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Jn  17  14-19

S. Chrys. (hom. 82 sur S. Jean.) Notre-Seigneur donne une seconde raison qui rend ses disciples dignes de la protection toute spéciale de son Père : « Je leur ai donné votre parole, et le monde les a eus en haine, » etc., c’est-à-dire, ils ont été un objet de haine à cause de vous et à cause de votre parole. — S. Augustin. Ils n’avaient pas encore éprouvé cette haine par les persécutions auxquelles ils furent en butte dans la suite, mais le Sauveur, suivant sa coutume, annonce les événements qui doivent avoir lieu, en termes qui semblent signifier qu’ils sont déjà arrivés. Il fait connaître ensuite la cause de la haine du monde contre eux : « Parce qu’ils ne sont pas du monde. » C’est par la régénération que cette grâce de séparation leur a été donnée ; car par leur naissance naturelle, ils étaient du monde. Dieu leur a donné de n’être plus du monde, comme lui-même n’est plus du monde : « Comme moi-même, ajoute-t-il, je ne suis point du monde. » Le Sauveur n’a jamais été du monde, car même dans sa nature de serviteur, il est né de l’Esprit saint, qui a été le principe de la régénération des autres. Cependant bien qu’ils ne fussent plus du monde, il était nécessaire qu’ils restassent encore dans le monde ; aussi Notre-Seigneur ajoute : « Je ne demande pas que vous les ôtiez du monde. » — Bède. C’est-à-dire, le temps approche où je disparaîtrai du monde, il est donc nécessaire qu’ils n’en soient pas enlevés eux-mêmes : « Mais je vous prie de les sauver du mal. » Quoiqu’on puisse l’entendre de toute sorte de mal, Notre-Seigneur a surtout en vue le mal qui doit résulter de son éloignement. — S. Augustin. Il répète la même pensée qu’il vient d’exprimer : « Ils ne sont pas du monde, comme moi-même je ne suis pas du monde. — S. Chrys. (hom. 83 sur S. Jean.) Pourquoi donc a-t-il dit précédemment : « Que vous m’avez donnés du monde ? » Il parlait alors de la nature, et sous rapport ils étaient du monde, tandis qu’ici il veut parler des actions mauvaises. Sous ce rapport, ils ne sont point du monde, parce qu’ils n’ont rien de commun avec la terre, et qu’ils sont par avance citoyens des cieux ; il leur montre ainsi son amour pour eux on faisant leur éloge à son Père. Lorsqu’on parlant de son Père et de lui, il emploie la particule comme, il veut exprimer l’égalité absolue qui résulte de l’unité de nature, mais lorsqu’il emploie ce même mot on parlant de nous et de lui, il laisse une grande distance entre les deux termes de comparaison. La prière qu’il adresse précédemment à son Père : « Sauvez-les du mal, » a pour objet de leur obtenir, non-seulement d’être délivrés de tous les dangers, mais aussi la persévérance dans la foi, c’est pour cela qu’il ajoute : « Sanctifiez-les dans la vérité. » — S. Augustin. Car c’est ainsi qu’ils sont sauvés de tout mal, ce qui vient de faire l’objet de sa prière. On peut demander comment ils n’étaient plus du monde, s’ils n’étaient pas encore sanctifiés dans la vérité ; est-ce parce que tout sanctifiés qu’ils sont, ils font des progrès dans cette même sainteté avec le secours de la grâce de Dieu ? Ces héritiers du Nouveau Testament sont sanctifiés dans la vérité, vérité dont les sanctifications légales de l’Ancien Testament n’étaient que l’ombre, et lorsqu’ils sont sanctifiés dans la vérité, ils sont sanctifiés en Jésus-Christ, qui a dit : « Je suis la voie, la vérité et la vie. » (Jn 14) Aussi le Sauveur ajoute : « Votre parole est vérité, le texte de l’Evangile grec porte λόγος, c’est-à-dire, le Verbe. Le Père a donc sanctifié dans la vérité (c’est-à-dire, dans son Verbe unique), ses héritiers et ses cohéritiers.

