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Jn  15  8-11

S. Chrys. (hom. 75 sur S. Jean.) Notre-Seigneur venait de déclarer à ses disciples, que ceux qui lui tendaient des embûches et ne demeuraient pas en Jésus-Christ, seraient condamnés au feu ; il leur prédit maintenant qu’ils seront à l’épreuve de toutes les attaques, et qu’ils porteront beaucoup de fruits : « C’est la gloire de mon Père que vous portiez beaucoup de fruit, » c’est-à-dire, si la gloire de mon Père est intéressée à ce que vous portiez du fruit, il ne négligera pas sa gloire ; or, celui qui produit du fruit est disciple de Jésus-Christ, comme l’ajoute Notre-Seigneur : « Et que vous devenez mes disciples. » — Théophile. Le fruit que devaient porter les Apôtres sont les nations qu’ils ont enchaînées à la foi par leurs enseignements, et dont ils ont fait autant d’instruments de la gloire de Dieu. — S. Augustin. (Traité 82 sur S. Jean.) Que l’on traduise, c’est l’honneur ou la gloire, clarificatus, sive glorificatus, l’un et l’autre de ces deux mots sont la traduction du même mot grec δόζα, en latin, gloria, gloire ; j’ai cru utile de faire cette remarque, pour que nous ne soyons pas tentés de tourner à notre propre gloire le mérite de nos bonnes oeuvres, comme s’il venait de nous, car il vient de sa grâce, et nous devons lui en renvoyer exclusivement la gloire. Qui pourrait, en effet, nous faire produire du fruit, si ce n’est celui dont la miséricorde nous a prévenus ? Aussi le Sauveur ajoute-t-il : « Comme mon Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. » Voilà pour nous le principe de toutes les bonnes oeuvres, et d’où pourraient-elles venir, si ce n’est de la foi qui opère par la charité ? Et comment aurions-nous pu l’aimer, s’il ne nous aimait le premier ? Quant à ces paroles : « Comme mon Père m’a aimé, moi aussi je vous aime, » elles n’emportent pas l’égalité de nature entre nous et Jésus-Christ, comme elle existe entre son Père et lui, elles signifient simplement la grâce du médiateur de Dieu et des hommes, Jésus-Christ homme. C’est cette médiation qu’il veut exprimer, lorsqu’il dit : « Comme mon Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés, » car le Père nous aime aussi, mais en Jésus-Christ.

S. Chrys. Si donc le Père vous aime, prenez confiance, et s’il y va de la gloire du Père, efforcez-vous de produire du fruit. Et pour prévenir toute négligence de leur part, il ajoute : « Demeurez dans mon amour. » Comment ? « Si vous gardez mes commandements, » etc. — S. Augustin. Qui doute que l’amour ne précède l’observation des commandements ? Celui qui n’aime pas, n’a aucun motif de garder les commandements. Ce n’est donc point le principe et la cause, mais les effets de l’amour que le Sauveur veut nous indiquer ici, afin que personne ne s’illusionne en affirmant qu’il aime Dieu, sans garder ses commandements ? Toutefois ces paroles : « Demeurez dans mon amour, » ne précisent pas de quel amour Notre-Seigneur veut parler, de celui que nous avons pour lui, ou de celui qu’il a pour nous ; et ce n’est que par ce qui précède que nous pouvons le savoir. En effet, après avoir dit : « Je vous ai aimés, » il ajoute aussitôt : « Demeurez dans mon amour, » c’est-à-dire, dans l’amour dont il les a aimés. Or, que signifient ces paroles : « Demeurez dans mon amour ? » persévérez dans ma grâce ? Et que veut-il dire quand il ajoute : « Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour ? » Le signe certain que vous persévérez dans l’amour que j’ai pour vous, c’est la fidélité à observer mes commandements. Ce n’est donc point pour mériter son amour que nous observons ses commandements, mais nous ne pouvons les observer, s’il ne nous aime le premier. C’est la grâce qui est révélée aux humbles et qui demeure cachée aux superbes. Mais quel est le sens des paroles suivantes : « Comme moi-même j’ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour ? » Le Sauveur veut aussi parler de l’amour que son Père a pour lui. Mais devons-nous entendre que le Père aime son Fils par grâce, dans le même sens que nous sommes redevables à la grâce de l’amour du Fils, alors que nous sommes les enfants de Dieu, non par nature, mais par grâce, tandis que le Fils unique est Fils par nature et non par grâce ? Ou bien faut-il entendre ces paroles du Fils de Dieu fait homme ? Oui, sans doute, car ces paroles : « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous aime, » expriment la grâce du médiateur ; or c’est comme homme et non comme Dieu que Jésus-Christ est médiateur de Dieu et des hommes. Nous pouvons donc, dire en toute vérité, que bien que la nature humaine n’ait point de rapport avec la nature divine, cependant elle a été unie à la personne du Fils de Dieu, par un effet de la grâce, et d’une grâce si extraordinaire, qu’il n’en est ni de plus grande, ni même d’égale. En effet, cette union de la nature divine avec la nature humaine, n’est la récompense d’aucun mérite de la part de l’homme, et c’est de cette union, au contraire, que les mérites des hommes ont découlé comme de leur source. — Alcuin. Or l’Apôtre nous apprend de quels préceptes le Sauveur a voulu ici parler lorsqu’il dit : « Jésus-Christ s’est rendu obéissant à son Père jusqu’à la mort, et jusqu’à la mort de la croix. » (Ph 2, 8.)

S. Chrys. (hom. 77 sur S. Jean.) Mais comme sa passion qui approchait et de tristes paroles étaient de nature à troubler et interrompre leur joie ; le Sauveur ajoute : « Je vous ai dit ces choses afin que ma joie soit en vous, et que cette joie soit pleine et parfaite, » c’est-à-dire, bien que la tristesse doive s’emparer de vous, je la dissiperai et je la changerai à la fin en joie. — S. Augustin. (Traité 83.) Quelle est cette joie de Jésus-Christ en nous, si ce n’est celle dont il daigne se réjouir à notre occasion ? Et quelle est notre joie dont il nous prédit le parfait accomplissement, si ce n’est la participation à son propre bonheur ? La joie qu’il avait à notre sujet était déjà parfaite, quand il nous prédestinait dans sa prescience divine, mais cette joie n’était pas encore en nous, parce que nous n’existions pas encore. Elle a remmenée à être en nous, lorsqu’il nous a appelés à la foi, et nous disons à juste titre que cette joie est notre joie, puisque c’est elle qui doit faire un jour notre félicité, elle commence avec la foi qui nous régénère, elle sera pleine et parfaite avec la résurrection qui sera notre récompense.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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