comparaison entre Jésus-Christ et Moïse qui fut pour les Juifs l’objet d’une bien plus grande admiration que Jean-Baptiste. Et voyez quelle est ici sa prudence : Il n’établit pas la comparaison entre les personnes, mais entre les choses, et il oppose la grâce et la vérité à la loi, aussi bien que cette expression : « A été donnée, » à cette autre : « A été faite. » Il dit de la loi qu’elle a été donnée, c’était l’œuvre d’un serviteur qui transmet ce qu’il a reçu selon l’ordre qui lui a été imposé. Ces paroles, au contraire : « La grâce et la vérité ont été faites, » indiquent un roi qui remet tous les péchés par sa puissance, c’est ce que faisait Jésus : « Vos péchés vous sont remis (Mc 2, 9), et encore : « Afin que vous sachiez que le Fils de l’homme a le pouvoir de remettre les péchés, » etc. (Mc 2, 10 et 11.) Vous voyez comme la grâce a été faite par Jésus-Christ, considérez comment la vérité nous est aussi venue de la même manière. Le don du baptême, le bienfait de l’adoption qui nous est donné par le Saint-Esprit, et une multitude d’autres dons sont les preuves et les fruits de la grâce. Quant à la vérité, nous comprendrons mieux comment elle est venue par Jésus-Christ, si nous avons une connaissance parfaite des figures de la loi ; car tout ce qui devait s’accomplir dans le Nouveau Testament a été annoncé et figuré dans l’Ancien, et c’est Jésus-Christ qui est venu accomplir toutes ces figures. C’est ainsi que la figure a été donnée par Moïse, et que la vérité a été faite par Jésus-Christ.

S. Augustin. (de la Trin., 13, 20.) Ou bien encore, nous pouvons rapporter la grâce à la science, et la vérité à la sagesse. Parmi les choses qui ont pris naissance dans le cours des temps, la grâce par excellence qui nous a été donnée, c’est que l’homme ait été uni à Dieu en unité de personne ; et dans les choses de l’éternité, la vérité suprême et par excellence doit s’entendre du Verbe de Dieu.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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