S. Chrys. Ou bien encore : « Sanctifiez-les dans la vérité, » c’est-à-dire, sanctifiez-les en leur donnant l’Esprit saint, et la saine doctrine, car la saine doctrine sur Dieu contribue à la sanctification de l’âme, et comme preuve qu’il est ici question de doctrine, il ajoute : « Votre parole est vérité, c’est-à-dire, elle ne renferme point de mensonge, il n’y a rien en elle de simplement figuratif ou de corporel. Cette prière : « Sanctifiez-les dans la vérité, » a encore, ce me semble, une autre signification, c’est-à-dire, séparez-les pour le ministère de la parole et de la prédication. Aussi ajoute-t-il : « Comme vous m’avez envoyé dans le monde, je les ai envoyés moi-même. » — La glose. Les Apôtres ont été envoyés pour remplir la même mission que Jésus-Christ, voilà pourquoi saint Paul dit : « Dieu était dans le Christ, se réconciliant le monde, et il a placé en nous la parole de réconciliation. » (2 Co 5, 19.) L’expression comme n’a pas la même signification pour lui et pour les Apôtres, elle n’établit la parité qu’autant qu’elle est possible en parlant du Fils de Dieu et des hommes. Notre-Seigneur dit qu’il les a envoyés dans le monde, en employant, selon sa coutume le passé, pour le futur.

S. Augustin. Nous avons ici eu une preuve évidente que le Sauveur veut parler des apôtres ; car le nom d’apôtres, qui vient du grec, veut dire en latin, envoyés. Or, comme ils sont les membres du corps de l’Eglise, dont Jésus-Christ est le chef, il continue ainsi sa prière : « Et je me sanctifie moi-même pour eux, » c’est-à-dire je les sanctifie en moi-même, puisqu’ils font partie du corps dont je suis le chef. Et pour nous faire mieux comprendre que ces paroles : « Je me sanctifie moi-même pour eux, » veulent dire qu’il les sanctifie en lui-même, il ajoute : « Afin qu’ils soient eux-mêmes sanctifiés en vérité, » c’est-à-dire en moi, puisque le Verbe est la vérité ; c’est dans ce Verbe que le Fils de l’homme a été sanctifié dès le commencement de son existence, lorsque le Verbe s’est fait chair. Il s’est alors sanctifié lui-même en lui-même, c’est-à-dire qu’il s’est sanctifié comme homme en lui-même, comme Verbe, parce que le Verbe et l’homme ne font qu’un seul Christ. Et c’est à cause de ses membres qu’il ajoute : « Et je me sanctifie moi-même pour eux, » (c’est-à-dire je les sanctifie eux-mêmes eu moi, parce qu’ils ne font qu’un avec moi), afin qu’ils soient eux-mêmes sanctifiés en vérité. Que signifie cette expression : « Eux-mêmes ? » c’est-à-dire comme moi, et dans la vérité, qui n’est autre que moi-même. — S. Chrys. Ou bien encore : « Je me sanctifie moi-même pour eux ; » c’est-à-dire, je m’offre à vous comme victime ; car toutes les victimes sont saintes, aussi bien que tout ce qui est consacré à Dieu. Sous l’ancienne loi, cette sanctification n’existait qu’en figure (comme par exemple dans les brebis qu’on immolait), mais maintenant elle existe dans la vérité, c’est pour cela qu’il ajoute : « Afin qu’ils soient sanctifiés en vérité ; » car je veux aussi vous les offrir on sacrifice. Il s’exprime de la sorte, ou parce que lui, qui s’offre, est notre chef, ou parce qu’ils sont eux-mêmes appelés à s’immoler comme victimes : « Offrez vos corps, dit l’Apôtre, comme une hostie vivante, sainte, et agréable à ses yeux, » etc. (Rm 13, 1)

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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