Accueil > Bibliothèque > La Chaîne d’or > Évangile selon saint Jean > chapitre 10, versets 7-10
S. Chrys. (hom. 59 sur S. Jean.) Notre-Seigneur, pour rendre les Juifs plus attentifs, leur explique ce qu’il vient de dire : « Jésus donc leur dit encore : En vérité, en vérité, je vous le dis, je suis la porte des brebis. » — S. Augustin. (Traité 45 sur S. Jean.) Voici qu’il ouvre ce qui était fermé, il est lui-même la porte ; entrons et réjouissons-nous d’être entrés.
« Tous ceux qui sont venus sont des voleurs et des larrons. » — S. Chrys. (hom. 59.) Ce n’est point aux prophètes que s’appliquent ces paroles, comme le disent les hérétiques, mais à ceux qui ont excité des séditions. Aussi se hâte-t-il de faire l’éloge des brebis en ajoutant : « Et les brebis ne les ont point écoutés ; » or, jamais nous ne le voyons donner des louanges à ceux qui n’ont point obéi aux prophètes, au contraire, il les blâme toujours sévèrement. — S. Augustin. Comprenez donc ces paroles dans ce sens : « Tous ceux qui sont venus en dehors de moi ; » or, les prophètes ne sont point venus en dehors de lui, tous ceux qui sont venus avec le Verbe de Dieu sont venus avec lui, et ceux qui sont venus avec lui sont dignes de foi, parce qu’il est lui-même le Verbe et la vérité. Avant de venir lui-même sur la terre, il envoyait devant lui ses hérauts, mais il était le maître des cœurs de ceux qu’il envoyait, car s’il a pris une chair mortelle dans le temps, il existe de toute éternité. Que signifient ces paroles : « De toute éternité ? » « Au commencement était le Verbe. » Or, avant son avènement si plein d’humilité dans la chair, il a paru sur la terre des justes qui croyaient au Christ qui devait venir, comme nous croyons au Christ qui est venu. Les temps ont changé, la foi est restée la même, et cette même foi unit étroitement ceux qui croyaient que le Christ devait venir avec ceux qui croyaient qu’il est venu. Tous ceux donc qui sont venus en dehors de lui sont des voleurs et des larrons, c’est-à-dire, qu’ils ne sont venus que pour voler et pour tuer. Mais les brebis, c’est-à-dire ceux dont saint Paul a dit : « Le Seigneur connaît ceux qui lui appartiennent, » (2 Tm 2) ne les ont point écoutés. Les brebis n’ont donc pas écouté ceux en qui n’était point la voix de Jésus-Christ, c’étaient des maîtres d’erreur et de mensonge qui ne pouvaient que séduire des âmes infortunées.
Il explique ensuite pourquoi il s’est appelé la porte : « Je suis la porte, si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé. » — Alcuin. C’est-à-dire, les brebis ne les écoutent point ; mais ils m’écoutent, parce que je suis la porte, et que celui qui entrera par moi sans artifice, en toute sincérité, et en toute persévérance, sera sauvé. — Théophile. Or, le Seigneur conduit ses brebis aux pâturages par la porte : « Et il entrera, et il sortira, et il trouvera des pâturages. » Quels sont ces pâturages ? ce sont les délices du ciel, et ce repos dans lequel Notre-Seigneur nous fera entrer. — S. Augustin. (Traité 45.) Mais que signifient ces paroles : « Il entrera et il sortira ? » Entrer dans l’Eglise par la porte elle-même est une excellente chose, mais il n’est pas aussi avantageux de sortir de l’Eglise. On peut donc dire que nous entrons, quand nous avons quelque pensée au dedans de nous, et que nous sortons quand nous agissons au dehors, selon ces paroles : « L’homme sortira pour accomplir son œuvre. » (Ps 103) — Théophile. Ou bien encore, entrer c’est prendre soin de l’homme intérieur ; sortir, c’est mortifier en Jésus-Christ l’homme extérieur, c’est-à-dire les membres qui sont sur la terre. (Col 3) Celui qui agit ainsi trouvera des pâturages dans la vie future. — S. Chrys. (hom. 59.) Peut-être encore ces paroles doivent s’entendre des Apôtres, qui entrèrent et sortirent librement comme les maîtres du monde entier, sans que personne les en pût chasser ou les empêcher de trouver leur nourriture.
S. Augustin. (Traité 41) Mais j’aime mieux voir ici un avertissement que la vérité elle-même, comme un bon pasteur, nous confirme dans les paroles qui suivent : « Le larron ne vient que pour dérober, pour égorger, et pour détruire. » — Alcuin. Paroles dont voici le sens : Les brebis ont raison de ne pas écouter la voix du larron, parce qu’il ne vient que pour voler, en dérobant ce qui ne lui appartient pas, c’est-à-dire, en persuadant à ceux qui le suivent de vivre conformément à ses exemples, au lieu de leur enseigner les préceptes de Jésus-Christ. Le Sauveur ajoute : « Et pour égorger, » en les détournant de la foi par sa doctrine pernicieuse, « et pour les perdre, » en les précipitant dans l’éternelle damnation. Les larrons ne font donc que voler et égorger ; « mais je suis venu pour qu’elles aient la vie, et une vie plus abondante. » — S. Augustin. Je crois que Notre-Seigneur veut dire : Afin qu’elles aient la vie en entrant, c’est-à-dire au moyen de la foi, qui opère par la charité. (Gal 5) Cette foi les fait entrer dans la bergerie, pour leur donner la vie, parce que le juste vit de la foi. (Rom 1, 17.) Il ajoute : « Et une vie plus abondante en sortant, » c’est-à-dire, quand les vrais fidèles sortent de cette vie, et entrent en possession d’une vie plus abondante, qui est pour toujours à l’abri de la mort. Car, bien que sur la terre même, et dans la bergerie, les pâturages ne leur aient pas manqué, ils trouveront alors des pâturages où ils seront pleinement rassasiés, tels que les a trouvés celui à qui Jésus a dit : « Aujourd’hui vous serez avec moi dans le paradis. » — S. Grég. (hom. 13, sur Ezech.) Il entrera donc pour recevoir la foi, il sortira pour entrer dans la claire vision, et il trouvera des pâturages là où son âme sera éternellement rassasiée.
S. Chrys. (hom. 59.) Ces paroles : « Le voleur ne vient que pour dérober, pour égorger et pour perdre, » s’appliquent à tous les auteurs de révolte ou de sédition, et elles se sont vérifiées à la lettre dans tous ceux qui ont été misa mort pour les avoir suivis, et qui ont ainsi perdu même la vie présente. Mais pour moi, je suis venu pour le salut de tous, pour qu’ils aient la vie, et une vie plus abondante dans le royaume des cieux, et c’est la troisième différence qui le distinguo, des faux prophètes. — Théophile. Dans le sens allégorique, le voleur est le démon qui vient par la tentation pour dérober, par les pensées coupables qu’il inspire, égorger par le consentement, et perdre par les actes.
Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.