Accueil > Bibliothèque > La Chaîne d’or > Évangile selon saint Jean > chapitre 18, versets 25-27
S. Augustin. (Tr. 113 sur S. Jean.) Après avoir rapporté comment Anne envoya Jésus enchaîné à Caïphe, l’Evangéliste revient à l’endroit du son récit où il avait laissé Pierre pour raconter le triple reniement de ce disciple dans la maison d’Anne : « Cependant Simon Pierre était là, debout, et se chauffant. » Il rappelle donc ici ce qu’il avait dit plus haut. — S. Chrys. (hom. 83 sur S. Jean.) Dans quel engourdissement était plongé cet Apôtre si plein d’ardeur, lorsqu’on voulait s’emparer de Jésus ! Le voilà devenu comme insensible, et Dieu le permet, pour vous apprendre combien est grande la faiblesse de l’homme lorsqu’il l’abandonne à lui-même. On le questionne de nouveau, et il nie pour la seconde fois : « Ils lui dirent donc : Et vous, n’êtes-vous pas aussi de ses disciples ? »
S. Augustin. (de l’accord des Evang., 3, 6.) Nous voyons ici que ce n’est point devant la porte, mais lorsqu’il se chauffait devant le brasier, que Pierre renia Jésus pour la seconde fois, ce qui n’aurait pu avoir lieu, s’il ne fût rentré après être sorti dehors, comme le raconte saint Matthieu. Ce n’est pas, en effet, lorsqu’il fût sorti dehors, que cette autre servante le vit, mais au moment même où il sortait, et c’est alors qu’elle le remarqua et qu’elle dit à ceux qui étaient là, c’est-à-dire, à ceux qui se chauffaient avec, lui dans l’intérieur de la cour : « Celui-ci était aussi avec Jésus de Nazareth.» Pierre qui était déjà sorti, ayant entendu ces paroles, rentra, et à toutes les affirmations de ceux qui étaient présents, répondit avec serment : « Je ne connais point cet homme. » L’évangéliste saint Jean raconte ainsi le second reniement de saint Pierre : « Ils lui dirent donc : Et vous, n’êtes-vous pas aussi de ses disciples ? » C’est-à-dire, lorsqu’il rentrait, ce qui nous confirme dans la pensée que ce ne fut pas seulement celte autre servante dont parlent saint Matthieu et saint Marc, mais une autre encore dont parle saint Luc, qui firent à Pierre la question qui détermina le second reniement de cet Apôtre ; c’est pour cela que saint Jean emploie ici le pluriel : « Ils lui dirent donc. » Le même Evangéliste poursuivant son récit, raconte ainsi le troisième renoncement : « Un des serviteurs du grand-prêtre lui dit, » etc. Saint Matthieu et saint Marc se servent du pluriel pour désigner ceux qui firent à Pierre cette nouvelle question ; saint Luc ne parle que d’un seul, ainsi que saint Jean, qui ajoute cette circonstance, qu’il était parent de celui à qui Pierre coupa l’oreille. Cette divergence s’explique facilement si l’on considère que saint Matthieu et saint Marc oui l’habitude de mettre le pluriel pour le singulier, ou qu’un de ceux qui étaient présents, affirmait avec plus de force, comme ayant vu Pierre dans le jardin, tandis que les autres ne pressaient Pierre que sur l’attestation de celui qui l’avait vu.
S. Chrys. Mais le jardin ne lui rappelle le souvenir, ni des promesses qu’il y a faites, ni de cet amour si ardent dont il avait protesté à plusieurs reprises : « Pierre le nia de nouveau et aussitôt le coq chanta. » — S. Augustin. (Traité 113.) Voici la prédiction du médecin qui est accomplie, et le malade convaincu de présomption, car ce que nous voyons se réaliser, ce n’est pas la promesse de Pierre : « Je donnerai ma vie pour vous, » mais la prédiction de Jésus : « Vous me renierez trois fois. » — S. Chrys. Les évangélistes s’accordent tous pour raconter le triple reniement de saint Pierre, non pour accuser ce disciple, mais pour nous apprendre quel mal c’est de ne pas tout remettre entre les mains de Dieu, et de placer sa confiance en soi-même. — Bède. Dans le sens allégorique, le premier reniement de Pierre figure ceux qui, avant la passion du Sauveur, ont nié qu’il fût Dieu ; le second représente ceux qui, après sa résurrection, ont nié à la fois sa divinité et son humanité. De même le premier chant du coq figure la résurrection du chef ; le second, la résurrection de tout le corps qui aura lieu à la fin du monde. La première servante, qui fut l’occasion du premier renoncement de Pierre, représente la cupidité ; la seconde, le plaisir des sens ; le serviteur, ou les serviteurs du grand-prêtre, les démons qui nous portent à renoncer Jésus-Christ.
Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.